3. La coopération décentralisée : quels liens avec le Pacifique ?

M. Paul Raoult, Maire de Le Quesnoy, commune jumelée avec Cambridge (Nouvelle-Zélande)

La relation très particulière qui unit la ville française de Le Quesnoy à la Nouvelle-Zélande est à vrai dire totalement le fruit du hasard. Il se trouve qu'au cours de la première guerre mondiale, toute une partie du front occidental située dans le Nord-Pas-de-Calais était dévolue du côté des Alliés au corps expéditionnaire britannique, lequel incluait des troupes venues d'outre-mer, et notamment des Australiens et Néo-Zélandais, qui avaient déjà combattu à Gallipoli lors de la sanglante tentative de débarquement aux Dardanelles.

Pendant l'ultime offensive de la Grande guerre, ces Néo-Zélandais vont, pour la première fois, combattre sous leurs propres couleurs et non en tant que Britanniques expatriés. Le 4 novembre 1918, ils remportent leur première victoire en libérant Le Quesnoy, ville fortifiée à l'époque espagnole et sous Louis XIV par Vauban, dont l'enceinte était alors intacte, d'où de rudes combats au cours desquels les soldats néo-zélandais manifestèrent héroïquement leur bravoure.

Cette bataille fondatrice joue donc pour la Nouvelle-Zélande un rôle comparable à celui de Bouvines pour la France ou encore, plus près de nous, celle de Bir Hakeim pour la France Libre. Elle est à l'origine d'une relation qui n'a cessé de se fortifier depuis bientôt un siècle.

En effet, les échanges entre Le Quesnoy et la Nouvelle-Zélande n'ont cessé de s'intensifier d'année en année. Lors de chaque Anzac Day, jour commémorant la mort des soldats australiens et néo-zélandais sur les champs de bataille qui a lieu chaque dernier week-end d'avril, des représentants de la Nouvelle-Zélande et de la France sont présents au Quesnoy. En 2003, le Premier Ministre néo-zélandais lui-même, Mme Helen Clark, a participé aux cérémonies.

Le Quesnoy, étymologiquement « cité des chênes », a développé un jumelage de fait qui a été récemment formalisé avec la ville néo-zélandaise de Cambridge, ou Waikato en maori, ce qui signifie « la ville des arbres », située dans l'île du Nord près d'Hamilton, quatrième ville de Nouvelle-Zélande, à environ 150 km au sud-ouest d'Auckland.

Au-delà de ce clin d'oeil de l'histoire, le choix de cette ville jumelle s'explique aussi parce que le curé de Cambridge, le Révérend CE Mortimer-Jones, qui avait exercé en France comme aumônier militaire, avait pour adjoint le révérend Walter Averill (fils de l'évêque du diocèse d'Auckland et archevêque de Nouvelle-Zélande), dont le frère Leslie, sous-lieutenant, joua un rôle primordial le 4 novembre 1918.

D'ailleurs, dans l'église Saint Andrews de Cambridge, plusieurs vitraux sont dédiés au sacrifice des troupes néo-zélandaises. Le triptyque de vitraux qui commémore le premier conflit mondial montre les soldats en train d'escalader les murs du Quesnoy. Ces vitraux furent dévoilés, en décembre 1923, le jour de l'inauguration en France du monument aux Néo-Zélandais érigé sur les remparts de la ville à l'endroit exact de l'assaut.

Certains anniversaires de la Libération de 1918 ont été célébrés avec un éclat tout particulier, comme le 50 e en 1968, ou le 90 e en 1998.

En Nouvelle-Zélande, pour commémorer ce 90 e anniversaire, une exposition sur l'histoire des Néo-zélandais en France durant la première guerre mondiale intitulée « All Quiet on the Western Front ? » a été présentée au Musée des Arts et de l'Histoire de Waikato, à Hamilton, du 11 novembre 1998 au 14 mars 1999, et inaugurée par Son Excellence M. Jacques Le Blanc, Ambassadeur de France en Nouvelle-Zélande. Riche de photographies et d'objets de guerre, l'exposition a été réalisée par le Dr Nathalie Philippe, historien en résidence soutenue par la Bank of New-Zealand, l'exposition étant parrainée par le Musée des Arts et de l'Histoire de Waikato, la BNZ, le Waikato Times et l'Université de Waikato et appuyée par l'Ambassade de France à Wellington.

Quant au Quesnoy, il a accueilli en visite officielle une délégation parlementaire néo-zélandaise, conduite par le Président de l'Assemblée Nationale et l'Ambassadeur de Nouvelle-Zélande en France, une délégation conduite par Sir Michael Hardie-Boys, Gouverneur général accompagné de plusieurs Ministres ainsi que Mme Margaret Blyth, fille du Lieutenant-Colonel Blyth (âgé alors de 102 ans), et M. Averill, fils du Dr Averill, premier libérateur du Quesnoy, venus tout spécialement de Nouvelle-Zélande avec son épouse. Quantités d'activités et animations ont été organisées : défilés, dépôts de gerbes, remise de médailles du souvenir, exposition sur l'amitié Le Quesnoy/Nouvelle-Zélande, décoration et pavoisement de la ville...

Le jumelage avec Cambridge :

Enfin, le 80 e anniversaire a été marqué également par l'annonce du jumelage du Quesnoy et de Cambridge, l'acte français étant signé à Cambridge le 16 février 1999 par l'Ambassadeur de France en Nouvelle-Zélande. À cette occasion une oeuvre picturale a été offerte à la Nouvelle-Zélande par la ville du Quesnoy. Il convient de rappeler que ce jumelage Le Quesnoy-Cambridge est l'unique jumelage franco-néo-zélandais à ce jour.

En parallèle, une association a été créée au Quesnoy, la « Maison quercitaine de Nouvelle-Zélande », actuellement présidée par Mme Marie-José Burlion, Adjointe au Maire, dont le but selon ses statuts est d'entretenir des liens d'amitié avec Cambridge et la Nouvelle-Zélande suite au jumelage des deux villes, d'entretenir et développer le devoir de mémoire envers la Nouvelle-Zélande et ses habitants, d'améliorer la connaissance de la langue anglaise afin de favoriser la communication, de promouvoir la langue et la culture française et de favoriser les échanges culturels au sens large.

Dans un local servant à exposer les documents liés aux relations entre Le Quesnoy et ses amis néo-zélandais et se voulant un point de rencontre pour tous les visiteurs venus des antipodes, la « Maison de la Nouvelle-Zélande » a été inaugurée au Quesnoy le 18 juin 2000, à l'occasion du 60 e anniversaire de l'Appel du Général De Gaulle, en présence d'une délégation néo-zélandaise conduite par le Maire de Cambridge.

Le 30 mars 2004, une « Le Quesnoy Place » (place Le Quesnoy) était inaugurée à Cambridge en présence de M. Jean-Michel Marlaud, Ambassadeur de France en Nouvelle-Zélande.

Depuis le jumelage et la création de la « Maison quercitaine de Nouvelle-Zélande » les échanges ont sensiblement augmenté et en nombre et en qualité. Nombreux sont les visites bilatérales, les échanges scolaires et culturels. Chaque année, sur les 800 étrangers qui visitent la ville, 200 sont de nationalité néo-zélandaise.

Un documentaire réalisé par Chantal Perrin « Ils sont venus du bout du monde », a évoqué la libération de Le Quesnoy par les troupes néo-zélandaises et la reconnaissance des Quercitains depuis lors, et une pièce de théâtre « Te Awarua », produite par la compagnie Altus et écrite par M. Albert Belz, auteur néo-zélandais d'origine maorie, a été présentée au Quesnoy. Cette pièce prend pour base les liens du Quesnoy et de la Nouvelle-Zélande depuis la libération de la ville en 1918.

En 2004, une « Année Chêne et Fougère » a été programmée, sur le thème de l'amitié entre Le Quesnoy (la ville des chênes) et la Nouvelle-Zélande (dont l'emblème est la fougère), ce qui a été l'occasion de présenter tout au long de l'année des expositions et des spectacles représentant la culture néo-zélandaise. Le lancement officiel de cette année eut lieu en février avec le carnaval, durant lequel Bimberlot, géant officiel de Le Quesnoy, a été rejoint par « Maori ». Venu d'Akaroa (près de Christchurch dans l'île du Sud), il est haut de 4 mètres et tire la langue tel un guerrier maori exécutant le « Haka ».

Au-delà de ces opérations ponctuelles, l'ambition de la Ville du Quesnoy est désormais, et dans la perspective du Centenaire de la Libération de 1918, de doter la Cité des Chênes d'un véritable espace muséographique, à l'image de ceux qui sont consacrés, avec l'aide du gouvernement de Canberra, à l'engagement des Australiens dans la première guerre mondiale.

Ce projet sera l'un des thèmes abordés par la délégation municipale que je conduirai en Nouvelle-Zélande lors du voyage qui a été programmé du 15 février au 4 mars prochains.

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