TRAVAUX DE LA COMMISSION - AUDITION POUR SUITE À DONNER DES REPRÉSENTANTS DE LA COUR DES COMPTES, DE L'ASSOCIATION EGIDE, DU MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET EUROPÉENNES, DU MINISTÈRE DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET DE LA RECHERCHE ET DU CENTRE NATIONAL DES oeUVRES UNIVERSITAIRES ET SCOLAIRES

Présidence de Monsieur Jean Arthuis, président

Séance du mercredi 13 octobre 2010

Ordre du jour

Audition pour suite à donner à l'enquête de la Cour des comptes, transmise en application de l'article 58-2° de la LOLF, sur le Centre français pour l'accueil et les échanges internationaux (EGIDE) .

COMPTE RENDU INTEGRAL

M. Jean Arthuis, président .  Nous allons procéder à une nouvelle audition de suivi d'une enquête réalisée par la Cour des comptes en application de l'article 58-2° de la loi organique relative aux lois de finance. Je rappelle que cette audition est ouverte à nos collègues membres de la commission des affaires étrangères et de la commission des affaires culturelles, ainsi qu'à la presse.

L'enquête concerne l'association « EGIDE », Centre français pour l'accueil et les échanges internationaux, opérateur du ministère des affaires étrangères et européennes pour la gestion des bourses, des missions d'experts et des invitations, tant en France qu'à l'étranger. Nous devons ce travail à l'initiative de notre collègue Adrien Gouteyron, rapporteur spécial de la mission « Action extérieure de l'Etat », et à notre ancien collègue Michel Charasse, alors rapporteur spécial de la mission « Aide publique au développement », fonction aujourd'hui dévolue à notre collègue Yvon Collin.

La demande d'enquête avait été adressée à la Cour des comptes dans la perspective de la réforme du dispositif de gestion des bourses, des invitations et des missions prévue en 2011. Cette réforme est désormais programmée par la loi du 27 juillet 2010 relative à l'action extérieure de l'Etat.

Il s'agissait, pour nous, d'évaluer la transparence du fonctionnement d'EGIDE et d'évaluer l'efficacité de sa gestion. Nous allons voir ce qu'il en est. À cet effet, nous recevons, ce matin :

- d'une part, M. Alain Pichon, président de la quatrième chambre de la Cour des comptes, et MM. Didier Selles et Philippe Hayez, conseillers-maîtres à la Cour des comptes ;

- d'autre part, MM. Jean Nemo, président, Dominique Hénault, directeur général, et Bertrand Sulpice, directeur général adjoint de l'association EGIDE ;

- M. Christian Masset, directeur général de la mondialisation, du développement et des partenariats, et Mme Hélène Duchesne, directrice à la direction générale de la mondialisation, du développement et des partenariats du ministère des affaires étrangères et européennes ;

- MM. François Decoster, conseiller au cabinet de la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, Gilles Vial, chargé de mission à la direction des relations internationales et européennes et de la coopération du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, et M. Jean-Yves Delongeau, sous-directeur à ce ministère, chargé de l'égalité des chances et de la vie étudiante ;

- enfin MM. François Bonaccorsi, directeur général, et Jean-Paul Roumegas, sous-directeur des affaires internationales du Centre national des oeuvres universitaires et scolaires (CNOUS).

Compte tenu de l'ordre du jour de la commission des finances et dans le but d'offrir une possibilité de dialoguer et de débattre aux différentes intervenants, je demande que les propos liminaires de chacun se limitent aux observations principales. Elles devraient pouvoir être exprimées en quelques minutes pour chacune des institutions représentées.

Je rappelle enfin à mes collègues sénateurs qu'au terme du débat nous devrons prendre une décision sur la publication de l'enquête de la Cour des comptes et son insertion dans un rapport d'information.

Si vous le voulez bien, je vais à présent céder la parole à M. Alain Pichon, président de la quatrième chambre de la Cour des comptes.

M. Alain Pichon, président de la quatrième chambre de la Cour des comptes .  Merci, Monsieur le Président.

La Cour des comptes a procédé au contrôle d'EGIDE conformément à la requête de la commission des finances. J'en profite pour préciser que l'auteur de ce contrôle a reçu un excellent accueil tant de la part des représentants d'EGIDE que de la part de ceux des administrations auxquelles il s'est adressé. Il a pu accomplir ce travail dans les meilleures conditions d'accès et de contradiction qui soient. EGIDE est un opérateur historique du ministère de la coopération, si nous remontons à ses origines. Elle est une association qui a été - je pèse mes mots - fort « malaimée ». Elle connaît, à l'heure actuelle, de réelles difficultés financières qui nous incitent à nous poser des questions quant à sa survie. Nous pouvons également la considérer comme un des vecteurs essentiels de la politique de mobilité internationale de la France. EGIDE en a assuré, avec un certain succès, la logistique. La loi du 27 juillet 2010 prévoit la création d'un nouvel outil, « Campus France », bénéficiant d'un statut d'établissement public industriel et commercial (EPIC). EGIDE va s'y intégrer avec l'ambition de devenir un instrument légitime d'attractivité et d'influence, instrument dont la France a cruellement besoin et qui faisait malheureusement défaut dans le paysage ces derniers temps.

Comme je viens de vous le dire, EGIDE bénéficie d'une expertise reconnue dans la logistique de la politique de mobilité internationale de la France. Cette qualité est d'ailleurs reconnue et l'efficacité de l'organisme nous a été confirmée par le ministère des affaires étrangères et européennes (MAEE) et par un certain nombre de postes diplomatiques et consulaires auxquels nous nous sommes adressés. La réputation d'EGIDE a parfois été mise en cause. Elle est désormais totalement reconnue. J'affirme qu'il nous faut conserver cet héritage dans la perspective de la réforme. Cela étant dit, la situation d'EGIDE, sur le plan financier, est critique. De multiples facteurs expliquent cette situation et posent la question de l'équilibre financier du nouvel EPIC Campus France. A cet égard, il conviendra de veiller à ce que cette réforme s'appuie sur une situation financière assainie. Il est tout-à-fait exact que les problèmes financiers d'EGIDE sont anciens. La Cour des comptes n'avait d'ailleurs pas manqué de les signaler dès 2004. L'inflexion que nous avons constatée à partir de 2004 n'a cessé de se creuser. L'association a d'ailleurs enregistré un déficit de trésorerie de quatre millions d'euros en 2009 alors que son chiffre d'affaires s'élevait à seize millions d'euros. Les causes de cette dégradation restent multiples. Evoquons, tout d'abord, une diminution relativement sensible du volume des crédits qui sont gérés pour le compte du ministère des affaires étrangères et européennes. Cette diminution est estimée à 25 % sur 5 ans. En outre, les postes diplomatiques faisant jouer la fongibilité, les crédits qui leur étaient délégués pour les bourses ou les accueils ont été affectés à d'autres priorités. Nous avons évalué que cette tendance contribuait à cette baisse à hauteur de 15 %. Le MAEE rémunère, par ailleurs, les prestations d'EGIDE de façon non-équilibrée. Elles représentent un facteur de coût pour l'association et non pas un facteur d'équilibre. Enfin, la croissance des charges et la qualité de la prestation n'ont pas suivi les financements.

L'environnement administratif a été, par ailleurs, plutôt défavorable. La tutelle a rarement été digne de ce qu'elle exigeait ou de ce qu'elle attendait d'EGIDE. Elle n'a ainsi pas été capable de dégager une stratégie pluriannuelle pour son opérateur. Le ministère des affaires étrangères et européennes a récupéré EGIDE lors de l'intégration du ministère de la coopération au sein du Quai d'Orsay en 1998. Il n'a pas résolu la question de savoir quel était son opérateur principal qui, à l'époque, était aussi le CNOUS. Celui-ci était privilégié par le MAEE, au détriment d'EGIDE. Les deux opérateurs ont, à cette époque, été quelque peu confondus. Ils ont même été placés dans une situation concurrentielle biaisée qui profitait au CNOUS. Cette dualité a pu susciter un peu d'incompréhension de la part de la plupart des publics concernés, que ce soit les étudiants ou les gouvernements étrangers. Ceux-ci ne comprenaient d'ailleurs pas cette rivalité. L'activité liée aux bourses est déficitaire pour les deux opérateurs. L'avantage que constitue pour les gouvernements étrangers l'hébergement à des tarifs subventionnés de leurs étudiants dans des résidences universitaires génère une difficulté - qui vient s'ajouter aux autres - que ne connaît pas le CNOUS. Sur ce point également, nous constatons une situation de concurrence imparfaite. EGIDE vit donc depuis plusieurs années dans une situation de relative précarité, aussi bien pour elle-même que pour ses personnels, malgré les efforts qui ont pu être accomplis pour redresser la situation. Reconnaissons qu'EGIDE a vécu des situations difficiles alors même que son personnel mettait en oeuvre et subissait des mesures d'économie.

La réforme votée par le Parlement en juillet dernier est donc la bienvenue. La création de l'EPIC et l'intégration à cet EPIC des activités internationales du CNOUS doivent être accueillis, semble-t-il, tout-à-fait favorablement. Sur ce point, le législateur a suivi les préconisations que la Cour avait, je le rappelle, formulé dans le rapport relatif à son dernier contrôle. Elle n'était pas la seule à le dire. Nous pouvons attendre de cette réforme une meilleure définition et une harmonisation des types de prestations, un meilleur service d'accueil apporté aux boursiers, aux experts ou aux divers invités, la fixation d'un niveau de rémunération qui, à terme, assure l'équilibre économique de l'ensemble et, par voie de conséquence, une meilleure transparence. Les ministères ne peuvent pas continuer à placer leurs opérateurs dans une situation de perte.

Il convient à présent d'aller plus loin : cette fusion doit permettre de mettre un terme aux doublons et aux redondances qui sont coûteux. Il conviendra de rationnaliser le maillage tant national que régional. Il conviendra d'optimiser la gestion des ressources humaines de ces entités, ceci tout en préservant le savoir-faire, les compétences ainsi que le réseau d'EGIDE. Ce réseau constitue un actif immatériel digne de respect et de conservation. Le pilotage de la réforme reste à renforcer. Je rappelle que le nouvel ensemble doit être opérationnel au 1 er janvier 2011. Or, au moment où nous achevions notre rapport, la question du siège social du futur EPIC n'avait pas encore été tranchée et l'impact économique des différentes synergies devait être très précisément évalué. Les réponses qui vous seront données seront, je l'espère, de nature à vous rassurer quant à la mise en oeuvre de cette réforme ambitieuse. La nouvelle agence Campus France devra dignement participer à la promotion de notre enseignement supérieur à l'étranger, ceci dans un environnement très concurrentiel. Aussi, l'intégration d'EGIDE dans le futur ensemble doit être accompagné de garanties qui nécessitent, je le crois, d'être encore précisées. J'achève mon propos en soulignant le caractère ambitieux de notre politique en matière d'accueil des personnalités et des étudiants étrangers. Cette dernière requiert, par conséquent, un opérateur logistique robuste, visible et lisible et dont la pérennité soit garantie. C'est une des conditions de réussite de notre politique en ce domaine. Elle vise à combler un retard certain, retard relativement préjudiciable aux intérêts mondiaux de la France, au regard de ce que la plupart de nos « partenaires » - lesquels sont plutôt des concurrents ! - européens manifestent en ce domaine.

Je vous remercie pour votre attention.

M. Jean Arthuis, président .  Je donne, à présent, la parole aux rapporteurs spéciaux.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial de la mission « Action extérieure de l'Etat » . Cette enquête de la Cour des comptes avait été souhaitée par Michel Charasse et moi-même. Je souhaite remercier ses auteurs pour la qualité de leur travail et des éléments tout-à-fait utiles qu'ils nous fournissent pour préparer l'avenir.

Le rapport de la Cour des comptes pointe la faiblesse de la plupart des contrôles effectués sur EGIDE par le ministère des affaires étrangères et européennes. Ce dernier a abandonné ce contrôle aux postes diplomatiques. Il relève l'absence d'indicateurs de performance visant l'association et de demandes du MAEE que son opérateur se dote d'une réelle comptabilité analytique. Enfin, le travail met en cause les défaillances du pilotage de sa fusion dans le futur établissement public prévu par la loi. Je souhaiterais savoir comment le ministère explique et justifie cette situation.

Tout à l'heure, le Président Alain Pichon a rappelé que l'échéance de la mise en oeuvre du futur ensemble était proche : le nouveau Campus France sera-t-il opérationnel à cette date ? Ses statuts seront-ils rédigés ? Où sera situé son siège social ? À plus long terme, dans quel délai un contrat de performance entre l'Etat et l'opérateur sera-t-il élaboré ? Enfin, les moyens qui sont déployés en faveur de la politique française relative à la mobilité des personnes sont-ils en rapport avec nos ambitions. Les évolutions de crédit retracées dans le rapport incitent à en douter. Dans quelle mesure soutenons-nous la comparaison avec l'effort mis en oeuvre avec nos partenaires européens ?

M. Yvon Collin, rapporteur spécial de la mission « Aide publique au développement » . Je souhaite, à mon tour, remercier la Cour des comptes des divers éléments qu'elle vient d'apporter à notre réflexion. Je ne reviendrai pas sur ceux que le Président Pichon a développés durant son propos liminaire.

Je constate que le rapport de la Cour des comptes n'aborde pas réellement la question de la pertinence du modèle économique choisi pour les relations financières entre le MAEE et son opérateur, c'est-à-dire une tarification à la prestation. Cette organisation est-elle efficiente ? Permet-elle la transparence requise, l'autorisation d'écoute ? Qu'en est-il des activités constituant le coeur de métier d'EGIDE, c'est-à-dire la gestion des bourses, des invitations et des missions ?

Par ailleurs, est-il prévu de reconduire ce système de rémunération au sein du nouvel opérateur, lequel présentera une forme juridique nouvelle et qui sera opérationnel au 1 er janvier 2011 ? Quels sont les perspectives de relèvement du barème des prestations, relèvement dont le rapport de la Cour relève la légitimité ? La direction d'EGIDE peut-elle dissiper les doutes nés de la lecture de ce rapport au sujet de la crédibilité de la stratégie qui a été élaborée sur la période 2010-2012 ? En particulier, je souhaiterais m'assurer que la maîtrise annoncée des ressources humaines pourra effectivement être mise en oeuvre. Le futur établissement public héritera donc d'un sérieux passif. Les mêmes causes générant les mêmes effets, nous pouvons nourrir de légitimes inquiétudes !

M. Jean Arthuis, président .  La parole est à l'association EGIDE.

M. Jean Nemo, président d'EGIDE . Je souhaite rappeler qu'EGIDE est une institution ancienne, créée il y a plus de cinquante ans, et que sa situation a toujours été raisonnablement équilibrée jusqu'en 2005 environ. Elle n'a ainsi jamais reçu de subventions et était rémunérée sur la base de la prestation de services. Depuis que j'en suis le Président, j'ai toujours relevé que la rémunération de la prestation était interrompue à un niveau inférieur à celui de l'équilibre économique et financier : les coûts des missions confiées à EGIDE par nos commanditaires sont de l'ordre de 8 % à 9 % du chiffre d'affaires traité, ce qui me paraît être un niveau convenable. L'équilibre économique et financier d'EGIDE a été assuré dans la mesure où son mode de financement consiste à percevoir des avances de ses commanditaires au titre des services qui lui sont demandées. Je souhaite rappeler que l'association a absorbé, au cours des dix dernières années, deux autres associations dépendant du ministère des affaires étrangères. Lorsque j'ai pris la tête de la structure, elle comptait 300 salariés. Elle en compte dorénavant moins de 250. En dix ans, nos effectifs ont donc baissé d'un tiers, mais ceux-ci n'en rendent pas moins les mêmes services. Je ne connais pas beaucoup d'entreprises ou d'opérateurs de l'Etat qui aient consenti des efforts de réduction et de rationalisation de leur fonctionnement sur une période aussi courte. Vous le savez, un certain nombre de réorganisations ont été conduites afin de répondre à des besoins et à des soucis de rationalisation. La Cour des comptes l'a particulièrement souligné. Enfin, je rappelle qu'EGIDE est un des rares opérateurs du MAEE à disposer d'un patrimoine immobilier conséquent. Il est propriétaire de son siège et de plusieurs résidences étudiantes. Ses réserves sont, par ailleurs, suffisantes et permettraient de couvrir encore quelques années de déficit. D'ailleurs, le plan de redressement initié en 2009 est suivi à la virgule près.

Cela étant dit, les causes de la situation économique et financière d'EGIDE sont multiples. Une des activités consistant à opérer pour le compte de grandes entreprises publiques ou privées a disparu, sans que nous puissions le compenser par quelque autre. Or, cette activité était très rémunératrice : les grandes entreprises compensaient, en partie, les « insuffisances » de rémunération assurée par le ministère des affaires étrangères et européennes. En deuxième lieu, les activités « traditionnelles » d'EGIDE dans le domaine de la gestion des bourses ont connu un net fléchissement. Nous avons, à ce sujet, demandé au MAEE de bénéficier d'une plus grande visibilité à terme sur l'avenir de cette politique qui contribue notablement au chiffre d'affaires d'EGIDE. Pour le moment, nous attendons encore la réponse de la tutelle. Des efforts de diversification ont été exigées tant par la tutelle que par le contrôle budgétaire. Ils supposent des actions de prospective de marché qui sont en cours : je ne peux donc pas vous en dire plus. Nous sommes relativement optimistes, mais nous n'avons pas, à ce jour, évalué l'impact positif d'une telle diversification sur le modèle économique sain que doit être celui de cette agence. S'agissant de l'évolution vers un EPIC plus intégré, j'ai demandé à notre tutelle à de nombreuses reprises la mise en commun d'un certain nombre de prestations de service. Je constate que d'autres opérateurs remplissent la même fonction logistique d'EGIDE. Il aurait été possible de réaliser des économies d'échelle. Jusqu'à présent, cette mise en commun n'est jamais intervenue. Le modèle d'EPIC ne me semble pas être très adapté : il ne contribue certainement pas à rétablir un équilibre économique et financier durable. Nous avions demandé que Campus France soit hébergé dans le siège d'EGIDE où de très nombreux bureaux restent disponibles. Je constate, à ce jour, que cette proposition n'a pas abouti alors que nous aurions pu réussir à mettre en commun certains supports administratifs.

M. Jean Arthuis, président .  Comment l'expliquez-vous ?

M. Jean Nemo . Nous l'avons suggéré à de multiples reprises. Aucune suite n'a été donnée à nos propositions. Les motifs en sont très clairs : les opérateurs ne souhaitaient pas être confondus entre eux. On a cru bon de m'accuser de vouloir absorber certains d'entre eux alors que ce n'était nullement l'objectif que je poursuivais en tant que vieux serviteur de l'Etat ! La tutelle n'a jamais arbitré correctement.

M. Jean Arthuis, président .  C'est ce que M. Alain Pichon appellerait une tutelle évanescente !

M. Jean Nemo. Nous pourrions loger le nouvel EPIC dans les locaux actuels d'EGIDE. Il nous a été demandé, une année durant, de réfléchir à la création d'une « grande maison des opérateurs » dont EGIDE serait le financeur alors que nous pouvons loger ce nouvel opérateur ! Cette affaire n'est désormais plus à l'ordre du jour. Il est un autre point qui me parait indispensable de mentionner. L'un d'entre vous a rappelé qu'EGIDE était l'héritier d'une association créée en 1960 à la demande du ministère de la coopération, ceci afin de faire face à l'afflux d'étudiants et de stagiaires africains. Le ministère des affaires étrangères, jusque dans les années 90, ne comptait pas parmi ces opérateurs cet « ancêtre » d'EGIDE qu'était le CIES. Son seul opérateur en ce domaine était le CNOUS. Le dossier n'a, lors de la fusion des deux ministères en 1997, trouvé d'issue. De manière informelle, les organismes se sont donc partagé le traitement des dossiers (CNOUS et CIES). Je le redis, au moment de la fusion, aucune décision n'a été prise pour déterminer lequel des deux organismes était apte à gérer tous les dossiers. De ce fait, les postes diplomatiques et consulaires s'adressent indistinctement à EGIDE ou au CNOUS pour traiter les demandes qui leur parviennent sans que nous soyons véritablement mis en compétition. Nous avons le sentiment, en outre, d'avoir veillé à ce que notre gestion des coûts et des dépenses ait été la plus rigoureuse possible. Nous ne sommes pas certains que le CNOUS soit, nous semble-t-il, en mesure d'apprécier le coût réel de la gestion des bourses qui lui est confiée. La gestion des boursiers est plus coûteuse à EGIDE qu'au CNOUS, en raison du plus grand nombre de prestations prises en compte par notre association. Je ne cherche pas à polémiquer avec le CNOUS. Je cherche simplement à souligner la divergence des modalités d'appréciation...

M. Jean Arthuis, président .  Si je vous comprends, votre appréciation des coûts n'est pas la même que celle en vigueur au sein du CNOUS.

M. Jean Nemo . Je ne connais vraiment pas, Monsieur le Président, beaucoup d'organismes assurent une gestion qui corresponde à 9 % du coût de l'opération qu'ils mènent ! Concernant le futur EPIC, les questions et les interrogations soulevées par les différents intervenants ne sont pas réglées par la fusion des deux organismes.

M. Jean Arthuis, président .  Vous doutez donc que la fusion soit réellement opérationnelle au 1 er janvier 2011 ?

M. Jean Nemo . Je n'en suis pas personnellement certain, Monsieur le Président. Il est des dispositions transitoires à mettre en oeuvre, notamment au plan comptable, à prendre.

M. Jean Arthuis, président .  Dénoncez-vous ce que vous considérez être une certaine inertie dans le système ?

M. Jean Nemo . Je ne suis pas en mesure de vous répondre, Monsieur le Président. Je vous invite à vous adresser à la tutelle sur ce point.

M. Jean Arthuis, président .  C'est donc à elle que je vais céder la parole. M. Masset, nous vous écoutons.

M. Christian Masset, directeur général de la mondialisation, du développement et des partenariats au MAEE . Monsieur le Président, je veux vous remercier de nous donner l'occasion d'échanger sur l'opérateur actuel qu'est EGIDE et l'opérateur futur qu'est Campus France, ceci au regard de l'influence et de l'attractivité de notre pays dans le monde. Nous savons bien que c'est en ce domaine que se construiront son influence et son attractivité dans les trente prochaines années.

En préalable, je rappelle que la direction générale de la mondialisation est une création récente au sein du ministère des affaires étrangères et européennes, puisqu'elle n'a été constituée qu'en 2009. Une réforme importante a été conduite au printemps de cette année-là visant à améliorer les tutelles des opérateurs du MAEE. J'ai constaté, au moment de ma prise de fonction, que des problèmes se posaient, tant en termes de viabilité qu'en termes de fonctionnement, au sein d'EGIDE. Les motifs en ont été rappelés par le Président Nemo, notamment. Nous avons constaté, cela étant dit, la sensible amélioration de la qualité du service rendu, mais que les problèmes que je viens d'évoquer trouvaient leur origine dans la réduction du « fonds de commerce » traditionnel de l'institution dans d'importantes proportions. Cette réduction n'a aucunement été compensée par la diversification de l'activité - elle a commencé, mais ses proportions demeurent insuffisantes - et par la réduction des coûts de fonctionnement, notamment des dépenses de personnel. Les gains de productivité et la rationalisation de l'organisation doivent être poursuivis. La coexistence de deux opérateurs n'est pas satisfaisante et la concurrence qu'ils se livrent mutuellement n'est pas égale. Enfin, nous sommes dans une phase de transition puisqu'un nouvel opérateur doit prochainement voir le jour. Il nous a semblé opportun, avec le Président Nemo, de réagir. C'est l'objet du plan élaboré à la fin de l'année 2009 et qui vise à redresser la situation d'EGIDE. Ce plan devrait être complété par un autre, qui sera adopté lors du prochain Conseil d'administration. Il vise à poursuivre la politique de diversification, à améliorer la productivité et à augmenter les tarifs de gestion pour les porter de 9 % à 11 %. Le conseil d'administration devrait également être informé d'un projet de cession de site. Nous avons de concert réagi et nous poursuivons cet assainissement.

Les bourses ont baissé. Ce n'est pas de gaîté de coeur que je vous le dis. Le MAEE participe, à son niveau, à l'effort de réduction des dépenses de l'Etat. Nous participons à cet effort. Nous veillons à ce que les bourses soient sanctuarisées. Elles l'ont été en 2010. Cependant, nous n'avons pas prévu, cette année, qu'un certain nombre de postes préfèrent attribuer les enveloppes qui sont initialement affectées aux bourses à d'autres activités. Par conséquent, la sanctuarisation théorique ne s'est pas produite en 2010. Le Président Nemo souhaite de la visibilité. Nous entendons lui en donner dans la mesure où nous assurons la sanctuarisation des bourses sur les trois années à venir. C'est le seul poste, avec les crédits d'interventions culturelles et le poste « enseignement de la langue française à l'étranger », à bénéficier de cette mesure.

M. Jean Arthuis, président .  Cette sanctuarisation s'inscrit-elle dans le contexte de la loi pluriannuelle des finances publiques ?

M. Christian Masset . Absolument, Monsieur le Président. Pour nous assurer qu'aucune ponction ne sera réalisée, il nous a semblé utile de diffuser des consignes auprès des postes. Ceux qui ne les respectent pas verront le montant de leur enveloppe de programmation diminuer. Evoquons, à présent, le projet d'édification du nouvel opérateur : nous considérons qu'il s'agit d'un progrès qui met fin à cinq ans d'incertitude en la matière. Le décret du 27 juillet 2010 formalise la réunion au sein du futur opérateur des deux intervenants en matière de gestion des bourses. Nous considérons qu'il s'agit d'un immense progrès qui profitera à cette future structure. Celle-ci dépendra de deux tutelles, les Affaires étrangères et la recherche. Nous avons identifié un préfigurateur qui a travaillé sur le thème. Il connaît fort bien le milieu de l'Université pour avoir enseigné à Sciences-Po. Cette personne va recevoir, au cours des jours qui viennent, une lettre de mission cosignée par les deux ministres. Parallèlement, nous avons l'intention de lancer un audit indépendant en partenariat avec le ministère de la recherche. Il porte sur la viabilité économique et sur la comptabilité analytique. Nous avons commencé de travailler à l'établissement d'un contrat d'objectifs et de performance pour trois ans.

Un calendrier a été établi. Un comité de pilotage a été institué. Tout se met en place. S'agissant des locaux, nous prévoyons d'installer l'opérateur dans le siège d'EGIDE. Celui-ci est très agréable. Je vous invite à le découvrir ! S'agissant du CNOUS International, les deux ministères vont établir un rapport, comme le prévoit la loi, en vue de son intégration au sein de Campus France. Concernant, par ailleurs, la politique en termes de mobilité, la France est le troisième pays d'accueil d'étudiants étrangers : 270 000 y suivent des études, soit une augmentation de 60 % par rapport à l'an 2000. Ce chiffre est à rapprocher des 100 000 étudiants français séjournant à l'étranger. Maintenant que nous disposons de l'opérateur Campus France, la synergie avec le ministère de l'enseignement supérieur et de la Recherche constitue la meilleure garantie des progrès à venir.

M. Jean Arthuis, président .  Voilà un témoignage qui doit apaiser l'impatience du Président Nemo !

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial . Je souhaiterais connaître l'échéance de mise en place de Campus France. Nous avons compris que la date initiale du 1 er janvier 2011 risquait fortement de ne pas être respectée. Quand pensez-vous que le projet pourra aboutir ?

M. Christian Masset . Nous n'avons jamais dit que la date initiale ne serait pas respectée !

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial . Cela a été sous-entendu.

M. Christian Masset . Les projets de décrets sont actuellement à la signature à Matignon. Ils vont passer devant les CTPM des deux opérateurs avant d'être présentés au Conseil d'Etat. J'ai bon espoir que les décrets seront adoptés dans les semaines à venir. La lettre précise que, le 1 er décembre prochain, les ministres des affaires étrangères et européennes, d'une part, et de l'enseignement supérieur et de la recherche, de l'autre, recevront le rapport du préfigurateur. Quant au rapport de l'audit, il sera disponible, me semble-t-il, en février 2011. Le COP, quant à lui, sera établi au cours du premier semestre de 2011. Ce calendrier s'inscrit dans les efforts d'assainissement et de rationalisation de l'activité d'EGIDE. Nous connaissons désormais le périmètre du futur opérateur. Chacun peut agir en toute lisibilité et en toute transparence. Il convient, à présent, de travailler sur la diversification, notamment sur les investissements en direction des étudiants qui ne sont pas boursiers. C'est là que se trouve la marge principale de progression de l'activité.

François Decoster, conseiller au cabinet de la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche . La constitution du futur opérateur est un exercice partagé entre la tutelle que je représente et celle que représente Christian Masset. Je crois que beaucoup a déjà été dit. Depuis l'adoption de la loi en juillet dernier, nous tenons le calendrier initialement respecté. Cela vaut pour la préfiguration et pour la rédaction des décrets d'application : ceux-ci seront soumis aux CTPM dans les jours à venir et transmis au Conseil d'Etat d'ici quelques semaines. Nous entendons tenir le délai du 1 er janvier ! Tout ceci s'inscrit dans ce qu'ont rappelé Christian Masset et le Président Pichon, c'est-à-dire l'accueil d'un nombre de plus en plus important d'étudiants étrangers dans les établissements d'enseignement supérieur français. Nous avons besoin d'un opérateur unique apte à rassembler les compétences ad hoc en ce domaine. Je souhaite rappeler que le réseau du CNOUS et des CROUS participe, depuis plusieurs années, à l'accueil de ces étudiants. Il a mobilisé toutes ses ressources pour les héberger : 27 % des logements des CROUS leur sont attribués.

M. Jean Arthuis, président .  Combien de logements représente ce pourcentage ?

M. François Decoster . Il représente 36 000 logements.

M. Jean Arthuis, président .  Les conditions financières d'hébergement des étudiants étrangers sont-elles satisfaisantes ?

M. François Bonaccorsi, directeur général du Centre national des oeuvres universitaires et scolaires (CNOUS) . Ils paient un loyer au même titre que les étudiants français.

M. François Decoster . L'enseignement supérieur français veille à accueillir les étudiants étrangers comme il accueille les étudiants français. Cette exigence représente bien évidemment un coût non-négligeable. Je souhaite préciser que la question de la cotutelle revient dans la discussion parlementaire : à l'occasion de la discussion sur le projet de loi sur l'immigration en discussion à l'Assemblée nationale a modifié le périmètre de la tutelle. Le ministère chargé de l'immigration deviendrait la troisième tutelle. Nous souhaiterions vivement, Monsieur le Président, que le Sénat revienne sur cette décision et rétablisse la double tutelle. Elle semble correspondre à la double logique d'accueil des étudiants étrangers en France.

M. Jean Arthuis, président .  Vous posez, là, une question extrêmement intéressante. Monsieur le Directeur général, vous souhaitez prendre la parole ?

M. Christian Masset . Merci, Monsieur le Président. Je tiens à dire que j'appuie totalement la démarche du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche sur ce point. La tutelle est d'autant plus efficace qu'elle n'est pas démultipliée. L'opérateur n'a pas de compétences en matière de visa. Par conséquent, la loi établissant la double tutelle du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche et du ministère des Affaires étrangères et européennes n'a pas de raison d'être amendé. Cette double tutelle est un gage d'efficacité, me semble-t-il.

M. Jean Arthuis, président .  Nous avons bien entendu votre appel, Messieurs.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial . Le pourcentage d'attribution des logements à des étudiants étrangers correspond-il à une instruction particulière ou est-il le résultat d'évolution plus ou moins contrôlée ?

M. Jean Arthuis, président .  Avant que vous ne répondiez, je souhaiterais donner la parole à M. François Bonaccorsi.

M. François Bonaccorsi . Je vous remercie, Monsieur le Président, de me donner l'occasion de rétablir aujourd'hui la vérité à propos d'un certain nombre d'affirmations. Je ne me permettrai bien évidemment pas de porter un quelconque jugement sur la gestion d'EGIDE. En revanche, le CNOUS a été mis en cause : je tiens à rappeler qu'il n'existe pas de « CNOUS International », mais un « service d'accueil des étudiants étrangers » qui fonctionne en réseau avec l'ensemble des 28 CROUS de France. Je rappelle que les chambres qui sont mises à disposition résultent d'une politique. Nos chambres ne reçoivent que les étudiants boursiers français, lesquels représentent moins de 10 % du total des étudiants français. Je souligne l'organisation performante du CNOUS qui fait preuve de réactivité à l'égal de n'importe quel autre opérateur. Le ministère des affaires étrangères et européennes m'a convié à la signature d'un accord entre Bernard Kouchner et le Président de la Fédération du BTP. Cet accord portait sur l'accueil en urgence de Sénégalais : nous avons résolu ce problème en 24 heures. Je souhaitais insister sur cette capacité de réactivité car le rapport de la Cour des comptes prêtait à confusion sur ce point. L'accueil des étudiants étrangers en France est régi par des textes qui datent de 1958 et de 1964. Ils fondent notre action en ce domaine.

J'ai découvert aujourd'hui le rapport final de la Cour des comptes. Je ne disposais, jusqu'à présent, que du relevé de conclusions provisoires qui nous avait été adressées en juillet dernier et auquel mon prédécesseur avait répondu. Je fais mienne les affirmations de ce dernier sur des points que le CNOUS conteste de la façon la plus vigoureuse. Je dois dire qu'il est évident que la loi nous place dans une certaine position. Je n'accepte pas que l'on puisse ainsi affirmer que le CNOUS démarche les gouvernements étrangers. On reproche au CNOUS et aux CROUS d'être ce qu'ils sont. Je dois dire qu'ils ne font qu'accomplir la mission qui leur est confiée depuis la création du réseau qu'ils constituent. J'ai cru comprendre que le CNOUS International serait intégré au sein du futur EPIC. Si tel est le cas, je souhaiterais, Monsieur le Président, que nous en soyons rapidement informés car nos personnels ne l'ont pas été. Les personnels et les étudiants du service d'accueil des étrangers (faussement appelé « CNOUS International) sont très inquiets. J'ai besoin de cette information afin de la répercuter auprès de mes personnels.

M. Jean Arthuis, président .  Si je vous comprends, vous n'êtes pas informés des projets qui concernent le CNOUS International.

M. François Bonaccorsi . Absolument pas, Monsieur le Président.

M. Jean Arthuis, président .  Monsieur Decoster, comment réagissez-vous à cette annonce ?

M. François Decoster . Le Parlement a voté une loi dont le contenu est parfaitement clair : le CNOUS International devrait intégrer Campus France. Cette intégration doit faire l'objet d'une mission commune des deux IG du ministère des affaires étrangères et européennes et du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche afin d'en déterminer les modalités. Cette intégration doit débuter très prochainement.

M. François Bonaccorsi . Je souhaite rappeler que le réseau des oeuvres est en relation avec les universités et avec un certain nombre d'IUT, par exemple, pour accueillir des étudiants étrangers. La loi LRU devrait permettre, à terme, de conduire une réflexion sur les conditions d'accueil des étrangers au sein des universités françaises. Celles-ci attendent beaucoup de notre réseau : elles savent qu'il contribue notablement à leur attractivité et à leur rayonnement. Cependant, il est possible que le rapport d'audit n'entrave, à travers ses conclusions, notre activité. J'en reviens donc à la question de l'intégration du « CNOUS International ». J'ai identifié trois hypothèses :

- soit les activités du CNOUS sont transférées avec leur personnel : dans ce cas, il conviendra alors de ne retenir que les activités internationales ;

- soit les activités du CNOUS International sont transférées, sans leur personnel ;

- soit le CNOUS continue à agir comme tête de réseau des oeuvres universitaires du futur EPIC.

J'insiste, Monsieur le Président, sur l'importance de régler ce point dans l'intérêt des personnels du CNOUS car ils auront ensuite des choix personnels à faire.

M. Jean Arthuis, président .  Je vous remercie de vos témoignages sur ce beau projet. Je souhaite entendre la Cour des comptes à propos du patrimoine immobilier de l'EGIDE. Il n'est pas évoqué dans le rapport qu'elle a produit. Que représente ce patrimoine immobilier ?

M. Didier Selles, conseiller-maître à la Cour des comptes . Le patrimoine immobilier d'EGIDE est constitué de son siège et d'un certain nombre de résidences qui lui ont été apportées par l'Association des foyers internationaux au moment de sa fusion avec la structure opératrice. Les immeubles ont été comptabilisés à leur valeur historique. Ces éléments, en revanche, n'ont pas été intégrés à notre rapport.

Mme Monique Cerisier-Ben Guigua, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées . Je ne souhaite pas m'étendre sur la difficulté de distinguer l'EPIC Campus France et EGIDE. Cette situation trouve son origine dans le fait que le premier n'a pas eu de directeur pendant longtemps à cause d'un différend opposant le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche et celui des affaires étrangères et européennes. L'EPIC Campus France est parvenu, malgré des personnels en nombre limité, à rassembler l'ensemble des grandes écoles et des universités à l'exception des trois universités strasbourgeoises pour favoriser la promotion de la langue française à l'étranger. Cet organisme ne souhaitait pas évoluer sans la garantie de pouvoir poursuivre son activité au sein d'EGIDE à qui cette mission n'avait pas été confiée en 1998. Les difficultés financières d'EGIDE sont dues à des choix budgétaires dont nous sommes, comme parlementaire, coresponsables avec le Gouvernement. Les crédits culturels extérieurs ont diminué de 30 % entre 2002 et 2009. La baisse est exactement la même concernant le nombre d'étudiants : nous sommes ainsi passés entre 2002 et 2009 de 22 500 à 15 000 boursiers. Le nombre de stagiaires est, lui, passé de 12 000 à 4 700 ! Nous sanctuarisons le budget d'EGIDE pour un montant inférieur de 30 % à ce qu'il était en 2002. Dois-je rappeler que les postes diplomatiques supportent des charges fixes qu'ils ne sont plus en mesure de payer. Dès lors, plutôt que d'accorder des bourses, ils paient leurs loyers et leurs salaires !

M. Jean Arthuis, président .  Un terme a été mis à cette pratique grâce à la sanctuarisation que nous évoquions tout à l'heure !

Mme Monique Cerisier-Ben Guigua, rapporteure pour avis . Je suis tout disposée à vous croire, Monsieur le Président ! Concernant la question de la tutelle, j'ai constaté que l'on ne cessait de critiquer le ministère des affaires étrangères et européennes. Il faut que cela cesse. La DGCRST a perdu ses moyens entre 2002 et 2006. La DGM permet de remédier à cette situation. Cependant, elle doit faire face à la RGPP 1 et à la RGPP 2. La tutelle fait ce qu'elle peut en fonction de ce dont elle dispose ! Il est trop simple de critiquer une tutelle que l'on prive de ses moyens et de ses personnels. Examinons, à présent, le problème de la future configuration de la future tutelle : celle-ci sera co-exercée non plus par deux, mais par trois ministères, celui chargé de l'immigration venant en effet s'ajouter à celle du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche et à celle du ministère des affaires étrangères et européennes. Je crains que ce choix ne se révèle catastrophique, les relations entre les deux tutelles actuelles étant déjà très compliquées ! Je souhaiterais savoir, malgré le fait que ce projet n'aboutisse tout de même, si les trois tutelles ont l'intention de créer une structure ministérielle commune pour être en capacité d'exercer la mission leur incombant. Je souhaiterais également connaître le type de comptabilité qui sera mise en oeuvre au sein du futur EPIC. Il semblerait qu'il soit question d'une comptabilité publique. Dans ce cas, à quoi sert-il de créer un EPIC ?

M. Jean Arthuis, président .  Arrêtons d'établir une distinction entre la comptabilité publique et la comptabilité privée. Je tiens à rappeler que la comptabilité a pour mission de donner une image fidèle de la situation patrimoniale et des opérations. L'inscription dans la Constitution de l'obligation de certification par la Cour des comptes de la sincérité est une révolution. Les comptabilités, qu'elles soient publiques ou privées, doivent désormais être sincères et permettre aux décideurs de prendre les décisions ad hoc.

Mme Monique Cerisier-Ben Guigua, rapporteure pour avis .  Certes, Monsieur le Président. Cependant à partir quel moment le contrôleur financier du ministère du budget pourra-t-il intervenir en cas de mise en oeuvre de la comptabilité publique ?

M. Jean Arthuis, président .  La réforme de l'Etat met en cause le rôle du contrôle d'Etat. Il convient donc de responsabiliser les contrôleurs. La fonction de contrôleur d'Etat, à terme, devra nécessairement être redéfinie.

M. Alain Pichon . - La question que pose Madame Cerisier-Ben Guigua est très intéressante. Je demeure relativement optimiste quant à la formule de la cotutelle du futur EPIC. Je n'ai pas le sentiment que l'insertion d'un troisième acteur ministériel soit la meilleure solution. Je crois, qu'en ce domaine, l'Etat s'inspire très largement de l'Agence française pour le développement qui dispose de quatre tutelles ! Si cette solution devait être appliquée à Campus France, la constitution d'une « cellule de coordination » me semble absolument indispensable. Je ne crois aucunement à la solution du « chef de filat », si je puis m'exprimer ainsi.

M. Jean Arthuis, président .  Ne conviendrait-il pas finalement que Matignon soit la tutelle directe du futur EPIC ?

François Decoster . Monsieur le Président, le cabinet du Premier ministre a très clairement exprimé sa préférence pour le maintien de la double tutelle pour toutes les raisons qui viennent d'être évoquées. Il est possible, en revanche, que d'autres ministères soient représentés au sein du Conseil d'administration.

M. Dominique Hénault, directeur général de l'association EGIDE .  Depuis la loi de juillet dernier, l'esprit dans lequel nous travaillons est excellent et il est tourné vers l'action. L'idée d'un secrétariat commun est une proposition sur laquelle nous nous penchons pour préparer les étapes de constitution du nouvel opérateur et l'optimisation du suivi de la tutelle.

M. Denis Badré .  J'ai pu constater, dans le rapport d'enquête de la Cour des comptes, la présence d'une ligne relative à l'Union européenne dans le tableau de financement d'EGIDE. Elle correspond à des fonds très modestes. S'agit-il d'une erreur ou les fonds qui lui correspondent sont-ils si faibles ? Quelles sont les relations qu'entretient EGIDE avec la Communauté européenne ?

En ce qui concerne la tutelle, je suis partisan du maintien de celle de l'Etat sur l'établissement. Mais il appartient à l'Etat de s'organiser pour identifier le canal le plus opportun, et j'ai le sentiment que le ministère chargé de l'immigration n'a rien à voir avec la mission de Campus France.

M. Dominique Hénault . S'agissant de l'Union européenne, des opérations de jumelage ont été organisées par le passé. Elles n'ont désormais plus cours, Monsieur le Président. Nous n'avons plus d'opérations de ce type. A ce jour, nous n'envisageons pas de les relancer le jour où Campus France sera formellement créé.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial . Il est heureux que cette audition ait été organisée : elle a notablement permis d'améliorer, semble-t-il, l'information réciproque des administrations. J'ai remarqué que le CNOUS n'était pas informé du détail des intentions des pouvoirs publics au sujet d'EGIDE. Je me réjouis que cette information lui soit parvenue ici...

M. Jean Arthuis, président .  En effet. Je crois que nous arrivons au terme de cette audition de suivi. Le Parlement a donc été activateur de cohérence et d'information mutuelle : les ministères se concertent, les opérateurs disposent d'une réelle feuille de route et les tutelles cessent d'être évanescentes... Nous n'avons qu'un voeu, c'est d'avancer et de progresser : j'espère que cette audition y aura contribué. Les rapporteurs spéciaux continueront d'exercer une pression positive pour que la réforme vive !

Je remercie chacun des participants à cette réunion, tout particulièrement le Président Pichon, qui s'apprête à prendre sa retraite. Monsieur le président de la quatrième chambre, je vous exprime toute notre gratitude : nous avons toujours apprécié vos rapports structurés et clairs, qui allaient à l'essentiel. Grâce à vous, nos missions de contrôle de l'action gouvernementale et d'évaluation des politiques publiques ont pris tout leur sens.

Enfin, si mes collègues de la commission des finances n'y voient pas d'objection, je leur propose de diffuser le rapport d'enquête de la Cour des comptes, sous la forme d'un rapport d'information.

M. Edmond Hervé . Pourra-t-on y joindre les remarques écrites du directeur du CNOUS ?

M. Alain Pichon . - La procédure habituelle consiste à communiquer le pré-rapport aux administrations et à tenir compte de leurs remarques pour la rédaction du rapport définitif. La réponse du CNOUS s'appliquait donc au pré-rapport et non au rapport définitif, qui tient compte de cette réponse. Pour l'avenir, on pourrait envisager, comme pour le rapport public annuel, que la Cour des comptes adresse aux administrations concernées le rapport définitif et que leurs observations sur ce document lui soient annexées. C'est une suggestion dont je ferai part au Premier Président de la Cour.

M. Jean Arthuis, président .  Le rapport d'enquête définitif de la Cour des comptes sera donc publié.

M. Edmond Hervé . - Encore un mot, Monsieur le Président, si vous le permettez.

M. Jean Arthuis, président .  Bien sûr !

M. Edmond Hervé . - Je trouve singulier que l'Etat insiste sur la coordination, qui est une nécessité, alors que l'on constate que des administrations comme celles que nous venons d'entendre font une application aussi divergente des principes que nous adoptons. Ces différences sont coûteuses, nous devons nous en préoccuper. Ensuite, lorsque nous constatons que le ministère chargé de l'immigration cherche à s'immiscer dans la politique d'accueil des étudiants étrangers, je crois que notre débat ne doit pas être seulement institutionnel, mais d'ordre philosophique.

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