II. UN BILAN CONTRASTÉ QUANT AU COÛT GLOBAL EFFECTIF RÉEL DE LA PRÉSIDENCE DE L'UNION EUROPÉENNE

Tout en constatant une sous-consommation des crédits du programme PFUE, la Cour des comptes a relevé certains éléments tendant à établir un coût global effectif de la présidence supérieur aux crédits du programme.

A. DES DÉPENSES INFÉRIEURES AUX AUTORISATIONS

Les crédits en autorisations d'engagement de la présidence française imputées sur le programme 306 ont été consommés à hauteur de 84 % , soit un montant de 151,54 millions d'euros 8 ( * ) (en AE) 9 ( * ) au 30 septembre 2009. Celui-ci correspond à une dépense de l'ordre de 1 million d'euros par jour et de 2,4 euros par habitant 10 ( * ) .

Elles sont inférieures aux autorisations d'engagement de 178,98 millions d'euros disponibles 11 ( * ) ainsi qu' au coût estimé à 180 millions d'euros de la présidence allemande en 2007 .

B. UNE ESTIMATION SURÉVALUÉE DES DÉPENSES

Néanmoins, la Cour constate que les inscriptions budgétaires de ces crédits ont résulté d'une estimation large plus que d'un raisonnement budgétaire classique fondé sur l'identification des besoins et la logique de performance.

Cette évaluation s'est « inspirée de la base d'indications générales relativement incertaines du coût de la présidence allemande » ainsi que d'une anticipation de situations imprévues. Cette estimation a ainsi permis la réalisation d'événements, tels que le sommet de Paris pour la Méditerranée ou encore les réunions consécutives à la crise financière et la crise géorgienne.

C. DES DÉPENSES EXTERNALISÉES

Les dépenses effectives du programme de la PFUE ne représentent pas le coût global des dépenses effectives de la présidence française. La Cour des comptes observe que les dépenses de la PFUE ont été supérieures en réalité à ce montant grâce au cofinancement par d'autres programmes ministériels 12 ( * ) , par des collectivités territoriales, par le mécénat d'entreprises 13 ( * ) ou encore grâce aux subventions de l'Union Européenne 14 ( * ) . Ces financements complémentaires sont estimés par la Cour à approximativement 20 millions d'euros.

D. DES DÉPENSES NOMBREUSES ET COÛTEUSES EN RAISON DE LEUR RÉALISATION DANS L'URGENCE

1. Une mobilisation prépondérante des crédits pour les initiatives propres de la Présidence française

Si la Cour convient que les conditions de la PFUE de 2008 ne sont pas celles existant en 1995 et 2000 15 ( * ) , en raison du plus grand nombre d'Etats membres, du contexte de crises internationales, diplomatiques et économiques 16 ( * ) et du coût croissant de la gouvernance mondiale 17 ( * ) , elle constate l'intensité de la programmation des événements ainsi que les coûts importants y afférents.

La moitié de ces dépenses 18 ( * ) se rattache aux manifestations correspondant à l'initiative propre de la présidence française dans le cadre de l'action 2 ; l'autre moitié correspond aux dépenses retracées dans les actions 1 et 3. La Cour constate que dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2008, le rapport était inversé puisque le volume des manifestations obligatoires liées au fonctionnement des institutions communautaires dépassait celui des manifestations décidées à l'initiative de la présidence de près de neuf millions d'euros.

Nombre de déplacements à l'étranger du président de la République ont été ainsi programmés dans l'urgence, face à l'évolution de la situation internationale 19 ( * ) . Le coût global des vols 20 ( * ) utilisés pour les déplacements présidentiels à l'étranger, initialement estimé à 2,7 millions d'euros, s'élève à 4,47 millions d'euros.

Hormis la présidence allemande, les dépenses de la présidence française ont été supérieures à celles des autres présidences qui se situent entre 70 et 80 millions d'euros (soit en moyenne deux fois moins) 21 ( * ) .

La Cour s'interroge sur un éventuel cadrage des dépenses liées à l'exercice de la présidence de l'Union européenne. Elle poursuit en évoquant la possibilité qu'une partie des dépenses inhérentes à un tel exercice soit prise en charge dans le cadre du budget européen. Toute manifestation supplémentaire serait alors imputée sur des budgets nationaux.

2. Des choix tardifs de programmation

Un certain nombreux d'événements ont été programmés si tardivement que l'urgence a conduit non seulement à des irrégularités de procédures comme démontré ci-dessus dans le cadre du sommet de Paris, mais également à des dépassements de prévisions de dépenses. Ainsi le choix de la ville d'Avignon pour la réunion informelle des ministres des affaires étrangères (« Gymnich ») 22 ( * ) a coûté 4,2 millions d'euros au lieu des 2,53 millions d'euros que prévoyait la convention de délégation de gestion passée fin décembre 2007.

Ces observations conduisent la Cour à s'interroger sur l'efficience globale de la PFUE : « Faut-il dépenser plus pour réussir une présidence de l'Union ? »

* 8 Après reports de crédits sur l'année 2009 et déductions faites des surengagements et des remboursements du SGCUE.

* 9 Les crédits de paiement (CP) ont été consommés à hauteur de 144,68 millions d'euros au 30 septembre 2009.

* 10 2,18 euros par habitant pour la présidence allemande.

* 11 Les crédits en autorisation d'engagement avaient été initialement inscrits dans le projet de loi de finances pour 2008 à hauteur de 190 millions d'euros. Les crédits effectivement disponibles résultent des mises en réserve intervenues en début d'exercice et de l'annulation des crédits résultat du décret d'avance du 27 juin 2008.

* 12 La Cour cite, à ce titre, la mobilisation de crédits à hauteur de 375.000 euros sur 11,6 millions d'euros en AE engagés sur le programme 181 « Protection de l'environnement et prévention des risques » du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.

* 13 Financement de l'illumination de la Tour Eiffel en bleu par Areva.

* 14 Approximativement 9 millions d'euros.

* 15 Le coût des deux précédentes présidences avait atteint 14,1 millions d'euros en 1995 et 56,9 millions d'euros en 2000.

* 16 Referendum irlandais, Géorgie, crise économique et financière.

* 17 Le coût du G 20 tenu à Londres s'établit approximativement à 20 millions d'euros, celui du sommet de l'OTAN tenu à Strasbourg s'élève à environ 30 millions d'euros.

* 18 Avant report de crédits et remboursements du SGCUE et restitutions des montants sur-engagés, le total des dépenses qui se rattachent directement à l'exercice de la présidence, retracées dans les actions 1 et 3, s'élève à 77.886.195 euros. Les dépenses correspondant aux manifestations organisées par la présidence, retracées dans l'action 2, s'établissent à 76.071.547 euros.

* 19 Irlande en juillet, Russie et Géorgie, à deux reprises, en août et septembre, New York en septembre, Washington en octobre et à nouveau en novembre pour le sommet du G20, Doha, Gdansk et Londres en décembre.

* 20 Escadron de transport, d'entraînement et de calibrage.

* 21 Le budget de la présidence autrichienne au premier semestre 2006 a atteint 70 millions d'euros, celui de la présidence finlandaise au second semestre 2006, 78,2 millions d'euros, celui de la présidence portugaise au second semestre 2007, 70  millions d'euros et celui de la présidence slovène au premier semestre 2008, 80 millions d'euros.

* 22 Réunion du 5 et 6 septembre 2008 sur le site du Palais des Papes et du Petit Palais.

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