C. UNE EFFICACITÉ ÉNERGÉTIQUE À AMÉLIORER

1. Une économie « énergivore »

L'efficacité énergétique de l'économie russe est très inférieure à celle de l'Europe occidentale : il faut en moyenne, selon la Banque mondiale, trois à cinq fois plus d'énergie en Russie que dans l'Union européenne pour produire la même quantité de richesse. Après avoir longtemps ignoré cette question, les autorités russes souhaitent désormais engager des actions dans ce domaine.

L'amélioration de l'efficacité énergétique russe est, en effet, un enjeu majeur pour la compétitivité du pays et pour la préservation de sa capacité exportatrice d'hydrocarbures. Les deux tiers du gaz produit en Russie sont actuellement consommés dans le pays, alors même que les revenus du gaz exporté sont beaucoup plus rémunérateurs.

Alors que la Russie a insuffisamment renouvelé sa base de production d'énergie au cours de dernières années, de nombreux spécialistes estiment qu'à court et moyen terme, les marges de manoeuvre russes résident essentiellement dans l'amélioration de l'efficacité énergétique. Cet objectif est désormais fortement promu par les instances dirigeantes.

Les prix domestiques de l'énergie, très inférieurs aux prix du marché mondial, sont ainsi progressivement dérégulés, afin d'inciter les utilisateurs à freiner leur consommation. Mais les instruments d'accompagnement (sensibilisation des consommateurs, cadre juridique et fiscal incitatif, financements, technologies) font encore trop largement défaut pour que cette politique produise ses effets à grande échelle.

2. Un enjeu dans le cadre des négociations sur le changement climatique

a) Une préoccupation mineure des autorités russes jusqu'à ce jour

Jusqu'à présent, le discours des autorités russes sur l'efficacité énergétique ne s'est pas traduit par une préoccupation majeure de la Russie pour les enjeux climatiques. Si les autorités russes reconnaissent la réalité du changement climatique, l'enjeu de l'efficacité énergétique demeure, à leurs yeux, économique avant d'être environnemental.

En 2004, la Russie avait finalement accepté de ratifier le Protocole de Kyoto, en échange de la levée des objections européennes à son adhésion à l'OMC. L'absence d'avancée majeure sur ce dernier dossier n'est sans doute pas étrangère au fait que la Russie n'a, à ce jour, techniquement validé aucun projet relevant des mécanismes de mise en oeuvre conjointe (MOC) prévus par le Protocole de Kyoto.

La préparation du Sommet de Copenhague a cependant fourni l'occasion à la Russie, troisième émettrice mondial de gaz à effet de serre, de clarifier son engagement et de réaffirmer son soutien de principe à la poursuite de l'effort global de lutte contre le changement climatique dans le cadre d'un accord international prenant la suite de Kyoto.

Le 19 juin 2009, Dmitri Medvedev a indiqué que la Russie pourrait accepter de réduire ses émissions de GES de 10 à 15 % d'ici 2020, par rapport à 1990. Il convient de rappeler que l'année de base retenue par le Protocole de Kyoto (un an avant la chute de l'URSS et l'effondrement industriel qui s'ensuivit) est mécaniquement favorable à la Russie. C'est pourquoi l'objectif initialement fixé par le Président russe permettait en fait à la Russie d'augmenter de 15 à 20 % ses émissions nationales entre aujourd'hui et 2020, ou de monnayer des « droits à polluer » équivalents.

Néanmoins, à l'occasion du Sommet UE-Russie du 18 novembre 2009, le Président russe a fixé un objectif plus ambitieux de -20 à -25 % d'émissions de GES d'ici à 2020, par rapport à 1990.

De nombreux experts estiment que la Russie pourrait, sans entraver son développement économique, se montrer aussi ambitieuse en matière climatique qu'en matière d'amélioration de l'efficacité énergétique.

b) Un changement de politique possible avec l'aide de la France

Campées sur une position prudente à la Conférence internationale sur le changement climatique de Copenhague, les autorités russes n'ont jusqu'alors pas spécialement favorisé le développement des projets de mise en oeuvre conjointe (MOC) prévus dans le cadre du Protocole de Kyoto.

Ce type de mécanisme permet aux agents économiques déficitaires en droits d'émissions de gaz à effet de serre d'acquérir des crédits d'émission en finançant des projets visant à réduire les émissions dans des pays tiers ayant des engagements dans le cadre du Protocole. Or, la Russie détient le plus grand potentiel de crédits issus de projets MOC au monde, puisque son niveau d'émissions actuel est encore inférieur de 30 % au niveau d'émissions de 1990. Elle pourrait valoriser économiquement ce potentiel.

La France à aujourd'hui l'opportunité de devenir un partenaire privilégié dans la valorisation du potentiel carbone de la Russie :

- d'une part, un accord franco-russe encourageant les projets MOC a été conclu à l'occasion du séminaire gouvernemental de Sotchi, le 20 septembre 2008. Il s'agit du seul accord bilatéral de ce type signé à ce jour par la Russie ;

- d'autre part, BNP-Paribas souhaite se positionner activement dans le trading d'unités carbone russe. La banque française a signé avec la société russe TNK-BP un accord de coopération dans le développement des projets MOC à l'occasion du séminaire gouvernemental franco-russe de Rambouillet, le 27 novembre 2009. Le premier projet commun, dont la validation par les autorités russes est espérée prochainement, vise à réduire les émissions de gaz associé à la production de pétrole sur le champ sibérien de Samotlor.

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