(2) Entre les hauts salaires et le reste du salariat

Enfin, une différenciation des destinées salariales est intervenue entre les salaires les mieux payés et le reste du salariat .

La considération de la dynamique des salaires des 1 % des salariés les mieux rémunérés montre que ceux-ci ont bénéficié d'une croissance de leurs salaires particulièrement élevée entre 1996 et 2001, le millième des salariés du haut de la distribution étant plus particulièrement favorisé.

TAUX DE CROISSANCE ANNUELS MOYENS DES QUANTILES DE SALAIRES,
AU SEIN DU DERNIER DÉCILE

Source : Rapport sur « le partage de la valeur ajoutée, partage des profits et écarts de rémunérations en France », de M. Jean-Philippe Cotis. Mai 2009.

Au total, quand le centième des salaires du haut de l'échelle recevait 5,5 % de la masse salariale en 1998, c'est près de 6,6 % qui leur étaient attribués en 2006 (1,1 point de gain de masse salariale).

PART DES SALAIRES SUPÉRIEURS AU 99 ÈME CENTILE
DANS LA MASSE SALARIALE TOTALE

Source : Rapport sur « le partage de la valeur ajoutée, partage des profits et écarts de rémunérations en France », de M. Jean-Philippe Cotis. Mai 2009.

Si la situation des très hauts salaires a ainsi nettement décroché par le haut, d'autres phénomènes contribuent à engendrer la perception d'inégalités croissantes.

(3) Selon la qualité de la position dans l'emploi

Si on délaisse le champ des salariés à temps plein qui, conventionnellement, sert le plus souvent dans les études portant sur les salaires, pour tenir compte des salaires perçus par l'ensemble des salariés en tenant compte de leur durée réelle d'emploi 19 ( * ) , on observe que le revenu salarial 20 ( * ) a progressé beaucoup moins que le salaire moyen par tête à temps complet.

MÉDIANES DU SALAIRE ANNUEL NET D'UN TEMPS COMPLET ET DU REVENU SALARIAL, EN EUROS CONSTANTS

Source : Insee, DADS séries longues et DADS exploitation au 1/25. Rapport sur « le partage de la valeur ajoutée, partage des profits et écarts de rémunérations en France », de M. Jean-Philippe Cotis. Mai 2009.

Le revenu salarial, à l'inverse du salaire moyen, a stagné entre 1976 et 1996. Il n'a vraiment augmenté qu'à la fin des années 90 (période de forte croissance économique et de « normalisation » de la situation d'emploi des salariés). Mais, au total quand le salaire moyen par tête médian est à 120 en 2006 (base 100 en 1976) le revenu salarial médian n'est qu'à 109.

En dehors même de toute législation impliquant une baisse de la durée du travail (sinon celle sur le temps partiel) un processus de diminution des jours de travail rémunérés s'est déroulé sous l'effet de l'augmentation de la place des formes d'emplois dites atypiques et de le persistance du chômage.

NOMBRE MOYEN DE JOURS ANNUELLEMENT RÉMUNÉRÉS
DES SALARIÉS DU SECTEUR PRIVÉ

Source : Insee

Le nombre moyen de jours rémunérés qui était de 285 en 1976 est tombé à 260 en 2000 soit un recul de près de 9 % en lien avec la progression des formules de sous-emploi dont celle des emplois dits « atypiques ».

Ces emplois sont passés de 5,5 à 12 % du total.

PART DES FORMES ATYPIQUES D'EMPLOI DANS L'EMPLOI TOTAL

Source : Insee

Outre les effets de ce processus sur la position de négociation des salariés dans les discussions de tout niveau conduisant à la fixation des salaires, la propagation des formes d'emplois pouvant comporter des durées d'emploi réduites, à quoi il faut ajouter les effets du temps partiel et du chômage, pèse sur les salaires réellement perçus par les personnes en emploi.

Finalement, derrière les situations moyennes se dissimule une segmentation du marché du travail avec des situations très contrastées .

De ce point de vue, même si les inégalités de revenu salarial n'ont, pas plus que les inégalités de salaire moyen , progressé, elles sont d'un niveau qui reste très élevé.

DISTRIBUTION DU REVENU SALARIAL NET DU SECTEUR PRIVÉ

Source : Insee, DADS, exploitation au 1/25 ème

L'écart entre un cadre à temps plein et un non-qualifié à temps partiel ou un stagiaire est dans une proportion de l'ordre de 25 à 1.

Ce phénomène peut être considéré comme durable. En dix ans, entre 1996 et 2006, 38,6 % de ceux qui relevaient des 20 % disposant du revenu salarial le plus faible en début de période sont dans la même situation à son terme.

Par ailleurs, s'il existe une assez forte dispersion des trajectoires salariales avec, en 2005 par exemple, pour un quart des salariés perdant plus de 540 €, la moitié qui ont enregistré un gain de plus de 400 €, il semble exister quelques pesanteurs structurelles qui condamnent à la pauvreté salariale certaines catégories de la population.

Ainsi, ce sont plutôt les femmes, les employés et les ouvriers qui subissent des évolutions salariales négatives.

De même, si on a observé que le partage global de la valeur ajoutée varie selon les caractéristiques des entreprises, il faut ajouter que celles-ci influencent également les variations de la situation salariale des employés , qui peut être d'ailleurs souvent « plus avantageuse » dans les entreprises où le partage de la valeur ajoutée ressort comme apparemment peu favorable aux salariés.


* 19 Le raisonnement sur le salaire par tête s'appuie sur une référence (la masse salariale divisée par un nombre d'emplois en équivalent temps plein) qui n'est pas la seule référence d'emploi et le devient d'autant moins que les emplois dits atypiques se diversifient.

* 20 A la différence du salaire moyen par tête, le revenu salarial exclut l'épargne salariale et, surtout, il est corrigé de la durée effective d'emploi.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page