c. Vers une nouvelle approche des brevets ?

Cette question, qui aurait été perçue comme impertinente il y a peu reste certes provocatrice. Mais elle reflète l'apparition d'idées nouvelles aux Etats-Unis et dans d'autres pays développés . Celles-ci sont certes marginales, mais reflètent une réalité marquée par des difficultés récurrentes.

(i). Le regard du docteur John Frangioni, directeur du centre d'imagerie moléculaire du Beth Israel Deaconess Medical Center, professeur de médecine à l'école de médecine de Harvard

Pour le Docteur Frangioni, le système actuel des brevets n'est pas efficace. Les décisions auxquelles il conduit sont basées sur l'argent et le profit, sur l'exclusivité, l'exclusion, sur une volonté de contrôle. Un tel système décourage l'évolution.

M. Frangioni remarque que certaines entreprises arrêtent leur production lorsque leur brevet vient à expiration. C'est pourquoi il propose un autre système, basé sur l'idée de la maximisation du bénéfice public. Les brevets seraient non exclusifs, afin de permettre un accès ouvert à la connaissance et d'encourager l'évolution technologique et l'utilisation des technologies.

Selon lui, la suppression des brevets permettrait une compétition pour de meilleurs produits. Cela suppose bien sûr que des besoins existent et que le marché soit présent.

(ii). Les idées de chercheurs français

De telles idées ne sont pas très lointaines de celles qui sont reprises dans le dernier numéro de la revue Recherche de l'année 2011.

Hervé Lebret, polytechnicien, interviewé par Nicolas Chevassus-au-Louis, y déclare notamment : «  Quitte à être iconoclaste, je pense que les brevets sont un frein à l'innovation. Je me demande s'il ne faudrait pas les supprimer, sauf peut-être dans des domaines particuliers, telles les biotechnologies, où un brevet correspond grosso modo au procédé de fabrication d'une molécule. Mais dans la plupart des domaines industriels, il faut des milliers de brevets pour protéger une innovation commercialisée. L'entretien très onéreux de ce portefeuille de brevets mobilise de l'argent qui pourrait être mieux utilisé dans la recherche et l'innovation. Là où le brevet favorise l'inventeur, il est devenu une arme défensive pour préserver des positions dominantes ».

(iii). Une réponse à des problèmes récurrents ?

Cette approche critique tient à la faible protection qu'offrent de nombreux brevets, à leur coût et à la réticence de certains chercheurs qui préfèrent publier les résultats de leur recherche plutôt que de les breveter avant publication.

De plus, la possession d'un brevet ne garantit ni la continuité de l'activité qu'il permet, ni la poursuite dans son pays d'origine, ni son contrôle par le titulaire du brevet.

M. René Ricol a illustré ce processus lors de l'audition publique du 12 octobre 2011, en remarquant que des chercheurs qui ont une idée déposent des brevets, vont chercher des fonds d'amorçage pour faire la preuve du concept, mais que dès que cette preuve est faite, elle est vendue, neuf fois sur dix à l'étranger. Il n'en résulte pour le pays concerné ni création de richesse, ni emplois.

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