3. Une économie structurée par quelques grands groupes dynamiques

Si les autorités politiques sont à l'origine des choix stratégiques majeurs, c'est par des entreprises pour la plupart privées que s'est effectué le développement coréen.

La caractéristique la plus frappante du tissu économique coréen est la prépondérance, surtout jusqu'à la crise financière de 1997, des grands conglomérats ou chaebols . Comme les zaibatsu japonais, les chaebols coréens couvrent des secteurs d'activité extrêmement variés. Leur visibilité est d'autant plus grande que l'ensemble de leurs filiales utilisent généralement le nom de la maison-mère dans leur raison sociale.

Ainsi le groupe Samsung, connu en France pour ses activités dans le domaine de l'électronique et de la téléphonie, est aussi l'un des principaux acteurs du secteur des bâtiments et travaux publics en Corée, ainsi que de la construction navale. Le groupe possède la première société d'assurance de Corée, gère le plus important parc d'attraction, des hôtels et de nombreuses autres activités. Le groupe assure à lui seul un cinquième des exportations de la Corée du Sud.

De la même manière, les autres chaebols les plus importants (Hyundai, LG, SK...) multiplient les activités dans les secteurs industriels les plus variés et les services. Le groupe Lotte, qui a pris le nom d'un personnage de roman de Goethe, s'est fait connaître en fabriquant des bonbons mais gère aujourd'hui des centres commerciaux, des hôtels et des parcs d'attraction, tout en possédant des activités dans la chimie lourde et la construction ainsi que l'industrie du divertissement.

Ces groupes rassemblent une constellation d'entreprises reliées de manière plus ou moins étroite, mais généralement contrôlées par la famille fondatrice.

Les chaebols s'appuient, comme l'indique Pascal Dayez-Burgeon dans un ouvrage récent 8 ( * ) , sur une « double stratégie d'intégration : une intégration horizontale, qui consiste à diversifier les productions pour pénétrer et si possible s'imposer sur tous les marchés ; une intégration verticale destinée à contrôler, à l'amont, les sources d'approvisionnement - minerai de fer, pétrole - sans dépendre des producteurs et à diriger, à l'aval, les circuits de distribution ».

Cette stratégie a permis aux chaebols de suivre chacune des nouvelles opportunités suscitées par le modèle de développement coréen.

S'appuyant le cas échéant sur des aides publiques, ils ont su passer des secteurs à faible coût de main d'oeuvre, dans lesquels la Corée disposait alors d'un avantage compétitif, à l'industrie lourde développée à partir des années 1970 (aciérie, pétrochimie, construction), puis aux activités de service et de loisir ainsi qu'à l'électronique et aux nouvelles technologies dans les années 1990 et 2000.

On cite ainsi la phrase du PDG de Samsung, Lee Kun-hee, qui, constatant en 1993 que sa firme n'était pas capable de rivaliser avec les leaders mondiaux, demanda à ses employés de tout changer, sauf leurs épouses et leurs enfants. Son entreprise était à la mi-2011 le deuxième producteur mondial de téléphones portables et a su transformer une image de marque de producteur d'entrée de gamme en généraliste, voire en innovateur.


* 8 Pascal Dayez-Burgeon, Les Coréens , Taillandier, 2011.

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