2. La population ne semble pas encore totalement acquise au développement touristique

La question de l'adhésion de la population au développement touristique est revenue systématiquement au cours des travaux de votre rapporteur. La question identitaire a été clairement identifiée comme un frein au développement touristique.

La population antillaise a en effet longtemps été réfractaire au développement du tourisme . Pour reprendre une formule souvent utilisée, le service a longtemps été assimilé à la servitude .

Par ailleurs, comme l'a souligné notre collègue Serge Larcher lors de son audition par votre rapporteur, les Antillais avaient le sentiment de ne pas profiter du développement touristique.

Selon les termes de M. Serge Tsygalnitzky, directeur général d'Air Caraïbes, le tourisme antillais a donc longtemps été « honteux ».

Votre rapporteur estime que les élites , les intellectuels et les élus locaux, portent une part de responsabilité en la matière : comme l'a ainsi souligné M. Jocelyn Jalton, président du Conseil économique et social régional (CESR) de Guadeloupe, lors de son audition, les élites guadeloupéennes ont toujours abordé, dans leurs discours, la question du tourisme sous un angle négatif.

L'adhésion de la population est pourtant une condition indispensable au développement du tourisme .

Comme le soulignait M. Miguel Laventure dans son rapport de 1997, « l'adhésion des populations est indispensable pour assurer un accueil agréable des visiteurs, faire naître chez eux le désir de revenir et en faire les ambassadeurs de la destination » 30 ( * ) . Mme Cécile Felzines estimait quant à elle en 2007 que « de nouvelles perspectives de développement du tourisme dans l'outre-mer ne pourront s'élaborer sans l'adhésion de la population » 31 ( * ) .

Comment espérer en effet devenir des destinations touristiques de premier ordre quand existe une « agressivité latente » de la population à l'égard des touristes, comme l'a estimé Mme Stéphanie Bessière, directrice du tourisme de la Collectivité de Saint-Martin, lors de son audition par votre rapporteur ?

Quelle est la situation aujourd'hui ? De réels progrès ont été réalisés . Cependant, si de nombreuses personnalités rencontrées par votre rapporteur estiment que l'adhésion de la population antillaise au tourisme est acquise, de non moins nombreuses relèvent que beaucoup est encore à faire en la matière .

Des campagnes de communication ont ainsi été lancées afin de sensibiliser la population à l'intérêt du développement du tourisme, à l'exemple de la campagne « Bâtisseurs de Paradis » lancée en 2010 en Martinique : cette campagne visait notamment à conscientiser la population de l'importance de protéger et de mettre en valeur le patrimoine de l'île.

Votre rapporteur estime que ce type de campagnes doit être poursuivi, en associant les différents acteurs concernés : une véritable pédagogie du développement touristique est en effet nécessaire , tant dans les médias que dans le cadre scolaire.

Mme Cécile Felzines résumait l'équilibre qui doit s'établir entre les touristes et la population par la formule suivante, que votre rapporteur reprend à son compte : « accueillir sans se faire envahir, offrir sans se sentir dépossédé » 32 ( * ) .

Votre rapporteur souligne que l'orientation exclusive du tourisme antillais sur la métropole a certainement contribué à alimenter une vision « coloniale » du tourisme. Les propositions que votre rapporteur formulera afin d'ouvrir les Antilles à d'autres marchés, notamment européens et nord-américains, pourraient permettre d'atténuer cette vision.

Votre rapporteur estime, par ailleurs, que la formation aux langues étrangères peut jouer un rôle positif en la matière : apprendre une langue étrangère permet en effet de s'ouvrir aux autres cultures. Il serait donc utile de renforcer le nombre d'heures d'enseignement des langues étrangères dans les écoles, les collèges et les lycées de ces deux départements : l'objectif doit être de faire des Antillais de parfaits bilingues . Cette idée a été notamment évoquée par M. Jean-Jacques Jérémie, président du Conseil de la culture, de l'éducation et de l'environnement (CCEE) de Guadeloupe lors de son audition par votre rapporteur. Par capillarité, la sensibilisation des enfants devrait ainsi permettre de sensibiliser une partie importante de la population.

Recommandation n° 2 : renforcer les actions de sensibilisation de la population à l'intérêt de l'activité touristique, notamment en accroissant la place des langues étrangères dans le cadre scolaire.


* 30 « Le tourisme, facteur de développement de l'outre-mer français », Ibid., p. 7.

* 31 « Le tourisme, perspective d'avenir de l'outre-mer français », Ibid., p. 39.

* 32 « Le tourisme, perspective d'avenir de l'outre-mer français », Ibid., p. 39.

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