3. Les radars
a) Les radars à visée directe

Un radar se définit par sa fréquence d'émission ou plus exactement la bande passante de cette fréquence. De façon très simplifiée, le faisceau d'un radar peut être comparé à un faisceau d'une lampe torche. Plus le radar émet dans une bande de fréquence faible, plus son faisceau aura un champ diffus. Plus il émet dans une bande haute, plus son faisceau est focalisé et permet une vision précise des objets observés, mais dans un champ très étroit.

Pour les radars concernés par la DAMB, il existe trois sortes de radars :

- les radars de bande L , qui couvrent un large champ, mais de façon imprécise (ce qui peut être amélioré en focalisant la puissance de l'antenne sur le point observé, mais au détriment de l'observation du reste du champ) ; ils servent principalement à la détection .

- les radars de bande X sont, à l'opposé des précédents, des radars de conduite de tir . Ils sont très précis mais ont besoin qu'un autre instrument leur définisse la zone précise de l'espace dans lequel chercher ; les Etats-Unis possèdent un radar en bande X déployé sur une plateforme maritime : le Sea-Based X band radar qui permet de guider les intercepteurs GBI. Ils possèdent aussi l'AN-TPY-2 qui est le radar d'alerte, de poursuite et de contrôle de tir du système d'interception THAAD et le GMDR déployé dans une île du Pacifique (équivalent du SBX mais à terre).

- les radars de bande S qui sont intermédiaires entre les deux et ont une certaine polyvalence.

Un radar à visée directe est potentiellement capable de suivre un missile durant toute sa trajectoire. Sa capacité de détection est limitée par :

- sa portée et donc sa puissance

- par la rotondité de la Terre et donc l'emplacement où il se trouve .

Pour détecter le missile au plus tôt, le radar doit être implanté à proximité des zones de lancement et la faisabilité d'une telle implantation dépend de nombreux paramètres, notamment techniques, diplomatiques et militaires. Il convient de noter que certaines trajectoires de missiles peuvent passer hors de portée de la nappe de veille du radar. On dit alors que le radar est lobé. Pour être plus précis, on lobe un radar en passant au dessus de sa bulle de détection, c'est-à-dire notamment grâce à des trajectoires plongeantes dont l'apogée est supérieure à la portée instrumentée du radar. Lorsque l'on passe sous la nappe de veille, on le fait avec des trajectoires tendues avec une apogée faible.

Il existe cinq grands radars à bande L dans le dispositif américain d'alerte précoce ( Ballistic Early Warning Radars ) :

Les radars de Fylingdales dans le nord-est du Royaume-Uni ( North Yorkshire ) et de Thule au Danemark fonctionnent dans la bande UHF. Leur antenne électronique active est reconnaissable par sa forme « plate », contrairement aux anciens radars à antenne tournante protégés par des radômes à la forme caractéristique en « balle de golf ». Le nombre de faces détermine le champ d'ouverture du radar. Avec une seule antenne, le radar couvre un angle de 120 ° devant lui. Avec deux, il surveille un champ de 240° et avec trois une couverture tous azimuts à 360°. Evidemment, le nombre de faces multiplie d'autant le coût du radar. La capacité à engager des intercepteurs est à la lisière des fonctions naturelles de ce type de radars (qualité de trajectographie trop faible).

Chacun de ces deux sites a fait successivement l'objet d'une mise à hauteur qui s'est achevée en 2007 pour Fylingdales et en mars 2011 pour Thule . Selon les informations disponibles en presse ouverte, les travaux réalisés ont notamment consisté en une amélioration des capacités de discrimination (et donc de précision). Depuis, ces systèmes sont annoncés comme capables de faire de la désignation d'objectif au profit d'intercepteurs.

Leur qualité de pistage radar reste sans doute limitée. Néanmoins, le fait que ces systèmes soient les seuls à pouvoir guider des intercepteurs GBI sur des missiles tirés depuis l'Iran vers les Etats-Unis, tend à confirmer la crédibilité de cette nouvelle aptitude. Elle est désormais en général prise en compte que ce soit dans les études conduites au niveau national ou à l'OTAN.

Pour optimiser leur utilité, les radars d'alerte avancée doivent être localisés le plus près possible de la menace afin de pouvoir détecter au plus tôt le départ de missiles. La localisation des deux radars de Fylingdales et de Thule ne les rend donc pas adaptés pour la protection du territoire européen contre des missiles tirés depuis l'Iran. Leur implantation remonte aux années 1960 et à cette époque, ces radars avaient pour seul objectif, et sans ambiguïté, la protection du territoire américain face à une attaque soviétique.

Néanmoins, des études conduites par l'OTAN ont montré qu'un radar AN-TPY2 positionné au sud-est de l'Europe, comme le prévoit la Phased Adaptive Approach (PAA) américaine, n'est pas suffisant pour détecter et élaborer une trajectographie de missiles tirés depuis l'Iran et qui viseraient le nord de la Norvège ou le Groenland. Pour ces missiles, le radar de Fylingdales apporte le complément de couverture indispensable pour permettre à la PAA de protéger ces parties du territoire européen.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page