C. DES DIFFICULTÉS DE RELOGEMENTS QUI PEINENT À TROUVER UN RÉEL REMÈDE PAR LA VOIE CONTENTIEUSE

1. Les mauvais chiffres du relogement
a) Une réserve : le caractère toujours insuffisamment fiable des chiffres relatifs à l'activité DALO

L'appréciation qu'il est possible de porter sur le respect des obligations de logement incombant à l'État est rendue très malaisée par la difficulté persistante à obtenir des chiffres fiables de la part des services de l'État.

Afin de rendre compte de l'activité engendrée par le DALO d'un point de vue statistique, la DHUP procédait jusqu'en décembre 2010 par enquête mensuelle réalisée auprès des directions déconcentrées. A compter du 15 mai 2008, les secrétariats des commissions de médiation se sont néanmoins progressivement vus dotés d'une application informatique nationale dénommée « COMDALO ».

Ce logiciel constitue un instrument de suivi de l'ensemble de la procédure relative au traitement des recours soumis à la commission de médiation, de l'édition des accusés de réception aux relogements. Le recueil des données par le biais de COMDALO est automatisé depuis 2011.

Le comité de suivi relève toutefois des difficultés dans l'utilisation du logiciel, préjudiciables à une connaissance fine de la réalité du DALO. Le caractère insuffisamment fiable des chiffres concerne au premier chef le nombre de relogements, les statistiques relatives aux nombres de recours et de décisions étant un peu plus satisfaisantes. Dans son dernier rapport annuel, le comité de suivi de la mise en oeuvre du DALO affirme ainsi que « l'application est utilisée dans tous les départements à l'exception d'un seul. (...) Des difficultés ont été constatées dans l'utilisation et dans l'appropriation de l'outil, non seulement au stade de la procédure devant la commission, mais aussi lors de la mise en oeuvre des décisions favorables des commissions et du traitement des contentieux ».

Face au manque de fiabilité des chiffres relatifs aux relogements, le comité de suivi demandait qu'à l'avenir l'utilisation effective du logiciel soit rendue obligatoire et que l'administration lui fournisse des chiffres fiables de mise en oeuvre à la date du 31 décembre 2011. Dans sa déclaration du 9 mars 2012, le comité de suivi souligne cependant le caractère toujours insuffisamment fiable des statistiques qui lui sont transmises.

Selon les informations communiquées par le ministère en charge du logement (DHUP), ces difficultés s'expliquent par les éléments suivants :

- tout d'abord, certaines préfectures ne renseignent pas, ou insuffisamment, le logiciel en ce qui concerne les relogements, parfois en raison du défaut de transmission des baux signés par les ménages reconnus prioritaires ;

- ensuite, il peut exister un défaut de communication au sein même des services préfectoraux entre les personnes suivant l'activité des commissions de médiation et celles suivant les relogements ;

- enfin, une certaine complexité et l'évolution des caractéristiques du logiciel dans le cadre de services déconcentrés ayant fait l'objet d'une réorganisation ont parfois constitué un frein à son appropriation efficace par les personnes chargées de le renseigner .

Vos rapporteurs prennent acte du plan d'action engagé par le ministère afin de remédier à ces difficultés et du dispositif introduit par le décret n°2012-718 du 7 mai 2012 relatif à l'enregistrement des demandes et au compte rendu des attributions de logements locatifs sociaux. Il s'agit d'une généralisation de l'enregistrement par les bailleurs, dans la base de données de la demande de logement social, des attributions suivies de la signature d'un bail, en précisant, le cas échéant que le locataire bénéficie du DALO. Il conviendra de veiller dans un avenir proche à la qualité de l'information statistique obtenue par la mise en place de ces nouvelles mesures.

b) Des procédures de relogement en panne

Sous cette réserve, dans les régions où le parc locatif social est notoirement insuffisant, nul ne s'étonnera du décalage structurel entre le nombre de demandes reconnues prioritaires et urgentes et le nombre de demandes ayant obtenu satisfaction par l'attribution d'un logement. Au 31 décembre 2010, le comité de suivi de la mise en oeuvre du DALO estimait ainsi à 18 718 (dont 16 214 pour l'Île-de-France), l'écart entre le nombre de ménages qui auraient dû recevoir une offre et le nombre de requérants effectivement relogés. Le rapport du comité de suivi évaluait à 27 500 décisions le nombre de décisions qui ne seraient pas mises en oeuvre en juillet 2011.

Il apparaît néanmoins aux yeux de vos rapporteurs qu'un nombre important de ménages déposant un recours sont relogés avant que la commission de médiation ne se réunisse pour statuer sur leur dossier . Ainsi, par exemple, au cours des trois premières années d'existence de la procédure, environ 39 000 ménages ont été relogés ou hébergés, dont 11 465 (soit près de 33 %) avant la réunion de la commission, s'agissant des recours logement et 1 047 (soit près de 27,5 %) avant la réunion de la commission, s'agissant des recours hébergement. L'enclenchement de la procédure suffit parfois à mobiliser les bailleurs sociaux pour le relogement de publics prioritaires, y compris dans des territoires pourtant très urbanisés et connaissant une situation tendue , comme l'illustre, à titre d'exemple, le tableau suivant :

Activité DALO entre le 1 er janvier et le 31 décembre 2011

Haute-Garonne

Gironde

Loire-Atlantique

Isère

Nombre de décisions favorables sur recours logement

561

270

323

338

Nombre de relogements avant examen par la commission

392

173

284

131

Nombre de relogements indépendamment de la mise en oeuvre de la décision favorable

0

7

4

2

Source : ministère chargé du logement (DHUP)

En ce qui concerne plus spécifiquement l'Île-de-France, selon les chiffres de la Fondation Abbé Pierre, à la fin décembre 2011, 42 112 requérants ont été déclarés prioritaires pour un logement, mais seuls 16 851 bénéficiaires ont pu être relogés. De surcroît, le rythme des relogements ralentit : de 500 relogements mensuels fin 2010, il est descendu à 453 fin 2011, et demeure à un niveau très insuffisant puisqu'il devrait se situer à 1 000 environ pour que l'ensemble des demandeurs puissent être relogé. Ce décalage croissant contribue à accentuer les retards accumulés d'une année sur l'autre.

Les taux de relogements relatifs à l'année 2011 demeurent assez disparates, allant de 30 % dans le Val de Marne jusqu'à 88 % dans les Hauts-de-Seine, en passant par 35 % à Paris .

De façon générale, bien que la loi DALO soit aujourd'hui appliquée sur environ les trois quarts du territoire, les chiffres disponibles conduisent à conclure à une application paradoxalement plus difficile de la loi DALO dans les départements dont la situation au regard du logement est pourtant la plus critique et qui auraient donc le plus besoin que l'obligation de résultat soit honorée : Île-de-France, Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte-D'azur, Nord-Pas-de-Calais. De plus, l'on assiste à une régression sur certaines parties du territoire qui ont connu récemment une hausse du nombre de personnes reconnues prioritaires mais non relogées.

Vos rapporteurs relèvent toutefois que compte tenu du caractère insuffisamment exhaustif des informations détenues par les services de l'État sur les relogements, les chiffres dont il est fait état doivent être nuancés. Il semble, notamment, qu'il n'existe aucune procédure d'actualisation des renseignements relatifs aux ménages comptabilisés comme étant en attente de relogement mais dont la situation a évolué depuis la décision de la commission (requérants relogés par leurs propres moyens, demandeurs étrangers ayant perdu leur titre de séjour, requérants décédés, etc.).

2. La nécessité d'un accompagnement social renforcé face au nombre élevé de refus des propositions
a) Un nombre très élevé de refus des propositions de relogement

Une proportion considérable des propositions de relogement adressées aux ménages dont la situation a été reconnue prioritaire et urgente fait l'objet d'un refus de la part des intéressés.

Le taux moyen de refus avoisine en effet 20 % (hors Île-de-France). Dans certains départements, le nombre de rejet des propositions de logement ou d'hébergement dépasse le nombre de relogements intervenus au cours d'une année donnée.

Les refus sont extrêmement fréquents de la part des personnes dont la demande initiale auprès des commissions de médiation a été réorientée vers une solution d'hébergement.

En outre, le taux de refus est demeuré stable en 2011 malgré les nouvelles règles d'information des demandeurs introduites par le décret n°2011-176 du 15 février 2011 relatif à la procédure d'attribution des logements sociaux et au droit au logement opposable. Ce décret fait obligation d'informer les demandeurs sur les conséquences du refus d'une proposition de logement ou d'hébergement au titre du DALO.

A l'instar des commissions de médiation, vos rapporteurs s'interrogent sur ces refus de la part de personnes se trouvant en situation de mal logement et dont la saisine de la commission de médiation constitue en principe le dernier recours possible.

Selon les informations recueillies, les refus s'expliquent à la fois par le caractère inadapté du logement proposé et par les espoirs déçus ou appréhensions des demandeurs, par exemple, quant à la localisation du logement. Les commissions indiquent, en outre, que certains requérants reconnus prioritaires pour délai anormalement long et ayant refusé une première proposition de relogement préfèrent une attente supplémentaire dans l'espoir d'obtenir une offre plus en adéquation avec leurs souhaits.

b) La nécessité d'un accompagnement social renforcé

Aux yeux de vos rapporteurs et de nombreuses commissions de médiation, cette prévalence des refus appelle la mise en place d'un accompagnement social renforcé.

Pour certains demandeurs prioritaires âgés ou dont la situation de logement est liée à des difficultés sociales, voire sanitaires, la proposition de relogement ou de réorientation vers une solution d'hébergement doit être préparée. Il s'agit d'expliquer la solution envisagée et, en cas de réorientation, d'informer du caractère temporaire de l'hébergement et de son caractère incontournable pour permettre un accès futur vers un logement autonome.

A cet égard, la possibilité, dont dispose la commission de médiation depuis la loi de mobilisation pour le logement de 2009, de préconiser les mesures de diagnostic ou d'accompagnement social qui lui apparaissent nécessaires doit jouer tout son rôle.

3. Une activité contentieuse croissante mais dont l'utilité réelle soulève question

Le DALO génère un important contentieux auprès des juridictions administratives. Il convient de rappeler que ce contentieux ne se limite pas au recours spécifique créé à l'article L.441-2-3-1 du CCH :

- d'une part, en amont de ce contentieux spécifique, les décisions des commissions de médiation sont susceptibles de faire grief et peuvent donc faire l'objet d'un recours de droit commun , devant le tribunal administratif. Ce recours est dirigé contre les décisions de refus de reconnaître le caractère prioritaire et urgent de la demande ou contre les décisions réorientant une demande de logement vers une demande d'hébergement. Il doit être exercé dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de la commission et peut être assorti d'un référé ;

- d'autre part, en aval de la procédure spécifique, le demandeur déclaré prioritaire et qui n'a pas obtenu satisfaction peut engager un recours en responsabilité contre l'État dans le cadre d'une action indemnitaire . L'indemnité éventuellement accordée est directement touchée par le requérant.

L'ensemble de ces voies de recours a engendré une activité contentieuse abondante même si elle apparaît concentrée d'un point de vue géographique. Malgré la charge importante à laquelle fait ainsi face la juridiction administrative, l'utilité réelle de l'intervention du juge est encore trop limitée.

a) Un contentieux important mais concentré géographiquement

Le contentieux généré par le DALO a connu une montée en charge rapide et continue de progresser. Selon les chiffres communiqués à vos rapporteurs par les juridictions administratives, entre la fin 2008 et la fin 2011, le DALO a en effet été à la source de 21 600 requêtes , dont 5 582 entre le 1 er décembre 2008 et le 31 décembre 2009, 7 519 en 2010 et, enfin, 8 495 en 2011.

Le plus volumineux parmi les différentes catégories de recours, le contentieux spécifique a progressé de 61 % en trois ans , passant d'environ 3 500 recours en 2009 à 5 650 recours en 2011. A ces recours s'ajoutent les demandes de liquidation présentées par les requérants au profit desquels une injonction assortie d'astreinte a été décidée. Au nombre de 3 073 en 2010, puis 4 204 en 2011 , elles représentent une charge de travail importante pour les greffes.

La liquidation de l'astreinte suppose, en effet, une nouvelle intervention du juge. Cette liquidation est définitive lorsque l'État a honoré son obligation et partielle dans les autres cas, une nouvelle liquidation intervenant alors à une échéance ultérieure.

Le nombre de recours contre les décisions défavorables des commissions départementales a connu une évolution similaire, avec une croissance de 60 % en trois ans, passant d'environ 1 600 recours en 2009 à 2 550 recours en 2011. Du point de vue du rythme de dépôt mensuel, la progression est de 150 % (de 100 recours mensuels début 2009 à 250 recours mensuels fin 2011).

Quant au contentieux indemnitaire, nettement moins développé, il affiche également une progression constante : quasiment inexistant au cours des deux premières années, il s'est traduit par 258 recours en 2011 , après 123 demandes en 2010. Cette tendance inflationniste s'est confirmée au premier trimestre de l'année en cours.

Bien qu'il soit encore un peu tôt pour évaluer les effets de l'ouverture du recours spécifique aux demandeurs pour délai anormalement long, les conséquences de cet élargissement sont déjà perceptibles : au premier trimestre 2012, les recours spécifiques ont enregistré une croissance de près de 20 % par rapport au trimestre 2011 13 ( * ) .

Au-delà des chiffres, la concentration géographique des recours juridictionnels semble recouper celle des recours amiables, les condamnations intervenant le plus souvent dans les territoires qui connaissent les plus grandes difficultés de relogement : Île-de-France et, dans une moindre mesure, façade méditerranéenne et nord de la France . Depuis 2008, le territoire francilien concentre à lui seul 85 % du total . Le tribunal administratif de Paris enregistre 44 % de ces affaires (soit 9 368). Il est suivi du tribunal administratif de Melun (11 %), de Montreuil (10 %) et Versailles (6 %). Hormis, les tribunaux administratifs de Marseille, Nice, Montpellier, Toulon, Lille et Amiens, tous les autres tribunaux administratifs hexagonaux ont enregistré moins de 150 affaires. En outre-mer, le contentieux généré par le DALO est relativement important à Cayenne (307 affaires enregistrées entre fin 2008 et fin 2011).

Évolution des différentes composantes du contentieux DALO depuis 2008

b) Un « contentieux sans espoir »

S'il demeure marginal tant en appel qu'en cassation 14 ( * ) , le contentieux généré par le DALO représente une charge de travail importante pour les juridictions de première instance : 15 % des affaires enregistrées à Paris et près de 5 % en moyenne au niveau national . La charge est particulièrement lourde pour les greffes qui doivent faire face à de multiples mesures d'instruction (notamment les demandes de régularisation) mais aussi, tout au long de la procédure, à de nombreuses sollicitations de la part des requérants eux-mêmes.

Le poids croissant de cette charge s'explique, de surcroît, par la montée en puissance mécanique des procédures de liquidation, compte tenu du faible taux de relogement des demandeurs . Faute d'obtenir spontanément de la part des préfectures les informations nécessaires, il revient très souvent aux agents de greffe, avant chaque ordonnance de liquidation, de solliciter les services de l'État sur l'avancement du dossier en question. De manière unanime, les juridictions soulignent la difficulté à laquelle elles sont confrontées pour suivre l'exécution de leurs jugements : bien souvent, ce sont les préfectures elles-mêmes qui ne sont pas en état de répondre aux demandes du greffe sur le relogement, ou non, du demandeur bénéficiaire d'une injonction...

Dans les conditions actuelles, il y a donc lieu de s'interroger sur l'utilité réelle d'un contentieux qui ne semble pas pouvoir améliorer substantiellement la situation des requérants.

Les recours dirigés contre les décisions de rejet des commissions de médiation aboutissent à une annulation, totale ou partielle, dans seulement 15 % des cas.

Quant au contentieux spécifique, dans près de 80 % des cas, il débouche sur une décision favorable au demandeur. Il ne donne lieu à une décision de rejet que dans environ 14 % des cas, le plus souvent, en outre, en raison d'une irrecevabilité (demande prématurée ou trop tardive, non-acquittement de la contribution à l'aide juridictionnelle...).

Les juridictions soulignent, en effet, que l'instabilité des requérants et les difficultés qu'ils rencontrent dans la formulation de leur requête engendrent un nombre important de rejet des demandes.

En outre, bien que les demandeurs aient la possibilité de se faire assister par une association agréée de défense des personnes en situation d'exclusion, l'assistance des requérants est très inégale : au Tribunal administratif de Paris, seuls 40 % des requérants bénéficient d'une aide juridictionnelle et 20 % d'un soutien de la part d'une association agréée. A ces difficultés s'ajoute l'introduction récente de la contribution à l'aide juridictionnelle dont doivent s'acquitter les requérants.

Dans 5 % des cas, le recours se termine par un désistement ou un non-lieu. Les cas où l'État a rempli son obligation de résultat au moment où le juge se prononce sont donc très rares.

En outre, l'injonction prononcée par le juge administratif au titre du DALO est assortie d'une astreinte financière de manière quasi-systématique mais son efficacité est généralement réduite .

Sollicitées par l'intermédiaire de vos rapporteurs, les juridictions administratives estiment, de manière empirique, que la proportion de relogement résultant de leur intervention demeure assez faible : au tribunal administratif de Paris, sur les 4 400 dossiers de liquidation ouverts, seules 19 % des liquidations sont devenues définitives (il s'agit de demandeurs relogés ou ayant renoncé à leur demande), et le caractère définitif de la liquidation n'intervient qu'à l'issue de délais assez longs (plus de 12 mois). Le nombre de liquidations définitives serait, de surcroît, en baisse depuis 2011. Afin que l'audience permette de débloquer certaines situations, la préfecture devrait être représentée, ce qui, selon les informations transmises par la juridiction administrative à vos rapporteurs, est loin d'être la règle.

En outre, le système des astreintes auxquelles l'État est condamné connaît une forme de dévoiement :

- les premières astreintes prononcées par le tribunal administratif de Paris étaient de l'ordre d'environ 100 euros par jour en cas de non-relogement. La loi de mobilisation pour le logement du 25 mars 2009 est cependant venue encadrer le montant de l'astreinte en précisant que son montant est déterminé en fonction du loyer moyen du type de logement considéré comme adapté aux besoins du demandeur par la commission de médiation 15 ( * ) (à Paris, environ 150 euros par mois pour une personne), ce qui limite encore davantage leur caractère incitatif ;

- de plus, l'affectation de ces astreintes, intégrées au budget de l'État et dont la gestion demeure encore opaque, limite leur caractère pénalisant pour l'État. Vos rapporteurs estiment que la portée de la redistribution opérée au travers du fonds national d'accompagnement dans et vers le logement (FNAVDL), récemment mis en place, mériterait au moins une analyse approfondie. A leurs yeux, à l'avenir, les astreintes financières devraient être versées à un fonds associatif oeuvrant dans le domaine du logement et de l'insertion des personnes défavorisées dans un cadre permettant d'assurer un suivi précis de leur versement et de leur emploi.

Au total, tandis que le nombre de recours demeure insuffisant pour obtenir un réel effet de levier, les juridictions, qui font face à une charge croissante, peinent à percevoir la véritable plus-value de leur intervention. Quant aux requérants, très demandeurs mais peu au fait des arcanes de la procédure et déçus de ne pas obtenir de logement ou d'hébergement à l'issue directe du recours, ils ont le plus souvent un sentiment, au mieux, d'incompréhension, au pire, de défiance face à l'action publique . Rappelons en outre que le produit de l'astreinte ne leur est pas versé. Si le contentieux indemnitaire est amené à se développer, il est très peu probable qu'il puisse véritablement venir compenser les limites auxquelles le juge est confronté, sans compter la déception de requérants particulièrement fragiles 16 ( * ) .

c) Des interrogations juridiques qui subsistent

En tout dernier lieu, vos rapporteurs relèvent l'ambiguïté qui touche le statut juridique des commissions de médiation. Celles-ci sont souveraines mais comportent en leur sein des représentants de l'État et fonctionnent notamment à l'aide d'un secrétariat assuré par les services préfectoraux.

Ainsi, dans le cas où un préfet contesterait la décision d'une commission de médiation devant le tribunal administratif, se poserait la question de l'identité du défenseur car les commissions de médiation sont dépourvues de personnalité juridique propre.


* 13 Ce chiffre doit néanmoins être relativisé car il englobe la croissance tendancielle associée à ce type de recours.

* 14 Moins de 90 requêtes enregistrées par les cours administratives d'appel en 2011 sur un total d'affaires enregistrées de 28 301, soit 0,32 %; 55 requêtes au Conseil d'État en 2011 sur un total de 9 346 affaires enregistrées, soit 0,6 %.

* 15 Décret n°2010-164 du 22 février 2010 relatif aux juridictions administratives.

* 16 La responsabilité pour faute de l'État dans le cadre de demandes d'indemnisation a été reconnue sur le fondement du manquement à l'obligation de reloger un demandeur prioritaire et urgent et sur celui du manquement à l'obligation d'exécuter des décisions juridictionnelles. Le juge se réserve la possibilité de moduler l'indemnité. Le tribunal administratif a, par exemple, condamné l'État à des indemnités de 20 à 30 euros par personne et par mois pour trouble dans les conditions d'existence (soit entre 500 et 2000 euros par personne). A noter toutefois que, pour diverses raisons (défaut de demande préalable ou insuffisance de l'argumentaire), 38 % des demandes d'indemnisation sont rejetées par le juge.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page