B. LA POSITION AMBIVALENTE DE LA RUSSIE

La « diplomatie des tuyaux » est particulièrement complexe. Elle est rendue d'autant plus délicate qu'en matière énergétique, la Russie est à la fois un acteur incontournable et un partenaire difficile .

La Russie est l'un des plus grands pays producteurs d'énergie, se situant au premier rang pour le gaz naturel et au deuxième pour le pétrole brut. Elle détient également de très importantes réserves de gaz. Les hydrocarbures représentent plus de la moitié de son commerce extérieur, et sont exportés, pour l'essentiel, vers l'Union européenne. Un quart du gaz consommé par l'Union européenne est livré par Gazprom. Bien que la Russie - et avant elle l'Union soviétique - ait été un fournisseur fiable pendant des décennies, des évolutions récentes apparaissent. L'énergie est pour elle un puissant instrument de nature géopolitique. C'est pour elle le moyen de retrouver une influence politique.

Les trois graphiques ci-après mettent en évidence le poids de la Russie dans les importations par l'Union européenne des énergies fossiles, soit 26 % pour le charbon, 33 % pour le pétrole et 42 % pour le gaz en 2006 :

Origine des importations d'énergies fossiles de l'Union européenne (2006)

Source : Eurostat

Pour autant, la situation de la Russie est loin de n'être que favorable. À l'avenir, la production d'hydrocarbures dans ce pays proviendra de gisements de plus en plus difficiles à exploiter et exigera des investissements colossaux qui seront également à trouver à l'étranger. Les infrastructures y sont obsolètes et provoquent régulièrement de graves accidents dont les répercussions à la fois humaines et environnementales sont parfois dramatiques. Le système énergétique russe est très éloigné des normes d'efficacité énergétique, dont le respect nécessite également des investissements massifs, qui demeurent pour l'instant marginaux dans ce domaine. Par ailleurs, la dépendance des marchés européens envers le gaz russe est à double tranchant. En la matière, la Russie a un besoin vital de l'Union européenne qui représente 70 % des exportations de gaz russe et 80 % de celles de pétrole. Or, le commerce entre l'Union européenne et la Russie est asymétrique : les importations de la première sont constituées d'hydrocarbures, mais celles de la seconde de produits à haute valeur ajoutée. La Russie cherche d'ailleurs depuis peu à diversifier ses exportations vers les marchés dynamiques d'Asie. Elle doit aussi diversifier son bouquet énergétique, l'instabilité des cours des matières premières portant préjudice à la régularité de ses ressources en devises, d'autant plus que l'économie russe a beaucoup souffert de la crise.

Il n'en demeure pas moins que, pour l'instant, l'Union européenne est loin de parler d'une seule voix à la Russie , dans ses négociations énergétiques comme sur d'autres dossiers. Elle demeure divisée sur la manière d'aborder la Russie, alors qu'il conviendrait de mettre en oeuvre une stratégie concertée vis-à-vis de ce pays. Plusieurs États membres sont même parties à différents projets de gazoducs potentiellement concurrents.

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