V. AUTRES PROPOSITIONS

A. FAVORISER LA COLLABORATION ENTRE ENTREPRISES ET ORGANISMES PUBLICS DE RECHERCHE

L'assiette du CIR est doublée pour les jeunes docteurs et les dépenses sous-traitées à des organismes publics. Les sommes en jeu sont modestes, mais les dépenses correspondantes (après doublement) ont fortement progressé entre 2007 et 2010. Elles sont passées respectivement de 0,5 % à 0,7 % et de 2,7 % à 3,4 % des sommes déclarées au CIR.

De plus, pendant la même période, le nombre d'entreprises déclarantes ayant recruté des jeunes docteurs a doublé, pour atteindre 886 ; et le nombre d'entreprises faisant appel à des laboratoires publics a progressé de 86 %, atteignant 2 583.

Ainsi, selon le MESR, « depuis 2008, les dépenses relatives à des travaux confiés à des institutions publiques de recherche ont augmenté plus rapidement que les dépenses externalisées auprès d'entreprises » 164 ( * ) .

Le CIR semble donc favoriser le décloisonnement entre recherche publique et recherche privée. L'enjeu du développement des dépenses privées externalisées vers des organismes publics concerne moins l'augmentation quantitative de ces dépenses que la valorisation de la recherche publique.

Les dispositifs relatifs aux jeunes docteurs et à la sous-traitance n'en devraient pas moins être évalués, et, le cas échéant, améliorés, voire renforcés. L'évaluation pourrait, en particuliers, comparer les simples dépenses sous-traitées et celles relevant de véritables partenariats ou de travaux collaboratifs entre les institutions de recherche publique et le secteur privé.

1. La majoration du CIR pour les jeunes docteurs

L'article 244 quater B du code général des impôts prévoit que lorsque les dépenses de personnel entrant dans l'assiette du CIR « se rapportent à des personnes titulaires d'un doctorat ou d'un diplôme équivalent, elles sont prises en compte pour le double de leur montant pendant les vingt-quatre premiers mois suivant leur premier recrutement à condition que le contrat de travail de ces personnes soit à durée indéterminée et que l'effectif salarié de l'entreprise ne soit pas inférieur à celui de l'année précédente ».

• Une première question qui se pose est celle de la pertinence de la condition de non diminution des effectifs globaux (qu'ils soient ou non consacrés à la recherche).

En effet, il en résulte qu'une entreprise réduisant ses effectifs globaux en raison de difficultés économiques ne peut pas bénéficier de la mesure. Selon le MESR, il s'agit d'éviter que la mesure se traduise par un simple effet de substitution (les entreprises remplaçant une partie de leur personnel de recherche par de jeunes docteurs). La référence aux effectifs globaux vient quant à elle de la difficulté technique qu'il y aurait à définir les personnels affectés à la R&D.

On pourrait toutefois envisager, par exemple, de remplacer la condition de stabilité des effectifs par une condition de stabilité des dépenses de personnel déclarées au CIR, ou - ce qui serait préférable, car plus lisible - de la supprimer purement et simplement.

• Plus fondamentalement, on peut s'interroger sur l'efficacité du doublement du CIR pour les jeunes docteurs en période de croissance normale ou forte.

En effet, selon le Trésor 165 ( * ) le renforcement du CIR en 2008 implique de faire temporairement passer de 6 000 à 11 000 le nombre d'embauches annuelles de chercheurs par les entreprises. Si la crise a retardé ce besoin, il n'en devrait pas moins se manifester au cours des prochaines années. Le dispositif en faveur des jeunes docteurs risque alors de correspondre à un pur effet d'aubaine.

• En forçant le trait, on pourrait même affirmer que le dispositif actuel ne sert à rien.

En effet, soit la croissance est faible, et alors les entreprises réduisent leurs effectifs globaux, et ne peuvent donc en bénéficier ; soit elle est normale ou forte, et alors le renforcement du CIR en 2008 permettra aux jeunes chercheurs de trouver un emploi quoi qu'il arrive.

• Il est donc urgent d'évaluer le « dispositif jeunes docteurs ».

Le MESR a lancé une étude en ce sens. Il précise que cette analyse doit tenir compte des autres dispositions en faveur des docteurs, en particulier les contrats doctoraux et les conventions industrielles de formation par la recherche (CIFRE). Votre rapporteur spécial considère qu'elle devra également mesurer si le degré d'incitation au recrutement des jeunes docteurs est différent selon la taille de l'entreprise (PME ou grand groupe notamment) et selon les branches d'activité (impact des pôles d'activité...).

• François Hollande a annoncé, le 5 mars 2012, que le dispositif en faveur des jeunes docteurs serait renforcé 166 ( * ) .

Les résultats de l'évaluation en cours pourraient permettre de déterminer la nature de ce renforcement (suppression de la clause de stabilité des effectifs, augmentation du coefficient de majoration...).


* 164 MESR, « Chiffres CIR 2010 », mai 2012, page 8.

* 165 Paul Cahu, Lilas Demmou, Emmanuel Massé, « Les effets économiques de la réforme du crédit d'impôt recherche de 2008 », Trésor-éco n° 50, janvier 2009.

* 166 « Nous renforcerons l'incitation à embaucher des docteurs dans l'assiette du CIR » (François Hollande, discours au biopôle de Nancy, 5 mars 2012).

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