IV. CONCLUSION

Aux termes de cette étude de prospective, il apparait que les conclusions de la délégation sénatoriale à la Prospective rejoignent celles exprimées par le Service Science et Innovation du Royaume-Uni dans le cadre du programme Foresight :

« Un rapport de cette envergure ne peut pas apporter des réponses détaillées aux problèmes complexes posés par la gestion de la vaste multitude de maladies qui affectent des pays dans l'ensemble du monde. Cela ne faisait pas partie des buts du projet, qui vise plus exactement à fournir des indications sur la manière dont la menace pourrait évoluer et sur les aspects pour lesquels il pourrait être utile d'envisager de développer des politiques . L'intention du projet n'était en outre pas de dire aux acteurs et partenaires quelles sont les mesures qu'ils devraient ou doivent prendre. Les conclusions qui en sont tirées sont plutôt destinées aux responsables de l'élaboration de politiques et aux parties prenantes pour qu'ils les examinent et les interprètent dans le contexte de leurs propres situations et processus de développement de politiques ».

En effet, l'objectif poursuivi dans un tel rapport est d'abord de fournir un signal de vigie sur un phénomène à venir, phénomène qui est certain, mais qui ne peut néanmoins pas faire l'objet d'une prédiction précise, ni dans ses causes, ni dans ses manifestations, ni dans ses conséquences, car les facteurs à prendre en compte sont trop nombreux et trop complexes pour être modélisés et mis en interaction les uns les autres.

Ce document s'adresse d'abord au public le plus large, mais aussi et en particulier aux décideurs politiques à qui revient la responsabilité de faire des choix pour l'avenir.

Au-delà d'une prise de conscience collective des enjeux du problème que représente l'évolution des pathogènes infectieux, le message s'adresse aussi à tous les acteurs de la santé publique, aux médias, aux transporteurs, aux responsables de la sécurité publique, aux enseignants, et, en général, à tous ceux qui se sentent concernés collectivement ou individuellement par des initiatives qu'ils seraient susceptibles de prendre en cas de crise épidémique.

En reprenant les analyses qui sous-tendent ce rapport, votre rapporteur aboutit ainsi à quelques conclusions principales qui peuvent être présentées sous la forme de dix leviers d'action. Ce sont ces dix leviers d'action qui encadrent les diverses propositions qui sont précisées plus loin dans ce rapport.

DIX LEVIERS D'ACTION POUR LUTTER CONTRE LES NOUVELLES MENACES
DES MALADIES INFECTIEUSES ÉMERGENTES

1. Faire prendre conscience aux opinions publiques de la globalisation du phénomène des maladies infectieuses émergentes et de l'importance des rapports Nord-Sud ;

2. Agir sur tous les facteurs d'émergence et de propagation des maladies infectieuses pour ralentir - ou mieux inverser - les grandes tendances observées (urbanisation, transports, concentrations humaines, modification de l'usage des sols, déplacements de population, méthodes d'élevage, etc...) à tous les niveaux d'organisation institutionnelle (international, national, régional, local) ;

3. Considérer la prévention de la diffusion des maladies infectieuses émergentes comme une grande cause collective de l'humanité et de ce fait empêcher et réprimer les actes qui concourent à l'augmentation des menaces (comme les trafics alimentaires, les déplacements de population, la modification des méthodes culturales traditionnelles, la diffusion de polluants, l'introduction non autorisée d'espèces sauvages etc..) ;

4. Faire progresser l'information des populations du Nord comme du Sud sur les pathologies, les vecteurs et les prophylaxies des maladies émergentes , en particulier pour celles qui sont localement ou régionalement les plus menaçantes ;

5. Inventer ou développer des méthodes de concertation pluri-disciplinaires les plus larges (santé, histoire, sociologie, communication, transports, géographes, etc...) associant des praticiens, des chercheurs ou des industriels des métiers les plus concernés pour créer des liens de confiance et faciliter la mise en place de dispositifs d'urgence en cas de pandémies ;

6. Réintroduire des protocoles classiques de lutte contre les pandémies (isolements, quarantaines, hygiène publique, etc...) et travailler sur les moyens de pallier aux nouvelles exigences en termes de volumes et de coûts de la sécurité sanitaire dans le domaine des transports de personnes, de biens et de marchandises ;

7. Promouvoir de nouveaux outils d'intervention sur les maladies infectieuses émergentes (observations spatiales, constitution de bases de données épidémiologiques avec le recours aux téléphones portables et à internet, modélisation des phases de diffusion pour les différents types de maladies, etc...) ;

8. Réguler les mouvements de praticiens de la santé des pays du Sud vers les pays du Nord et au sein des pays du Nord entre les pays demandeurs de praticiens et les pays exportateurs de praticiens (notamment par la sanctuarisation de la prise en charge financière des personnels de santé dans les pays les plus démunis) pour éviter les déserts médicaux dans les zones géographiques touchées par des crises économiques ou politiques ;

9. Soutenir et orienter la recherche sur les vaccins et les thérapeutiques des maladies infectieuses par un rapprochement des politiques menées par les organisations internationales sur les santés humaines et animales (FAO, ONU-Habitat, OMS) et les organisations régionales ou sous-régionales ;

10. Faire des efforts d'organisation de la logistique de terrain pour l'acheminement des vaccins, des médicaments et le transfert de souches de pathogènes dans les zones les plus difficiles d'accès et encourager la coopération décentralisée entre collectivités locales du Nord et du Sud .

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