DEUXIÈME PARTIE - PERSPECTIVES À MOYEN ET LONG TERME

La croissance potentielle d'une économie, reflet de l'évolution structurelle des facteurs d'offre que sont le capital et le travail, constitue un instrument de pilotage et de surveillance qui fait aujourd'hui l'objet d'une attention redoublée de la part des décideurs économiques.

Plusieurs études estiment que la crise actuelle aura un impact négatif, profond et durable, sur la croissance potentielle. Or, un tel constat est de nature à entraîner un jugement plus alarmant sur la soutenabilité des dettes publiques, de précipiter une vigoureuse réépargne publique (et sans doute privée aussi) et, in fine , d'étouffer dans l'oeuf une reprise encore très hésitante.

On peut rappeler que les politiques économiques visent en premier lieu à maximiser la croissance. Dans cette perspective, des politiques économiques reposant sur une croissance potentielle sous-estimée se révèleraient auto-réalisatrices . On désigne par là la situation où des politiques économiques, reposant sur des prévisions exagérément pessimistes, déclenchent seules, par leurs effets restrictifs sur la croissance, la survenance des prévisions redoutées. Les politiques inverses ne présentent pas la même irréversibilité. Les mesures de la croissance potentielle étant particulièrement imprécises, il est prudent d'éviter toute politique susceptible d'exercer des effets irréversibles.

En outre, il se peut que le jugement formé sur l'orientation de la croissance potentielle, même fondé, ne permette pas de rédiger la bonne ordonnance. L'examen des causes profondes de la crise actuelle suggère que la question cruciale est probablement celle de notre régime de croissance et des moyens d'en garantir la soutenabilité, afin de ne plus entretenir un terreau favorable à l'émergence de crises successives, assurément préjudiciables à la croissance à long terme et particulièrement déstabilisantes pour les finances publiques.

L'une des conséquences les plus manifestes de la crise en cours est, en effet, une augmentation, sans précédent, de la dette publique.

L'accentuation des déséquilibres des finances publiques n'est pas le fruit d'une génération spontanée ; l'alourdissement du poids de la dette dans le PIB résulte des interventions des Etats dans le double cadre de leur rôle d'assureur des risques microéconomiques pris par les agents privés et de leur fonction de stabilisation macroéconomique dans un contexte de contraction du PIB.

En bref, c'est à la suite des réactions aux différents aspects de la crise que le numérateur du ratio dette publique/PIB a augmenté quand son dénominateur diminuait sous l'effet de la contraction de l'activité économique entraînant une forte augmentation du poids de la dette publique.

La trajectoire prise par la dette publique dans la crise est évidemment insoutenable. Mais, elle résulte de circonstances exceptionnelles dont personne ne s'attend vraiment à ce qu'elles se prolongent.

Il n'en reste pas moins que la question de la soutenabilité des dettes publiques est aujourd'hui posée.

La question est alors celle de dessiner un scénario crédible de désendettement.

Les conditions d'arbitrage entre croissance et désendettement sont illustrées par cinq scénarios alternatifs qui n'alimentent généralement pas le sentiment d'évolutions mal maîtrisables. La prudence serait d'éviter toute orientation irréversible en privilégiant un maniement adaptable de la politique budgétaire.

Le concours des autres politiques économiques et un plus haut degré de coordination internationale faciliteraient le repli en bon ordre des dettes publiques.

Cet environnement international renouvelé donnerait un début d'existence à un pilotage des équilibres internationaux plus tangible, entreprise nécessaire pour prévenir de nouvelles crises et faire gagner en crédibilité structurelle les positions budgétaires dans le monde.

Le graphique ci-dessous retrace l'importance des effets de la crise sur les dettes publiques dans l'OCDE et dans la zone euro. On remarque incidemment que les dettes brutes 16 ( * ) toujours nettement plus élevées que les dettes nettes 1 ont connu une amplification plus forte que ces dernières, une partie des emprunts nouveaux ayant été consacrée à prendre des participations dans des entreprises privées afin de les préserver de la faillite.

Source : OCDE

* 16 La dette brute est la seule considérée par le pacte de stabilité et de croissance européen. Elle correspond au seul passif des administrations publiques. La dette nette déduit de ce passif les actifs que les emprunts ont pu financer.

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