d) Instituer une contravention d'usage simple de troisième classe

Pour répondre aux besoins mis en évidence par les développements qui précèdent, il faut créer une sanction simple, aussi systématique et par conséquent effective que possible, immédiate, homogène et non stigmatisante pour les personnes, quel que soit leur âge, prises en compte par les statistiques comme consommant une fois au moins dans l'année du cannabis (3,9 millions), de la cocaïne (250 000), de l'ecstasy (200 000) ou toute autre drogue illicite.

La commission d'enquête sénatoriale de 2003 avait proposé la création d'une contravention de la cinquième classe en cas de première infraction et de maintenir la qualification délictuelle (avec peine d'emprisonnement d'un an) en cas de récidive. « Punir d'un an d'emprisonnement un usager de drogue occasionnel n'ayant commis aucun autre délit paraît disproportionné » était-il précisé dans le rapport. La qualification d'usager occasionnel disparaissait à la première infraction sanctionnée.

Un inconvénient de ce dispositif d'inspiration novatrice réside dans le passage nécessaire de l'auteur de l'infraction devant le tribunal de police (ou la juridiction pour enfants), ce qui tend à priver la sanction de sa simplicité, de son automaticité et de son immédiateté. Il est vrai que la saisine de la juridiction par convocation par un officier ou agent de police peut sembler de nature à compenser cet inconvénient, mais cette procédure n'est possible que sur instructions du procureur de la République, ce qui implique, par construction, l'hétérogénéité territoriale de sa mise en oeuvre.

C'est pourquoi, en raison de la possibilité de sanctionner l'infraction, en l'occurrence la première consommation par une amende forfaitaire empêchant le déclenchement des poursuites, les contraventions des quatre premières classes semblent le mieux correspondre à l'objectif de créer une sanction répondant aux objectifs recherchés . La fixation des taux des amendes forfaitaires à un niveau raisonnablement dissuasif renforcerait l'efficacité de cette mesure.

Dans ces conditions, pourrait être créée une peine d'amende de la troisième classe dont le taux maximum encouru , en deçà duquel le juge resterait libre de prononcer la sanction qui lui paraît la plus appropriée, est aujourd'hui de 450 euros (article 131-13 du code pénal). Selon le régime applicable à l'ensemble des contraventions des quatre premières classes, les faits punissables relèveraient de la juridiction de proximité (sauf attribution expresse de compétence au tribunal de police). Ces contraventions ne nécessitent pas d'instruction préalable au jugement, sauf à la requête du procureur de la République. Elles permettent la saisine de la juridiction par citation directe (l'accusation peut attraire directement l'auteur de l'infraction devant la juridiction de jugement) ; la juridiction peut aussi être saisie par convocation par un officier ou agent de police ; l'ordonnance pénale est possible.

L'intérêt de la mesure réside naturellement dans la notion d'amende forfaitaire (article 529 du code de procédure pénale) dont la création nécessiterait un ajout à la liste énumérée à l'article R. 48-1 du code de procédure pénale. Cette amende, payée dans un délai de 45 jours à compter de la constatation de l'infraction ou de l'envoi de l'avis de contravention, serait de 68 euros (article R. 49 du code de procédure pénale). Un taux majoré de 180 euros s'appliquerait aux amendes non réglées dans les 45 jours et pour lesquelles aucune réclamation n'a été présentée (article R. 49-7 du code pénal). Cette amende majorée serait assortie d'un avertissement et devrait être payée dans les 45 jours. L'amende judiciaire maximale est, on le rappelle, de 450 euros.

L'impossibilité de mentionner les condamnations sur le casier judiciaire (sauf si une mesure d'interdiction, de déchéance, ou d'incapacité est prise à titre principal, ce qui ne sera pas le cas dans l'hypothèse de l'application d'amendes forfaitaires) serait un autre élément positif de cette sanction du primo-usage, dans la mesure où elle éviterait la stigmatisation des intéressés.

Pour permettre le repérage des contrevenants entrant, à la suite de leur premier usage sanctionné, dans le champ d'application de la répression délictuelle, la tenue d'un fichier est nécessaire. Il existe actuellement un fichier national des auteurs d'infraction à la législation sur les stupéfiants , pas nécessairement renseigné de façon systématique si l'on se réfère aux propos du préfet Gilles Leclair mentionnés plus haut. Renforcé et adapté en tant que de besoin, il pourrait servir à la mise en oeuvre de la politique contraventionnelle préconisée par la mission d'information.

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