B. RENFORCER LES MOYENS DE PROJECTION JUDICIAIRE

Le guichet universel de greffe apporte une première réponse au problème de la proximité judiciaire. Toutefois, il se limite à une information et une entrée dans la procédure.

Dans leur rapport sur la réforme de la carte judiciaire, les membres du groupe de travail avaient appelé au développement des audiences foraines, pour remédier à l'éloignement trop important de la juridiction de regroupement par rapport à la juridiction supprimée. Le juge du TGI se serait ainsi déplacé, à date fixe, pour tenir une audience au sein du tribunal d'instance et éviter aux justiciables d'avoir, eux, à faire ce déplacement.

Force est toutefois de constater que l'observation qu'ils faisaient peut être aujourd'hui reconduite à l'identique : très peu, et de moins en moins, de juridictions organisent de telles audiences.

Interrogés sur ce point par vos rapporteurs, les représentants des chefs de cour et de juridiction ont été unanimes à souligner leurs limites : ces audiences sont facultatives et très lourdes à organiser ; la charge de travail des magistrats n'est pas conciliable avec les temps de déplacement qu'elles imposent, ce qui conduit à les abandonner rapidement.

Pourtant, vos rapporteurs ont pu mesurer lors de leur déplacement dans le ressort de la cour d'appel d'Amiens, le succès que rencontraient les audiences organisées en matière de contentieux familial hors divorce à Péronne et Abbeville. Ce succès tient largement à l'investissement des magistrats et des greffiers concernés, et au soutien qu'ils reçoivent de leurs chefs de juridiction.

Pour autant, ce succès est précaire, car les difficultés sont nombreuses : il n'y a pas de greffe du TGI sur place, ce qui impose au magistrat d'être accompagné de son greffier ; les tribunaux d'instance d'Abbeville et de Péronne ne disposent pas des applications informatiques du TGI, ce qui oblige à procéder aux saisies, après l'audience, au siège du TGI d'Amiens ; et les moyens mis à disposition pour le déplacement du magistrat et de son greffier ne suivent pas toujours.

Vos rapporteurs remarquent toutefois qu'au moins deux des difficultés précitées seraient levées si un guichet universel de greffe était créé et si les effectifs de greffe étaient mutualisés.

En effet, d'une part, le magistrat pourrait faire appel aux services d'un des greffiers polyvalents du tribunal d'instance, et, d'autre part, ce même tribunal serait raccordé au même réseau informatique que le tribunal de grande instance, ce qui permettrait de saisir la procédure sur place.

La troisième difficulté est moindre que les deux précédentes, et devrait pouvoir être résolue facilement, pour peu que les crédits nécessaires soient mis en place.

La réforme du guichet universel de greffe est ainsi susceptible de faciliter la tenue des audiences foraines, afin de remédier ponctuellement à certaines lacunes du réseau juridictionnel de première instance.

Pour vos rapporteurs, ce renforcement des moyens de projection judiciaire est lui-même susceptible d'aider à la mise en place éventuelle des tribunaux de première instance.

En effet, s'il se confirmait que le nouveau contentieux de la proximité pris en charge par les sections déconcentrées du TPI, incluait des matières supplémentaires par rapport à celui dévolu aux tribunaux d'instance, comme une partie du contentieux familial, il serait nécessaire d'adapter en conséquence l'effectif de ces implantations judiciaires. La tenue d'audiences foraines, facilitée par la mise en commun des greffes, pourrait constituer une solution pertinente, qui éviterait l'affectation de magistrats supplémentaires, tout en garantissant l'apport d'une aide ponctuelle.

Recommandation n° 6

Renforcer les audiences foraines, lorsqu'elles apparaissent nécessaires, en tirant parti des facilités permises par le GUG et la mutualisation des greffes

La création du GUG ne ferait pas perdre aux maisons de la justice et du droit (MJD) ou aux points d'accès au droit leur intérêt, bien au contraire : ces structures aident à l'information des citoyens et leur offrent un véritable service judiciaire de proximité, comme vos rapporteurs ont pu le vérifier lors de leur déplacement à Bordeaux, puisqu'elles accueillent en leur sein des professionnels du droit, avocats, médiateurs ou conciliateurs, susceptibles d'aider et d'orienter les justiciables dans leurs litiges.

Toutefois, vos rapporteurs soulignent que la grande majorité des MJD est localisée dans la même ville ou la même agglomération que le tribunal de grande instance. Elles répondent ainsi moins à un éloignement géographique qu'à un éloignement social du justiciable vis-à-vis de la justice, auquel elles tentent de remédier.

Surtout, comme les rapporteurs du groupe de travail de votre commission sur la réforme de la carte judiciaire l'avaient relevé 41 ( * ) , la pérennité financière des MJD n'est pas assurée, puisqu'elle dépend de l'investissement des collectivités territoriales, qui règlent leurs frais de fonctionnement, l'État ayant financé le premier équipement. En outre, peu de MJD disposent d'un greffier mis à disposition par le TGI, alors que ce devrait être la règle : l'utilité de la structure en dépend.

Si les efforts doivent être poursuivis dans le déploiement ou le renforcement de ces MJD, celles-ci ne sauraient se substituer au GUG, dont elles sont complémentaires.


* 41 La réforme de la carte judiciaire : une occasion manquée , op. cit. , p. 47-49 et 112-113.

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