Rapport d'information n° 691 (2010-2011) de M. Richard YUNG , fait au nom de la commission des affaires européennes, déposé le 29 juin 2011

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N° 691

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2010-2011

Enregistré à la Présidence du Sénat le 29 juin 2011

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des affaires européennes (1) sur le Fonds social européen ,

Par M. Richard YUNG,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Bizet , président ; MM. Denis Badré, Pierre Bernard-Reymond, Michel Billout, Jacques Blanc, Jean François-Poncet, Aymeri de Montesquiou, Roland Ries, Simon Sutour , vice-présidents ; Mmes Bernadette Bourzai, Marie-Thérèse Hermange , secrétaires ; MM. Robert Badinter, Jean-Michel Baylet, Didier Boulaud, Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. Gérard César, Christian Cointat, Mme Roselle Cros, M. Philippe Darniche, Mme Annie David, MM. Robert del Picchia, Bernard Frimat, Yann Gaillard, Charles Gautier, Jean-François Humbert, Mme Fabienne Keller, MM. Serge Lagauche, Jean-René Lecerf, François Marc, Mmes Colette Mélot, Monique Papon, MM. Hugues Portelli, Yves Pozzo di Borgo, Josselin de Rohan, Mme Catherine Tasca, M. Richard Yung.

INTRODUCTION

Le FSE au sein de la politique de cohésion

Créé en 1957 par le Traité de Rome, le Fonds social européen (FSE) est actuellement le principal levier financier de l'Union européenne pour la promotion de l'emploi.

A l'origine, il était destiné à accompagner la mobilité géographique et professionnelle des travailleurs. Face à la montée du chômage, son rôle a évolué et il constitue maintenant le principal pilier de la Stratégie européenne pour l'emploi (SEE) qui est elle-même une des expressions de la Politique de Cohésion.

Avec le FEDER et le Fonds de cohésion, le FSE est l'un des trois fonds structurels de l'Union européenne dont la mission consiste à mettre en oeuvre la Politique de Cohésion, c'est-à-dire à réduire les écarts de développement et à renforcer la cohésion économique et sociale entre pays et régions de l'Union. Pour ce faire, le FSE reçoit environ 8 % du budget total de l'Union européenne et il investit plus de dix milliards d'euros par an dans l'ensemble des États membres (75 milliards d'euros pour la période 2007-2013, dont presque 5 pour la France).

Pour mettre en oeuvre la SEE, il apporte un concours financier aux actions et aux dispositifs mis en place dans les États membres dans plusieurs domaines : l'adaptation des travailleurs et des entreprises, l'accès à l'emploi des demandeurs d'emploi, des personnes inactives, des femmes et des migrants, l'intégration sociale des personnes défavorisées et la lutte contre la discrimination sur le marché du travail, l'amélioration des compétences, la réforme des systèmes éducatifs et la mise en réseau des établissements d'enseignement supérieur, des centres de recherche et de technologie et des entreprises.

L'attribution des crédits par le FSE est régie par le principe du cofinancement, ce qui signifie que le FSE ne finance jamais seul un projet (le FSE finance en moyenne 45,76 % du projet). Les crédits ne peuvent pas se substituer aux efforts financiers des États membres, que ces efforts soient réalisés par les États eux-mêmes ou les collectivités locales ou des personnes morales de droit privé. Ainsi le FSE cofinance des projets locaux, régionaux et nationaux. Les projets sélectionnés émanent aussi bien du secteur public que du secteur privé. Les budgets de ces projets sont abondés par le FSE, par l'État membre (État central ou collectivité locale) et parfois aussi par des fonds privés.

Ce sont les objectifs de la stratégie globale de l'Union européenne en matière économique, qui déterminent les priorités du FSE. La plupart des instruments financiers et politiques de l'UE sont conçus pour soutenir la stratégie « UE 2020 » qui succède à l'Agenda de Lisbonne. La Politique de Cohésion en découle et utilise les ressources financières des fonds structurels et notamment celles du FSE.

Quant à la Stratégie européenne pour l'emploi (SEE), elle offre aux États membres un cadre de coordination pour définir les objectifs et les priorités en matière d'emploi. Ces priorités communes, une fois définies, sont reprises dans les lignes directrices pour l'emploi et sont intégrés aux programmes d'action nationaux préparés par chaque État membre. Ces programmes portent le nom de « programme opérationnel » (PO).

Les financements du FSE sont ventilés par les États membres en fonction de leurs programmes d'action nationaux mais aussi de leurs cadres de référence stratégiques nationaux qui définissent les grandes priorités de l'État membre dans l'allocation des fonds structurels qui lui sont accordés.

L'Agenda social européen joue également un rôle dans la définition des priorités d'allocation des ressources du FSE (moderniser le marché du travail tout en protégeant les personnes les plus vulnérables dans nos sociétés).

La stratégie du FSE

Le FSE est géré selon des programmes cycliques de sept ans. Sa stratégie négociée entre les États membres définit les objectifs de ses financements. Les objectifs du FSE sont la « Compétitivité régionale et l'emploi » et la « Convergence » (stimuler la croissance et l'emploi dans les régions les moins développées) pour la période de programmation 2007-2013.

Dans le cadre des objectifs « Convergence » et « Compétitivité régionale et emploi », le règlement du FSE indique les quatre piliers ou axes où il peut intervenir.

Le premier pilier

Le premier pilier concerne l'augmentation de la capacité d'adaptation des travailleurs, des entreprises et des chefs d'entreprise, afin d'améliorer l'anticipation et la gestion positive des changements économiques.

Le second pilier

Le second pilier est consacré à l'emploi et permet au FSE de soutenir les actions des États membres en vue d'améliorer l'accès à l'emploi et l'insertion durable sur le marché du travail des demandeurs d'emploi et des personnes inactives. Il lui permet aussi de soutenir les actions des États en vue de prévenir le chômage de longue durée et le chômage des jeunes, d'encourager le vieillissement actif et de prolonger la vie active ainsi que d'accroître la participation au marché du travail.

Le troisième pilier

Le troisième pilier est consacré au renforcement de l'insertion sociale des personnes défavorisées en vue de leur intégration durable dans la vie active ainsi qu'à la lutte contre toute les formes de discrimination sur le marché du travail.

Le quatrième pilier

Le quatrième pilier est le renforcement du capital humain et il vise à adapter l'éducation et la formation aux besoins du marché du travail.

Et pour mémoire, il convient de rappeler qu'il existe un cinquième pilier qui est constitué des crédits d'assistance technique utilisables pour la gestion administrative des projets FSE.

La mise en oeuvre du FSE

Les Programmes opérationnels (PO), d'une durée de sept ans, sont planifiés par les États membres et leurs régions en partenariat avec la Commission européenne ; les PO décrivent les champs d'activité qui seront financés. Ces champs peuvent être géographiques ou thématiques. Les États membres désignent les organismes nationaux de gestion du FSE qui sont chargés de sélectionner les projets, de redistribuer les fonds et d'évaluer la progression et les résultats des projets. Des autorités de certification et d'audit sont également désignées pour contrôler et vérifier que les dépenses sont conformes au règlement du FSE.

En France, le Ministère de l'emploi est chargé de la gestion du FSE et au niveau régional, la gestion des crédits FSE est dévolue aux préfets de région. Les projets sélectionnés émanent du secteur public et du secteur privé. Parmi les acteurs publics, on compte Pôle Emploi, l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFTA) ou les groupements d'établissements publics locaux d'enseignement (GRETA) ainsi que les collectivités locales. Le secteur privé est représenté par les syndicats (CGPME), par les entreprises elles-mêmes qui mettent en oeuvre des actions de formation, par les organismes consulaires et par les associations.

I. LE FSE PERMET LA MISE EN oeUVRE D'UNE POLITIQUE DE PROXIMITÉ

A. LE FSE : DE LA POLITIQUE SECTORIELLE À L'INVESTISSEMENT DANS LA PERSONNE

Comme le FSE, en tant que fonds structurel, participe à la politique de cohésion, il a pour objectif de réduire les écarts de richesse et de niveau de vie entre les États membres, mais il doit se consacrer à l'emploi et sa véritable devise est : « investir dans la personne ». C'est en ce sens qu'il est devenu un outil de proximité dans la politique de l'emploi et de la formation. L'échelon local est donc privilégié dans l'exécution pratique sur le terrain. Comme il a été dit, les programmes opérationnels sont mis en oeuvre par un large éventail d'organismes des secteurs public et privé : administrations nationales et régionales, collectivités locales, établissements d'enseignement et de formation, organisations non gouvernementales et secteur associatif. À ces acteurs essentiels, il faut ajouter les partenaires sociaux (syndicats, comités d'entreprises, chambres professionnelles, etc.) et les associations, particulièrement pour les actions auprès des plus démunis.

À ses débuts, le FSE servait à compenser les pertes d'emploi et il aidait les travailleurs des secteurs en restructuration en leur fournissant des allocations de reconversion. Il devait aussi favoriser la créativité et il aidait à la réinstallation des personnes ayant quitté leur région pour chercher un emploi ailleurs dans l'espace européen.

Dans les années 50 et 60, l'économie des trente glorieuses battant son plein et le chômage étant faible, le FSE a surtout bénéficié à l'Italie dont 9 millions de travailleurs ont quitté le Sud pour trouver un emploi. Au même moment, en Allemagne, par exemple, le FSE servait à aider, en les formant à d'autres tâches, les personnes victimes d'un accident du travail.

Le FSE a été réformé en 1971 pour permettre de cibler de nouveaux publics et son budget a été augmenté. Il s'agissait d'accompagner l'exode rural : les agriculteurs et les ouvriers agricoles abandonnant le secteur ont pu en bénéficier ; puis, en 1975, le FSE s'est ouvert au secteur de la confection textile.

À la fin des années 70, résorber le chômage des jeunes, qui s'était considérablement accru après la crise due aux chocs pétroliers, est devenu une priorité du FSE. Les femmes devenant de plus en plus nombreuses sur le marché du travail, le FSE a également commencé à les aider, soit qu'elles aient perdu leur travail, soit qu'elles voulussent entrer pour la première fois sur le marché du travail. Puis, le FSE a commencé à cibler d'autres groupes : les handicapés et les seniors.

Au fur et à mesure que le FSE passait d'une politique d'intervention sectorielle vers une politique ciblée sur des catégories de personnes au sein de la société, il s'est trouvé confronté à la nécessité de travailler avec un plus grand nombre de partenaires et surtout avec des partenaires qui n'étaient plus toujours des partenaires issus de l'administration d'État ou de l'administration locale. Cela a entraîné un changement majeur dans le fonctionnement du FSE. Jusqu'alors, les projets des États membres étaient remboursés après leur mise en oeuvre ; cette pratique a été abandonnée au profit de la définition de priorités auxquelles étaient attachés des crédits.

À partir des années 80, le déclin des industries traditionnelles européennes (acier, constructions navales, etc.) et le développement des services issus des technologies nouvelles, ont rendu nécessaire la formation de travailleurs très qualifiés plus nombreux. La formation professionnelle et l'utilisation des nouvelles technologies sont devenues de nouvelles priorités du FSE. Le financement par le FSE s'adresse alors aux jeunes ayant peu de perspectives d'emploi en raison d'un manque de formation professionnelle ou d'une formation inadéquate ainsi qu'aux chômeurs de longue durée et aux jeunes en décrochage scolaire. Le FSE continuait aussi à aider les femmes à entrer sur le marché du travail.

En 1983, il a été décidé que le FSE privilégierait les régions en difficulté. En 1988, le FSE a donc été réformé pour mieux aider les régions les plus en retard. Ainsi, à la fin des années 80, plus de la moitié du financement était alloué aux régions et aux pays les plus pauvres de l'Union européenne (Andalousie, Iles Canaries, départements français d'Outre-mer, Irlande, Mezzogiorno, Portugal).

En 1988, une autre réforme a consisté à passer de projets menés dans un contexte national à un effort pluriannuel programmé sur une base convenue en partenariat avec les États membres et la Commission. Cette réforme devait permettre de concentrer les efforts là où les besoins étaient les plus grands (régions ou groupes de travailleurs).

À partir des années 90, la hausse du chômage, la mondialisation et le passage à une société de l'information a contraint l'Union européenne à adopter une stratégie pour l'emploi (1994). Le FSE, en conséquence, a déplacé sa priorité du chômage à l'emploi et s'est consacré plus particulièrement aux personnes actives afin de les aider à conserver leur emploi et à progresser dans leur carrière.

La formation, la création d'emplois, l'orientation professionnelle et le conseil devenaient le coeur de l'action du FSE, sans pour autant que le FSE se détourne de la formation des jeunes, des chômeurs et de toutes les personnes exclues du marché du travail et sans que le FSE puisse non plus abandonner les seniors de plus en plus nombreux sous l'effet du vieillissement général de la population européenne.

En 2000, l'Union européenne a adopté la stratégie de Lisbonne : faire de l'Europe une économie de la connaissance la plus avancée d'ici 2010. Il s'agissait également d'atteindre un taux d'emploi global de 70 %, un taux d'emploi des femmes supérieur à 60 %, et un taux d'emploi des seniors de 50 %.

À partir de 2000 également, le FSE a pris en compte la nécessité de lutter contre le sous-emploi des femmes et la discrimination sous toutes ses formes.

Pour la période 2007-2013 en cours, le FSE doit prioritairement renforcer l'adaptabilité des travailleurs et des entreprises et améliorer l'anticipation des mutations économiques, sans pour autant délaisser ses autres missions.

Enfin, dans le cadre de la stratégie UE 2020, trois axes devront être privilégiés. Le premier axe s'intitule « De nouvelles compétences pour de nouveaux emplois », et il concerne la mutation du marché du travail sous l'effet des nouvelles technologies ainsi que le retard de l'Europe dans le domaine scientifique. Le deuxième est la lutte contre la pauvreté et le troisième axe est l'accent qu'il convient de mettre sur la jeunesse qui entre dans la vie active.

Force est de constater que le FSE cumule un nombre important de missions liées toutes à l'emploi et à l'employabilité, mais que son action sur le terrain est devenue plus spécifiquement centrée sur la personne en difficulté et moins sur les mutations du marché du travail. À ce titre, le FSE est devenu un outil de proximité. Son utilité est reconnue par tous, mais on déplore les dispersions de ses moyens. Si le FSE remplit ses missions, il le fait en complément de la politique de l'emploi sans jamais apporter sa dynamique propre. Mais n'est-ce pas sa raison d'être ?

B. LA PART RELATIVE DU FSE DANS LA POLITIQUE DE L'EMPLOI

La part du FSE représente en France une enveloppe modeste de l'ordre de 5 % du total des dépenses générales d'emploi et de formation, et le FSE se doit, à travers le PO et les actions qui en découlent, d'assurer une contribution significative et d'apporter une réelle valeur ajoutée aux dispositifs nationaux existants. Il en ressort pour les actions FSE l'obligation d'être plus efficaces, plus souples et plus proches des publics visés. On comprend dans ces conditions que l'action du FSE ne s'exerce qu'à la marge et que, pour être efficace, cette action doit prendre la forme d'une politique d'extrême proximité. Il est donc souhaitable que cette action soit menée par des institutions et des acteurs proches des publics cibles. Il s'agit d'ailleurs d'acteurs locaux et souvent d'associations.

C'est pourquoi il n'est pas étonnant que la plupart de nos interlocuteurs se soient ouverts sur les difficultés de la mise en oeuvre de l'axe 1 (accompagnement des restructurations économiques). En effet, il est apparu difficile de toucher et de convaincre les entreprises qui hésitent à se lancer dans des programmes financés par le FSE à cause de la lourdeur de la préparation des dossiers et de la sévérité des contrôles. En outre, dans ce domaine d'action précis, les projets FSE se trouvent en concurrence directe avec la politique de formation professionnelle qui est plus facile à mettre en oeuvre et qui dispose d'un budget annuel dépassant les 24 milliards d'euros. De cet état de fait découle la constatation qui a pu être faite que l'axe 3 fonctionne mieux que les trois autres axes.

C. LES ACTIONS FSE TIRENT LEUR VALEUR AJOUTÉE DE LA JUSTESSE DES CIBLES VISÉES

Désireux d'apporter la plus grande attention à la personne, les partenaires français ont fait porter le choix sur le ciblage des publics et sur la concentration des dépenses au profit des dispositifs les plus pertinents, tout en répondant aux priorités fixés par les quatre piliers ou axes du FSE.

L'Axe 1 contribue à répondre aux exigences d'accompagnement de la création d'emplois et à celles liées aux mutations économiques en s'adressant d'abord aux entreprises et aux salariés. Les choix faits ont été d'anticiper et d'accompagner les mutations économiques de territoires fragilisés, de répondre au défi du reclassement et de la reconversion, de développer la formation tout au long de la vie (de façon organisée, notamment autour de la gestion prévisionnelle de l'emploi et des compétences, de la validation des acquis de l'expérience (VAE), mais aussi le développement de l'alternance -notamment en direction du public handicapé -, le soutien à la création d'activités). Deux publics sont spécifiquement visés : les travailleurs seniors et les publics de bas niveau de qualification, plus exposés aux conséquences négatives des mutations économiques.

L'Axe 2 a pour objet d'améliorer l'accès des demandeurs d'emploi à des emplois autant que possible durables ; il s'agit de soutenir l'action des services publics de l'emploi, l'orientation, et la coordination des acteurs, en renforçant la formation des demandeurs d'emploi. Une vigilance particulière entoure les actions mises en oeuvre par les conseils régionaux, et plus particulièrement celles destinées aux publics à faible niveau de qualification. Cet axe concerne aussi l'intégration professionnelle des travailleurs migrants. Enfin, une mesure spécifique concerne l'amélioration et le développement de l'accès et de la participation durable des femmes au marché du travail.

L'Axe 3 a pour objet de contribuer à lutter contre l'exclusion sociale et contre les discriminations. Il a été choisi de soutenir les entreprises d'insertion, les PLIE (Plan local pour l'insertion et l'emploi) et les PDI (Plan départemental d'insertion) des conseils généraux, mais en ciblant l'aide sur les actions qui favorisent l'objectif d'insertion économique et la lutte contre les discriminations qui visent les handicapés. Des actions spécifiques concernent des publics confrontés à des difficultés particulières, comme par exemple des personnes sous main de justice. Il s'agit aussi de lutter contre le décrochage scolaire, de promouvoir la diversité, et d'agir pour les habitants des ZUS confrontés à des difficultés spécifiques à leur environnement.

L'Axe 4 soutient toutes les actions d'investissement en capital humain, celles de mise en réseau, les projets d'innovation et les actions transnationales. Cet axe 4 a vocation à développer des projets nouveaux et parfois exemplaires qui ne sont pas toujours centrés sur des publics spécifiques, mais qui agissent sur des processus d'ouverture, d'échange, d'expérimentation, d'introduction de nouvelles technologies dans les processus de formation et d'intermédiation vers l'emploi. Il permet aussi d'accompagner des réseaux orientés vers le microcrédit ou l'appui aux créateurs d'activités.

En fonction de ces quatre axes, il s'agit de gérer au mieux, pendant sept ans, les 4,495 milliards d'euros mis à disposition par le FSE pour la France, et de les utiliser comme marge de manoeuvre supplémentaire pour favoriser l'emploi. On fera remarquer que pour avoir une notion exacte des crédits consacrés à l'emploi sous l'impulsion du FSE, il convient d'ajouter, selon le principe du cofinancement, aux 5 milliards de crédits FSE, une somme à peu près équivalente dont 4/5 proviennent des budgets publics et 1/5 de fonds privés.

II. LA MISE EN oeUVRE DU FSE EN FRANCE

Il convient de rappeler qu'en réponse à la crise économique et financière subie par l'Europe depuis 2008, la Commission européenne a mis en place un « plan européen pour la relance économique », invitant les États membres à adapter si nécessaire leurs « programmes opérationnels » pour réagir aux effets négatifs de la crise sur l'emploi. Toutefois, en France, le programme opérationnel national construit pour pallier les faiblesses structurelles du marché de l'emploi et de la formation ne requérait pas de modification radicale, mais seulement quelques adaptations à la marge.

Le Comité national de suivi (CNS) a renforcé la priorité d'adaptation des travailleurs et des entreprises aux mutations économiques ainsi que la priorité de soutien des formations qualifiantes pour les demandeurs d'emploi et pour les personnes les plus vulnérables et notamment les bénéficiaires du RSA. Ces modifications ont donné lieu à des transferts de crédits au sein de l'enveloppe française du FSE.

A. LE PROGRAMME OPÉRATIONNEL FRANÇAIS

Le programme opérationnel français 2007-2013 met en oeuvre une stratégie de moyen terme pour répondre aux problèmes structurels de la relation économie-emploi-formation, mais on y accroche depuis 2009 une stratégie de court terme pour pallier les conséquences des événements économiques récents en offrant tout l'éventail des instruments d'appui aux politiques de l'emploi, de la formation et de la lutte contre l'exclusion sociale.

1. L'activité et l'emploi

Le PO est parti de deux constatations : un taux de chômage élevé en France depuis 1993, c'est-à-dire presque toujours à deux chiffres sauf en 2006 et 2007, et un taux d'emploi de 63,8 % (de la population en âge de travailler - 15 à 64 ans) inférieur de 2,5 % à la moyenne européenne.

2. L'éducation et la formation des actifs

Autre constat : en matière d'éducation et de formation tout au long de la vie, la situation française se caractérise par un taux de participation des personnes âgées de 25 à 64 ans de 7,5 %, soit 2,5 % de moins que la moyenne européenne.

3. L'exclusion sociale et les discriminations

Le taux de chômage persistant s'accompagne d'un chômage de longue durée beaucoup plus sensible en France qu'ailleurs en Europe, d'où la nécessité de renforcer l'offre d'insertion, car le chômage de longue durée engendre le décrochage et l'exclusion sociale qui s'accompagne de discriminations selon l'âge, le genre, le handicap et l'origine ethnique.

4. La modernisation des structures et systèmes de l'emploi, de la formation et de l'insertion

Le PO a aussi pris en considération la modernisation des systèmes de formation et d'emploi par les nouvelles technologies, l'amélioration du management et l'établissement de nouveaux partenariats.

5. Un PO français en adéquation avec la stratégie de Lisbonne

Le PO français est établi en parfaite adéquation avec la stratégie de Lisbonne et avec la stratégie européenne de l'emploi, lesquelles mettent l'accent sur la nécessité d'obtenir la croissance par l'innovation, la création d'entreprises et l'accès à la formation et à l'emploi du plus grand nombre, y compris les publics victimes de grandes difficultés sociales.

B. UNE MOBILISATION DES CREDITS PLUS DYNAMIQUE DEPUIS 2008

Dans le contexte de ralentissement économique que nous connaissons, les crédits du FSE ont été mobilisés de manière plus dynamique, en particulier grâce à la réaffectation des crédits non consommés (car jusqu'en 2008, on notait chaque année le même niveau de sous-programmation et donc de sous-consommation qui caractérise l'emploi des fonds FSE depuis sa création).

Cette réaffectation mise en place par le délégué général à l'emploi est appelée « programmation dynamique » : il s'agit de la possibilité de reprendre les crédits attribués à une région qui ne les a pas encore utilisés pour les attribuer à une autre qui a consommé les siens. Cette programmation n'est possible que parce que la gestion des crédits FSE reste en France une politique nationale.

À partir de fin 2009, grâce à cette nouvelle politique, on assiste à un phénomène de rattrapage significatif. Ainsi, les efforts conjoints des autorités de gestion et de certification ont permis d'atteindre le seuil de dépenses déclarées, ce qui est nouveau et atténue le reproche constant fait à la mise en oeuvre du FSE dont la lourdeur entraînerait une sous-consommation des crédits.

C. LES BÉNÉFICIAIRES DU FSE EN FRANCE EN 2009

En 2009, on compte près de 7 000 dossiers FSE et 536 783 participants (dont 282 328 femmes, soit 52,6 % du total).

Les bénéficiaires du FSE en France se répartissent de la manière suivante :

- 20 % des participants sont des actifs occupés dont 3 % sont indépendants ;

- 59 % sont des demandeurs d'emploi dont 24 % sont des chômeurs de longue durée ;

- 20 % sont des inactifs;

- 35 % sont des jeunes de 15 à 24 ans, 61 % sont concentrés dans la tranche d'âge 25-54 ans et le programme comporte 4 % de participants de plus de 55 ans ;

- 41 % des participants ont un niveau qui ne dépasse pas le premier cycle de l'enseignement secondaire, jusqu'à la classe de troisième (dont 50 % de femmes) ; 35 % ont le niveau de la classe de terminale de lycée ou supérieur (dont presque 58 % de femmes) - ce pourcentage, relativement élevé, témoigne des difficultés croissantes, sur le marché du travail d'un public plus diplômé, par ailleurs plus féminisé ; 17 % relèvent du postsecondaire et 7 % de l'enseignement supérieur ;

- 60 % des participants ont une sortie positive vers un emploi ou une validation de leur formation.

Le FSE insiste sur la priorité qu'il convient d'accorder aux personnes vulnérables et on remarque qu'en France, en 2009, les bénéficiaires du FSE comptaient 2 % de migrants et 4 % d'handicapés, 21 % de bénéficiaires de minima sociaux. Toutefois, les statistiques restent incomplètes sur ce point du fait que ces rubriques facultatives et déclaratives sont mal ou peu renseignées. On constate cependant que dans une proportion significative, les opérations organisées grâce aux crédits du FSE s'adressent prioritairement à des publics en difficulté qui ont un besoin d'accompagnement personnel vers l'emploi très fort et partant, un besoin dépassant largement le seul service offert par Pôle Emploi.

D. UN RECENTRAGE SUR LES ENJEUX ESSENTIELS

Sous la pression de la crise financière et économique de 2008 et à l'invitation de la Commission, la France a recentré sa politique de mise ne oeuvre du FSE sur les enjeux essentiels.

1. Un outil de lutte contre la crise

Dans un contexte de crise, les crédits FSE servent d'accompagnement aux mesures anticrise, et la France multiplie les actions de formation pour les salariés de bas niveau de qualification et les demandeurs d'emploi.

2. Une mobilisation dynamique des crédits

Tout est mis en oeuvre afin d'éviter les crédits dormants et les dégagements d'office : des redéploiements sont engagés dès que des besoins non couverts sont détectés. Grâce à la programmation dynamique, il n'y a plus de crédits « dormants ».

3. La simplification de l'accès au FSE

Depuis 2009, tout est fait par Bruxelles pour mettre en oeuvre des mesures de simplification de la gestion et du contrôle des crédits européens : mise en place des coûts standards unitaires et des coûts forfaitaires (pour les opérations d'un montant inférieur à 50 000 €) ainsi que la forfaitisation des coûts indirects. La France a immédiatement répercuté ces réformes.

4. Une communication plus dynamique

Depuis trois ans, des plans de communication sont régulièrement organisés pour informer les acteurs concernés et les bénéficiaires potentiels. On envisage la création d'une banque de bonnes pratiques.

5. Les résultats des contrats FSE

Un changement important s'est opéré en faveur d'une culture de résultat et l'usage des crédits FSE fait désormais l'objet d'une analyse en termes d'efficacité sociale et économique, même s'il est très difficile pour certains publics de prendre en compte le seul taux de retour à l'emploi.

E. ANALYSE DE L'ANNÉE 2009

En 2009, 97,3 % des dossiers et 96,8 % des montants programmés concernent les thèmes prioritaires codifiés dans le programme opérationnel (PO) :

- 45,5 % des montants concernent le retour à l'emploi des personnes défavorisées et la lutte contre les discriminations ;

- 14,2 % concernent les institutions du marché du travail et l'accompagnement des demandeurs d'emploi et des jeunes ;

- 14,8 % des montants réalisés concernent les mesures actives et préventives sur le marché du travail, c'est-à-dire, essentiellement, les actions de formation des demandeurs d'emploi mises en oeuvre par les conseils régionaux ;

- 12 % des montants réalisés concernent la formation tout au long de la vie et l'encouragement à une participation accrue à la formation continue ;

- 4,5 % le soutien à la création d'entreprises ;

- 3,1 % des montants concernent les restructurations sectorielles et d'entreprises et les systèmes d'anticipation des changements ;

- 1,9 % des montants réalisés concernent la modernisation des systèmes de formation.

1. Axe 1 : contribuer à l'adaptation des travailleurs et des entreprises aux mutations économiques (20 % des crédits)

Les principaux organismes intermédiaires sont les conseils régionaux pour le développement et l'amélioration de la qualité de l'apprentissage et de l'alternance et les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) pour l'accès aux formations. Les organismes consulaires (chambres régionales de commerce et d'industrie ou chambres régionales des métiers et de l'artisanat) gèrent aussi des crédits FSE.

L'axe 1 concerne 139 975 participants (soit 26 % du total). Deux tiers sont des actifs occupés et un tiers sont chômeurs.

2. Axe 2 : améliorer l'accès à l'emploi des demandeurs d'emploi (35 % des crédits)

Les conseils régionaux sont les principaux intermédiaires, la loi leur reconnaissant une compétence de principe pour la mise en oeuvre des formations destinées aux demandeurs d'emploi. On dénombre 218 517 participants (soit 41 % du total). 72 % des participants sont au chômage, 7 % sont bénéficiaires des minima sociaux, 1 % sont des migrants, 3 % des handicapés, 10 % sont des personnes défavorisées.

3. Axe 3 : renforcer la cohésion sociale, favoriser l'inclusion sociale et lutter contre les discriminations (36 % des crédits)

On dénombre 162 903 participants, dont 68 % de chômeurs. 57 % sont des bénéficiaires des minima sociaux, 5 % sont des migrants, 6 % des handicapés, 25 % sont des personnes défavorisées.

4. Axe 4 : investir dans le capital humain et la mise en réseau, l'innovation et les actions transnationales (6 % des crédits)

14 754 participants bénéficient de cet axe, soit 2,6 % du total. 75 % sont des chômeurs, 7 % sont bénéficiaires des minima sociaux, 6 % sont des migrants, 5 % des handicapés et 10 % sont des personnes défavorisées.

III. ETAT DES LIEUX EN FRANCE APRES LA CRISE ET PRECONISATIONS

A. LES DÉFAUTS DU MARCHÉ DU TRAVAIL FRANÇAIS ONT ÉTÉ AGGRAVÉS PAR LA CRISE

La crise de 2008 a incité les autorités françaises à infléchir ou à recentrer certains aspects de l'utilisation des crédits du FSE.

Les crédits du FSE ont tendance à être utilisés en France en gardant à l'esprit quatre problèmes plus spécifiquement français, à savoir que la formation doit se faire tout au long de la vie, que les mutations économiques entraînent de nécessaires reclassements et transitions professionnelles, qu'il faut accompagner la création et la reprise d'entreprises et qu'il faut lutter contre l'exclusion sociale.

Cette grille d'analyse conduit aux constats et aux préconisations suivantes pour chaque problématique.

1. Les formations tout au long de la vie

Comme il a été dit, le taux de participation à la formation continue est relativement faible en France. Pour pallier cette faiblesse, les crédits du FSE doivent permettre :

- de poursuivre l'effort de formation,

- de favoriser l'individualisation des parcours de formation,

- de favoriser les formations vers de « nouveaux emplois » liés à l'après-crise et à l'évolution économique,

- de rechercher une articulation avec la réforme de la formation professionnelle.

Il reste, comme il a été dit, que la force de frappe de la formation professionnelle, telle qu'elle est organisée en France, fait concurrence à cette action du FSE.

2. La mobilité professionnelle

La mobilité professionnelle est peu développée en France : 6 % des salariés effectuent 55 % des mobilités. Les crédits du FSE devraient être destinés à cibler des actions de formation de longue durée permettant des reconversions véritables d'un métier à un autre.

3. La création et la reprise d'entreprises

La création d'entreprises se développe en France grâce au statut d'auto-entrepreneur : beaucoup de chômeurs souhaitent aujourd'hui créer une entreprise, mais les micro-entreprises, souvent créées par des auto-entrepreneurs, ne résistent pas très longtemps aux difficultés conjoncturelles. Quant à la reprise d'entreprises, elle est délicate aujourd'hui à cause de la pyramide des âges et de la difficile transmission du capital et des compétences. Partout où cela est possible, les crédits du FSE sont mobilisés pour permettre à un chômeur ou à un actif de suivre une formation qui renforce ses connaissances et ses compétences en matière de gestion et de management.

4. L'exclusion sociale

Les publics les plus éloignés du marché du travail sont aussi les plus sensibles à la conjoncture. Les bénéficiaires du RMI et du RSA ont augmenté avec la crise, et les dispositifs d'insertion ne parviennent pas aujourd'hui à proposer suffisamment de « sorties » vers l'emploi. On envisage une utilisation des crédits du FSE portant l'accent sur une approche globale de la personne et une offre d'accompagnement personnalisée et renforcée.

*

En conclusion, la politique suivie grâce aux crédits du FSE s'attaque aux faiblesses structurelles de l'emploi et de la formation en France, faiblesses que la crise actuelle tend à accentuer. Les opérations financées par le FSE soutiennent les parcours de formation et le retour à l'emploi pour les catégories les plus en difficulté. Le FSE à programmation pluriannuelle, tel qu'il est décliné en France, est adapté pour déployer des efforts dans la durée et lutter contre les insuffisances structurelles et les distorsions sociales du marché du travail.

B. POUR UN MEILLEUR USAGE DES CRÉDITS DU FSE

Les pouvoirs publics et les partenaires qui gèrent et bénéficient des crédits du FSE s'accordent pour considérer que des améliorations peuvent être apportées dans quatre directions : le pilotage, les priorités, le recentrage du FSE sur le contexte socio-économique, et l'anticipation de la mobilité professionnelle par la formation tout au long de la vie.

1. Renforcer le pilotage

Il conviendrait que l'autorité de gestion (le SGAR) anime et maintienne le lien avec les autorités de gestion déléguée (associations, collectivités territoriales, etc.) et procède à une évaluation régulière des actions engagées au fur et à mesure de leur réalisation. C'est un voeu pieux difficile à mettre en oeuvre pour plusieurs raisons.

Des liens souples et constants existent déjà dans certaines régions où il y a un modus vivendi entre la préfecture et le Conseil régional et l'ensemble des collectivités territoriales, mais c'est une idée qui se heurte au principe de la libre administration des collectivités territoriales, lesquelles demandent aujourd'hui une régionalisation des crédits FSE.

Si l'on prend le cas de la région Centre où les relations sont bonnes entre préfecture, région et départements, les crédits du FSE, qui s'élèvent à 138 millions, sont gérés à 60 % par le SGAR, le reste étant confié à la région xxx départements. Il est donc difficile de rester en contact, au-delà des collectivités territoriales, avec tous les organismes intermédiaires chargés de la gestion des fonds FSE.

2. Définir les priorités structurantes

En restant dans le cadre posé par le programme opérationnel, l'autorité de gestion devrait s'appuyer, pour départager les projets qui lui sont présentés et qui apparaissent d'égal intérêt, sur des priorités transversales comme l'égalité entre les femmes et les hommes, le développement durable ou le vieillissement actif.

Comme il a été dit, on remarque que c'est l'axe 3 (lutte contre les exclusions sociales et les discriminations) qui fonctionne le mieux. Les « priorités structurantes » pourraient être utiles pour départager les projets, mais à l'heure présente, il n'y a guère de concurrence entre les projets, car les projets ne sont pas nombreux et, en outre, l'innovation est difficile à détecter dans le domaine social où les besoins restent les mêmes avec plus ou moins d'acuité d'une région à l'autre. Enfin, l'axe 3 conduit à un saupoudrage des crédits FSE qui semble inévitable pour soutenir le tissu social et associatif.

3. Mieux répondre aux évolutions socio-économiques

Les gestionnaires des crédits du FSE doivent non seulement identifier ces évolutions, mais aussi anticiper sur les impacts qu'elles vont provoquer. Quant aux évolutions dues à la mondialisation qui entraîne des délocalisations, il existe pour cela un fonds dédié : le Fonds européen d'ajustement à la mondialisation (FEM) mais qui est peu ou mal utilisé, du moins en France.

4. Mieux favoriser la formation tout au long de la vie

Les gestionnaires de crédits du FSE doivent passer d'une logique de l'offre de formation à une logique de la demande en développant le conseil professionnel pour favoriser la mobilité des publics. Comme il a été dit, c'est une faiblesse du marché du travail français et, de plus, la formation professionnelle dispose déjà d'importants crédits.

C. QUELQUES EXEMPLES FRANÇAIS DE PROJETS FINANCÉS PAR LE FSE

En pays de Loire, le Conseil régional a missionné le CAFOC (Centre académique de formation continue) de Nantes pour réaliser une prestation portant sur le développement de l'individualisation des parcours de formation et le renforcement qualitatif et quantitatif de l'alternance dans le parcours des apprentis. En Auvergne, le FSE soutient « Handiformation », schéma régional destiné à faciliter l'accès à la formation et à l'emploi des personnes handicapées. En Nord-Pas-de-Calais, une opération spécifique s'est adressée à un public de détenus et de sortants de prison ; il s'agit d'un projet (R'Libre) visant à favoriser l'insertion sociale et professionnelle des personnes sous main de justice. En Midi-Pyrénées, l'association Parole-Expression travaille avec 70 personnes sur l'apprentissage de la langue française dans le quartier nord de Toulouse. En Franche-Comté, le Medef a mis en oeuvre un projet intitulé « Favoriser le maintien dans l'emploi des seniors » en valorisant leur savoir-faire (campagne de sensibilisation et transfert de compétences). En Bretagne, une association a lancé une opération « Familles monoparentales » à Saint-Brieuc où le besoin était prioritaire : elle vise l'accès ou le retour à l'emploi de femmes seules. En Ile-de-France, le projet « Faire de l'égalité entre les hommes et les femmes une réalité dans l'entreprise » est dirigé par l'Union régionale CFDT Ile-de-France, vise à confier aux équipes syndicales la mission de négocier l'égalité professionnelle.

Les deux dossiers FSE types restent pourtant la formation à la coiffure ou le PLIE proposant un programme d'insertion professionnelle.

IV. LE DÉBAT SUR L'AVENIR DU FSE

À l'occasion des négociations sur le prochain cadre financier pluriannuel (2014-2020), un débat sur la politique de cohésion et sur l'avenir du FSE s'est engagé.

Ce débat a démarré avec la présentation du « non-papier » italien en mars 2010, l'Italie n'ayant pas caché son attachement à une simplification drastique de l'ensemble des procédures du FSE. La proposition italienne envisage de faire du FSE un outil aussi flexible que possible grâce à une révision générale de l'architecture de l'audit en supprimant certaines autorités aujourd'hui obligatoires. Le débat s'est poursuivi avec les prises de position des commissaires intéressés préconisant une vraie réforme, et celle de la Conférence des régions périphériques maritimes d'Europe (CRPM) du Parlement européen, l'Assemblée des régions d'Europe et les États membres du groupe de Visegrad (Pologne, Hongrie, Slovaquie, République tchèque) qui, tous, s'opposaient à une réforme qui tendrait à isoler le FSE ou à rompre le lien avec le territoire.

Aujourd'hui, ce débat semble clos et les positions sont concordantes, qu'il s'agisse de la Commission, du Parlement européen ou des États membres. Tous s'accordent sur une simplification nécessaire de la gestion des fonds FSE et un projet de réforme du règlement devrait voir le jour en septembre 2011.

Naturellement, au Parlement européen, les députés de la commission de l'emploi et des affaires sociales sont favorables à une augmentation des crédits du FSE, mais les circonstances ne s'y prêtent pas et on s'oriente vers un statu quo. En outre, en augmentant les crédits du FSE, le risque existe que dans cette enveloppe élargie, on inclut le Fonds d'ajustement à la mondialisation (FEM). Les députés de la commission de l'emploi et des affaires sociales avançaient l'argument qu'il convenait d'augmenter l'enveloppe du FSE pour faire face aux conséquences sociales de la crise et plus particulièrement au chômage et à la pauvreté.

A. L'EUROPE A ENCORE BESOIN D'UN FONDS SOCIAL EUROPÉEN MAIS UNE SIMPLIFICATION DE LA MISE EN oeUVRE EST NÉCESSAIRE

1. La crise est une opportunité pour réformer le FSE

Sous le coup des effets de la crise, chacun s'accorde aujourd'hui sur la nécessité de conserver le FSE. Le FSE a accompagné pendant plus de 50 ans les réformes structurelles importantes qui ont amélioré le marché du travail et les systèmes d'éducation et de formation. Par son organisation, il a permis l'installation d'une multitude de microprojets de proximité qui ont amélioré la situation de millions d'individus. Le FSE permet l'exercice d'une solidarité européenne de proximité car, comme le répète volontiers le président Barroso, « personne ne doit être abandonné au bord du chemin » . C'est la raison pour laquelle est abandonnée maintenant l'idée de limiter l'intervention du FSE aux États membres les moins avancés économiquement. En effet, la pauvreté, l'exclusion sociale et le chômage des jeunes, auxquels le FSE apporte de sensibles atténuations, existent dans tous les États membres, même les plus riches.

2. Pour une simplification du FSE

L'utilité reconnue du FSE ne fait pas taire pour autant les critiques qui s'attachent à la complexité de sa mise en oeuvre. Une première modification du règlement financier a déjà été faite, mais tout le monde convient que ce travail doit se poursuivre. Une simplification du contrôle est souhaitée par tous. Enfin, le coût administratif de sa gestion à Bruxelles et dans les États membres - bien que difficile à mesurer puisqu'il pèse essentiellement sur les administrations - est jugé disproportionné et contre-productif.

On sait qu'en France, le coût moyen du montage d'un dossier oscille entre 1 500 euros et 2 000 euros, ce qui agit comme une puissante dissuasion auprès de nombreux acteurs. Certains projets ne dépassent pas la barre des 2 000 euros et la moitié des projets soutenus par le FSE en France ont des budgets inférieurs à 50 000 euros.

En France, 1 000 personnes gèrent le FSE réparties entre 350 organismes intermédiaires ; cette organisation entraîne un coût significatif qui est en partie absorbé par les crédits du FSE destinés à l'assistance. Au ministère de l'emploi, la sous-direction du FSE organise un programme de formation des gestionnaires du FSE (mission « Méthode et appui »). Localement, des emplois rattachés au SGAR ou à la DIRECTE (Direction régionale des entreprises, de la consommation, du travail et de l'emploi) qui sont rémunérés sur les crédits d'assistance.

3. Pour un système de gestion plus orienté sur le résultat

En matière de résultat, les projets issus du FSE doivent conduire au retour à l'emploi et à la réinsertion, mais il faut rester conscient que la mesure du résultat ne saurait prendre en compte seulement le retour à l'emploi qui n'est pas toujours acquis, mais aussi le succès de validation d'une formation, voire simplement l'amorce d'un cheminement vers l'employabilité.

B. LA POSITION DU PARLEMENT EUROPÉEN

Le Parlement européen, comme les autres acteurs européens, est parfaitement conscient des difficultés de mise en oeuvre des fonds du FSE, de la lourdeur des charges administratives qu'elle entraîne, de l'insécurité juridique quant à l'obtention des fonds et du manque de flexibilité de certains programmes opérationnels. Il reconnaît que ces difficultés expliquent qu'à mi-parcours du cadre financier 2007-2013, seuls 15 % de crédits du FSE avaient été engagés. Cependant, le Parlement européen reste convaincu de l'utilité du FSE, utilité renforcée à ses yeux par le fait que le FSE sera très sollicité dans le cadre de la stratégie 2020 dont le volet social tient une place prépondérante. Le Parlement européen tient à rappeler que l'objectif principal du FSE est l'aide ciblée au retour à l'emploi, ainsi que l'amélioration de la qualité des emplois grâce à la justesse de la formation. Conscient que le FSE ne peut résoudre tous les maux, il distingue la lutte contre la pauvreté au sens large, qui doit relever plutôt d'une politique de solidarité nationale, d'un aspect plus particulier de cette lutte qui est le retour à l'emploi ou du moins à l'employabilité.

Le Parlement préconise le maintien de l'enveloppe du FSE dans le prochain cadre financier et le maintien de sa vocation en faveur de l'emploi. Il partage l'idée qu'il faut simplifier la mise en oeuvre des crédits du FSE et créer un nouveau contrat de confiance entre la Commission européenne et les porteurs de projet en région. En particulier, même si la dernière réforme a amélioré la clarté des exigences relatives au système de gestion et de contrôle demandé par l'Union européenne, l'importance accordée aux exigences de contrôle n'est pas proportionnée à la taille des projets et le contrôle porte de manière excessive sur les exigences comptables des projets éligibles au FSE et moins sur le contenu des projets et leur contribution aux objectifs du FSE. Une telle situation décourage les gestionnaires de projets et absorbe une énergie qui est soustraite à la bonne surveillance des contenus.

Sur la possibilité de détacher le FSE de la politique de cohésion et de le rendre autonome, l'opinion européenne dans son ensemble (Commission et Parlement) a évolué et l'option a été écartée à ce stade. De même, l'idée que certains États membres ne sont pas suffisamment incités à utiliser les crédits du FSE dans la mesure où pour chaque euro obtenu, ils doivent souvent engager un euro eux-mêmes et que ces États puissent obtenir un financement à 100 %, a été écartée.

Le 7 octobre 2010, le Parlement européen s'est prononcé pour une résolution sur l'avenir du FSE résumant ses positions et insistant sur les points suivants :

- le FSE joue un rôle-clé en améliorant l'emploi et l'intégration des travailleurs sur le marché du travail et dans la société ;

- le Parlement européen confirme que les quatre axes ou piliers choisis l'ont été judicieusement ;

- le Parlement européen demande que le FSE cible plus efficacement les objectifs de la stratégie « Europe 2020 » ;

- le Parlement européen attire l'attention sur les petites et moyennes entreprises et sur la nécessaire adaptation à leurs besoins de l'éducation, de l'enseignement et de la formation professionnelle ;

- le Parlement européen demande qu'un accent plus fort soit mis sur le bon fonctionnement des marchés du travail et sur les conditions sociales afin de stimuler la croissance et la productivité et d'améliorer les chiffres de l'emploi en Europe ;

- le Parlement européen rappelle son attachement à la notion de travail décent et à l'égalité des sexes ;

- le Parlement européen appelle au renforcement du FSE ;

- le Parlement européen souligne l'importance de la cohésion territoriale et de la cohésion sociale ;

- le Parlement européen reconnaît que les fonds structurels restent de loin le principal instrument de financement pour atteindre les objectifs sociaux ;

- le Parlement européen invite la Commission à renforcer le potentiel des fonds structurels par la simplification des contrôles, l'assouplissement et l'amélioration des procédures et du suivi ;

- le Parlement européen confirme que le FSE est un outil primordial dans la lutte contre le chômage, la pauvreté et l'exclusion, et un partenaire précieux par ces temps de crise ;

- le Parlement européen demande que le FSE soit maintenu sous le régime du règlement de base portant dispositions générales sur les fonds structurels mais avec ses propres règles ;

- le Parlement européen estime enfin que le FSE pourrait faire évoluer son soutien plus efficacement encore en matière de lutte contre la pauvreté et l'exclusion en fournissant une meilleure formation pour les emplois futurs.

C. ISOLER LE FSE : UN PROJET ABANDONNÉ PAR LA COMMISSION

La Commission a un temps envisagé officieusement de séparer le FSE de la politique de cohésion. Devant la levée de boucliers en provenance des régions, qui sont les principales bénéficiaires du fonds, la Commission n'a pas poursuivi son projet.

La révision du cadre financier pluriannuel était effectivement une occasion idéale pour réformer le FSE et remettre en question cet outil, au motif bien connu que le bilan du FSE vieux de plus de 50 ans était mitigé en termes d'efficacité.

L'objectif de la Commission consistait à créer une politique européenne de l'emploi dont le FSE aurait été le bras séculier. Les commissaires Johannes Hahn, Maria Damanaki, Laszlo Andor et Dacian Ciolos défendaient en effet l'idée d'une plus grande complémentarité entre les différents fonds de cohésion afin de déboucher sur une meilleure concentration de l'argent communautaire sur les priorités stratégiques de l'Union européenne, priorités contenues dans la stratégie « UE 2020 ».

L'indépendance du FSE, selon ses promoteurs, aurait également apporté plus de visibilité aux mesures mises en place par l'Union pour endiguer le chômage né de la crise économique et financière. Dans ces conditions, le FSE ne serait plus lié au territoire aussi bien pour ses objectifs que pour sa mise en oeuvre alors qu'aujourd'hui, si la stratégie et le budget sont négociés et décidés entre l'Union européenne et les États membres, le Parlement européen et la Commission, la mise en oeuvre des financements par le FSE incombe aux États membres et à leurs régions, puisque l'idée maîtresse et originelle est de promouvoir les régions les moins avancées ou d'aider les régions en crise à se reconvertir.

Dans ce projet aujourd'hui abandonné, le point délicat était naturellement le financement, car sortir le FSE signifiait lui allouer une enveloppe budgétaire propre et donc indépendante de celle du FEDER. En effet, aujourd'hui FEDER et FSE sont alloués en bloc aux États membres qui détenaient eux-mêmes la part du FSE.

En outre, certains commissaires, dont Danita Hubner, ont rappelé que le FEDER était plus efficace s'il était coordonné et intégré au FSE. D'autres voix se sont élevées pour faire savoir que l'atout du FSE était d'agir directement sur les territoires et à travers les territoires, donc au plus proche du terrain. En outre, un territoire bénéficiant du FEDER est aussi et automatiquement un territoire qui a besoin de soutien en termes de formation et de lutte contre le chômage des plus vulnérables.

Toutefois, la Commission a fait part du bilan qu'elle dressait de l'action du FSE et des pistes de réflexion qu'elle souhaite voir débattues. En novembre 2010, la Commission a publié le 5 e rapport sur la cohésion économique, sociale et territoriale de l'Union, rapport intitulé « Investir dans l'avenir de l'Europe ». À la suite de ce rapport, elle a conduit une consultation publique sur l'avenir de la politique de cohésion.

La Commission remarque qu'il existe une difficulté à relier les réalisations financées par le FSE et les objectifs de la stratégie de Lisbonne. Ensuite, elle demande que soient reconnues les problématique posées par la définition des dépenses non éligibles au FSE et relevant plutôt de la santé ou de la protection sociale car, à ses yeux, 10 à 16 % des fonds du FSE sont dépensés pour des actions qui ne sont pas éligibles. La Commission considère qu'une programmation réalisée sur sept ans handicape la réactivité du FSE. Enfin, la Commission reconnaît qu'il existe un problème d'articulation entre la gestion assurée par les États membres et la responsabilité budgétaire et comptable assumée par le commissaire européen chargé de l'emploi.

La Commission insiste sur le fait que ces problèmes tiennent pour partie au fait que les règles générales des fonds structurels trouvent mal à s'appliquer aux particularités du domaine social. La Commission souhaite impliquer davantage les ministres en charge de l'emploi.

En conclusion, la Commission envisagerait une réforme offrant au FSE un environnement plus flexible et plus réactif que celui du FEDER.

D. LA POSITION DU COMMISSAIRE AUX AFFAIRES SOCIALES ET À L'EMPLOI, LASZLO ANDOR

La Commission souhaite recentrer le FSE sur les objectifs de la stratégie « UE 2020 ». Ainsi, le 18 février dernier, Laszlo Andor s'est exprimé sur sa conception du rôle du FSE et il a apporté son soutien à l'idée d'une plus grande souplesse entre les fonds structurels et à la nécessité de créer et d'améliorer des synergies entre ces différents fonds. Il considère que le FSE doit redoubler ses efforts dans le domaine de la lutte contre l'exclusion ; il n'exclut pas que le FSE puisse recevoir une attribution budgétaire plus importante.

Selon Laszlo Andor, le FSE, depuis sa création en 1957, a permis à des millions d'Européens (71 millions de personnes auraient bénéficié du FSE en 50 ans) d'acquérir des compétences nouvelles et de trouver un travail. Le fonds illustre donc bien la manière dont l'Union européenne a su allier croissance et cohésion sociale. Il apparaît comme l'instrument-clé de la mise en oeuvre de la stratégie « UE 2020 ». Selon lui, l'argent investi a permis aux États les plus pauvres de tirer davantage parti de leur potentiel économique. Le FSE a eu, d'autre part, une influence heureuse sur les systèmes éducatifs et sur l'organisation de la formation dans tous les États membres.

Le commissaire Laszlo Andor fait remarquer que les raisons qui sont à l'origine de la création du FSE existent encore aujourd'hui avec 5 millions de jeunes sans emploi en Europe et 80 millions d'Européens vivant dans la pauvreté.

Cependant, Laszlo Andor appelle de ses voeux un travail en synergie avec les autres fonds, faisant remarquer que la part relative du FSE au sein de la politique de cohésion était passée de 40 % en 1989 à 22 % en 1993, il a annoncé que la Commission étudiait différents scénarios pour augmenter le budget du FSE.

En conclusion, Laszlo Andor imagine une réforme du FSE sur trois axes :

- une approche basée sur les résultats,

- une surveillance continue de la gestion des fonds,

- une forme de proportionnalité des exigences administratives et comptables en fonction de l'importance financière du projet.

Enfin, Laszlo Andor a fait savoir qu'il n'était pas question d'isoler le FSE, mettant ainsi un terme à la polémique qui s'était développée au cours de l'année 2010. Une seule notion semble aujourd'hui devoir guider la réflexion sur l'avenir du FSE : la simplification.

V. CONCLUSIONS DU RAPPORTEUR

1. Sur la renationalisation de la politique de cohésion en général et du FSE en particulier

Dans la mesure où le FSE poursuit une politique qui prolonge ou renforce la politique de l'emploi de chaque État membre, il est parfois apparu que la politique de l'emploi entendue au sens large pouvait rester du ressort de chaque État membre et qu'une totale renationalisation serait envisageable. Cette position s'appuie également sur l'idée qu'il est difficile de mesurer si les fonds obtenus du FSE s'ajoutent au budget national de l'emploi ou plutôt l'allègent d'autant, bien qu'en principe, la contribution du FSE ne doive pas se substituer aux dépenses structurelles publiques ou assimilables d'un État membre. Le risque actuellement couru et parfois pris est d'abonder le FSE avec des crédits publics déjà dédiés à une politique de l'emploi.

Votre rapporteur écarte l'option d'une renationalisation parce qu'il considère que le FSE conduit à mettre l'accent sur certains aspects parfois oubliés de la politique nationale de l'emploi et surtout que l'actuel mécanisme de cofinancement conduit à provoquer la création de partenariats entre le public et le privé, comme entre le national et le local, partenariats qui ont pour effet salutaire de conjuguer les efforts de tous afin de résoudre des problèmes concrets de notre marché du travail et de notre société.

2. Sur le détachement du FSE de la politique de cohésion et sur la non territorialisation des crédits

L'idée d'isoler le FSE du reste de la politique de cohésion et d'en faire l'arme budgétaire de la politique européenne de l'emploi est à ce stade abandonnée pour deux raisons essentielles : l'insuffisance de moyens en période de restrictions budgétaires et l'opposition des régions à son corollaire, la non territorialisation des crédits.

Votre rapporteur estime également qu'il est plus sage, faute de moyens suffisants, de circonscrire l'action du FSE à l'action déjà ambitieuse qui est la sienne avant d'envisager de le faire intervenir sur l'ensemble de la politique de l'emploi. Sur la non territorialisation, il estime que la précision apportée à la définition des principes régissant l'éligibilité des projets conduit ipso facto à réserver les crédits FSE aux régions les moins avancées. Si la non territorialisation des crédits devait entraîner en quelque sorte leur fusion au sein des politiques nationales de l'emploi, il faudrait naturellement s'y opposer.

3. Sur l'idée de réserver les crédits du FSE aux États membres les plus pauvres

Cette idée a pris corps depuis l'entrée des pays d'Europe centrale dans l'Union européenne et repose sur la comparaison entre le formidable effet de rattrapage dont a pu bénéficier l'Italie, puis l'Espagne, la Grèce et l'Irlande, grâce à l'ensemble des fonds européens de solidarité et, l'effort beaucoup moindre consenti au profit de la Pologne, de la Hongrie, de la République tchèque et de la Slovaquie.

L'Union européenne fait donc relativement moins pour les nouveaux entrants. Pour faire plus, à budget constant, elle pourrait exclure les pays les plus riches du bénéfice des fonds structurels.

Sur cette question, votre rapporteur se range à l'avis que les effets de la crise actuelle montrent clairement que le chômage, et particulièrement celui des jeunes, est un fléau qui touche tous les États membres et, pour cette raison, il vous propose de maintenir l'actuelle clé de répartition des crédits FSE.

4. Sur l'idée de concentrer prioritairement les crédits du FSE à la lutte contre la pauvreté

Votre rapporteur considère que la lutte contre la pauvreté est une politique sociale nationale et que le FSE, par sa mission, y participe. Pour autant, on ne saurait lui imposer d'en faire sa priorité, car il n'a pas été créé pour compléter les minima sociaux mais pour conduire à l'emploi ceux qui ont été écartés du marché du travail ou risquent de l'être. En outre, restaurer l'employabilité permet aussi d'écarter l'exclusion et la pauvreté.

5. Sur la durée de la programmation

Actuellement, la programmation du FSE se calque sur la durée du cadre financier pluriannuel, soit sept ans. La crise récente a amené à modifier quelque peu la programmation du FSE en cours de cycle pour mieux l'adapter aux événements.

Aux yeux de votre rapporteur, la durée de sept ans ne faisant pas obstacle à des modifications en cours de cycle, il n'y pas lieu de la modifier. Au contraire, il voit, dans cette durée, un avantage appréciable en termes de garantie et de prévisibilité des crédits. En effet, les crédits sont connus et engagés sur les sept ans à venir, ce qui peut représenter une forte incitation pour tous les projets menés à moyen terme.

6. Sur le verdissement du FSE

Une partie des acteurs du secteur et des parlementaires européens sont sensibles à l'idée que le FSE devrait intégrer dans sa stratégie, en sus de sa composante « développement durable », une composante « verte », c'est-à-dire mettre l'accent sur la formation aux emplois nouveaux engendrés par toutes les entreprises qui produisent des biens et des services contribuant à éviter, réduire ou supprimer des nuisances pour l'environnement.

Votre rapporteur juge que cette question n'a pas été négligée dans les projets financés par le FSE, mais il ne voit pas d'inconvénient à ce que cette obligation déjà intégrée par les acteurs du secteur figure en toutes lettres dans le prochain programme du FSE.

7. Sur la possibilité d'exonérer de l'obligation de cofinancement certains États membres

On sait que cette idée repose sur la supposition que la sous-consommation des crédits par certains États membres serait due à la difficulté qu'ils éprouveraient de cofinancer les éventuels projets éligibles. On rappellera que ces projets sont financés en moyenne à hauteur de 45,76 % grâce aux crédits du FSE. Outre qu'aucun État membre n'a à ce jour avancé cette raison, on sait que ce qui semble faire défaut à certains pays, c'est une fonction publique suffisamment étoffée et un réseau associatif suffisamment dense pour gérer la très lourde partie administrative d'instruction, de gestion et de suivi des projets.

Aujourd'hui, cette réforme est à nouveau proposée, pour d'autres raisons, pour le cas particulier de la Grèce, notamment par M. Jean-Claude Juncker, président de l'Eurogroupe. Dans le cas de la Grèce, ce serait un manque de fonds publics.

À l'exception du cas grec, qui demande à être examiné plus attentivement vu la conjoncture, votre rapporteur n'est pas favorable à l'exemption de l'obligation de cofinancement qui est un principe fondateur des fonds structurels.

8. Sur la responsabilité budgétaire et comptable du commissaire aux affaires sociales et à l'emploi

Selon le principe qui veut que l'on puisse gouverner de loin mais qu'on administre bien que de près, il paraît effectivement peu défendable que la responsabilité budgétaire et comptable pèse presque uniquement sur le commissaire européen aux affaires sociales et à l'emploi pour des projets gérés localement.

Comme le montre l'annexe 2, les contrôles sont au nombre de six, et selon l'adage qui veut que plusieurs contrôles équivalent à aucun contrôle, il convient de réduire ces contrôles tatillons et coûteux.

De même, la Commission considère que le risque d'erreur tolérable doit être inférieur à 2 % du projet de budget, ce qui est peu, sachant par exemple que la prise en compte de salaires peut entraîner l'inclusion à tort d'une prime saisonnière ou d'un rappel, erreur susceptible de dépasser facilement les 2 %.

Pour ces raisons, votre rapporteur est favorable à une réforme qui introduirait un partage proportionné de la responsabilité et mettrait en place un contrat de confiance reposant plus largement sur un contrôle national.

9. Sur la nécessaire simplification de la gestion administrative budgétaire et comptable des crédits du FSE

La gestion administrative budgétaire et comptable nécessite la mobilisation d'un nombre important de fonctionnaires et d'acteurs privés dont le coût global est difficile à calculer. Si le coût était connu, il contribuerait à conforter les critiques adressées au FSE qui tendent à lui reprocher un coût de fonctionnement disproportionné par rapport aux crédits versés.

C'est la raison pour laquelle votre rapporteur salue la première réforme introduite par le règlement CE n° 396-2009 du 6 mai 2009, et appelle de ses voeux une simplification encore plus drastique qui permettrait l'établissement d'un guichet local unique et un renforcement du suivi des résultats qui, aujourd'hui, laisse à désirer.

10. Sur la fusion du FSE et du FEM (Fonds européen d'ajustement à la mondialisation)

Le fonds européen d'ajustement à la mondialisation a été créé en 2006 et doté d'un budget annuel de 500 millions d'euros. Sa mission est de venir en aide aux travailleurs qui perdent leur emploi en raison de l'évolution du commerce mondial. Il contribue donc à aider les travailleurs à chercher un emploi et à se réorienter par la formation ou un recyclage sur mesure. Il s'agit d'une aide individuelle, unique et limitée dans le temps.

Votre rapporteur fait remarquer que la mission accomplie par le FEM fait partie des missions déjà menées par le FSE et il sait que le FEM pourrait être fusionné au sein du FSE, abondant ainsi les crédits du FSE de 500 millions annuels supplémentaires. Cependant, cet abondement n'étant pas certain, il préfère, pour des raisons tactiques évidentes, ne pas proposer la fusion des deux fonds.

11. Sur la régionalisation des crédits du FSE

Actuellement, des voix se font entendre en faveur de la régionalisation des crédits du FSE, c'est-à-dire le transfert aux régions de l'entière gestion des crédits du FSE. D'autres positions plus modérées veulent revenir sur le partage des crédits entre préfectures et régions afin de favoriser les régions. Il convient de rappeler que la gestion des crédits du FSE relève, actuellement, d'une politique nationale dont la responsabilité appartient au ministre de l'emploi et, par délégation, au délégué général pour l'emploi et la formation professionnelle. Aujourd'hui, il existe trois étapes dans le partage des crédits : le partage entre le FEDER et le FSE, le partage entre la politique nationale financée par les crédits FSE (15 %) et la politique régionale (85 %), et enfin un partage régional entre le SGAR (60 %) et les collectivités territoriales.

Votre rapporteur, qui a rencontré l'ensemble des acteurs qui se sont tous prononcés pour l'augmentation de leur part respective, considère qu'il convient de conserver une gestion nationale à la fois déconcentrée et décentralisée des crédits du FSE dans le respect d'un principe de subsidiarité jouant entre l'échelon national et l'échelon local.

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EXAMEN EN COMMISSION

La commission s'est réunie le mercredi 29 juin 2011 pour l'examen du présent rapport. À l'issue de la présentation faite par le rapporteur, M. Richard Yung, le débat suivant s'est engagé :

Mme Bernadette Bourzai :

Je remercie le rapporteur pour la clarté de son propos et l'intérêt de son analyse comme de ses conclusions. Le FSE est très mal connu de ceux qui en bénéficient, mais il est très bien connu de ceux qui le gèrent, c'est-à-dire des utilisateurs institutionnels du FSE.

C'est un travail difficile que celui de la gestion et de l'optimisation des fonds du FSE. Dans le Limousin, où j'ai une longue expérience, nous avons beaucoup fait pour les centres d'apprentissage grâce aux crédits du FSE et, entre autres choses, nous avons créé des internats pour les apprentis, car le logement était le problème le plus sensible.

C'est donc un fonds très utile et il faut le conserver malgré la complexité de son mode d'emploi.

Quant à la fusion du FSE et du FEM, je suis de l'avis du rapporteur. Le FEM est d'un usage plus occasionnel et plus spécifique, essentiellement lors de la fermeture d'une entreprise et, donc, il ne faut surtout pas les fusionner.

M. Jean-François Humbert :

Quelles sont les régions qui bénéficient du FSE et selon quels critères ?

M. Richard Yung :

Toutes les régions selon des critères démographiques, de chômage et d'employabilité.

M. Simon Sutour :

Oui, toutes les régions en bénéficient aujourd'hui, car il n'y a plus de zonage comme autrefois. De toute manière, le chômage est sensiblement le même partout.

M. Pierre Bernard Reymond :

Vous avez fait allusion à la difficulté de mobiliser les PME sur l'axe 1, mais les chambres consulaires et les chambres de métier n'ont-elles pas un rôle à jouer ? Quel type d'investissement peut-on faire avec le FSE ? Enfin, dernière question : qui sont les décideurs ?

M. Richard Yung :

J'ai noté une certaine tiédeur de la part des chambres consulaires qui ont effectivement un rôle à jouer et qui sont toujours consultées et sollicitées.

Le FSE ne permet pas d'investir : il s'adresse à la personne, mais il peut venir en complément d'un investissement FEDER pour la formation et l'employabilité liées à cet investissement.

Quant aux décideurs, ce sont le délégué général à l'emploi pour les projets nationaux et les SGAR, et les Conseils régionaux et généraux, ou du moins leurs services de l'emploi, pour les projets locaux.

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À l'issue du débat, la commission a autorisé, à l'unanimité, la publication du rapport.

A N N E X E S

ANNEXE 1

LISTE DES AUDITIONS

- M. Laszlo ANDOR, commissaire européen pour l'emploi et les affaires sociales.

- M. Pierre BESSON, secrétaire général pour les affaires régionales de la préfecture du Loire-Centre.

- M. Frédéric ORELLE, chargé de mission Europe (SGAR Centre) ;

- M. Pascal VANHAELEN, responsable de la mission FSE de la DIRECTE-Centre.

- Mlle Valérie JOYEUX, chargé de mission Europe (SGAR-Centre).

- M. Emmanuel LEMAUX, conseiller près de l'autorité régionale de certification (DGFIP) - Région Centre.

- Mme Hélène STRIGARD, conseiller pour les affaires sociales et l'emploi de BUSINESS-Europe.

- M. Christophe CORIOU, conseiller FSE et formation auprès du MEDEF.

- Mme Audrey HERBLIN, conseiller FSE et formation auprès du MEDEF, chargée des relations avec le Parlement.

- Mme Pervenche BERES, député européen, présidente de la commission de l'emploi et des affaires sociales au Parlement européen.

- Mme Corinne VAILLANT, sous-directeur du FSE à la Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP).

- M. Grégory BROUSSEAUD, adjoint au sous-directeur du FSE (DGEFP)

ANNEXE 2

SYSTÈME DE GESTION ET DE CONTRÔLE DU PO FSE « COMPÉTITIVITÉ RÉGIONALE ET EMPLOI »
(PÉRIODE 2007-2013)

Autorité de gestion en titre - DGEFP SD FSE

Autorités de gestion déléguées 1

Bénéficiaire (opération individuelle)

Bénéficiaires (opérations sous-jacentes)

Organismes intermédiaires (OI)

Contrôles qualité gestion à la charge des OI

Visites sur place + Contrôle de service fait

Contrôles qualité gestion à la charge de l'AG / AGD

Visites sur place + Contrôle de service fait

Contrôles qualité certification

Contrôles d'opération

Autorité de paiement (DGFIP)

Audits de systèmes

Contrôles préalables au paiement de l'aide FSE

Contrôles postérieurs au paiement de l'aide FSE

Autorité d'audit

Autorité de paiement

Commission européenne

Mise en paiement des appels de fonds

Audit des systèmes de gestion et de contrôle

Certification des appels de fonds, au vu des résultats des contrôles qualité certification

Pilotage, contrôle de gestion des AGD

Préparation des appels de fonds

Validation de la stratégie d'audit, au vu des résultats des contrôles d'opérations et des audits de systèmes

Autorité d'audit (CICC)

Source : DGEFP

ANNEXE 3

LA PLACE DU FSE DANS LE BUDGET DE L'UE

Source : DGEFP

ANNEXE 4

DISTRIBUTION DES CRÉDITS ET CONTRÔLE EN FRANCE

Source : DGEFP

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