II. LA COOPÉRATION DÉCENTRALISÉE : DES ACTIONS MULTIPLES ET DIVERSES SUR LES CINQ CONTINENTS, TÉMOIGNANT DU SAVOIR-FAIRE DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

A. UN NOMBRE CROISSANT DE COLLECTIVITÉS PARTICIPANTES

1. 4 800 collectivités

Aujourd'hui, on dénombre 4 806 collectivités territoriales, qui interviennent dans près de 140 pays. En France, 26 régions , plus de 80 départements sur 101, toutes les grandes villes , ainsi que de très nombreuses communes de toutes tailles sont impliqués. En outre, environ 250 intercommunalités mènent des actions de coopération décentralisée, un nombre en croissance ces dernières années. Ce sont plus de 12 000 actions de coopérations décentralisées qui sont menés.

La contribution financière de ces quelques 4 800 collectivités territoriales et établissements publics de coopération intercommunale français est non négligeable. L'aide publique au développement des collectivités territoriales et des EPCI s'élève en 2010 à 60,5 millions d'euros. Selon les estimations, l'effort d'APD devrait atteindre 65 millions d'euros en 2011 (déclaration en 2012) et 70 millions en 2012 et 2013 9 ( * ) . Entre 2003 et 2009, l'aide publique au développement déclarée par les collectivités locales est passée de 46 millions d'euros à près de 60 millions d'euros ; une augmentation en sept ans de 24 millions d'euros , soit de 35% par rapport à 2003. Ces montants ne prennent pas en compte les effets de levier induits par les actions des collectivités territoriales.

Montants en millions d'euros de l'APD des collectivités territoriales
déclarée par année (2003- 2010) 10 ( * )

Année 2003

(déclarée 2004)

Année 2004

(déclarée 2005)

Année 2005

(déclarée 2006)

Année 2006

(déclarée 2007)

45,4

46,6

45,5

57,6

Année 2007

(déclarée 2008)

Année 2008

(déclarée 2009)

Année 2009

(déclarée 2010)

Année 2010

(déclarée 2011)

62,2

72,5

69,7

60.5

La diminution des montants d'APD des collectivités territoriales en 2010 ne signifie toutefois pas que la coopération décentralisée marque le pas , et ce pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, ces montants résultent de déclarations volontaires de la part des collectivités territoriales. Or, toutes ne le font pas. L'étude réalisée par l'agence COOP DEC Conseil sur l'APD de l'ensemble des régions des départements, des villes de plus de 100 000 habitants et des 16 communautés urbaines en 2010 souligne que « beaucoup de collectivités qui ont pour habitude d'allouer un montant conséquent au titre de l'APD n'ont pas déclaré leur contribution en 2010 », avant de conclure : « plus de 60 % des départements, des villes et des communautés urbaines n'ont pas télédéclaré leur APD en 2011 » . C'est notamment le cas du conseil régional du Provence-Alpes-Côte d'Azur, dont le budget « relations internationales » s'élève pour 2010 à 7 millions d'euros, du conseil régional des Pays-de-la-Loire, dont le budget concerné est supérieur à un million d'euro ou encore du conseil général du Nord, dont l'APD s'élève à 800 000 euros en 2010 11 ( * ) .

Nombre de déclaration par an et selon les collectivités 12 ( * )

)

Villes de plus de 100 000 hab.

(sur 40)

Communautés urbaines

(sur 16)

Total

(sur 182)

2007

17

51

24

4

96

2008

22

62

29

6

119

2009

20

43

18

4

85

2010

19

47

20

4

90

2011

21

40

15

4

80

En outre, la variation d'APD déclarée par une collectivité territoriale d'une année sur l'autre s'explique aussi par des modifications comptables dans le calcul de l'APD ou encore par la mise en place de projets pluriannuels dont le coût n'est pas également réparti d'une année sur l'autre.

De manière générale, les montants d'APD des collectivités territoriales sont connus de manière parcellaire. En effet, il y a un consensus sur le fait que les dépenses sont sous-estimées. L'absence de déclaration de la part de certaines collectivités constitue l'une des raisons. Sur la période 2008-2010, près de 47% des régions, départements, villes de plus de 100 000 habitants ou communautés urbaines n'ont pas déclaré d'APD 14 ( * ) .

En outre, certains frais ne sont pas comptabilisés : à titre d'exemple, le salaire des agents travaillant dans le domaine de la coopération décentralisée n'est pas pris en compte.

Il en est souvent de même pour les frais liés au déplacement. L'agence Coop Dec Conseil estime de 25 à 30 millions d'euros les montants non comptabilisés dans ce domaine 15 ( * ) .

Troisième facteur, la déclaration des montants d'APD reste encore très cloisonnée et se fonde principalement sur le budget « relations internationales ». Or, certaines actions d'autres services, tel celui de la jeunesse et de la culture, peuvent contribuer aux actions de coopération décentralisée 16 ( * ) .

Pour sa part, le site du ministère des Affaires étrangères reprend un montant déjà ancien, proposé par notre collègue Charles Guené dans son rapport de 2005 17 ( * ) sur la proposition de loi relative au renforcement de la coopération décentralisée en matière de solidarité internationale, et estime à 230 millions d'euros les montants consacrés à l'action internationale des collectivités territoriales, dont la moitié environ, soit 115 millions d'euros, est dirigée vers des partenaires des pays en voie de développement.

Pour les montants déclarés, l'analyse de la ventilation des montants de l'aide publique au développement par niveau de collectivités territoriales met en lumière les points suivants :

• les régions sont les collectivités allouant le plus de financement à l'aide publique au développement avec près de 39 millions d'euros en 2009. Leurs contributions représentent plus de 55% de l'aide publique locale au développement. On constate par ailleurs une augmentation de 14 millions en sept ans, soit de près de 63% depuis 2003.

• les montants alloués par les groupements de communes ont été multipliés par 4 entre 2005 et 2009, pour atteindre près de 5,4 millions d'euros.

Montants de l'APD par niveau de collectivités territoriales (2003-2009)

(source : délégation pour l'action extérieure des collectivités territoriales)

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Régions

24 570 296

23 572 227

17 439 948

29 288 036

28 650 002

37 790 852

38 834 270

Départements

15 770 466

14 583 050

12 815 482

15 916 250

16 322 308

13 322 509

11 004 030

EPCI

Non demandé

Non demandé

1 356 699

3581 116

4 561 261

6 519 557

5 397 636

Villes
> 100 000 hab.

6 344 814

7 221 469

7 703 111

6 025 092

8 804 382

9 140 473

9 827 623

Villes
< 100 000 hab.

Non demandé

Non demandé

6 241 824

2 874 021

3 671 326

5 747 463

4 727 693

Total

45 376 746

46 685 576

45 557 064

57 684 515

62 173 646

72 520 854

69 791 252

Répartition par niveau de collectivités territoriales pour 2009

2. L'existence d'un réel savoir-faire et d'une valeur ajoutée des actions menées par les collectivités territoriales

Au-delà du seul aspect financier, la coopération décentralisée apporte une réelle plus-value aux actions internationales et d'aide au développement menée tant par l'Etat que par les associations. En effet, il existe souvent des liens privilégiés entre la collectivité française et la collectivité étrangère.

La coopération décentralisée se distingue tout d'abord par le dialogue entre élus, entre pairs qu'elle instaure . Comme le soulignait Alain Juppé, alors ministre des Affaires étrangères et maire de Bordeaux, en déplacement à Oran dans le cadre du jumelage entre Bordeaux et Oran, « la coopération décentralisée donne un caractère humain et de proximité aux relations bilatérales ».

Témoin de cette relation de proximité, les tensions diplomatiques entre la France et la Chine entre 2007 et 2009 n'ont pas eu d'impact sur les relations entre collectivités, alors qu'elle a entravé les relations au niveau ministériel. Ainsi, le comité de pilotage de l'accord franco-chinois dans le domaine du développement urbain durable signé en 2007 n'a vu le jour qu'en 2010 18 ( * ) .

La dimension politique est l'un des éléments constitutifs de la coopération décentralisée. Portée par des convictions fortes fondées au lendemain de la Seconde guerre mondiale sur un idéal de rapprochement entre les peuples puis de solidarité internationale, la coopération décentralisée fait l'objet, dans l'immense majorité des collectivités, d'un consensus entre majorité et opposition . Ainsi, un changement de majorité de l'organe exécutif ne remet pas en cause les projets menés et en cours.

Cette dimension politique devient un facteur de légitimité de l'action mais permet également d'inscrire dans la durée l'action de la coopération décentralisée . En effet, contrairement aux actions d'ONG ou encore de l'Agence française de développement (AFD), où le partenariat ne dure que le temps de la mission ou du projet d'investissement, les actions de coopération décentralisée sont ancrées dans un partenariat existant pour certains depuis de nombreuses années, voire décennies. L'Agence française de développement souligne d'ailleurs que la collectivité française « peut souvent être présente avant, pendant et après le projet d'investissement financé par l'Agence française du développement » . La collectivité française peut ainsi, en amont du projet, aider l'AFD à identifier les besoins de la collectivité du Sud et assurer « un accompagnement après projet qui peut permettre d'assurer sa viabilité. La coopération décentralisée permet ainsi à l'AFD d'améliorer la qualité du projet et la durabilité de ses impacts » 19 ( * ) .

En outre, les collectivités locales françaises disposent d'une expertise propre, aujourd'hui recherchées par les collectivités du Sud qui répondent aux objectifs du millénaire et de développement fixés par les institutions internationales et l'Union européenne : expertise dans des secteurs propices à la réduction de la pauvreté, notamment en matière d'urbanisation, d'assainissement et de gestion des déchets, savoir-faire en matière de gouvernance locale et d'appui institutionnel, ou encore expérience en matière de transport, de développement durable, de santé et de prévention ou encore d'ingénierie.

Enfin, les collectivités territoriales françaises disposent d'une capacité à mobiliser d'autres acteurs locaux, qu'il s'agisse d'associations, d'entreprises locales, d'agences locales d'urbanisme, d'agences de l'eau, de régies, d'autorités organisatrices de transports ou encore de parcs naturels régionaux, d'hôpitaux, d'universités et de chambres consulaires. Dans son étude intitulée « Bilan et caractérisation de la coopération décentralisée dans le secteur Eau et assainissement », le programme Solidarité Eau (pS-Eau) a calculé l'effet levier moyen sur un échantillon de 44 projets. Il est de 4 : 1 euro apporté par la collectivité permet de mobiliser 3 euros de cofinancement. Parmi les cofinanceurs locaux, on peut citer les autres niveaux de collectivités ou l'intercommunalité, les syndicats des eaux ou de l'assainissement, mais également des comités de jumelage, des associations, des fondations et entreprises 20 ( * ) .

3. Le ministère des Affaires étrangères et européennes, l'Agence française de développement, l'Union européenne, Cités Unies France : 4 partenaires des collectivités territoriales
a) Le ministère des Affaires étrangères et européennes

Instituée en 1983, la Délégation pour l'action extérieure des collectivités territoriales est le point d'entrée pour l'appui à l'action internationale des collectivités françaises . La circulaire du 26 mai 1983 nommant le premier délégué pour l'action extérieure des collectivités locales témoigne d'une certaine suspicion initiale du gouvernement français face à la diplomatie des villes, départements et régions. En effet, le texte précise que cet agent exerce les missions suivantes :

• recueillir les informations concernant les relations entretenues pas des collectivités locales françaises avec des collectivités locales étrangères, en faire l'analyse et appeler l'attention du gouvernement sur les problèmes qui peuvent se poser à cet égard ;

• apporter un concours aux commissaires de la République pour tout ce qui touche à l'action extérieure des collectivités locales ;

• assurer une action générale de coordination entre les différents services des administrations centrales de l'Etat, notamment ceux du ministère de l'Intérieur et de la Décentralisation et ceux du ministère des Relations extérieures, pour les problèmes touchant à l'action extérieure des collectivités locales.

Aujourd'hui, ses missions ont évolué. Ainsi, la Délégation pour l'action extérieure des collectivités territoriales, outre son rôle de coordonner l'action interministérielle et de veiller à la cohérence de l'action extérieure de l'Etat et des collectivités territoriales, appuie la coopération décentralisée . Ainsi, elle apporte un soutien juridique aux collectivités locales qui le souhaitent et joue le rôle d'interface avec les ambassades et les préfectures.

Elle est également un cofinanceur important. En outre, elle assure le secrétariat de la Commission nationale de la coopération décentralisée. Enfin, elle travaille à une meilleure mise en cohérence et à une mutualisation de l'action extérieure des collectivités territoriales. A ce titre, elle agit en concertation avec les associations d'élus et soutient les réseaux régionaux de mutualisation.

L'aide au financement de la DAECT s'élève pour 2011 à 9,8 millions d'euros . Le cofinancement est l'outil à la disposition du ministère des Affaires étrangères et européennes pour orienter l'action extérieure des collectivités territoriales. En effet, pour être éligibles, les projets doivent respecter des critères à la fois thématiques et géographiques. Trois grandes thématiques ressortent des appels à projets proposés depuis 2009 : l'appui institutionnel, le développement durable et le développement des territoires.

La DAECT dispose de plusieurs outils financiers, que l'on peut regrouper en trois catégories :

- appels à projets triennaux : le dernier proposé concerne la période 2010-2012. Le ministère constate à ce sujet une augmentation du nombre de dossiers déposés par les collectivités territoriales, témoin « de l'appropriation par les collectivités territoriales de cet outil » ;

- appels à projets annuels ;

- programmes bilatéraux et fonds spécifiques.

Ventilation des cofinancements pour l'année 2011

Tranche annuelle des appels à projets triennaux 2010-2012

Appels à projets annuels 2011

Programmes bilatéraux et fonds spécifiques

Financement des réseaux régionaux

Autres financements (associations nationales, réseaux thématiques, rencontre de la coopération décentralisée)

5,3 millions

1,7 million

700 000 euros

640 000 euros

200 000 euros

L'effet de levier des cofinancements de la DAECT est d'un peu plus de 1 à 5.

Un nouveau programme intitulé programme d'appui à la coopération thématique des collectivités territoriales (PACT 2) a été instauré. Sur la base du volontariat, il permet aux collectivités locales de se faire référencer dans un domaine d'excellence sur des sujets techniques ou de qualification de gouvernance.

Pour le ministère, ce nouveau programme répond à deux objectifs :

- développer les coopérations décentralisées dans les pays où les collectivités sont peu présentes ;

- répondre aux demandes de coopération des pays du Sud dans la bourse-projets de la coopération décentralisée.

Pour les collectivités territoriales, il s'agit de la reconnaissance à l'international de leur savoir-faire au moyen d'un label officiel.

Près de soixante dossiers ont été déposés et une trentaine d'expertises ont pour l'instant été labellisés, témoignant de la diversité des savoir-faire des collectivités françaises.

Le programme d'appui thématique des collectivités territoriales PACT 2

Le PACT 2 comporte deux parties distinctes. Premièrement, il instaure un label « expertise internationale ». Deuxièmement, il doit permettre la mise en place de missions de coopération thématique sur un sujet spécifique, soit sur l'initiative de la collectivité, soit sur demande du ministère. La collectivité territoriale indique les conditions et contraintes qu'elle pose à la mobilisation de son expertise, comme par exemple le nombre de jours mobilisables par an ou les contraintes de durée (missions ponctuelles ou plus longues).

Un jury composé de représentant des organisations siégeant à la CNCD (ministères et associations nationales d'élus) arrêtera la liste des collectivités retenues, avec les compétences et savoir-faire correspondants.

Le ministère des Affaires étrangères prend à sa charge l'ensemble des frais externes des missions (en particulier l'hébergement et les frais de transport), la collectivité territoriale mettant le personnel ou les élus concernés à la disposition de ces missions.

Exemples de collectivités ou organismes labellisés ainsi que leur champ d'expertise :

- Association des maires de France : aide à la structuration d'associations d'élus

- Conseil national de la fonction publique territoriale : formation des agents des collectivités territoriales

- Comité départemental du tourisme de la Lozère : tourisme culture/patrimoine

- Communauté d'agglomération de Seine-Eure : expertise internationale eau et assainissement

- Conseil général d'Ille-et-Vilaine : crédit carbone

- Conseil général de Dordogne : filière bois

- Conseil régional de Basse-Normandie : droits de l'Homme, médiation : gestion des conflits et éducation mémorielle

- Ville d'Issy-les-Moulineaux : e-administration/informatique (TIC)

b) L'Agence française de développement (AFD)

L'Agence française de développement est l'opérateur pivot de l'aide bilatérale française. Elle est devenue, depuis la moitié de la dernière décennie, un autre partenaire important de la coopération décentralisée. Fait révélateur, le directeur général de l'Agence est membre de droit de la Commission nationale de coopération décentralisée depuis 2006. Elle s'est rapprochée des collectivités territoriales tant du sud que françaises et travaille désormais en complémentarité de la coopération décentralisée, car ces dernières interviennent dans un grand nombre de pays où l'AFD mène également des projets.

Traditionnellement, l'Agence française de développement travaille souvent directement avec les collectivités territoriales du Sud, pour financer des projets d'infrastructures. Le prêt direct à une collectivité étrangère ou à un opérateur local est d'ailleurs une forte spécificité de l'Agence française de développement. Elle cherche désormais à s'appuyer sur l'expertise des collectivités françaises et de leurs organismes. Elle promeut ainsi des partenariats tripartites entre l'Agence française de développement, la collectivité française et la celle du Sud : la collectivité française intervient en appui du prêt de l'opérateur à son partenaire du Sud. A ce jour, l'Agence a signé une vingtaine d'accords avec des collectivités ou des associations d'élus et mène environ 90 projets en collaboration ou en co-construction.

Aujourd'hui, lorsque l'Agence initie un projet, elle associe autant que possible la collectivité territoriale française déjà partenaire de la collectivité du Sud bénéficiaire. De même, lorsqu'aucune coopération décentralisée n'existe, l'Agence française de développement cherche à identifier un partenaire français. Dans cet esprit, elle pourra s'appuyer sur le PACT 2 pour mobiliser l'expertise territoriale.

Les statuts de l'Agence ont été modifiés en 2009, lui permettant désormais d'octroyer des subventions à des institutions du Nord.

Cependant, il existe plusieurs obstacles liés à l'organisation et au mode de fonctionnement de l'Agence française du développement. En effet, les projets financés et les prêts aux collectivités du Sud représentent un investissement très élevé qui n'est accessible qu'aux grandes collectivités. Même les concours locaux de faible montant mis en place en 2007 afin de financer des opérations de petites tailles peuvent représenter des sommes importantes pour les petites et moyennes collectivités. A titre d'exemple, pour pouvoir bénéficier de ces concours locaux, le coût du projet doit être compris entre 300 000 euros et 750 000 euros, pour une durée de 2 à 3 ans.

En outre, il est également difficile d'obtenir un cofinancement pour un partenariat avec des petites villes ou des zones rurales . Souvent, dans ces cas, l'Agence française de développement soutient une politique nationale , par exemple en finançant un fonds d'appui à la décentralisation ou au développement urbain. Les collectivités françaises ont ainsi du mal à s'insérer dans ce processus .

L'AFD monte également des projets ciblant un réseau de villes. Dans ces cas, l'AFD a des difficultés à trouver des collectivités françaises intéressées, ou à moduler ses actions en fonctions des partenariats préexistants.

Enfin, en ce qui concerne les actions en zone rurale, les projets de développement rural de l'opérateur français ont soit une dimension nationale, soit concernent généralement des zones territoriales importantes plus vastes que celles avec lesquelles les collectivités françaises établissent des partenariats.

c) Cités Unies France

Cités Unies France réunit, depuis 1975, les collectivités territoriales françaises qui ont une action internationale. Elle rassemble près de 500 collectivités françaises et leurs groupements , dont la quasi-totalité des régions françaises, plus d'un quart des départements, presque toutes les grandes villes, un pourcentage important des villes moyennes, ainsi que de nombreuses communes de taille plus modeste. On constate également une adhésion progressive des intercommunalités. L'une de ses principales missions, renforcée par la convention triennale qu'elle a signée avec le Ministère des affaires étrangères et européennes, est l'animation et la coordination des actions des collectivités territoriales . Pour cela, elle a mis en place une quarantaine de « groupes pays », qui réunissent les collectivités françaises travaillant dans un même pays afin de mutualiser et capitaliser les expériences et d'impulser des actions concertées.

En outre, Cités Unies France a signé une convention cadre avec l'Agence française du développement afin d'approfondir leurs relations .

Actions de Cités Unies France en 2010

- Organisation de 60 réunions de groupes-pays et thématiques

- Aide à l'organisation de 8 assises bilatérales en Asie, en Afrique et en Europe où les élus de 165 collectivités françaises ont pu rencontrer leurs homologues

- Organisation du premier Forum pour la coopération internationale des collectivités locales, qui est devenu le rendez-vous annuel de tous les acteurs de la coopération décentralisée

- Représentation de ses adhérents dans les grands évènements internationaux et auprès des organisations internationales

- Mise en place de formations, notamment sur les financements européens

- Publication d'études

d) L'Union européenne

L'Union européenne est également un partenaire récent pour les collectivités territoriales françaises dans leurs actions extérieures. Toutefois, il est important de noter que l'Union européenne a une conception beaucoup plus large de la coopération décentralisée. Les acteurs de la coopération décentralisée sont ainsi, dans cette conception « les pouvoirs publics locaux (y inclus municipaux), les organisations non gouvernementales, les organisations de populations autochtones, les groupements professionnels et groupes d'initiatives locaux, les coopératives, les syndicats, les organisations représentatives des acteurs économiques et sociaux, les organisations locales (y inclus les réseaux) qui oeuvrent dans le domaine de la coopération et de l'intégration régionales décentralisées, les organisations de consommateurs, les organisations de femmes ou de jeunes, les organisations d'enseignement, culturelles, de recherche et scientifiques, les universités, les églises et associations ou communautés religieuses, les médias, et toutes associations non gouvernementales et fondations indépendantes susceptibles d'apporter leur contribution au développement 21 ( * ) ».

Le début de la coopération décentralisée communautaire date des années 90. Lors de la Convention de Lomé IV avec les pays Afrique-Caraïbes-Pacifique, l'Union européenne souhaite mettre en place une approche novatrice , en associant les collectivités locales et la société civile. De même, des programmes pour financer des projets entre villes, comme URBAL entre villes européennes et villes d'Amérique latine, sont instaurés à partir de 1994.

Les différentes conférences internationales et les objectifs du Millénaire visant à réduire la pauvreté vont inciter l'Union européenne à mieux associer les autorités locales des pays bénéficiaires et des pays européens. Le consensus européen sur le développement du 20 décembre 2005 en est l'une des premières manifestations européenne. Ainsi « l'Union européenne encourage une participation accrue des assemblées nationales, des parlements et des autorités locales ». Ce texte coïncide avec le rapport du Parlement européen présenté par Pierre Shapira , qui sera adopté à l'unanimité, qui souligne l'expertise et la plus-value des autorités locales en matière de développement et insiste sur la nécessité d'impliquer les autorités locales pour atteindre les objectifs du millénaire pour le développement. Pour la première fois, il est demandé à la Commission « d'appuyer et de renforcer la coopération directe des autorités locales européennes avec leurs partenaires internationaux », mais surtout, il est souligné « qu'il est important de bien distinguer la spécificité des autorités locales par rapport aux "acteurs non étatiques" » 22 ( * ) .

Cela se traduit financièrement par l'instauration, pour la programmation 2007-2014, d'un programme thématique de financement intitulé « les acteurs non étatiques et les autorités locales dans le développement » d'un montant de 1,6 milliard d'euros sur sept ans, en appui des programmes géographiques et en complément des autres programmes thématiques. La Commission européenne, dans sa communication du 8 octobre 2008 intitulée « Les autorités locales : des acteurs en faveur du développement » souligne explicitement l'importance du rôle des autorités locales et la nécessité de leur accorder une place plus importante dans la définition et la mise en oeuvre de le politique du développement. Une série de mesures tire la conséquence de ce constat :

- mise en place d'un dialogue structuré par des assises de la coopération décentralisée ;

- recensement de la coopération décentralisée en Europe par un atlas de la coopération décentralisée ;

- instauration d'une plateforme d'échange d'informations mettant en relation les autorités locales et d'une bourse de la coopération décentralisée.

Ces deux dernières mesures sont directement inspirées des outils homologues existant en France.

Conséquence de cette reconnaissance, en 2008, les autorités locales sont invitées à participer à un dialogue informel dit « Palerme II » entre la Commission européenne, la société civile européenne, le Parlement européen et les Etats membres, sur la participation de la société civile dans la mise en oeuvre de l'aide au développement de l'Union européenne. Il fait suite à un dialogue informel lancé en 2003 sur le même thème ne concernant que les ONG.


* 9 Document de politique transversale relative à la politique française en faveur du développement, p. 86. PLF 2012.

* 10 S ource : Délégation extérieure pour l'action des collectivités territoriales et document de politique transversale relatif à la politique française en faveur du développement, PLF 2012.

* 11 Etude sur les déclarations réalisées en 2012 de l'Aide Publique au Développement 2011 des collectivités territoriales françaises, Agence COOP DEC Conseil, septembre 2012, p. 13.

* 12 Etude sur les déclarations réalisées en 2012 de l'Aide Publique au Développement 2011 des collectivités territoriales françaises, Agence COOP DEC Conseil, septembre 2012, page 12.

* 13 Le budget de Paris est comptabilisé dans la catégorie ville de plus de 100 000 habitants.

* 14 Etude sur la déclaration de l'Aide Publique au Développement par les collectivités territoriales françaises, Agence Coop Dec Conseil, décembre 2011.

* 15 Elle intègre notamment dans son calcul le salaire de 500 agents des collectivités territoriales travaillant à temps plein pour l'action internationale des collectivités territoriales en faveur du développement sur les 1 800 agents territoriaux travaillant dans le domaine des relations internationales.

* 16 Etude sur les déclarations réalisées en 2012 de l'Aide Publique au Développement 2011 des collectivités territoriales françaises, Agence Coop dec Conseil, septembre 2012, page 31.

* 17 Rapport n°29 (2005-2006) de M. Charles Guené, au nom de la commission des Lois, sur la proposition de loi relative au renforcement de la coopération décentralisée en matière de solidarité internationale, déposé le 19 octobre 2005.

* 18 Evaluation de la coopération décentralisée franco-chinoise réalisée par Technopolis Groupe France, ministère des Affaires étrangères et européennes, mai 2011, p.117.

* 19 « Travailler avec les collectivités territoriales françaises et les acteurs de la coopération décentralisée », AFD, décembre 2011.

* 20 « Bilan et caractérisation de la coopération décentralisée dans le secteur Eau et assainissement », pS-Eau, juin 2010, p.37 et suivantes.

* 21 Règlement (CE) n° 625/2004 du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 prorogeant et modifiant le règlement (CE) n° 1659/98 relatif à la coopération décentralisée.

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