Rapport d'information n° 77 (2013-2014) de Mme Michèle ANDRÉ , fait au nom de la commission des finances, déposé le 16 octobre 2013

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N° 77

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2013-2014

Enregistré à la Présidence du Sénat le 16 octobre 2013

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur les préfectures et la réorganisation territoriale de l' État ,

Par Mme Michèle ANDRÉ,

Sénatrice.

(1) Cette commission est composée de : M. Philippe Marini , président ; M. François Marc , rapporteur général ; Mme Michèle André , première vice-présidente ; Mme Marie-France Beaufils, MM. Jean-Pierre Caffet, Yvon Collin, Jean-Claude Frécon, Mmes Fabienne Keller, Frédérique Espagnac, MM. Albéric de Montgolfier, Aymeri de Montesquiou, Roland du Luart , vice-présidents ; MM. Philippe Dallier, Jean Germain, Claude Haut, François Trucy , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, Jean Arthuis, Claude Belot, Michel Berson, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Joël Bourdin, Christian Bourquin, Serge Dassault, Vincent Delahaye, Francis Delattre, Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. Éric Doligé, Philippe Dominati, Jean-Paul Emorine, André Ferrand, François Fortassin, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Charles Guené, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Roger Karoutchi, Yves Krattinger, Dominique de Legge, Marc Massion, Gérard Miquel, Georges Patient, François Patriat, Jean-Vincent Placé, François Rebsamen, Jean-Marc Todeschini, Richard Yung .

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Administrations de mission, les préfectures (et les sous-préfectures) sont à l'avant-poste de la représentation de l'Etat sur les territoires . Lieu d'accueil des usagers et des administrés, elles représentent un interlocuteur privilégié et apprécié des élus locaux. Pour les autres administrations déconcentrées, elles constituent aussi un point d'ancrage incontournable.

Depuis la loi du 28 pluviose an VIII, leur présence immuable dans le paysage administratif du pays pourrait laisser croire à une certaine immobilité de l'institution préfectorale. Les apparences sont toutefois, comme souvent, trompeuses et les préfectures ont toujours su s'adapter aux exigences de leurs temps . Ce constat est d'autant plus vrai au cours de la période récente, où les facteurs d'évolution de ces services déconcentrés sont allés en se multipliant.

De 2008 à 2012, la révision générale des politiques publiques (RGPP) a fait sentir ses effets : réduction drastique des effectifs, réorganisation des processus de décision et réorientation des missions. Parallèlement, la réorganisation de l'administration territoriale de l'Etat (RéATE) a eu pour conséquence l'émergence de nouveaux pôles administratifs aux côtés des préfectures, tout en provoquant la montée en puissance de l'échelon régional. Plus largement encore, les progrès techniques et scientifiques toujours plus rapides ont amené à s'interroger sur les méthodes de travail au sein des services préfectoraux avec pour objectif de nouveaux gains de productivité, couplés à une amélioration espérée des conditions de travail pour les agents.

Après avoir étudié l'impact de la diffusion des nouvelles technologies appliquées aux titres d'identité 1 ( * ) ainsi que les conséquences de la RGPP sur la qualité du service public 2 ( * ) , votre rapporteure spéciale a décidé d'examiner la situation des préfectures (et des sous-préfectures) à l'heure de la RéATE .

Comment l'organisation et le fonctionnement des préfectures ont-ils évolué sous l'incidence de cette ample réforme des administrations déconcentrées ? Une meilleure lisibilité et une plus grande efficacité de l'action de l'Etat en ont-elles résulté ? Les moyens ont-ils été au rendez-vous pour poursuivre la mutation de l'administration préfectorale ?

SYNTHÈSE DES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEURE SPÉCIALE

I. LES PRÉFECTURES : UN REPOSITIONNEMENT À STABILISER

A l'origine d'un resserrement de l'Etat déconcentré autour du niveau régional, la RéATE s'est traduite par un renforcement de l'autorité du préfet de région . Garant de la cohérence de l'action de l'Etat dans la circonscription régionale, ce préfet dispose d'un pouvoir d'instruction, d'un pouvoir d'évocation et d'un pouvoir de répartition des crédits de nombreux budgets opérationnels de programme (BOP).

A ses côtés, le secrétaire général aux affaires régionales (SGAR) connaît une montée en puissance certaine depuis quelques années. Son champ d'influence a en effet eu tendance à s'étendre, au point que sa fonction première reposant sur une administration de mission se trouve désormais concurrencée par l'affirmation progressive d'un rôle d'administration de moyens.

Dans ce contexte, la place du préfet de département est sujette à question, si ce n'est à redéfinition. Avec encore plus d'acuité, il en est de même pour le devenir des sous-préfets et des sous-préfectures . Afin de répondre à une demande légitime de conseil et d'expertise émanant notamment des collectivités territoriales, le sous-préfet a probablement vocation à demeurer la « porte d'entrée » du réseau de l'administration d'Etat et à intervenir en soutien des initiatives locales.

En provoquant des regroupements de services et de directions, la RéATE a suscité une nouvelle dynamique dans la stratégie immobilière de l'Etat. Les préfectures ont pris leur part dans ce mouvement en commençant à infléchir leur politique immobilière . L'entretien des bâtiments demeure toutefois encore problématique, l'externalisation conduisant à plus ou moins brève échéance à une perte de maîtrise du coût des prestations.

Dans un environnement en mutation, une constante demeure (malheureusement) pour les préfectures : le flot de normes à gérer au quotidien en provenance des administrations centrales. Environ 80 000 pages de circulaires leur sont adressées chaque année, avec pour conséquence une pression continue sur les services mais aussi une certaine forme de dévalorisation de la norme : « trop de normes tue la norme ».

Ces évolutions ont été opérées au cours des dernières années avec en arrière-plan une contrainte forte : la réduction continue des effectifs . Au total, entre 2009 et 2012 et sous l'effet de la révision générale des politiques publiques (RGPP), 2 582 emplois équivalents temps plein (ETP) ont été supprimés au sein du programme « Administration territoriale » qui porte les effectifs de l'administration préfectorale. En 2013, les personnels baisseront à nouveau de 450 ETP , soit un niveau moindre que celui anciennement fixé par la RGPP mais encore conséquent.

Les activités de guichet ainsi que le contrôle de légalité sont directement concernés par ces réductions d'emplois, avec le péril d'une dégradation tant de la qualité du service public que des conditions de travail. Dans ce contexte, le besoin d'améliorer la gestion des ressources humaines se fait d'autant plus sentir, l'encouragement à la mobilité des personnels devenant en particulier essentiel.

II. LES GRANDS PROJETS : LA MODERNISATION EN COURS DE L'ADMINISTRATION PRÉFECTORALE

Cheville ouvrière de la mise en oeuvre de la nouvelle génération de titres d'identité sécurisés (passeport biométrique, nouveau système d'immatriculation des véhicules...), l'agence nationale des titres sécurisés (ANTS) exerce une activité en lien direct avec la modernisation des préfectures. Elle s'appuie pour 2013 sur un budget prévisionnel de 205,1 millions d'euros, alimenté par des taxes affectées.

Plusieurs projets ont été menés à bien ou sont en passe de l'être. Après des débuts difficiles, le passeport biométrique et le système d'immatriculation des véhicules (SIV) ont désormais atteint leur régime de croisière. Tel n'est pas le cas en revanche du projet « FAETON » visant à introduire un nouveau permis de conduire . Initialement prévue pour le 19 janvier 2013, son entrée en application a été repoussée au 16 septembre 2013 pour des raisons techniques. Le système transitoire mis en place n'est toutefois pas allé sans poser de sérieuses difficultés aux services des préfectures. Enfin, techniquement prête, la carte nationale d'identité électronique (CNIe) reste en l'attente de décisions.

La sécurisation accrue des titres d'identité a finalement eu une double conséquence : le recul de la falsification et de la contrefaçon des documents, mais aussi le déplacement des tentatives de fraude en amont du processus de délivrance . C'est désormais la faculté de se procurer des documents d'état civil qu'il convient d'encadrer et de sécuriser au mieux.

Du point de vue de la fraude, le SIV constitue un cas particulier avec deux séries de difficultés rencontrées : les verbalisations indues et l'usurpation du numéro d'immatriculation . Ces failles du dispositif appellent un perfectionnement et un renforcement en cours du processus de sécurisation.

I. LES PRÉFECTURES : UN REPOSITIONNEMENT À STABILISER

La RéATE a profondément redessiné les contours de la carte administrative déconcentrée en opérant des fusions et en redéfinissant les rôles des uns et des autres. Les préfectures ne sont pas restées en marge de ce processus. Elles y ont, bien au contraire, pleinement participé. Ainsi, une nouvelle articulation se fait jour entre le niveau régional et départemental . Dans le même temps, le secrétaire général aux affaires régionales (SGAR) s'impose aux côtés du préfet comme un interlocuteur essentiel, symbole de la prééminence croissante de l'échelon régional.

Face à une inflation normative non maîtrisée et plus encore dans un contexte de réduction des moyens humains, une demande de plus en plus pressante des personnels en préfecture et en sous-préfecture (toutes catégories confondues) émerge désormais : qu'attend-on dorénavant de l'administration préfectorale ? Quelles seront ses missions demain ? Et avec quels moyens ? C'est au final une quête de sens qui irrigue l'ensemble de cette administration en proie aujourd'hui à une inquiétude, pour ne pas dire à une angoisse, sur son avenir.

A. LA PLACE DU PRÉFET À L'ÈRE DE LA RÉATE

La RéATE s'est accompagnée d'un mouvement général de resserrement de l'administration déconcentrée au niveau régional . Un tel mouvement n'est pas sans incidence sur la répartition des rôles et des compétences entre le préfet de région, celui de département et le sous-préfet.

1. Le resserrement de l'Etat déconcentré autour du niveau régional

Entrée en vigueur à compter du 1 er janvier 2010 , la RéATE a suscité une profonde évolution des relations et des méthodes de travail entre l'Etat, les collectivités territoriales et les administrés.

Elle s'est traduite par une régionalisation de la plupart des services déconcentrés de l'Etat, le niveau départemental étant celui d'une organisation administrative plus légère . Le nombre de directions a été réduit par le regroupement de services.

Ainsi, au niveau régional, l'organisation des services de l'Etat a été recomposée autour de huit grandes entités administratives intégrées (contre vingt auparavant). Dans chaque région métropolitaine (à l'exception de la région Ile-de-France qui présente une organisation spécifique), les nouvelles directions régionales déconcentrées sont les suivantes :

- la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi ( DIRECCTE ) ;

- la direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt ( DRAAF ) ;

- la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement ( DREAL ) ;

- une direction régionale des affaires culturelles ( DRAC ) ;

- la direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale ( DRJSCS ) ;

- la direction régionale des finances publiques ( DRFiP ) ;

- les services du Rectorat ;

- l'agence régionale de santé ( ARS ).

Le tableau suivant présente un récapitulatif des directions avant et après la RéATE.

Les services déconcentrés régionaux avant et après la RéATE

Avant la RéATE

Après la RéATE

Direction Générale de la Comptabilité Publique (DGCP)

Direction Régionale des Finances Publiques

(DRFIP)

Direction Générale des Impôts (DGI)

Direction régionale du Travail, de l'Emploi et de la Formation Professionnelle (DRTEFP)

Direction Régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l'Emploi (DIRECCTE)

Directions départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (DDTEFP)

Mission "concurrence" de la Direction régionale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DRCCRF)

Division développement industriel des DRIRE

Services de métrologie des DRIRE

Direction Régionale du Commerce Extérieur (DRCE)

Délégation Régionale du Tourisme (DRT)

Service du Délégué Régional au Commerce et à l'Artisanat (DRCA)

Chargé de Mission Régional à l'Intelligence Economique (CRIE)

Direction Régionale de l'Equipement (DRE)

Direction Régionale de l'Environnement, de l'Aménagement et du Logement

(DREAL)

Direction Régionale de l'Industrie, de la Recherche et de l'Environnement (DRIRE)

Direction Régionale de l'Environnement (DIREN)

Direction Régionale de l'Agriculture et de la Forêt (DRAF)

Direction Régionale de l'Alimentation, de l'Agriculture et de la Forêt

(DRAAF)

Direction Régionale des Affaires Culturelles (DRAC)

Direction Régionales des Affaires Sanitaires et Sociales (DRASS)

Direction Régionale de la Jeunesse, des Sports et de la Cohésion Sociale

(DRJSCS)

Direction Régionale de la Jeunesse et des Sports (DRJS)

Direction Régionale de l'Agence nationale pour la Cohésion Sociale et l'Egalité des Chances (ACSé)

Agences Régionales de l'Hospitalisation (ARH)

Agences Régionales de Santé (ARS)

Rectorat

Source : commission des finances

La nouvelle administration départementale de l'Etat s'organise, pour sa part, autour d'un schéma plus resserré.

Outre les services de la préfecture et des sous-préfectures, tous les départements sont dotés de directions départementales interministérielles (DDI) , au nombre de deux ou trois selon l'importance démographique des départements. A vocation interministérielle, ces directions sont placées sous l'autorité du préfet de département.

La direction départementale des territoires (DDT) est commune à l'ensemble des départements. Elle regroupe, en reprenant leurs missions en matière de politiques d'aménagement et de développement durables des territoires, les anciennes directions départementales de l'agriculture et de la forêt (DDAF), de l'équipement (DDE) et les services « environnement » de la préfecture. Dans les départements littoraux (soit 22 départements), la DDT englobe également l'ancienne direction des affaires maritimes dont elle reprend les missions : la DDT prend alors le nom de direction départementale des territoires et de la mer (DDTM).

La direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations ( DDCSPP ) reprend les compétences des anciennes directions départementales de la jeunesse et des sports (DDJS), des affaires sanitaires et sociales (DDASS) en matière d'affaires sociales, des unités départementales de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (UDCCRF) et des services vétérinaires.

Dans les départements dont la population est supérieure à 400 000 habitants (soit 42 départements) ou dont les circonstances locales en matière de cohésion sociale et de politique de la ville le justifient, les missions de la DDCSPP sont confiées à deux structures :

- une direction départementale de la cohésion sociale (DDCS) , dont la mission est d'affirmer le rôle d'animateur de l'Etat dans les domaines de la cohésion sociale, de la jeunesse, des sports, de la vie associative et de l'éducation populaire. Elle rassemble les personnels de l'ancienne DDJS, une partie de ceux des DDASS et les personnels des préfectures intervenant en matière d'accès au logement, de politique de la ville ou de droits des Femmes ;

- une direction départementale de la protection de la population (DDPP) , qui rassemble les compétences techniques, scientifiques, juridiques et économiques dont dispose l'Etat pour assurer ses fonctions d'information, de prévention et de contrôle dans le domaine de la protection des populations. Elle est issue du rapprochement des personnels de la direction départementale des services vétérinaires et ceux en charge de la répression des fraudes.

Les unités territoriales (UT)

Aux deux (ou trois) DDI s'ajoutent trois unités territoriales (UT) de directions interministérielles régionales. Elles remplacent certaines anciennes structures départementales :

- l' UT de la DIRECCTE , composée essentiellement de l'ancienne direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (DDTEFP) ;

- l' UT de la DRAC , qui succède au service départemental de l'architecture et du patrimoine (SDAP) ;

- l' UT de la DREAL , composée de l'ex-subdivision de la direction régionale de la recherche et de l'environnement (DRIRE).

Leur existence permet aux ministères concernés de conserver un réseau départemental qui leur soit propre et de maintenir plus d'autonomie vis-à-vis du préfet de département. Elles dérogent ainsi à la règle générale d'intégration des services départementaux au sein des nouvelles directions départementales intégrées que sont les DDI.

Ces structures se superposent, dans les départements chefs-lieux de région, aux directions régionales dont elles dépendent.

Enfin, chaque département comprend une délégation départementale de l'ARS, une inspection d'académie, une direction départementale des finances publiques (DDFiP) et les services chargés de la sécurité intérieure (police, gendarmerie).

2. Le renforcement de l'autorité du préfet de région

La RéATE peut ainsi se résumer en quelques grands principes :

- une recherche de clarification des rôles entre le niveau régional et départemental ;

- la mission confiée à l'échelon régional de définir les modalités d'application des directives nationales dans la région et de répartir les moyens alloués par les ministères ;

- l'identification de la région comme le niveau de pilotage des politiques publiques ;

- l'attribution à la circonscription départementale de la mission de contact avec les usagers et de mise en oeuvre des politiques publiques de proximité .

Le décret n° 2010-146 du 16 février 2010 , modifiant le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements, a tiré les conséquences de cette nouvelle organisation concernant l'architecture préfectorale.

Déjà conforté en 2004, le rôle du préfet de région dans la conduite des politiques publiques a été renforcé par l'autorité qui lui est désormais reconnue sur les préfets de département 3 ( * ) .

Le préfet de région dans le nouveau schéma préfectoral mis en place

par le décret du 16 février 2010

Le nouveau schéma préfectoral mis en place par le décret précité du 16 février 2010 vise d'abord à assurer la cohérence de l'action de l'Etat dans la circonscription régionale.

Le préfet de région , garant de la cohérence de l'action de l'Etat dans la région, est responsable de l'exécution des politiques nationales et communautaires, sous réserve des compétences de l'ARS et du Rectorat.

A ce titre, il a autorité sur le préfet de département dans la conduite des politiques publiques par le biais d' un pouvoir d'instruction .

Il dispose par ailleurs d' un pouvoir d'évocation , pour une durée limitée, de tout ou partie d'une compétence à des fins de coordination régionale : dès lors, il prend les décisions correspondantes en lieu et place des préfets de département. Cette faculté ne peut pas être déléguée. Dans une instruction du 13 décembre 2010 du Premier ministre, il est précisé que « l'autorité reconnue au préfet de région ne remet pas en cause la responsabilité première des préfets de département devant les ministres. A cet égard, les recours hiérarchiques contre les décisions des préfets de département continueront à être portés directement devant les ministres compétents . ». Le préfet de région n'est donc pas une « instance d'appel » des décisions du préfet de département.

Du point de vue budgétaire , le préfet de région arrête la répartition des crédits des budgets opérationnels de programme (BOP). Ce pouvoir lui confère ainsi la capacité d'adapter les moyens mis à sa disposition aux enjeux territoriaux.

Cette régionalisation du cadre d'action de l'Etat territorial se situe dans la logique de la décentralisation. Ainsi par exemple, Yvon Ollivier, préfet honoraire, qui fut responsable en 2007 et 2008 d'un groupe d'audit au ministère de l'intérieur dans le cadre de la RGPP, considère la région comme « le niveau pertinent de l'administration territoriale de l'Etat (...) car c'est celui notamment de la problématique de l'aménagement du territoire » 4 ( * ) .

3. Le devenir du préfet de département

Dans le nouveau schéma préfectoral mis en place par le décret précité du 16 février 2010, le préfet de département est confirmé dans sa responsabilité de mise en oeuvre des politiques publiques auprès des citoyens.

Le champ de compétences du préfet de département

Le préfet de département est chargé de la mise en oeuvre des politiques nationales et communautaires dans le cadre fixé par le préfet de région tout en conservant ses missions propres.

Dépositaire de l'autorité de l'Etat dans le département, il a seul la responsabilité de l'ordre public et de la sécurité des populations étendue au champ de la sécurité nationale, du contrôle de légalité et de la police des étrangers . Ces missions régaliennes ne peuvent pas être l'objet du pouvoir d'évocation du préfet de région, non plus que les matières relevant de la compétence légale du préfet de département.

Désormais, le préfet de département a autorité sur le commandant du groupement de gendarmerie départementale dans le domaine relevant de ses compétences (ordre public et police administrative). Cet élargissement s'inscrit dans le rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l'intérieur.

Par ailleurs, le préfet dispose des moyens de l'ARS dans l'exercice de ses compétences sanitaire, de salubrité et d'hygiène publiques . En cas d'événement sanitaire pouvant constituer un trouble à l'ordre public, les services de l'agence sont placés pour emploi sous son autorité.

Certes, le mode de gouvernance retenu au niveau régional peut parfois renforcer le rôle opérationnel du préfet de département . Ainsi, en région Provence-Alpes-Côte d'Azur ont été constitués certains « pôles experts régionaux » confiés 5 ( * ) :

- au préfet des Hautes-Alpes s'agissant de l'aménagement et du développement rural ;

- au préfet des Alpes de Haute-Provence sur l'énergie photovoltaïque ;

- au préfet du Var pour la gestion des déchets inertes et du bâtiment travaux publics (BTP) ;

- au préfet de Vaucluse sur l'exploitation du gaz de schiste ainsi que sur les questions de sûreté nucléaire ;

- au préfet des Alpes-Maritimes concernant les questions relatives au loup.

Pour autant, au cours de sa mission de contrôle, votre rapporteure spéciale a pu constater les interrogations suscitées par ce nouveau schéma d'organisation auprès des préfets de département et de leurs équipes . Il ressort de ces échanges un doute, presque un désarroi, sur le devenir des préfectures de département et de leurs missions. Ce sentiment doit être mis en relation, d'une part, avec l'impression de n'être plus qu'une simple courroie de transmission sans prise véritable sur le cours des choses, et, d'autre part, avec une inquiétude relative au manque de moyens pour assumer les missions restantes. Votre rapporteure spéciale reviendra infra sur ce dernier point.

Face à ces interrogations, votre rapporteure spéciale rappelle que le département demeure un échelon de proximité essentiel et que le préfet de département doit rester un interlocuteur indispensable pour les élus locaux ainsi que les acteurs du tissu économique et social de nos territoires (les chefs d'entreprises, les responsables associatifs...) .

4. L'avenir des sous-préfectures en question

Avec le nouveau schéma préfectoral, le sous-préfet a également vu son rôle sensiblement redéfini .

Les missions du sous-préfet

Délégué du préfet dans l'arrondissement , le sous-préfet veille au respect des lois et des règlements. Il concourt en outre au maintien de l'ordre public et de la sécurité des populations.

Il anime et coordonne l'action des services de l'Etat dans l'arrondissement, tout en participant à l'exercice du contrôle administratif et au conseil aux collectivités territoriales .

Le préfet de région peut, avec l'accord du préfet du département, lui confier des missions particulières , temporaires ou permanentes, d'intérêt régional.

La compétence du sous-préfet n'a pas été bouleversée par le décret précité du 16 février 2010 qui a tiré les conséquences du pouvoir hiérarchique du préfet de région sur le préfet de département. Mais votre rapporteure spéciale souligne toutefois que la centralisation du contrôle de légalité en préfecture ( Cf. infra ) a altéré le rôle du sous-préfet . Celui-ci est devenu une simple courroie de transmission des actes prioritaires, avec un rôle plus ou moins bien défini de conseil aux collectivités locales.

Dans ces conditions, deux questions se posent . L'une porte sur le devenir de la fonction de sous-préfet sur le territoire. L'autre concerne une éventuelle redéfinition de la carte des sous-préfectures, avec le débat récurrent sur d'éventuelles suppressions 6 ( * ) . Ces deux interrogations sont d'ailleurs en partie liées. Elles constituent un motif de préoccupation fort dans les départements, aussi bien parmi les agents de l'Etat (au premier rang desquels les préfets et les sous-préfets, bien évidemment) que chez les élus locaux (notamment en zone rurale).

S'agissant du premier volet de ce questionnement, la directive nationale d'orientation des préfectures (DNO) 2010-2015 préconisait la transformation des sous-préfectures en administrations de mission tournées vers le développement des territoires : « « assemblier » des politiques publiques à l'échelle de l'arrondissement, garant de leur cohérence et animateur de la transversalité de l'Etat sur le territoire (...) le sous-préfet aura ainsi à développer ses interventions en matière d' ingénierie territoriale ».

Votre rapporteure spéciale souligne le rôle important du sous-préfet en tant que « tête de réseau » de l'Etat . Au cours de sa mission de contrôle, l'image du sous-préfet comme « porte d'entrée » des services de l'Etat est systématiquement ressortie. Cette fonction est d'autant plus essentielle que nombre d'élus locaux (notamment dans les petites communes, faiblement dotées en moyens humains) ne disposent pas de l'expertise nécessaire pour conduire seuls certains projets. Ils se tournent alors assez naturellement vers le sous-préfet pour faire avancer les initiatives locales. Dans cette perspective, on passe progressivement d'une administration de guichet à une administration de projet. Le sous-préfet devient ainsi un « développeur ».

Recommandation n° 1 : préserver le sous-préfet comme « porte d'entrée » du réseau des services de l'Etat.

Ouvrant de nouvelles perspectives au sous-préfet, le développement de cet axe de travail trouve toutefois sa limite les moyens humains sur lesquels peuvent s'appuyer les sous-préfectures . Votre rapporteure spéciale reviendra infra plus en détail sur l'évolution des effectifs au sein du programme « Administration territoriale », mais elle souligne d'ores et déjà le manque de fonctionnaires de catégorie A dans les sous-préfectures. De ce fait, le sous-préfet est « freiné » par la rareté des cadres parmi ses collaborateurs.

Recommandation n° 2 : afin de satisfaire la recommandation n° 1, doter les sous-préfectures en cadres qui seront la « ressource » pour accompagner les projets locaux.

Concernant le second volet du questionnement (les suppressions éventuelles de sous-préfectures), votre rapporteure spéciale considère que ce débat mérite d'être éclairé par les travaux actuellement menés . Le 1 er octobre 2012, Manuel Valls, ministre de l'intérieur, a annoncé la création d'une mission de réflexion sur l'implantation des sous-préfectures. Cette mission avait été confiée à Michel Sappin, chef de l'inspection générale de l'administration (IGA), Jean-Marc Rebière, président du Conseil supérieur de l'administration territoriale de l'Etat (CSATE) et Emmanuel Berthier, délégué interministériel à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale (Datar). S'agissant des sous-préfectures, Manuel Valls avait en outre indiqué que « dans un environnement en évolution, leur rôle, leurs missions, leurs effectifs doivent être redéfinis, en prenant en compte la diversité des situations ainsi que les caractéristiques des territoires urbains, ruraux, montagnards, littoraux, frontaliers » 7 ( * ) .

Ce travail de réflexion sur l'évolution du réseau territorial des sous-préfectures devait initialement aboutir au mois de mars 2013, mais il a été prolongé. En effet, Jean-Marc Ayrault, Premier ministre, a souhaité confier une mission prospective à Jean-Marc Rebière et Jean-Pierre Weiss, directeur de l'établissement public du Palais de justice de Paris (EPPJP), sur l'évolution de l'administration territoriale de l'Etat. Cette mission avait vocation à identifier plusieurs scénarios d'organisation fonctionnelle de l'administration territoriale à un horizon de cinq ans.

En juillet 2013, le rapport de Jean-Marc Rebière et Jean-Pierre Weiss, « La stratégie d'organisation à 5 ans de l'administration territoriale de l'Etat » 8 ( * ) , a fourni une grille de lecture de la conduite de l'adaptation des réseaux infra départementaux des services de l'Etat . Il a recensé quarante sous-préfectures (sur un réseau composé de deux cents quarante au total) ayant actuellement moins de dix agents.

Différents scénarios peuvent être étudiés. Ils vont de l'extension du périmètre de certaines sous-préfectures (avec à leur tête un sous-préfet spécialisé sur quelques missions prioritaires) à la suppression de certains postes de sous-préfets (les sous-préfectures étant alors remplacées par de simples antennes de la préfecture) en passant par la création de « maisons de l'Etat » ou de « cités administratives » notamment en zone rurale (afin de maintenir les sous-préfets en regroupant leurs services avec d'autres directions ministérielles).

Recommandation n° 3 : ne redimensionner la carte des sous-préfectures qu'à la condition nécessaire de tenir compte des temps d'éloignement des usagers par rapport aux services de l'Etat, afin de ne pas désertifier certains territoires (ruraux, montagnards...).

Au final et d'un point de vue strictement budgétaire, quelles peuvent être les économies brutes attendues de la suppression de certaines sous-préfectures ? Un chiffrage précis est certes, à ce stade, quasi impossible. En revanche, les variables de dépenses peuvent être identifiées. Les charges de personnel ne seraient, au moins à moyen terme, guère impactées, puisqu'il conviendrait d'affecter les agents actuellement en sous-préfectures à d'autres missions. Nombre de sous-préfectures étant situées dans des locaux mis à disposition par des collectivités territoriales 9 ( * ) , la libération de ces immeubles ne laisse guère non plus espérer de substantiels produits de cession. Les gains réalisés porteraient en fait davantage sur les frais d'entretien actuellement à la charge de l'Etat.

B. LA MONTÉE EN PUISSANCE DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL AUX AFFAIRES RÉGIONALES (SGAR)

Dans la nouvelle organisation territoriale de l'Etat, le SGAR occupe une place privilégiée sous l'autorité du préfet de région. Au cours de la période récente, son influence n'a cessé de croître sur les enjeux administratifs de l'Etat en région.

1. Le renforcement récent de ce nouvel interlocuteur

La circulaire JORF n° 246 du 19 octobre 2004 relative à la réforme de l'administration territoriale de l'Etat (création de pôles régionaux - organisation des préfectures de région) plaçait déjà le SGAR en situation centrale sur toute une série de thématiques : le pilotage du comité de l'administration régionale (CAR) 10 ( * ) , la mise en oeuvre territoriale de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), l'évaluation des politiques publiques et le contrôle de gestion, la mutualisation des moyens des services de l'Etat...

Toutefois, le décret n° 2009-587 du 25 mai 2009 relatif aux missions des SGAR a renforcé le SGAR , qui assiste le préfet de région dans l'exercice de ses missions.

Les fonctions du SGAR

Sous l'autorité du préfet de région , le SGAR exerce les fonctions suivantes :

1. Il coordonne l'action des services régionaux de l'Etat et veille à l'articulation de celle-ci avec celle des services départementaux ;

2. Il veille à la cohérence de la mise en oeuvre des politiques nationales et de celles de l'Union européenne qui relèvent du niveau régional et met en oeuvre certaines d'entre elles ; il peut également mettre en oeuvre certaines politiques nationales ou européennes qui relèvent du niveau interrégional lorsque le préfet de région en a été désigné coordonnateur ;

3. Il anime l'action des services régionaux de l'Etat dans les domaines des études , de l'évaluation et de l'utilisation des technologies de l'information et de la communication ;

4. Il coordonne la mise en oeuvre des actions d'information et de communication de l'Etat relatives aux politiques publiques dans la région, en relation avec le service d'information du Gouvernement (SIG) ;

5. Il anime et coordonne l'organisation et la mise en oeuvre des fonctions mutualisées des services de l'Etat en région ;

6. Il organise et anime une plate-forme d'appui interministériel à la gestion des ressources humaines (GRH) .

Au titre du secrétariat du CAR, le SGAR prépare et suit l'application des décisions et des avis relatifs à la mise en oeuvre territoriale des programmes au titre de la LOLF. Il est donc au coeur de la mission de coordination et d'animation de l'action des administrations déconcentrées de l'Etat .

2. L'accroissement des effectifs du SGAR

Le SGAR s'appuie sur une équipe interministérielle de chargés de mission et de collaborateurs contractuels. Cette équipe regroupe aussi bien des agents du ministère de l'intérieur ou d'autres ministères que des agents détachés de la fonction publique territoriale.

Son organisation est variable d'une région à l'autre , signe d'une administration encore en cours de mutation et soucieuse de s'adapter aux spécificités des territoires. A titre d'exemple, votre rapporteure spéciale vous présente l'organigramme du SGAR de la région Midi-Pyrénées.

L'organisation du SGAR de la région Midi-Pyrénées

Source : préfecture de la région Midi-Pyrénées

Les effectifs des SGAR ont connu un « fort accroissement » au cours des dernières années selon la Cour des comptes 11 ( * ) . En 2013, ils s'appuient ainsi sur 897 équivalents temps plein travaillé (ETPT) au titre du seul programme « Administration territoriale » de la mission « Administration générale et territoriale de l'Etat ». La Cour des comptes précise par ailleurs qu'« en réalité, le nombre d'agents des SGAR est sensiblement supérieur : il comprend des agents relevant de plusieurs administrations des niveaux régional et national, et donc de plusieurs programmes. Ainsi le SGAR du Languedoc-Roussillon comporte 50,5 ETP, celui de Nord-Pas-de-Calais 70,3 ETP avec des objectifs cibles de 78,1 ETP, celui de Poitou-Charentes 46,1 ETP ».

L'accroissement des effectifs des SGAR tient naturellement au renforcement de leur position centrale avec le décret précité du 25 mai 2009.

Cependant, la Cour des comptes pointe un facteur supplémentaire : « [les SGAR] comportent un ou deux conseillers dans le domaine de chacune des directions régionales. Les conseillers constituent, auprès des préfets de région, une sorte de cabinet régional . Cette situation n'est pas totalement compatible avec le rôle de réflexion et de pilotage de ces directions et avec la responsabilisation des directeurs régionaux. L'enquête montre que, dans certains cas, les dossiers préparés par les directions régionales sont ré-instruits par ces conseillers et que la relation entre le SGAR et les directions régionales s'effectue, dans nombre de cas, par leur intermédiaire ».

La Cour des comptes ajoute que « les SGAR sont devenus de véritables services dont le nombre d'agents est parfois supérieur à celui de directions comme la DRJSCS ou la DDCS » .

Recommandation n° 4 : maîtriser l'évolution des effectifs des secrétariats généraux aux affaires régionales (SGAR), ceux-ci ne devant ni doublonner les directions régionales ni limiter le rôle de pilotage de ces dernières.

3. L'évolution en cours de son rôle : d'une administration de mission à une administration de moyens

A l'origine, le SGAR accompagne le préfet de région dans son rôle de coordination et d'animation des politiques de l'Etat en région. Pour autant, le SGAR a connu au cours de la période récente une évolution de son périmètre d'action . D'une administration de mission, il devient également une administration de moyens.

Alors qu'avec la RGPP chaque ministère a vu un responsable pour la mutualisation des achats (RMA) être nommé, il en va de même aujourd'hui au niveau de chaque SGAR.

Plus encore, dans le domaine de la mutualisation de la gestion des ressources humaines (GRH), le SGAR joue un rôle grandissant en pilotant en région la plate-forme régionale d'appui interministériel à la GRH .

Cette plate-forme régionale a une double mission :

- faciliter et développer la mobilité des agents des fonctions publiques, d'une administration à l'autre au sein d'un même bassin d'emploi ;

- soutenir le développement d'une gestion personnalisée des carrières.

Elle a vocation à représenter un espace de travail collaboratif, au sein duquel se dégagent des synergies nouvelles en matière de GRH publique par l'élaboration d'un plan régional de gestion prévisionnelle des ressources humaines (RH), la mise en place de nouveaux réseaux de travail, la circulation améliorée de l'information entre les services et à destination des agents, le partage de bonnes pratiques entre les différents acteurs... Elle doit aussi permettre notamment d'identifier des passerelles de mobilité entre les ministères, en offrant ainsi aux agents un nombre plus important d'opportunités d'évolutions professionnelles. Certains SGAR travaillent également sur des programmes de bourse régionale des emplois publics sur internet.

Ce glissement vers une administration de moyens ne va pas sans poser une question : comment s'articule le SGAR avec le secrétaire général de la préfecture du chef-lieu de région ? Ce dernier était en effet jusqu'à présent censé avoir la haute main sur la gestion des moyens préfectoraux en région et dans les départements. A court terme, un nouvel équilibre doit pouvoir se dégager afin qu'il n'y ait ni recoupement ni redondance des responsabilités entre ces deux acteurs.

Recommandation n° 5 : veiller au juste équilibre des compétences entre le SGAR et le secrétaire général de la préfecture du chef-lieu de région s'agissant de l'administration des moyens préfectoraux.

C. LA DYNAMISATION DE LA STRATÉGIE IMMOBILIÈRE DE L'ÉTAT

En impulsant des réorganisations et des rapprochements de services de grande ampleur, la RéATE a eu un effet bénéfique sur la politique immobilière de l'Etat. La recherche d'une plus grande rationalisation des moyens immobiliers a été mise en oeuvre à cette occasion, les préfectures n'étant pas restées en marge de cette redynamisation de l'Etat « propriétaire » et « locataire ».

1. Le bilan général de la RéATE

Sans dresser un bilan exhaustif des opérations immobilières menées par l'Etat dans le cadre de la RéATE, il apparaît toutefois utile de rappeler les grandes lignes et les principaux résultats de cette politique. Les préfectures ont en effet fortement contribué à la conduite de ces opérations de restructuration sur l'ensemble du territoire.

La mise en oeuvre de la réorganisation des services déconcentrés de l'Etat est au coeur des schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI) qu'établissent les préfets. Sur la base du diagnostic de l'existant, ces documents doivent intégrer les axes de rationalisation de l'occupation des surfaces, d'optimisation économique et d'amélioration environnementale pour l'implantation des services.

A ce jour et selon les informations communiquées par le ministère de l'intérieur à votre rapporteure spéciale, la quasi-totalité des projets en métropole et dans les départements d'outre-mer a pu être validée au niveau interministériel.

Toujours selon le ministère de l'intérieur, le bilan global de la RéATE fait apparaître :

- une diminution d'un tiers du nombre de sites , ce nombre étant passé de 2 351 à 1 482 ;

- une diminution d'environ 307 000 m² de surface utile nette (SUN), la baisse du ratio d'occupation passant de 17,5 m² à 15 m² (SUN) ;

- une économie totale de loyer de 11,3 millions d'euros ;

- un solde excédentaire d'environ 77 millions d'euros en investissement, dans la mesure où 513 millions d'euros ont été réalisés en recettes de cessions d'actifs et que 436 millions d'euros de dépenses nouvelles ont été identifiées.

2. L'inflexion de la politique immobilière préfectorale

Dans un référé en date du 5 novembre 2010 sur la gestion du parc immobilier des préfectures et des sous-préfectures, la Cour des comptes faisait part de ses préoccupations concernant « l'absence de perspectives stratégiques et un relatif manque de réalisme budgétaire pour la rationalisation du parc immobilier des préfectures et des sous-préfectures ». Elle regrettait en particulier que « les conséquences de la réforme de l'Etat tant aux plans de l'organisation territoriale (RéATE) que de la gestion immobilière (NPI 12 ( * ) ) n'aient pas encore été pleinement satisfaites pour réviser cette gestion ».

Les principales observations de la Cour des comptes lors de son référé sur la gestion du parc immobilier des préfectures et des sous-préfectures (2010)

La période d'observation du référé de la Cour des comptes s'étendait de l'année 2004 à l'année 2009 .

La Cour des comptes relevait un entretien « inégal » de ce parc, « surtout pour les réparations courantes ». Les perspectives relatives aux moyens accordés à la gestion du parc posait également problème. Alors que pour les constructions neuves et les gros travaux l'enveloppe du « programme national d'équipement » (PNE) était toujours restée « modeste face à l'ampleur des besoins », la baisse des crédits de fonctionnement des préfectures ne laissait présager aucune amélioration des moyens consacrés à la gestion du parc immobilier.

La Cour des comptes soulignait que « la question de la soutenabilité budgétaire du maintien de l'état actuel du parc et a fortiori de sa nécessaire modernisation est à considérer avec vigilance alors que le caractère figé de la carte des sous-préfectures et la très difficile rationalisation des implantations, en raison du caractère souvent historique des hôtels des préfectures, n'a offert jusqu'ici que peu de marge de manoeuvre ».

L'absence d'orientations et d'actions coordonnées face au régime « daté et pénalisant » des mises à disposition de locaux par les collectivités territoriales (71 % des surfaces) était également pointé, tout comme la nécessité de mener une réflexion approfondie (notamment du point de vue juridique) sur la partie résidentielle du parc préfectoral.

Dans ce contexte d'ensemble, le volet immobilier de la RéATE a eu « un impact réduit sur les préfectures et sous-préfectures » selon les éléments communiqués par le ministère de l'intérieur à votre rapporteure spéciale. En effet, si un millier d'agents du ministère de l'intérieur ont rejoint les nouvelles DDI, les mouvements ainsi réalisés (une dizaine d'agents au maximum par département) n'ont pas nécessité de relocalisation d'implantations. Ces dernières auraient d'ailleurs été difficiles à soutenir budgétairement : les bâtiments préfectoraux étant majoritairement mis à disposition par les collectivités territoriales, la récupération de produits de cession en cas de départ ne pouvait pas être espérée.

Toutefois, quelques préfectures ont pu accueillir en leur sein des directions régionales (la DRAC à Rouen ainsi que la DIRM et la DRRT à Rennes), des DDI (à Albi, Arras, Lons-le-Saunier, Nîmes, Saint-Etienne et Toulouse) ou des services de moindre taille (à Avignon, Bastia, Clermont-Ferrand, Evreux, Foix Guéret, Nantes, Nevers, Nice, Orléans, La Roche-sur-Yon, Tarbes, Vesoul, Versailles...).

Il en est de même pour l'accueil de subdivisions de DDI dans certaines sous-préfectures : Alès, Bayonne, Béziers, Castelsarrasin, Commercy, Cosne-sur-Loire, Lure, Mulhouse ou Pontivy.

Les mutualisations immobilières en région Franche-Comté

La mise en oeuvre de la RéATE en Franche-Comté a débouché sur plusieurs mutualisations immobilières. Ces mutualisations ont eu lieu à l'échelle interministérielle et elles ont notamment concerné les bâtiments préfectoraux .

Depuis le mois de septembre 2012, les services de la DDCSPP du Jura sont installés dans les locaux de la préfecture (Lons-le-Saunier). De même, la préfecture du Doubs (Besançon) a accueilli en 2012 les services de l'office français de l'immigration et de l'intégration (OFII).

La préfecture de la Haute-Saône (Vesoul) a libéré en 2010 une partie de son espace pour recevoir l'UT de la DREAL et le service départemental de l'office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC-VG).

Enfin, le pôle « Application du droit des sols » (ADS) de la DDT a emménagé à la sous-préfecture de Lure (Haute-Saône) au 1 er janvier 2011.

Ainsi, les préfectures ont amorcé sous l'effet de la RéATE une inflexion de leur stratégie immobilière , même si l'effort de rationalisation doit encore être poursuivi.

3. L'entretien des bâtiments

La rationalisation de la gestion du parc immobilier des préfectures et des sous-préfectures passe par une exigence d'entretien régulier et à la hauteur des besoins.

A cet égard, votre rapporteure spéciale relève qu'au cours de sa mission de contrôle nombre de ses interlocuteurs ont déploré la passation de marchés publics répondant mal aux besoins pour l'entretien courant des bâtiments . Des marchés nationaux, obtenus par des sociétés éloignées du tissu local, ne donnent pas satisfaction. Au surplus, le coût de telles prestations a tendance à croître au bout de quelques années, au moment où les préfectures sont devenues incapables de les assurer à nouveau en régie et où elles ont perdu l'expertise pour en évaluer le juste coût.

Recommandation n° 6 : privilégier la passation de marchés locaux pour l'entretien des bâtiments préfectoraux, si besoin en recourant à l'allotissement des marchés afin de préserver l'accès des petites et moyennes entreprises (PME) à la commande publique.

D. LES SERVICES SOUMIS À L'INFLATION NORMATIVE

Parmi les principaux problèmes auxquels sont soumis les services préfectoraux aujourd'hui figure malheureusement en bonne place l'inflation normative. Chaque semaine, voire chaque jour, de nouvelles instructions (à caractère législatif ou règlementaire) sont adressées aux préfectures. Ne pouvant compter que sur des moyens humains de plus en plus limités, les services éprouvent les pires difficultés à gérer ce flux . La vérité devrait même pousser à reconnaître que les préfectures ne parviennent plus à le gérer, ou en tout cas très mal.

1. Le constat : 80 000 pages de circulaires adressées chaque année aux préfectures

Afin de mesurer le flux de normes auquel sont confrontés les services préfectoraux au cours d'une même année, votre rapporteure spéciale a interrogé le secrétariat général du ministère de l'intérieur ainsi que la direction général des collectivités locales (DGCL) du même ministère. Les résultats sont saisissants : l'ampleur du phénomène de l'inflation normative, subi non seulement par les préfectures mais aussi par l'ensemble de l'administration territoriale, est considérable.

Selon le secrétariat général du ministère, le stock de normes existantes peut être évalué à « pas moins de 400 000 ». Le nombre de pages de circulaires adressés aux préfets est, quant à lui, estimé à 80 000 par an .

A l'appui de son recensement, la DGCL apporte les réserves suivantes permettant de pondérer une approche strictement quantitative de sa « production » normative annuelle . Tout d'abord, elle rappelle que cette production est en lien direct avec l'activité législative. Par exemple, en matière de fonction publique, telle norme qui peut être fixée par décret pour la fonction publique de l'Etat sera fixée par la loi pour la fonction publique territoriale. Par ailleurs, depuis quelques années, les propositions de loi représentent une part significative de l'activité de la DGCL. La direction n'est évidemment pas à leur origine, cependant elle apporte son concours à des degrés divers. Enfin, la DGCL produit de nombreuses circulaires-cadres dont l'objectif n'est pas de donner une instruction à mettre en oeuvre dans un délai fixé, mais plutôt d'apporter aux agents-instructeurs des préfectures les éléments utiles à l'application de la loi (les agents instructeurs se réfèreront à ces éléments à mesure qu'ils en auront besoin). A titre d'exemple, la circulaire-cadre annuelle sur la répartition de la dotation générale de fonctionnement (DGF), ou d'autres dotations ayant été modifiées par la dernière loi de finances, actualise la description de la législation sur la base des derniers changements. Il en est de même pour celle sur la fiscalité locale. La taille de ces documents doit donc être quelque peu relativisée : ce sont des documents de référence qui ne sont pas destinés à une lecture in extenso .

Sous ces réserves, le tableau ci-après retrace le nombre de normes adressées par la DGCL aux préfets depuis 2007.

Les normes adressées par la DGCL aux préfets depuis 2007

Année

Lois

Décrets

Circulaires

2007

1 (loi n° 2007-209 du 17 février 2007 relative à la fonction publique territoriale)

43

77

2008

1 (loi n° 2008-352 du 16 avril 2008 visant à renforcer la coopération transfrontalière)

39

107

2009

0

35

88

2010

2 (loi n° 2010-559 du 28 mai 2010 pour le développement des sociétés publiques locales et loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales)

25

82

2011

1 (loi n° 2011-1749 du 5 décembre 2011 relative au plan d'aménagement et de développement durable de la Corse)

20

ND

2012

1 (loi n° 2012-281 du 29 février 2012 visant à assouplir les règles relatives à la refonte de la carte intercommunale)

23

77

Source : source commission des finances d'après la DGCL

Au total, la DGCL indique avoir préparé à l'attention des préfets (en tant qu'auteur ou contributeur principal) sur les dernières années, en moyenne et par an: une loi (hors loi de finances), 31 décrets (avec un maximum à 43 et un minimum à 20) et 86 circulaires (avec un maximum à 107 et un minimum à 77).

2. La pression sur les services

Les causes de cette inflation normative sont bien connues : la multiplication des sources du droit (à l'Etat sont venus s'ajouter les sources communautaires et internationales), l'émergence de nouveaux domaines (avec la montée en puissance des normes environnementales, des nouvelles technologies...) et l'absence de réexamen périodique des normes.

Les conséquences en sont tout aussi bien identifiées : le ralentissement de l'activité économique en raison du coût et de la durée des procédures, des charges disproportionnées pesant sur les acteurs (les collectivités territoriales, les services déconcentrés de l'Etat...), ainsi qu'un réel manque d'accessibilité et d'intelligibilité de la norme pour le citoyen.

Dans les préfectures plus spécifiquement, il en résulte une forte pression sur les services destinataires de ce flux de normes. Les stocks s'accumulent, tandis que le temps passé à traiter ces informations s'allonge. Les effectifs sont mobilisés sur des tâches administratives dont on ne voit pas la fin. Les préfectures ne sont ainsi pas seulement le relais de l'inflation normative, elles en sont aussi l'une des principales victimes.

Pour les personnels , le « syndrome de Sisyphe » guette. Surtout, quand la norme devient si dense et pléthorique, il devient difficile de l'assimiler et, plus encore, de la mettre effectivement en application : « trop de normes tue la norme ». Outre le risque juridique alors encouru, la perte de sens menace. A quoi sert une norme qu'on n'a quasiment plus le temps de lire ? C'est alors un sentiment de malaise généralisé qui se diffuse, malaise que votre rapporteure spéciale a pu ressentir dans les entretiens qu'elle a menés au cours de sa mission de contrôle.

3. Les voies pour une maîtrise du flot normatif

Aucun interlocuteur rencontré par votre rapporteure spéciale ne conteste cet état de fait. Il y a même, au travers de l'administration française, un vrai consensus, et la prise de conscience quant aux effets ravageurs de cette dérive normative a eu lieu il y a maintenant longtemps. La question porte donc sur les voies et moyens pour parvenir aujourd'hui à juguler cette dérive .

Les administrations centrales , tout d'abord, s'organisent pour parvenir à une meilleure maîtrise du phénomène normatif.

Ainsi, par exemple, la DGCL a nommé cette année un expert de haut niveau dont l'une des missions, en lien étroit avec le secrétariat général du ministère de l'intérieur, est l'allègement et la simplification des tâches des préfectures dans le champ de compétences de la direction. Une impulsion confiée à un même fonctionnaire a été retenue pour des raisons essentiellement pragmatiques. Les simplifications envisagées correspondent en effet souvent à des points marginaux de l'activité des services centraux. Le travail nécessaire pour obtenir une simplification est considérable, alors que l'économie qu'il est possible d'en espérer en ce qui concerne les charges des préfectures est souvent modeste. C'est pourquoi une impulsion spécifique a paru souhaitable pour que ce dossier se tienne à un bon rang dans l'ordre des priorités. Dans une deuxième étape, l'expert de haut niveau sera chargé d'une enquête de satisfaction auprès des préfectures, considérées par conséquent comme des utilisateurs des services rendus par la DGCL. Il devra notamment mesurer les appréciations et les attentes des préfectures quant aux outils d'information que la DGCL met à leur disposition.

L'activité normative résultant pour une part conséquente de la publication de circulaires, une « circulaire des circulaires » en date du 25 février 2011 est venue établir une typologie de ces actes en fonction de laquelle sont applicables des règles spécifiques en matière de signature et de diffusion. Par exemple, les circulaires définissant des priorités politiques ou des objectifs stratégiques doivent être signée personnellement par le ministre et être adressées à l'ensemble des préfets.

Plus généralement, le 17 juillet 2013, le Conseil interministériel pour la modernisation de l'action publique (CIMAP) a décidé (dans sa résolution n° 25) que « l'usage des circulaires sera réservé à la diffusion d'instructions signées personnellement par les ministres, se présentant sous l'intitulé « Instructions du Gouvernement », et limitée à 5 pages maximum . L'information des services sera assurée par les outils intranet des ministères en privilégiant l'interactivité (« questions-réponses », guides et modes d'emploi, forums d'échanges notamment). Les sites Internet des ministères permettront de proposer au public un service d'informations actualisées et indexées pour les moteurs de recherche ». La limitation à cinq pages des circulaires et l'obligation de signature par le ministre en charge paraît de nature à introduire un frein dans l'inflation normative.

L'activité législative ne doit pas non plus être exemptée de toute contrainte, dans la mesure où elle est aussi directement responsable de la dérive normative subie par les préfectures (comme par les autres services de l'Etat et les collectivités territoriales, entre autres). L'obligation d'une étude d'impact est prévue (pour les projets de loi) tant par l'article 53 de la LOLF que par l'article 8 de la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution.

Toutefois, cette étude d'impact demeure encore trop souvent un exercice purement formel, au final guère utile . La plupart du temps, elle ne permet pas d'évaluer clairement la charge de travail qui incombera aux préfectures (ainsi qu'aux autres administrations) si le texte est adopté.

Recommandation n° 7 : renforcer le caractère substantiel des études d'impact accompagnant les projets de loi pour en faire de vrais outils d'aide à la décision du législateur.

Afin d'ériger en véritable réflexe la vérification préalable de la capacité du réseau de l'administration territoriale de l'Etat à mettre en oeuvre les mesures élaborées au niveau national, une piste consisterait aussi à prendre à l'avance l'avis des futurs exécutants. Cette démarche pourrait avoir lieu en interrogeant des « groupes miroirs » ou des « panels » d'agents des administrations chargées de la mise en oeuvre des politiques publiques au niveau local.

Recommandation n° 8 : instaurer des « groupes miroirs » ou des « panels » d'agents des préfectures, afin de tester en amont la capacité du réseau à mettre en oeuvre une mesure.

Dans la même perspective, la pratique d'ores et déjà assez répandue des « carrières alternées » entre l'administration centrale et l'administration préfectorale doit être encouragée. Elle permet en effet de préserver en administration centrale un certain recul et un regard critique sur les dispositions envisagées et ayant vocation à être mises en oeuvre ensuite par les préfectures.

Recommandation n° 9 : encourager les « carrières alternées » entre l'administration centrale et l'administration préfectorale, afin de maintenir l'administration centrale en phase avec la réalité du travail en préfecture.

E. LA RÉDUCTION CONTINUE DES EFFECTIFS

Au cours de la période récente et plus particulièrement sous l'effet de la RGPP, les effectifs du ministère de l'intérieur ont connu une évolution contrastée . Alors que la police et la gendarmerie voient leurs plafonds d'emplois augmenter 13 ( * ) , les préfectures supportent une baisse très substantielle du nombre de leurs agents. Schématiquement, tout se passe comme si l'accroissement des forces de sécurité était finalement « gagé » par la baisse du niveau d'emploi dans les autres services déconcentrés du ministère.

Toujours est-il qu' en préfecture ces suppressions d'emplois ne sont pas sans conséquence sur les conditions de travail, comme sur la qualité du service public offert. Elles rendent d'autant plus nécessaire une gestion rénovée des ressources humaines.

1. La baisse marquée depuis 2007

La mission « Administration générale et territoriale de l'Etat » a été particulièrement mise à contribution en vue de l'objectif de réduction des effectifs fixé par la RGPP. Le tableau ci-dessous retrace ainsi l'évolution de ses effectifs depuis 2007.

Evolution des ETPT de la mission

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2012-2007

LFI

35 113

35 727

34 904

34 100

33 402

33 015

- 2 098

Exécution

34 478

35 156

34 523

33 750

32 840

32 549

- 1 929

Ecart

- 635

- 571

- 381

- 350

- 562

- 468

Source : ministère de l'intérieur

La réduction des effectifs sous la contrainte de la RGPP a été particulièrement forte en 2010 et 2011 avec respectivement - 773 emplois équivalents temps plein travaillés (ETPT) et - 910 ETPT . La pression s'est un peu relâchée en 2012 avec - 291 ETPT .

Au sein de la mission, le principal programme à avoir été concerné par la règle du « non remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite » a été le programme « Administration territoriale » portant les effectifs des préfectures et des sous-préfectures .

Le tableau ci-dessous rend compte de l'application des « mandats RGPP » en termes d'emploi sur ce programme de 2009 à 2013.

Suppressions d'emplois dans le programme « Administration territoriale » entre 2009 et 2013

2009

2010

2011

TOTAL 2009-2011

2012

2013

TOTAL 2012-2013

TOTAL 2009-2013

Titres

127

Faciliter et sécuriser la délivrance du passeport et de la carte nationale d'identité électronique

52

73

145

270

50

25

75

345

129

Moderniser et sécuriser la délivrance des permis de conduire

150

126

276

276

128

Faciliter et sécuriser la délivrance des certificats d'immatriculation pour les citoyens

69

140

130

339

0

80

80

419

Total Titres

121

213

275

609

200

231

431

1 040

Contrôle de légalité et règlementation

125

Améliorer la qualité du contrôle de légalité

207

156

104

467

175

88

263

730

126

Abandonner certaines règlementations pour permettre un redéploiement sur des missions prioritaires

50

0

50

50

130

Adapter les sous-préfectures à l'évolution de leurs missions

0

0

0

0

0

Total contrôle de légalité et règlementation

207

156

104

467

225

88

313

780

2009

2010

2011

TOTAL 2009-2011

2012

2013

TOTAL 2012-2013

TOTAL 2009-2013

Rationalisation des fonctions support et des moyens affectés à la représentation de l'Etat

137

Optimiser la fonction Ressources humaines, notamment par sa régionalisation et la mutualisation de la gestion administrative

29

88

108

225

25

81

106

331

Rationalisation des autres fonctions supports

90

94

72

256

256

140

Optimiser et déconcentrer la fonction immobilière

110

70

20

200

0

50

50

250

139

Rationaliser les infrastructures et le support des systèmes d'information et de communication

115

115

120

350

0

0

0

350

131

Renforcer la mutualisation et l'externalisation des moyens affectés à la représentation de l'Etat (résidences et garages des préfectures)

25

25

50

50

Total fonctions support

344

367

320

1 031

50

156

206

1 237

TOTAL

672

736

699

2 107

475

475

950

3 057

Source : ministère de l'intérieur

Entre 2009 et 2012, 2 582 emplois équivalents temps plein (ETP) ont donc été supprimés sur le programme « Administration territorial ».

Ces réductions d'emplois se sont appuyées sur les gains espérés de diverses mesures :

- la réforme des conditions de production et de délivrance des titres d'identité ;

- la réorganisation du contrôle de légalité ;

- l'optimisation et l'intégration de la fonction immobilière ;

- la réorganisation de la fonction « systèmes d'information ».

Pour 2013 , le « mandat RGPP » prévoyait une nouvelle réduction à hauteur de 475 ETP. Le nouveau Gouvernement a toutefois revu cet objectif à la baisse : 450 ETP ont été supprimés .

En tenant compte des effets en année pleine des précédentes suppressions en 2012 et de divers transferts, le plafond d'emplois du programme est ainsi passé à 27 763 ETPT .

Votre rapporteure spéciale prend note que les suppressions prévues par le nouveau Gouvernement en 2013 se situent en deçà de la cible initialement fixée par la RGPP. Mais elle souligne toutefois la difficulté qu'auront les préfectures et les sous-préfectures à tenir cet engagement .

2. La qualité du service public et les conditions de travail dégradées
a) Les activités de guichet

Les suppressions d'emplois dictées par la RGPP au sein des préfectures étaient essentiellement fondées sur un pari : les gains de productivité espérés de la diffusion des nouvelles technologies . Dans son rapport précité « La RGPP dans les préfectures : pour la délivrance des titres, la qualité du service public est-elle en péril ? », votre rapporteure spéciale a montré que ce pari était hasardeux. Les difficultés rencontrées tant dans le déploiement du système d'immatriculation des véhicules (SIV) que lors de l'entrée en vigueur du passeport biométrique ont largement illustré ce constat. Un principe de précaution aurait probablement voulu qu'on mette dans un premier temps en place la nouvelle génération de titres sécurisés, qu'on en tire le bilan organisationnel puis qu'on supprime le cas échéant les emplois dégagés grâce aux gains de productivité. C'est la logique inverse qui a été mise en oeuvre, avec pour résultat une forte pression sur les activités de guichet pour la délivrance des titres.

Comme votre rapporteure spéciale le montrera infra , cette pression ne s'est que partiellement relâchée aujourd'hui . Les heurts du passage au nouveau permis de conduire en 2013 avec le projet « FAETON » placent à nouveau en difficulté les agents de préfecture face à la demande légitime des usagers 14 ( * ) . Le surcroît de travail impliqué par cette transition chaotique vient se conjuguer à une activité de délivrance des certificats d'immatriculation qui reste plus importante que les prévisions initialement réalisées lors de la mise en place du SIV. En effet, alors que les réseaux de concessionnaires se sont vus confiée une mission de délivrance de ces certificats, leurs opérations restent dans les faits aujourd'hui limitées aux véhicules neufs. Pour les véhicules d'occasion, les usagers continuent de se tourner vers les services des préfectures. Ce constat n'est pas neutre dans un contexte économique où le marché du neuf traverse une passe difficile et où la majorité des transactions portent sur des voitures d'occasion. Selon les informations recueillies en préfectures par votre rapporteure spéciale lors de son contrôle, on peut estimer à plus de 50 % la proportion de certificats d'immatriculation encore délivrés aux guichets des préfectures.

L'effet de ciseaux consistant en la suppression des effectifs et au maintien d'un niveau d'activité de délivrance de titres encore élevé n'est pas sans conséquences sur la charge de travail pesant sur les agents aux guichets des préfectures. Sans toucher les planchers atteints lors du très pénible passage au SIV, le « moral des troupes » est toutefois en berne . La lassitude ici éprouvée vient se mêler au sentiment de perte de sens de la mission et d'anxiété quant au devenir des préfectures évoqué supra .

A cet égard, votre rapporteure spéciale tient à saluer le sens du service public et l'engagement des personnels des préfectures (notamment ceux situés en premier ligne au contact des usagers dans les activités de guichet) dans un contexte tendu. La réussite finale des projets menés à bien dans les préfectures au cours des dernières années (SIV, passeports biométriques, mutualisations de moyens...) leur doit beaucoup .

b) Le contrôle de légalité

Outre les activités de guichet, une autre mission traditionnelle des préfectures a connu une profonde évolution au cours des dernières années : le contrôle de légalité . Dans ce domaine les suppressions de postes ont reposé sur une révision de la stratégie de contrôle.

La stratégie redéfinie du contrôle de légalité

La circulaire NOR IOA/C/091/7418/C du 23 juillet 2009 relative à la réorganisation du contrôle de légalité fixe le principe d' une concentration en préfecture des moyens nécessaires au contrôle de légalité et au contrôle budgétaire. Ces moyens étaient, jusqu'alors, répartis entre les sous-préfectures.

Toutefois, le rôle et la responsabilité du sous-préfet à l'égard des élus en matière de contrôle de légalité est préservé. Il s'agit en l'espèce de maintenir le sous-préfet dans le jeu des relations avec les collectivités territoriales, en protégeant l'un de ses principaux moyens d'action.

Le sous-préfet conserve également sa fonction de conseil auprès des collectivités territoriales, cette mission étant indissociable du contrôle.

La nouvelle architecture du contrôle de légalité s'accompagne d' un circuit redéfini de transmission des actes :

- les actes des collectivités territoriales situées dans les arrondissements de la sous-préfecture sont transmis à celle-ci ;

- sur la sous-préfecture repose la charge de procéder à une sélection des actes prioritaires, sur la base de la stratégie de contrôle élaborée par le préfet. Ces actes sont alors transmis pour traitement au service compétent (la direction des relations avec les collectivités territoriales) de la préfecture. Dans ce cadre, ce service est mis pour emploi à la disposition du sous-préfet ;

- en tant que de besoin, ce service soumet à la signature du sous-préfet les lettres d'observation aux élus de son arrondissement.

Au total, le sous-préfet conserve donc sa capacité d'appréciation , dans le respect des directives préfectorales. Son rôle en matière de conseil aux collectivités territoriales se trouve par ailleurs garanti par la mise à disposition, également pour emploi, de la direction des relations avec les collectivités territoriales (DRCT) dans ce cadre.

Dans ce schéma d'organisation d'ensemble quelques exceptions peuvent toutefois exister, du fait de spécificités géographiques . Par exemple, le cas de certaines sous-préfectures très éloignées et / ou peu accessibles du chef-lieu de département peut susciter des adaptations.

Ainsi que le rappelle la circulaire du 23 juillet 2009 précitée « la nouvelle organisation représente une transformation des méthodes de travail. Excluant le cloisonnement géographique, elle implique un travail en réseau entre les sites, et donc des relations souples, rapides, réactives et collaboratives ». Cette capacité à travailler en réseau est d'autant plus sollicitée que certains pôles thématiques peuvent être localisés en fonction d'une sous-préfecture disposant d'une expertise préalable particulière, par exemple.

Dans le cadre du contrôle de légalité, les préfectures ont été incitées à recentrer le contrôle sur les actes les plus sensibles et à fort enjeu .

Initié par la circulaire précitée du 17 janvier 2006 relative à la modernisation du contrôle de légalité, ce recentrage a fait l'objet d'une actualisation par la circulaire NOR IOCK0920444C du 1 er septembre 2009 relative au contrôle de légalité en matière d'urbanisme, par l'ordonnance n° 2009-1401 du 17 novembre 2009 portant simplification de l'exercice du contrôle de légalité et par la circulaire NOR IOC/B/C du 24 février 2010 relative à la mise en oeuvre de l'ordonnance précitée.

Les priorités stratégiques s'articulent autour des domaines de l'urbanisme et de l'environnement, de la commande publique et du respect des compétences des différentes collectivités territoriales.

Concernant l'urbanisme et l'environnement , les décisions de préemption deviennent, par exemple, des actes à contrôler en priorité. Il en va de même notamment pour les arrêtés d'ouverture d'enquêtes publiques, les délibérations relatives aux acquisitions foncières et aux périmètres d'intervention foncière. En revanche, les permis portant sur des travaux mineurs et sans enjeu n'entrent pas dans cette catégorie.

Parmi les priorités de ce secteur, le respect des législations afférentes à l'aménagement et à la protection des espaces géographiques sensibles occupe également une bonne place. Il s'agit ici de faire strictement appliquer pour les zones de montagne et le littoral les dispositions issues des articles L. 145-1 et suivants (dispositions particulières aux zones de montagne), ainsi que L. 146-1 et suivants (dispositions particulières au littoral) du code de l'urbanisme.

Par ailleurs, l'exercice du contrôle de légalité doit porter prioritairement sur les aménagements et les travaux situés dans des zones à risques , tout particulièrement lorsque ces zones sont couvertes par un plan de prévention des risques naturels prévisibles (PPRNP), tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches ou les incendies de forêts.

S'agissant de la commande publique , l'attention porte désormais en particulier sur les dossiers à fort enjeu (cette notion pouvant s'apprécier au regard du contexte local), les marchés de maîtrise d'oeuvre, les conventions de mandat ainsi que les marchés complémentaires.

Le contrôle des actes budgétaires et à caractère financier continue de représenter un volet majeur du contrôle de légalité. Ainsi que le rappelle la DNO des préfectures (2010-2015), « un contrôle budgétaire attentif et réactif est indispensable pour prévenir une dégradation de la situation financière des collectivités territoriales ».

En revanche, la plupart des actes de personnels relevant du code de la fonction publique ne sont plus considérés comme prioritaires . Seuls demeurent dans cette catégorie quelques actes tels que les contrats des personnels de cabinet, ce secteur devenant particulièrement sensible au lendemain des élections.

Au regard de cette stratégie, votre rapporteure spéciale s'interroge cependant sur ce « rétrécissement » du périmètre de contrôle. Elle rappelle que la diminution du champ prioritaire du contrôle de légalité peut avoir pour conséquence une augmentation de l'insécurité juridique, qui aurait elle-même un coût social élevé .

Votre rapporteure spéciale rappelle en outre qu'à ce recentrage du contrôle vient se combiner les effets de la récente réforme des chambres régionales et territoriales des comptes (CRTC) . Ayant donné lieu à la fusion de certaines de ces chambres, cette réforme a notamment pour conséquence un éloignement supplémentaire du contrôleur et des collectivités territoriales contrôlées 15 ( * ) .

3. L'amélioration attendue de la gestion des ressources humaines

Si la baisse des effectifs en préfecture peut répondre à un objectif de maîtrise de la masse salariale sur le long terme dans un objectif de redressement des finances publiques (dette et déficit publics), elle peut paradoxalement aussi faire craindre une approche « court termiste » de la gestion des ressources humaines dans ces services déconcentrés de l'Etat.

Les départs en retraite signifient une perte de savoir-faire et de connaissances acquises au fil du temps. Cette expérience administrative est à la fois précieuse et difficilement remplaçable dans les préfectures où le lien avec les territoires se tisse patiemment. Lorsque les départs en retraite se doublent d'un non-remplacement (comme ce fût le cas avec la RGPP), la perte est nette.

Dans les préfectures, la pratique relativement habituelle du recours à des vacataires pour couvrir un besoin ponctuel (par exemple à l'approche des départs en vacances dans le cas des activités de délivrance de titres) représente un autre marqueur de cette approche de court terme. Comme l'ont relevé plusieurs interlocuteurs de votre rapporteure spéciale au cours de sa mission de contrôle, ces recrutements ne vont pas d'ailleurs pas sans poser question au regard de l'application effective de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, dite « loi Sauvadet ».

Recommandation n° 10 : privilégier autant que possible la mise en oeuvre des dispositions prévues par la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, dite « loi Sauvadet », plutôt que de recourir à des vacataires en préfecture.

L'évolution de l'activité des préfectures et des sous-préfectures oriente ces services de l'Etat vers des métiers où la valeur ajoutée sera de plus en plus un facteur clef de réussite . Or, précisément cette valeur ajoutée tend à faire défaut, notamment dans les sous-préfectures ou les préfectures de petite taille. La gestion prévisionnelle des effectifs doit prendre en compte ce besoin en cadres de catégorie A. L'urgence est réelle dans la mesure où la concurrence d'autres administrations et, plus encore, des conseils généraux a pour conséquence d'attirer cette ressource vers d'autres horizons (direction générale ou services techniques des départements...). De ce point de vue, l'administration préfectorale partage d'ailleurs un point commun avec les DDI issues de la RéATE confrontées à un même problème (concurrence des ARS, des services techniques des départements...).

Recommandation n° 11 : identifier le besoin en cadres de catégorie A comme l'un des axes prioritaires de la gestion prévisionnelle des effectifs au sein de l'administration préfectorale.

Parallèlement, l'évolution des métiers de l'administration territoriale amène également à s'interroger sur le devenir des agents de catégorie C . La technicité croissante des métiers et la diffusion des nouvelles technologies rendent l'employabilité de ces personnels de plus en plus sensible. Un effort accru de formation doit dès lors être produit pour permettre leur évolution professionnelle.

Recommandation n° 12 : consacrer un effort d'investissement accru à la formation des agents de catégorie C, afin de valoriser leur employabilité.

Dans un univers préfectoral en mutation notamment sous l'effet de la RéATE, le maître mot en matière de gestion des ressources humaines est probablement celui de « mobilité » . Or, cette mobilité souffre aujourd'hui de plusieurs freins. La force des habitudes, la crainte du changement, l'achat d'un logement avec l'ancrage familial qui en découle souvent constituent autant d'obstacles bien connus à une évolution professionnelle fondée sur la mobilité. Contrairement à une idée reçue, ils transcendent d'ailleurs les clivages de catégories (A, B et C) au sein de l'administration préfectorale.

Mais des barrières plus administratives jouent aussi. Ainsi que le met en évidence la Cour des comptes dans son rapport précité sur « L'organisation territoriale de l'Etat », des « conditions d'emploi inégalitaires » (basées sur des différences de statut et des inégalités de rémunération) ainsi que des « modes de gestion peu adaptés à l'organisation territoriale et à ses réformes » (fonctionnement de la commission administrative paritaire, répartition des fonctionnaires en catégories, ventilation des postes par programme budgétaire et par budget opérationnel de programme...) sont autant de facteurs de rigidité actuellement difficiles à surmonter.

Recommandation n° 13 : favoriser la mobilité des personnels en introduisant de la souplesse dans les modes de gestion des ressources humaines de l'Etat et en surmontant les différences de statut comme de rémunération.

II. LES GRANDS PROJETS : LA MODERNISATION EN COURS DE L'ADMINISTRATION PRÉFECTORALE

Avec en toile de fond la RéATE, l'administration préfectorale a pris le tournant de la modernisation au cours de la période récente. Le saut technologique effectué résulte principalement de l'émergence de la nouvelle génération de titres sécurisés, mêlant biométrie et architectures informatiques complexes.

Dans son rapport précité « La nouvelle génération de titres d'identité : bilan et perspectives », votre rapporteure spéciale avait déjà eu l'occasion de présenter la stratégie en oeuvre, les difficultés rencontrées et les succès remportés dans ce domaine. Le présent rapport lui permet de faire un nouveau point d'étape sur les avancées et l'actualité de ces projets.

A. L'AGENCE NATIONALE DES TITRES SÉCURISÉS (ANTS), AU CoeUR DE LA STRATÉGIE DE NOUVELLE GÉNÉRATION DE TITRES D'IDENTITÉ

1. Les objectifs ambitieux de l'agence

Instituée par le décret n° 2007-240 du 22 février 2007, l'agence nationale des titres sécurisés (ANTS) est un établissement public administratif (EPA). L'agence a la qualité d' opérateur du programme « Administration territoriale » .

Sa mission vise à répondre aux besoins des administrations de l'Etat en matière de titres sécurisés. Elle recouvrait initialement les passeports électronique et biométrique, le certificat d'immatriculation des véhicules, le titre de séjour électronique, la carte nationale d'identité électronique (CNIe) et le visa biométrique. Depuis 2011, les attributions de l'ANTS ont été étendues à d'autres documents : le feuillet pour l'apposition d'un visa délivré par les autorités françaises compétentes aux titulaires d'un document de voyage non reconnu par la France, le titre de voyage délivré aux réfugiés et aux apatrides titulaires d'une carte de résident ou d'une carte de séjour, les cartes professionnelles des agents de l'Etat, le permis de conduire des bateaux de plaisance à moteur, le permis de conduire et la carte nationale d'identité (CNI).

Les défis de l'ANTS à court et moyen terme

De l'audition d'Etienne Guépratte, directeur de l'ANTS, par votre rapporteure spécial (le 18 juillet 2013), il ressort plusieurs axes prioritaires pour l'ANTS à court et moyen terme :

- l'aboutissement du projet « FAETON » ( Cf. infra ) d'ici à 2014, en limitant les surcoûts liés au lancement différé de l'application dans sa version définitive ;

- le développement de la vente de « cartes d'agent » sécurisées à différentes administrations (ministère de la défense, par exemple) ;

- l'avancement du projet COMEDEC ( Cf. infra ) permettant la transmission sécurisée des données d'état civil. Dans cette perspective, une expérimentation est actuellement menée dans quarante-quatre communes (dont Nice, Strasbourg, Brest...). Il est prévu une extension de ce dispositif en 2014 ;

- la conduite d' une restructuration des implantations immobilières de l'agence , qui devrait prochainement quitter le site de Levallois pour un déménagement dans Paris intra muros (quartier de Montparnasse) ;

- le rayonnement de l'agence à l'international afin d'accroître le pouvoir de négociation de la France dans le processus en cours de normalisation de la sécurité dans le monde (notamment au travers d'une participation aux travaux de l'organisation de l'aviation civile internationale et à ceux de divers « groupes de haut niveau »).

L'ANTS se situe ainsi au coeur de la stratégie visant à mettre en place une nouvelle génération de titres sécurisés, tandis que les projets qu'elle mène ont une influence directe sur l'organisation et le fonctionnement des préfectures .

Depuis la création de l'agence, le lien de l'ANTS avec l'administration préfectorale est d'ailleurs étroit. En effet, Etienne Guépratte, l'actuel directeur, est issu du corps préfectoral, tout comme l'étaient Raphaël Bartolt et Bertrand Maréchaux, ses deux prédécesseurs .

Au final, l'objectif poursuivi consiste à donner à la France les moyens d'être au meilleur niveau mondial dans l'emploi des nouvelles technologies pour la production de titres sécurisés, de développer les synergies entre les administrations pour une meilleure maîtrise des coûts et de mutualiser les achats d'équipements nécessaires à l'exploitation des titres.

2. Les ressources de l'ANTS : 205,1 millions d'euros en prévision pour 2013

Le budget de l'ANTS est uniquement abondé par des ressources propres , liées aux taxes et aux redevances sur les titres d'identité ainsi qu'au SIV.

A cet égard, votre rapporteure spéciale souligne que les affectations de recettes ne doivent pas avoir pour objet, même si elles sont conformes à la LOLF (articles 2 et 36), de contourner l'objectif de maîtrise des dépenses mais au contraire d' optimiser l'utilisation des ressources budgétaires .

Les ressources de l'ANTS en 2012 et en 2013

(en millions d'euros)

Taxes et redevances

Base juridique

Produit attendu par l'établissement

Prévisions 2012

Prévisions 2013

Droit de timbre sur les passeports

Art. 953-1 du CGI

Art. 46 de la LFI 2007

107,5

107,5

Droit de timbre sur les titres de voyage biométrique délivrés aux réfugiés et apatrides

Art. 77 de la LFI 2011

0,45

0,9

Taxe perçue à l'occasion de la délivrance, du renouvellement, du duplicata ou du changement d'une carte de séjour

Art. 77 de la LFI 2011

15,2

15,2

Droit de timbre sur la carte nationale d'identité en cas de non présentation de l'ancienne carte lors de son renouvellement

Art. 126 bis du CGI

12,5

12,5

Droit de timbre sur les certificats d'immatriculation des véhicules

Art. 1628-0 bis du CGI

43

43

Redevance d'acheminement

Décret n° 2008-850 du 26 août 2008

26

26

Total

204,65

205,1

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2013

Concernant les recettes de l'ANTS, votre rapporteure spéciale souhaite une nouvelle fois relever le décalage entre le montant du droit de timbre à la charge du demandeur d'un passeport biométrique et le coût complet de ce titre . Ce décalage a été mis en évidence par l'enquête, demandée par votre commission à la Cour des comptes, dans le cadre de l'article 58-2° de la LOLF, sur le coût du passeport biométrique 16 ( * ) . Alors que le droit de timbre s'élève à 89 euros pour un adulte , 45 euros pour un mineur de quinze ans et plus et 20 euros pour un mineur de moins de quinze ans 17 ( * ) , le coût moyen du passeport biométrique est de 55 euros et son coût moyen pondéré en fonction de l'âge du demandeur s'établit à 69 euros .

D'une manière plus générale, si les ressources de l'ANTS demeurent stables d'une année sur l'autre (205,1 millions d'euros en 2013 contre 204,65 millions d'euros en 2012), ses charges augmentent en passant de 293,07 millions d'euros en 2012 à 268,14 millions d'euros en 2013. Cette progression s'explique notamment par la perspective de la mise en production en 2013 du nouveau permis de conduire, l'application « FAETON » mobilisant 42,33 millions d'euros (contre 26,9 millions d'euros en 2012).

B. LE NOUVEAU PERMIS DE CONDUIRE : LA TRANSITION HEURTÉE VERS « FAETON »

En 2013, le projet « phare » pour l'ANTS et les préfectures est le projet « FAETON » visant à la délivrance d'un nouveau permis de conduire, plus sécurisé et en cohérence avec les règles d'harmonisation à l'échelle de l'Union européenne (UE).

Initialement prévue pour le 19 janvier 2013, l'entrée en vigueur de ce dispositif a toutefois été reportée pour des raisons techniques au 16 septembre 2013 . Ce report a mis les préfectures dans l'obligation de gérer, en quelque sorte « en double commande », à la fois l'ancien système et un système transitoire. Un surcroît de travail, des pertes de temps et un allongement des délais de délivrance en ont résulté.

1. Le système national des permis de conduire (SNPC) en vigueur depuis 1992

Créé par arrêté du 29 juin 1992 , le système national des permis de conduire (SNPC) est issu de la mise en oeuvre du permis à points.

Ce système a jusqu'à présent permis de gérer les droits de conduire des 40 millions de titulaires de permis en France.

Les modalités de délivrance du permis de conduire diffèrent selon le type de situation administrative. Le primata , c'est-à-dire le premier titre émis pour un usager, est édité en préfecture à partir des informations enregistrées au préalable dans l'application SNPC. Ces informations sont issues du dossier d'inscription déposé soit auprès d'une école de conduite, soit directement au guichet s'il s'agit d'un candidat libre. Les résultats des examens au permis de conduire, transmis par l'inspecteur du permis de conduire, sont ensuite renseignés par les personnels de préfecture en charge de la délivrance. Ces personnels vérifient l'état des droits du titulaire (cas d'une décision judiciaire intervenue éventuellement entre le moment de la validation de l'inscription au permis de conduire et la réussite aux examens, par exemple) avant l'impression du titre en local sur une imprimante dédiée. Le permis de conduire est ensuite délivré à l'intéressé soit au guichet, soit pour certaines préfectures directement au domicile de l'usager.

La chaîne de délivrance du permis de conduire sous le régime du SNPC

Source : ministère de l'intérieur

Lors d'une perte ou d'un vol du permis de conduire, l'usager peut demander la délivrance d'un duplicata. Pour cela, l'usager doit se présenter au moins une fois au guichet, soit au moment de la demande soit pour retirer le titre une fois celui-ci édité. Il y a également réédition du titre pour les permis détériorés ou lorsqu'il y a changement d'état civil.

Certaines catégories de droits à conduire (pour les poids lourds notamment) doivent être renouvelées à échéances régulières et sur avis favorable d'un médecin agrée. Dans ce cas, l'usager doit remettre au guichet son ancien titre avant de se voir remettre le nouveau. En effet, un titulaire ne peut posséder plus d'un permis à la fois.

2. L'harmonisation européenne, le renforcement de la lutte contre la fraude et la simplification des formalités administratives : le projet « FAETON »

Le projet « FAETON » trouve sa source dans la directive européenne n° 2006/126/CE du 20 décembre 2006 relative au permis de conduire . Cette directive vise à harmoniser les règles de gestion de ce titre au sein de l'UE et à renforcer la lutte contre la fraude avec la délivrance d'un titre sécurisé renouvelable. Sa transposition a été opérée par le décret n° 1475 du 9 novembre 2011 portant diverses mesures réglementaires de transposition de la directive précitée de 2006 relative au permis de conduire.

Les principales nouveautés apportées par la directive européenne de 2006

La directive européenne précitée de 2006 introduit plusieurs nouveautés dans le système du permis de conduire :

- le caractère renouvelable du permis, dont la durée de validité sera au maximum de 15 ans pour permettre un renouvellement régulier de la photographie. Cette obligation est cependant sans incidence sur les droits à conduire qui restent dans la plupart des cas permanents ;

- l'instauration de nouvelles catégories , concernant notamment les catégories A (motocyclettes), celles du groupe lourd (C et D) et la création d'une catégorie AM (pour les véhicules de moins de 50 cm 3 et les voiturettes) ;

- la délivrance du permis de conduire au format unique à partir du 19 janvier 2013 et la reprise de l'intégralité des permis de conduire actuels, délivrés antérieurement au 19 janvier 2013, avant le 19 janvier 2033 .

Le nouveau format autorisera les échanges de données entre pays de l'UE (programme RESPER).

Le nouvel outil informatique « FAETON » (exploité sous « Java ») succédera au SNPC. Développé avec une technologie (« Gecos ») datant des années 1980, le SNPC ne permet en effet plus d'être interfacé avec des applications plus modernes .

L'application « FAETON » prend en compte le continuum de la gestion des droits à conduire , de l'apprentissage de la conduite à l'évolution dans le temps de la capacité réelle de la personne à conduire. Par conséquent, elle présente une dimension interministérielle puisqu'elle implique, outre le ministère de l'intérieur, les ministères chargés des transports, de l'agriculture, de la défense, de l'éducation nationale, de la justice, de la santé, des affaires étrangères et de l'emploi.

L'ambition consiste à offrir aux différents acteurs de la gestion du permis de conduire (délivrance, contrôle, production...) un outil efficace, souple et rapide, en recourant à la dématérialisation dans les processus administratifs. L'application « FAETON » permet, sous forme dématérialisée, aux établissements d'enseignement à la conduite automobile (EECA) de transmettre aux préfectures les dossiers de candidature, aux centres de sensibilisation à la sécurité routière (CSSR) de leur adresser les attestations de validation de stage et aux médecins agréés de communiquer leurs avis. Par ailleurs, « FAETON » est interfacé avec les applications informatiques des autres ministères concernés et des forces de l'ordre.

L'ordre d'édition du permis est lancé par le service en charge de la délivrance, tandis que le titre sécurisé est produit par l'Imprimerie nationale (sur son site à Douai).

Dans la majorité des cas (pour les primatas notamment), le permis ainsi édité sera envoyé au domicile de l'usager. Il y aura remise en guichet dans quelques cas plus rares, notamment lorsque l'usager devra échanger son ancien titre contre un nouveau.

La chaîne de délivrance du permis de conduire avec « FAETON »

Source : ministère de l'intérieur

Au final, tout en luttant contre la fraude et la violence routière, le projet « FAETON » veut assurer une meilleure qualité de service . En effet, du point de vue de l'usager, la dématérialisation des procédures et l'expédition du titre au domicile représentent le moyen de limiter les déplacements et donc un gain de temps. Concernant les partenaires utilisateurs de l'application (les autres ministères, les EECA, les CSSR), « FAETON » présente aussi plusieurs avantages : la dématérialisation des dossiers d'inscription, l'enregistrement des résultats d'examen, la possibilité offerte de consultations sécurisées des dossiers.

Ce projet s'accompagne en outre d' une redéfinition des processus « métier » et d'une réorganisation des procédures administratives pour les préfectures notamment .

3. Le report de l'entrée en application au 16 septembre 2013 : une période transitoire difficile à gérer

Initialement prévue pour le 19 janvier 2013, l'entrée en application de « FAETON » a été reportée au 16 septembre 2013 suite à des difficultés de mise en oeuvre technique .

Une solution alternative et d'attente a ainsi été mise en place à compter du 21 janvier 2013.

Ce système dit « transitoire » s'appuie sur une évolution du SNPC . Compte tenu de la contrainte de délai entre la décision de report intervenue en novembre 2012 et la date du 21 janvier 2013, le choix d'une adaptation simple mais robuste du SNPC a été retenu. Il a consisté à transposer un seul des volets de la directive précitée de 2006, à savoir la création de six nouvelles catégories de permis 18 ( * ) (dont la catégorie AM destinée à la conduite des cyclomoteurs de moins de 50 cm 3 et des voiturettes). Il s'est également traduit par l'édition, en lien avec l'Imprimerie nationale, d'un nouveau modèle de permis à trois volets, dit « F9 », homologué par la Commission européenne à la fin de l'année 2012.

L'impact sur les préfectures de la mise en oeuvre du système « transitoire »,

selon le secrétariat général du ministère de l'intérieur

En réponse écrite au questionnaire de votre rapporteure spéciale adressé dans le cadre du présent contrôle, le secrétariat général du ministère de l'intérieur apporte les éléments d'information suivants concernant l'impact sur les préfectures de la mise en oeuvre du système « transitoire » :

« La mise en oeuvre de cette solution a eu un impact réduit pour les agents des préfectures . En effet l'environnement est demeuré inchangé avec les habituels écrans de saisie du SNPC, à l'exclusion de la fonction de calcul des équivalences entre une catégorie obtenue par examen et une catégorie délivrée par équivalence (par exemple, la catégorie B donne par équivalence la catégorie A1 ou B1) qui faute de temps n'a pu être automatisée. Le principe de doubles saisies a été combattu afin de ne pas dégrader l'ergonomie du dispositif, tout en rassurant les personnels. Cet aspect a été apprécié par les préfectures.

« En outre et afin de faciliter la prise en main de cette évolution du SNPC dite V96, un plan d'accompagnement a été mis en place au démarrage (formation et supports techniques et pédagogiques, FAQ, séance de formation mise en ligne sur le site de la [sous-direction du recrutement et de la formation] SDRF...) et dans les semaines suivantes afin de veiller au fonctionnement normal des bureaux de la circulation. »

Votre rapporteure spéciale relève une divergence d'appréciation entre l'analyse du secrétariat général du ministère, livrée ci-dessus, et les témoignages qu'elle a recueillis dans le cadre de sa mission de contrôle . Les personnels en préfecture ont en effet été nombreux à lui faire remonter les difficultés matérielles rencontrées dans le cadre de l'utilisation du système « transitoire ». En particulier, les doubles saisies (avec les risques d'erreurs matérielles en résultant) ont été pointées comme un facteur important de perte de temps. Votre rapporteure spéciale a pu concrètement constater que les stocks de dossiers non traités ont eu tendance à s'accumuler.

Dans la mesure où la directive européenne impliquant une évolution du système de délivrance des permis de conduire remonte à 2006, on peut s'étonner de la situation d'urgence dans laquelle s'est retrouvé le ministère de l'intérieur à la fin de l'année 2012, au point de devoir mettre en place une solution temporaire et par ailleurs non optimale. Cette situation n'est pas sans rappeler un précédent similaire : le passage (très difficile) au passeport biométrique en 2009 19 ( * ) .

Recommandation n° 14 : mieux anticiper la transposition des directives européennes, afin de ne pas être confronté à de nouvelles situations d'urgence comme dans le cas du nouveau permis de conduire en 2013 (et du passeport biométrique en 2009).

4. L'aboutissement définitif du projet au premier semestre de l'année 2014 ?

La première phase d'adaptation du SNPC a été complétée, afin de pouvoir parvenir à un déploiement du nouveau permis, par une évolution plus consistante à la date du 16 septembre 2013 . Le SNPC a en effet été adapté afin de pouvoir améliorer l'édition, la confection et l'acheminement du titre. En outre, cette version du SNPC, dite « FAETON I », intègre le calcul automatique des équivalences, répondant ainsi à une forte demande des préfectures

Selon le secrétariat général du ministère, « cette solution devrait ainsi alléger sensiblement la charge de travail des préfectures en supprimant l'impression du titre localement, en automatisant le calcul des équivalences et en industrialisant la fonction de numérisation auprès d'un prestataire externe. Un dispositif de formation assez simple et d'accompagnement est également prévu avant et après la date du 16 septembre 2013 ».

Ces évolutions permettent ainsi aux autorités françaises de transposer totalement la directive précitée de 2006. Elles devront aboutir à une transition dans les meilleures conditions possibles entre « FAETON I » et le projet initial, désormais baptisé « FAETON II ». Cette transition vers « FAETON II » est finalement prévue dans le courant du premier semestre de l'année 2014 , selon les informations communiquées à votre rapporteure spéciale par le secrétariat général du ministère.

Votre rapporteure spéciale sera donc attentive dans les mois à venir à l'aboutissement définitif du projet « FAETON » .

Par ailleurs, le CIMAP du 17 juillet 2013 (décision n° 23) a prévu que « les conducteurs recevront à partir de l'automne 2013, à l'occasion de la délivrance du nouveau permis de conduire FAETON (...), un code d'accès à l'application « Télépoints » qui leur permettra d'avoir accès au relevé de points de leur permis de conduire ». Cette mesure vise à réduire les démarches aux guichets des préfectures.

C. LES AUTRES TITRES D'IDENTITÉ

Depuis 2007, la gamme des titres sécurisés tend à s'élargir (titres de séjour, cartes professionnelles...). Dans le cadre de la mission « Administration générale et territoriale de l'Etat » et plus spécifiquement de son programme « Administration territoriale » retraçant les crédits dédiés aux préfectures, deux d'entre eux occupent toutefois une place prépondérante : le passeport biométrique et la carte nationale d'identité électronique (CNIe). Votre rapporteure spéciale évoquera par ailleurs plus loin un autre programme lourd mais présentant certaines spécificités au regard du risque de fraudes : le certificat d'immatriculation (carte grise).

1. Le passeport biométrique en régime de croisière

Après un lancement chaotique en 2009 20 ( * ) , le passeport biométrique a maintenant atteint un rythme de croisière satisfaisant .

Le rapport annuel de performances (RAP) de la mission « Administration générale et territoriale de l'Etat » pour 2012 21 ( * ) présente un délai moyen de mise à disposition de ce titre de 11,4 jours pour 2012 (contre 13,8 jours en 2010 et 10,7 jours en 2011). Le projet annuel de performances (PAP) pour 2013 arrête pour sa part une prévision de 86 % des passeports mis à disposition en moins de 15 jours. Dans le PAP, le ministère de l'intérieur précise que ce délai de 15 jours correspond « à un niveau de qualité jugé satisfaisant par les usagers dans le cadre des dernières enquêtes de satisfaction ».

Encore faut-il cependant préciser que le délai de mise à disposition du passeport présenté dans les PAP et les RAP « court depuis la réception de la demande du titre par les services de la préfecture jusqu'à sa production et son acheminement ». Il ne représente donc pas le délai complet subi par l'usager, puisqu'il faut lui ajouter le temps de transmission de la demande par les services de la mairie à la préfecture. Ce délai complet est donc tributaire de la rapidité plus ou moins grande des services de la mairie à traiter le dossier.

Pour certaines mairies ayant accueilli les stations d'enregistrement des demandes de passeport biométrique dans leurs murs, la question de « l'indemnisation » (du point de vue de l'Etat) ou de « la compensation » (du point de vue de la plupart des élus locaux) des charges supportées du fait de cette activité demeure encore problématique. C'est notamment le cas de « communes-centres » délivrant de nombreux passeports à des usagers ne résidant pas sur leur territoire.

L'indemnisation des charges pesant sur les mairies

ayant accueilli les stations d'enregistrement

Afin d'indemniser les communes accueillant une ou plusieurs stations, l'article 136 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 a créé une « dotation relative à l'enregistrement des demandes et à la remise des titres sécurisés ». Cette dotation est désormais inscrite à l'article L. 2335-16 du code général des collectivités territoriales (CGCT). Elle vise à couvrir l'activité générée par les demandes de titres émanant de citoyens ne résidant pas dans la commune d'implantation.

Au 1 er janvier de l'année 2009 , elle s'élevait à 5 000 euros par an et par station en fonctionnement dans la commune.

Le montant de cette dotation évolue chaque année en fonction du taux d'évolution de la dotation globale de fonctionnement (DGF).

Pour 2013 , le montant de cette indemnité annuelle forfaitaire s'établit ainsi à 5 030 euros par station .

Ce montant reste toutefois sujet à débats . Le caractère forfaitaire de la dotation ne prend en effet en compte ni la spécificité des « villes-centres » (qui reçoivent un grand nombre de demandes « extérieures »), ni le caractère plus ou moins touristique de la commune, ni les horaires d'ouverture des mairies plus ou moins attractifs pour les usagers (ouverture le samedi matin, par exemple). Il va pourtant de soi que tous ces éléments sont autant de facteurs devant être pris en considération pour apprécier le nombre de passeports susceptibles d'être délivrés dans une commune.

Ainsi, par exemple, la ville de Besançon estime le coût de fonctionnement induit par les cinq stations d'enregistrement (pour 7 029 passeports délivrés en 2011) dont elle a la charge à environ 100 000 euros par an .

Recommandation n° 15 : réviser le mode de calcul de la dotation relative à l'enregistrement des demandes de passeport biométrique et à la remise de ce titre, en tenant compte du retour d'expérience acquis grâce aux quatre premières années de fonctionnement du dispositif.

Du point de vue des équipements, le matériel nécessaire au recueil des demandes de passeport biométrique a été déployé en 2009. L'usure , voire une certaine obsolescence, de ces matériels est désormais constatée. En conséquence, le ministère de l'intérieur a prévu (dans le cadre du renouvellement du marché) la possibilité d'acquérir environ 3 600 dispositifs de recueil et de procéder graduellement au changement des stations.

En termes d'effectifs, le nombre d'emplois affectés à la gestion des demandes de passeport en préfecture est passé, selon le ministère de l'intérieur, de 469,1 ETPT en 2009 à 374,2 ETPT en 2011, soit une baisse de 20,2 % (- 94,9 ETPT sur la période).

2. La carte nationale d'identité électronique (CNIe) : une solution techniquement prête mais en attente de décision

Dès l'origine, la réflexion sur une nouvelle carte nationale d'identité dite « électronique » (CNIe) a été étroitement menée en lien avec le lancement du passeport biométrique . La CNIe aurait en effet vocation à contenir, dans sa puce, des données à caractère biométrique (empreintes digitales, notamment) comme le passeport lancé en 2009.

Les travaux menés sur la norme IAS (International association services), permettant de s'authentifier et de signer en ligne, ainsi que sur le support physique du titre, en lien avec les laboratoires spécialisés de la police et de la gendarmerie nationales, ont permis d'aboutir à un produit « quasi fini ». Aujourd'hui, la CNIe est donc techniquement prête .

Reste toutefois à trouver le véhicule législatif permettant son entrée en vigueur. La censure partielle par le Conseil constitutionnel de la loi n° 2012-410 du 27 mars 2012 relative à la protection de l'identité a rendu plus hypothétique le développement de ce projet à court terme.

La censure partielle par le Conseil constitutionnel de la loi n° 2012-410

du 27 mars 2012 relative à la protection de l'identité

La loi précitée du 27 mars 2012 relative à la protection de l'identité est parue au Journal officiel (JO) du 28 mars 2012 après une censure partielle de ses dispositions par le Conseil constitutionnel.

Dans sa décision DC n° 2012-652 du 22 mars 2012 , le Conseil constitutionnel a notamment censuré l'article 5 qui prévoyait la mise en place d'un fichier commun aux CNI et aux passeports, comportant des données biométriques. Ce fichier unique, principalement conçu pour garantir la fiabilité des documents délivrés et simplifier l'instruction des demandes, pouvait être consulté, à titre subsidiaire, à des fins policières ou judiciaires.

Le Conseil constitutionnel a considéré qu'eu égard à la nature des données enregistrées (données biométriques traçantes), à l'ampleur du traitement regroupant potentiellement la quasi-totalité des nationaux, à ses caractéristiques techniques (identification possible à partir des seules empreintes) et aux conditions de sa consultation, la création de la base unique envisagée portait une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée par rapport au but poursuivi .

La loi promulguée ne comprend donc désormais que :

- l'insertion d'un composant dans la CNI, comportant notamment l'image de deux empreintes digitales du titulaire ;

- la transmission directe des données d'état civil de la commune de naissance à la commune qui a enregistré la demande de titre d'identité.

A ce stade, aucun calendrier de déploiement de la CNIe n'a été arrêté.

Le Gouvernement a toutefois pris une décision importante concernant l'actuelle CNI à l'occasion du CIMAP du 17 juillet 2013 . Dans sa décision n° 23, il s'est engagé à ce que « la durée de validité de la carte nationale d'identité [soit] prolongée de dix à quinze ans » . Cette mesure vise à alléger les démarches de renouvellement de titres pour les usagers et à réduire l'attente aux guichets d'un tiers. Elle sera accompagnée d'un renforcement des actions de prévention contre les fraudes à l'identité. Les premières étapes de la mise en oeuvre de cette décision seront franchies avant la fin de l'année 2013.

Pour conclure, les enjeux de la mise en place de cette nouvelle carte sont le renforcement de la sécurisation des titres et de la lutte contre la fraude. En effet, cette mise en oeuvre s'inscrit dans le contexte général de sécurisation des pièces nécessaires à l'obtention de titres d'identité et de voyage. Ainsi, le ministère de la justice, en lien avec l'ANTS et le ministère de l'intérieur, a entrepris de développer une application de vérification dématérialisée des données d'état civil dénommée « COMEDEC » . Cette application a notamment pour objectif de permettre aux services de délivrance des titres de vérifier les données d'état civil fournies par le demandeur d'un passeport auprès de sa commune de naissance.

D. LE BILAN DE LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE DOCUMENTAIRE

De par l'expertise de leurs agents recevant les usagers, manipulant les documents d'identité et les contrôlant au quotidien, les préfectures ont traditionnellement tenu une place importante dans la lutte contre la fraude documentaire . L'émergence de la nouvelle génération de titres sécurisés a fait évoluer le travail en préfecture, mais cette administration conserve toujours pour autant un rôle essentiel dans ce domaine.

Si la sécurisation accrue des titres a permis de faire reculer la falsification et la contrefaçon, elle a aussi induit un déplacement des tentatives de fraude en amont du processus de délivrance . Le cas du SIV appelle quant à lui une réflexion particulière de par les verbalisations indues et les usurpations du numéro d'immatriculation qui entachent son fonctionnement.

1. La sécurisation des titres : un facteur de déplacement des tentatives de fraude en amont du processus de délivrance

Le coût de la fraude documentaire est extrêmement difficile à évaluer . En effet celui-ci présente la caractéristique d'être diffus, dans la mesure où il est lié à la perte de confiance dans la capacité de l'Etat à garantir la fiabilité de l'identité. Il est en outre difficilement quantifiable : quel est, par exemple, le coût d'un séjour irrégulier sur le territoire national ? Le coût économique résulte souvent d'une autre infraction commise au moyen d'une fraude à l'identité : une escroquerie au détriment d'une banque, d'un organisme de crédit ou d'un commerçant, une utilisation de chèques volés, une fraude aux prestations sociales, un travail illégal...

Dans ces conditions, il n'existe pas de statistiques de ces coûts. Cependant, en juin 2009, une enquête du centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (CREDOC) a chiffré le coût moyen des usurpations d'identité à 2 228,70 euros par victime . Encore ne s'agissait-il que d'une estimation basée sur les déclarations des intéressés et ne recouvrant que la situation de l'usurpation d'identité, qui n'est qu'une catégorie particulière de la fraude à l'identité.

La fraude documentaire a d'abord été considérée sous l'angle de la contrefaçon ou de la falsification des titres. Pour la prévenir, la réponse a été la création de documents sécurisés , la lutte se concevant principalement comme une action répressive menée par les forces de l'ordre contre le trafic de faux documents.

Si ces deux actions doivent se poursuivre, il convient d'en développer d'autres afin de répondre aux nouvelles formes de fraude documentaire . En effet, les processus actuels de délivrance présentent des fragilités, à toutes les étapes de leur déroulement. C'est notamment le cas lorsque la fraude n'a pas été suffisamment prise en compte en amont, en sécurisant les documents constitutifs du dossier.

Les titres de nouvelle génération, au fur et à mesure de la mise en oeuvre des sécurisations, sont évidemment plus difficiles à imiter et à falsifier. Les titres les plus récemment sécurisés (le passeport biométrique et le certificat d'immatriculation) sont ceux qui font l'objet du moins de détections de tentatives de fraudes. A l'inverse, le permis de conduire, en cours de sécurisation, fait l'objet de nombreuses tentatives . La sécurisation réduit donc les tentatives frauduleuses, même s'il est vraisemblable qu'il existe des effets reports de fraudes entre les titres et entre les modes opératoires des fraudeurs.

Désormais, la fraude se déporte donc en amont du processus de délivrance et plus particulièrement sur les documents sources que sont les justificatifs d'état-civil et de domicile ou les certificats de conformité des véhicules . Le faux document proprement dit subsiste, mais il est plus difficile à concevoir et sa détection est plus aisée. La fraude se reporte sur l'obtention indue d'un vrai document.

La priorité de l'action des services se situe aujourd'hui à ce niveau. Elle s'est concrétisée en 2011 par la détection par les préfectures de 9959 tentatives de fraude pour les cinq principaux titres (CNI, passeport, titre de séjour, certificat d'immatriculation, permis de conduire).

Constitué d'agents de préfecture formés à la détection des faux documents et des usurpations d'identité, le réseau national des « référents fraude » accompagne les services de délivrance de titre dans l'instauration d'une culture de lutte contre la fraude (formations des agents, diagnostic de sécurité, méthodologie de contrôle, fiches réflexes...). Une mission de prévention et de lutte contre la fraude apporte pour sa part un soutien et des conseils méthodologiques aux « référents fraude », en partenariat avec l'inspection générale de l'administration (IGA), la direction des libertés publiques et des affaires juridiques (DLPAJ), le secrétariat général à l'immigration et à l'intégration (SGII) et les services de police et de gendarmerie.

2. Le cas particulier du système d'immatriculation des véhicules (SIV)
a) Les mesures de sécurisation

Le passage au SIV (en avril 2009) s'est accompagné d'une série de mesures apportées aux propriétaires de véhicules visant à leur garantir un niveau accru de sécurisation contre la fraude.

Ces garanties portent tout d'abord sur la recevabilité de la demande . L'immatriculation des véhicules (c'est-à-dire l'autorisation donnée par le ministre de l'intérieur à un engin motorisé de circuler sur les voies ouvertes à la circulation publique) repose sur la production préalable par le demandeur, puis par l'examen et l'archivage par l'autorité en charge de l'instruction, d'un ensemble de pièces justificatives d'identité, d'adresse, techniques et fiscales visant à identifier le véhicule de manière certaine, tout au long de sa vie, en attestant sa conformité technique, son acquisition dans des conditions régulières et le respect des règles fiscales correspondant au genre et à la catégorie concernés. L'examen du dossier est renforcé par des contrôles automatisés, reposant notamment sur des interconnexions avec d'autres fichiers ( Cf. infra ).

La sécurisation du certificat d'immatriculation apporte, quant à elle, des garanties matérielles tout à fait substantielles.

La sécurisation du certificat d'immatriculation

Le fond de papier du certificat comporte une irisation en deux couleurs invisibles, réactives aux rayons ultra-violets. Il est aussi « guilloché », c'est-à-dire qu'il comporte des lignes gravées de la mention « République française » invisibles sans grossissement. Il contient enfin une image invisible à l'oeil nu (la mention « RF » en bas à droite) mais qui peut être révélée à l'aide d'une grille pour un contrôle de deuxième niveau.

Les différentes rubriques sont renseignées au moyen d'un système de jet d'encre avec une police anamorphosée spécifique aux certificats d'immatriculation (c'est-à-dire une police qui contient certaines micro-déformations des caractères indétectables à l'oeil nu).

Le gaufrage est millésimé , perceptible au toucher. Il indique l'année et la date de l'immatriculation à laquelle se réfère le certificat.

L'hologramme de sécurité est placé à cheval sur le coupon détachable et le corps du document. Il reste majoritairement sur le coupon, ce qui permet aux forces de l'ordre d'authentifier le coupon lors d'un contrôle.

Le numéro d'immatriculation, délivré à vie pour le véhicule, est perforé à l'aide d'un laser sur le coupon détachable et l'hologramme. La perforation de ce dernier renforce la sécurité du document.

Une zone de lecture optique située au bas du document permet de faciliter l'action des autorités de contrôle lors de l'interrogation du SIV.

Enfin, le niveau de garanties procédurales lors de l'examen de la demande est supérieur à celui existant auparavant. Le SIV effectue en temps réel et automatiquement une interrogation des fichiers de police relative à l'information de vol du véhicule, non seulement au niveau national (fichier des véhicules volés) mais aussi au niveau européen (base N-SIS Schengen). Cette interrogation constitue une amélioration considérable par rapport à l'ancien fichier des immatriculations.

Par ailleurs, le SIV est également interconnecté avec le fichier de l'organisme technique central (OTC) dépendant du ministère chargé des transports. Les caractéristiques techniques des véhicules ayant fait l'objet d'une homologation selon la procédure de réception communautaire sont ainsi rapatriées automatiquement dans le SIV. Cette nouvelle mesure constitue une fiabilisation nouvelle très importante par rapport à l'ancien système, étant souligné que les caractéristiques techniques servent notamment à déterminer les taxes applicables ou le niveau de pollution des véhicules.

Le SIV vérifie automatiquement, lors de chaque opération, la validité de la date de contrôle technique (grâce à l'interconnexion précitée avec le fichier de l'OTC) et la situation administrative du véhicule (par exemple, l'absence de suspension de l'autorisation de circuler suite à un rapport télétransmis par un expert agréé consécutif à un accident de la circulation, ou l'absence d'opposition au transfert du certificat d'immatriculation transmis par la direction générale des finances publiques dans le cadre d'une procédure d'amende forfaitaire majorée).

Les opérations les plus complexes et / ou les plus sensibles restent du seul ressort des préfectures et ne peuvent être effectuées par des professionnels habilités (par exemple, les immatriculations diplomatiques, le changement de caractéristiques techniques, l'immatriculation de véhicules importés...).

Au sein même des services de la préfecture, certaines opérations ne peuvent être effectuées qu'avec un profil spécifique réservé au personnel d'encadrement (par exemple, l'exonération de taxes)

Enfin, il n'existe plus aucun stock de certificats d'immatriculation vierges au sein des services territoriaux en charge de l'immatriculation , ce qui a permis de supprimer tout risque de vol ou de fraude à cet égard. Les certificats sont produits directement sur le site sécurisé de l'Imprimerie nationale, puis acheminés au domicile du demandeur par « pli suivi » de La Poste.

b) Les difficultés néanmoins rencontrées : la verbalisation indue et l'usurpation du numéro d'immatriculation

En dépit de ces dispositions, deux séries de difficultés se sont fait jour.

D'une part, des problèmes de verbalisations indues liés à la vente d'un véhicule sont apparus.

Le SIV a certes permis de simplifier les démarches de l'usager (amélioration de la fiabilité du processus de délivrance, envoi du document produit directement au domicile du demandeur...). Mais une difficulté a cependant surgi : en droit le titulaire du certificat d'immatriculation était considéré comme le responsable du véhicule. De ce fait, lorsqu'une infraction était commise par un nouvel acquéreur avant qu'il n'ait procédé à la réimmatriculation du véhicule à son nom, l'ancien propriétaire pouvait se retrouver injustement sanctionné . Cette procédure a été à l'origine de problèmes de verbalisations indues.

D'autre part, des cas de fraude liés au détournement de la procédure dite de « réception à titre isolé » du véhicule ont pu être détectés.

Cette procédure de « réception à titre isolée » concerne les particuliers comme les professionnels, si le véhicule particulier ou l'utilitaire léger est initialement importé à l'unité d'un pays n'appartenant pas à l'UE et si le véhicule n'est pas conforme (partiellement ou totalement) à un modèle européen équivalent .

Actuellement, les procès-verbaux de « réception à titre isolé » délivrés par les DREAL sont remis à l'usager en vue de la constitution de son dossier de demande d'immatriculation, conformément à la réglementation. Cette procédure d'homologation particulière ne peut donner lieu à une immatriculation du véhicule qu'en préfecture, eu égard à la sensibilité de ce type de dossiers. Ces dossiers ne représentent toutefois qu'une part résiduelle des immatriculations (2,85 % par an selon le ministère de l'intérieur).

En 2012, certains cas de fraude à l'immatriculation ont été identifiés, impliquant quelques dizaines de véhicules importés de luxe (Maybach, Bentley...). A l'origine de cette fraude se trouvait l'utilisation de faux justificatifs de « réception à titre isolé » .

c) Le perfectionnement du dispositif de lutte

Face à ces difficultés, le dispositif de lutte contre la fraude a fait l'objet d' un renforcement .

Concernant les verbalisations indues, la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles a modifié les articles L. 121-2 et L. 121-3 du code de la route. L'ancien propriétaire n'est plus destinataire des contraventions survenues postérieurement à la cession du véhicule, quand bien même le nouvel acquéreur n'aurait pas encore procédé à la réimmatriculation du véhicule à son nom.

Il convient par ailleurs de rappeler que, conformément aux articles 529-2 et suivants du code de procédure pénale, les usagers peuvent contester leur amende en adressant une requête en exonération à l'officier du ministère public compétent (dont l'adresse figure sur l'avis de contravention). La requête en exonération s'effectue au moyen du formulaire adressé en accompagnement de l'avis de contravention 22 ( * ) . Les requêtes qui ont été adressées directement aux services du ministère de l'intérieur ont été réorientées vers les services des officiers du ministère public compétents pour une instruction prioritaire.

En ce qui concerne le cas distinct de l'usurpation du numéro d'immatriculation, une procédure de changement d'immatriculation existe afin de répondre à ce type de difficulté . Indépendamment des poursuites pénales qui sont menées à l'encontre des contrevenants 23 ( * ) , les victimes peuvent demander en préfecture à bénéficier d'un nouveau numéro d'immatriculation sur présentation du dépôt de plainte effectué auprès des forces de l'ordre pour usurpation du numéro d'immatriculation. Ce numéro est alors délivré sans donner lieu au paiement de la taxe régionale. Les infractions commises avec l'ancien numéro ne sont plus attribuées aux personnes dont l'immatriculation a été usurpée.

La cession des véhicules mieux sécurisée

En matière de cession de véhicule, une nouvelle procédure dématérialisée a été mise en oeuvre à la fin de l'année 2012 avec un double objectif de simplification et de sécurisation. Il s'agit d'un « téléservice » permettant à un particulier de déclarer sur le site internet gouvernemental « Mon service public » la cession de son véhicule.

A la suite de cette ouverture de service, une étude spécifique a été réalisée dans le but de fiabiliser , d'ici à 2014, certaines données d'adresse pour permettre une montée en puissance du dispositif.

Outre l'intérêt évident qu'il présente pour l'usager (qui n'est plus obligé de se rendre en préfecture) ainsi que la diminution de charge induite pour les services de l'Etat, ce « téléservice » permet une prise en compte immédiate de la cession dans le SIV et supprime le délai d'enregistrement par les services préfectoraux. Dès lors, le risque de verbalisation durant la période transitoire située entre la vente du véhicule et l'accomplissement de la formalité déclarative dans le SIV est considérablement réduit.

En 2012, 11 060 opérations de réimmatriculation suite à usurpation ont été enregistrées dans le SIV, ce qui représente une hausse de 89,6 % par rapport à 2011 (5 833 opérations enregistrées). Outre l'intensification de la fraude, le fait qu'une plus grande communication ait été organisée autour de cette procédure peut aussi expliquer qu'elle ait été davantage utilisée 24 ( * ) . En tout état de cause et même s'il doit continuer à faire l'objet d'un suivi vigilant, ce phénomène demeure statistiquement résiduel puisqu'il ne représente que 0,01 % du parc français de véhicules.

Toujours sur ce terrain, il convient de souligner qu'une mesure supplémentaire vient d'être mise en oeuvre. Ainsi, la saisie du champ « marque du véhicule » dans le SIV est désormais effectuée lors de la constatation des infractions de stationnement relevées par procès-verbal électronique. Elle permet de détecter une incohérence avec le champ « marque » retourné par le SIV et d'éviter l'envoi d'un avis de contravention à un titulaire d'un certificat d'immatriculation d'un véhicule d'une autre marque, dont le numéro d'immatriculation aurait été usurpé.

Recommandation n° 16 : assurer un suivi vigilant de l'évolution de la fraude à l'usurpation du numéro d'immatriculation des véhicules.

S'agissant de la fraude liée à l'utilisation de la procédure dite de « réception à titre isolé » du véhicule, un dispositif commence à être expérimenté en Ile-de-France . Il vise à permettre la gestion dématérialisée du justificatif de réception technique du véhicule. Il reposant sur l'utilisation d'une plateforme hébergée par le ministère de l'écologie, à laquelle les préfectures et les DREAL ont accès. Les procès-verbaux de « réception à titre isolé » sont scannés et stockés sur cette plateforme par les agents des DREAL, puis récupérés en ligne par la préfecture compétente lors de l'instruction de la demande d'immatriculation déposée par l'usager. L'objectif à terme est que le procès-verbal officiel de « réception à titre isolé » ne transite plus par l'usager.

Le ministère de l'intérieur a précisé à votre rapporteure spéciale qu' un bilan de cette expérimentation sera dressé à l'automne, en vue d'une généralisation à toute la France pouvant intervenir à la fin de l'année 2013 .

CONCLUSION

Finalement, que veut-on faire désormais des préfectures et de leur prolongement « naturel », les sous-préfectures ? Il est frappant de constater combien cette question est aujourd'hui à l'esprit de chacun. Concernés au premier chef, les personnels en préfecture s'inquiètent de leur devenir, du sens de leurs missions et des priorités qui peuvent désormais leur être fixées. Les élus locaux aussi s'interrogent, partagés entre un réflexe de recul teinté de méfiance à l'égard de l'Etat central et une attente légitime d'aide et de soutien de sa part.

Avec l'administration préfectorale, l'Etat dispose d'un levier territorial à nul autre pareil et ayant depuis longtemps fait ses preuves. Au cours de la période récente, cette administration a d'ailleurs fait la démonstration de sa capacité d'adaptation en sachant appréhender le tournant de la modernisation et prendre la mesure du défi des nouvelles technologies.

Les étapes successives de la décentralisation appellent toutefois un nouvel effort d'imagination afin de mettre à niveau la représentation de l'Etat sur les territoires. Le temps est certes désormais bien loin du préfet quasi omnipotent en son département, mais le gué n'est pas encore totalement franchi vers d'autres rives. C'est bien ce qui fait la complexité de la situation actuelle.

A elle seule la RéATE ne peut suffire à répondre à l'enjeu, elle constitue plutôt un élément de contexte supplémentaire dans un environnement plus vaste. L'horizon s'ouvre aujourd'hui vers la recherche d'un nouvel équilibre entre le niveau régional et départemental, le repositionnement du rôle du préfet et du sous-préfet dans le paysage administratif national et l'évaluation des moyens (humains et financiers) optimaux pour mener à bien cette ambition.

L'administration préfectorale a bien un avenir , même si celui-ci doit désormais faire l'objet d'un projet revisité pour être pleinement partagé.

RECOMMANDATIONS DE VOTRE RAPPORTEURE SPÉCIALE

I. LES PRÉFECTURES : UN REPOSITIONNEMENT À STABILISER

Recommandation n° 1 : préserver le sous-préfet comme « porte d'entrée » du réseau des services de l'Etat.

Recommandation n° 2 : à cette fin doter les sous-préfectures en cadres qui seront la « ressource » pour accompagner les projets locaux.

Recommandation n° 3 : ne redimensionner la carte des sous-préfectures qu'à la condition nécessaire de tenir compte des temps d'éloignement des usagers par rapport aux services de l'Etat, afin de ne pas désertifier certains territoires (ruraux, montagnards...).

Recommandation n° 4 : maîtriser l'évolution des effectifs des secrétariats généraux aux affaires régionales (SGAR), ceux-ci ne devant ni doublonner les directions régionales ni limiter le rôle de pilotage de ces dernières.

Recommandation n° 5 : veiller au juste équilibre des compétences entre le SGAR et le secrétaire général de la préfecture du chef-lieu de région s'agissant de l'administration des moyens préfectoraux.

Recommandation n° 6 : privilégier la passation de marchés locaux pour l'entretien des bâtiments préfectoraux, si besoin en recourant à l'allotissement des marchés afin de préserver l'accès des petites et moyennes entreprises (PME) à la commande publique.

Recommandation n° 7 : renforcer le caractère substantiel des études d'impact accompagnant les projets de loi pour en faire de vrais outils d'aide à la décision du législateur.

Recommandation n° 8 : instaurer des « groupes miroirs » ou des « panels » d'agents des préfectures, afin de tester en amont la capacité du réseau à mettre en oeuvre une mesure.

Recommandation n° 9 : encourager les « carrières alternées » entre l'administration centrale et l'administration préfectorale, afin de maintenir l'administration centrale en phase avec la réalité du travail en préfecture.

Recommandation n° 10 : privilégier autant que possible la mise en oeuvre des dispositions prévues par la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, dite « loi Sauvadet », plutôt que de recourir à des vacataires en préfecture.

Recommandation n° 11 : identifier le besoin en cadres de catégorie A comme l'un des axes prioritaires de la gestion prévisionnelle des effectifs au sein de l'administration préfectorale.

Recommandation n° 12 : consacrer un effort d'investissement accru à la formation des agents de catégorie C, afin de valoriser leur employabilité.

Recommandation n° 13 : favoriser la mobilité des personnels en introduisant de la souplesse dans les modes de gestion des ressources humaines de l'Etat et en surmontant les différences de statut comme de rémunération.

II. LES GRANDS PROJETS : LA MODERNISATION EN COURS DE L'ADMINISTRATION PRÉFECTORALE

Recommandation n° 14 : mieux anticiper la transposition des directives européennes, afin de ne pas être confronté à de nouvelles situations d'urgence comme dans le cas du nouveau permis de conduire en 2013 (et du passeport biométrique en 2009).

Recommandation n° 15 : réviser le mode de calcul de la dotation relative à l'enregistrement des demandes de passeport biométrique et à la remise de ce titre, en tenant compte du retour d'expérience acquis grâce aux quatre premières années de fonctionnement du dispositif.

Recommandation n° 16 : assurer un suivi vigilant de l'évolution de la fraude à l'usurpation du numéro d'immatriculation des véhicules.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 16 octobre 2013, sous la présidence de M. Yvon Collin, vice-président, la commission a entendu une communication de Mme Michèle André, rapporteure spéciale, sur les préfectures et la réorganisation territoriale de l'État.

Mme Michèle André, rapporteure spéciale de la mission « Administration générale et territoriale de l'Etat » . - Ce contrôle s'inscrit dans une trilogie. Dans le cadre de la mission « Administration générale et territoriale de l'État », je me suis d'abord intéressée à la diffusion des nouvelles technologies, notamment à l'entrée en application des nouveaux titres d'identité sécurisés, dont le passeport biométrique. J'ai ensuite étudié les conséquences de la révision générale des politiques publiques (RGPP) sur la qualité du service rendu aux usagers par les préfectures et les sous-préfectures. Enfin, je me suis penchée sur la question de l'adaptation de l'administration préfectorale à la réorganisation de l'administration territoriale de l'Etat (RéATE).

Ces dernières années, l'organisation et le mode de fonctionnement de l'administration préfectorale ont profondément changé. Entrée en vigueur le 1 er janvier 2010, la RéATE a consisté à régionaliser la plupart des services déconcentrés de l'État, passés de vingt à huit grandes entités administratives : direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) ; direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (Draaf) ; direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal) ; direction régionale des affaires culturelles ; direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale ; direction régionale des finances publiques ; services du Rectorat ; enfin, Agence régionale de santé (ARS).

Au niveau départemental, des directions départementales interministérielles sont apparues - deux ou trois, selon la démographie départementale : la direction départementale des territoires, qui regroupe les anciennes directions départementales de l'agriculture et de la forêt (DDAF) et de l'équipement (DDE) ; la direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations (DDCSPP), qui reprend les compétences des anciennes directions départementales de la jeunesse et des sports, des affaires sanitaires et sociales (DDAS) en matière d'affaires sociales ; des unités départementales de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes et des services vétérinaires. Dans les départements les plus importants, deux structures se substituent en outre à la DDCSPP : une direction départementale de la cohésion sociale et une direction départementale de la protection des populations.

La transition entre le modèle précédent et cette nouvelle architecture territoriale n'est pas allée sans difficulté. Des moyens humains ont été perdus - les médecins des anciennes DDAS, par exemple, qui sont partis dans les agences régionales de santé - au risque de fragiliser durablement les politiques publiques.

La Réate a fait de la région le niveau de pilotage des politiques publiques, tandis que le département met en oeuvre des actions de proximité. Le rôle du préfet de région a été renforcé par l'autorité qui lui est désormais reconnue sur les préfets de départements. Il dispose notamment d'un pouvoir décisionnaire de la répartition des crédits des budgets opérationnels de programme afin d'adapter les moyens aux enjeux territoriaux.

Cependant l'une des évolutions les plus notables au sein de l'administration préfectorale a été l'influence croissante du secrétaire général aux affaires régionales (SGAR) à ses côtés. Celui-ci coordonne l'action des services régionaux de l'État, veille à leur articulation avec les services départementaux, conduit la mise en oeuvre de certaines politiques européennes, initie des mutualisations et anime la plate-forme d'appui interministériel à la gestion des ressources humaines. Pour ce faire, il dispose d'une équipe dont les effectifs ont fortement progressé, au point de constituer une sorte de cabinet régional faisant parfois écran entre le préfet de région et les directions régionales et faisant craindre la redondance avec le secrétaire général des préfectures départementales.

Dans cet ensemble, la place et le devenir du préfet de département sont incertains. Sous l'effet notamment de la RGPP, les effectifs ont diminué. Le manque de fonctionnaires de catégorie A prive les préfectures et sous-préfectures de ressources suffisantes. Le suivi et la mise en oeuvre des politiques publiques au niveau départemental deviennent plus délicats. Le périmètre du contrôle de légalité se réduit, ce qui accroît le risque juridique pesant sur les élus.

Le département a pourtant vocation à demeurer un échelon de proximité, et le préfet de département, un interlocuteur indispensable pour les élus locaux et les acteurs économiques et sociaux. De même, le sous-préfet est apparu de manière constante au cours de mon contrôle comme devant être la porte d'entrée des services de l'État.

L'administration préfectorale subit en outre l'inflation des normes. Chaque année, 80 000 pages de circulaires sont adressées aux préfectures. Réuni le 17 juillet dernier, le Conseil interministériel pour la modernisation de l'action publique a annoncé la limitation des circulaires à cinq pages.

Dans une période marquée par la réduction des effectifs et le changement rapide des métiers, la formation, en particulier en catégorie C, devient un facteur clé de réussite pour les fonctionnaires. La mobilité doit également être encouragée. La force des habitudes, la crainte du changement, l'achat d'un logement, l'ancrage familial, constituent autant d'obstacles bien connus à une évolution professionnelle portée par la mobilité. A cela s'ajoutent des barrières administratives, les différences de statuts ou de rémunérations.

Ces enjeux peuvent notamment être mesurés à l'aune des projets menés par l'administration préfectorale. Après des débuts difficiles, le passeport biométrique et le système d'immatriculation des véhicules ont désormais atteint leur régime de croisière. Tel n'est pas le cas du projet FAETON introduisant un nouveau permis de conduire : initialement prévue pour le 19 janvier 2013, son entrée en application a été repoussée au 16 septembre 2013 pour des raisons techniques. Enfin, techniquement prête, la carte nationale d'identité électronique reste en attente de décisions.

Que veut-on faire désormais des préfectures et de leur prolongement naturel, les sous-préfectures ? Cette question occupe tous les esprits. Les agents s'inquiètent de leur devenir et du sens des missions qui leur sont assignées. Je salue leur sens de l'État, leur engagement et leur dévouement dans une conjoncture délicate. Les élus locaux s'interrogent également, partagés qu'ils sont, dans leur attitude envers l'Etat central, entre méfiance naturelle et attente légitime de soutien.

Les étapes successives de la décentralisation appellent un nouvel effort d'imagination. Le temps est bien loin du préfet quasi omnipotent en son département, mais le gué n'est pas encore totalement franchi : c'est bien ce qui fait la complexité de la situation actuelle. Faut-il abandonner le contrôle de légalité ? Les préfectures doivent-elles continuer à mobiliser des personnels sur les régies ? Ou au contraire aller vers la généralisation du paiement par le timbre fiscal ? La Réate ne peut suffire. L'administration préfectorale a bien un avenir, mais celui-ci doit désormais faire l'objet d'un nouveau projet.

M. Éric Doligé . - Vous parlez de problème d'effectifs. Il y a surtout un problème de perte d'autorité des préfets sur leur administration. Les nouvelles structures ont totalement pris le pouvoir. Les préfets de département, en particulier, sont démobilisés. Ils n'osent plus rien refuser aux hauts fonctionnaires qui dirigent les services administratifs, par peur des réactions de l'administration centrale.

M. François Fortassin . - L'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (ONEMA) est un parfait exemple de confusion des normes. Certaines directions ont demandé des peines de prison à l'encontre de certains maires - les procureurs n'ont à ce jour pas donné suite à ces demandes, mais nous ne sommes pas à l'abri de développements futurs - et pour des raisons vénielles, qui plus est : parce que des conducteurs de travaux avaient mis un coup de pelle malencontreux dans des ruisselets, dérangeant des salamandres à ventre gris !

De même, dans une vallée pyrénéenne, il a fallu près d'un an pour savoir à quelle hauteur construire le tablier d'un pont, afin de protéger les chauves-souris, dont certaines le franchissent en volant au-dessus et d'autres, en-dessous... C'est ubuesque ! Ces gens-là paralysent l'action publique et font passer les maires pour des délinquants. Est-ce normal ?

M. Jean-Paul Emorine . - Il est des sous-préfectures qui ne comptent guère plus de dix ou douze employés. Ce seuil vous parait-il pertinent ?

M. Yannick Botrel . - Je remercie la rapporteure pour ce très intéressant rapport. J'ai le sentiment que les choses fonctionnent convenablement. Nous avions certes de très bonnes relations avec les anciennes DDAF et DDE. Mais tout dépend en définitive des interlocuteurs et de la qualité des échanges que nous entretenons avec eux. Dans de nombreux dossiers, nous travaillons ensemble efficacement. En matière d'ingénierie, les services déconcentrés sont plus démunis qu'avant, et les collectivités territoriales ont constitué leurs propres équipes en récupérant des fonctionnaires déconcentrés, mais sans doute est-ce l'esprit de la décentralisation.

Le rôle de l'administration est de contrôler, mais aussi de faciliter la vie des collectivités. Les préfets de département n'ont certes plus une grande autorité sur les DREAL mais celles-ci sont dans une position ambigüe : leur avis est par exemple requis pour modifier un document d'urbanisme, elles ont trois mois pour le rendre. Or certaines évitent de répondre. Cela vaut accord tacite, mais ralentit le fonctionnement de nos collectivités. Il faudrait corriger cette anomalie.

M. Albéric de Montgolfier . - Je reconnais mes préoccupations dans le rapport de Michèle André. La baisse des effectifs, liée à la RGPP d'hier et à la modernisation de l'action publique (MAP) d'aujourd'hui, pose de réels problèmes. Mais a-t-on la moindre idée des effectifs simultanément recrutés par des autorités indépendantes et organisations à caractère autonome comme les agences régionales de santé (ARS) ? La Cour des comptes ne cesse de dénoncer leur non-respect des plafonds d'emplois.

M. Jean Arthuis . - Je rends à mon tour hommage au rapport de Michèle André. Chaque année, nous avons ce débat sur les DREAL. Dans mon département, la construction d'une passerelle en bois dans un site protégé a été retardée d'un an, car c'est le délai qu'il a fallu à la direction régionale pour rendre son avis, et l'affaire est remontée jusqu'au ministère. Le ministre est-il le greffier de la DREAL Pays-de-la-Loire ? C'est insupportable ! Que la DREAL se comporte en régulateur budgétaire, cela va à l'encontre du soutien à l'activité économique et à la croissance.

À cela s'ajoute la question du rôle des préfets : sont-ils les procureurs de la République du droit administratif ? Ont-ils une fonction d'arbitrage local ? Le Gouvernement doit dire le sort qu'il entend leur réserver.

M. Francis Delattre . - Les services qui entouraient le préfet en Ile-de-France s'appauvrissent. Sur un territoire de 11 ou 12 millions d'habitants, la régionalisation est une catastrophe. Les préfets n'ont plus d'experts sous la main, les compétences sont tombées à un niveau effroyablement bas. Le conseil général des ponts et chaussées dispose de centaines d'ingénieurs hautement qualifiés : ne peut-on en réinjecter quelques-uns dans nos services ? Lorsque nous manquons d'experts pour traiter les grands dossiers d'aménagement, ne restent que les cabinets privés...

Mme Michèle André, rapporteure spéciale . - Notre débat démontre l'utilité du contrôle sur pièces et sur place. La décentralisation a été une grande ambition, mais le rôle des préfets n'a pas été redéfini. La RéATE a montré son utilité, notamment en matière immobilière et de regroupement de services, mais elle ne suffit pas. La perte d'autorité des préfets de département est une réalité.

Seules 40 sous-préfectures sur les 240 que compte notre pays ont moins de dix agents. Mais partout on manque de cadres, donc d'interlocuteurs pour accompagner les projets des élus locaux. Le sous-préfet étaient auparavant l'interlocuteur le plus proche, et disposant des ressources adéquates. Certaines préfectures ont trouvé de nouvelles méthodes de travail astucieuses, en confiant aux sous-préfectures l'expertise du contrôle de légalité. D'autres, en zones périurbaines, ont concentré le travail au niveau préfectoral. Mais aucun schéma global n'a pu être élaboré, et la mission diligentée par le ministre sur ce sujet n'a pas encore débouché sur des conclusions.

D'aucuns craignent la suppression du niveau le plus bas. Ce ne serait pas une bonne idée. Il faut avancer sur cette question avec précaution. Certaines zones, de montagne par exemple, ne s'y prêtent guère. Et dans tous les cas, le représentant de l'État doit rester en contact direct avec le niveau central et travailler avec lui en bonne intelligence. La nouvelle autorité hiérarchique du préfet de région sur le préfet de département a parfois été mal comprise. Les ministres veulent conserver une autorité directe sur leurs propres services, comme les DREAL, ce qui complique singulièrement la tâche des préfectures de région. La montée en régime des SGAR, leur compétence en matière européenne et de prospective n'a pas simplifié le paysage...

Peut-être conviendrait-il de rattacher les préfets directement au Premier ministre, afin de mieux exploiter leur dimension interministérielle. Au sein même du corps préfectoral, certains se posent la question. En effet, le préfet n'a plus pour seule mission de garantir l'ordre public, il a désormais un rôle économique et d'aménagement du territoire. Et il est exact qu'il manque des compétences, notamment celles réunies dans les anciennes DDE.

M. Francis Delattre . - Absolument.

Mme Michèle André, rapporteure spéciale . - Certaines compétences ont certes été absorbées par nos collectivités. Mais dans certaines matières, comme la politique de l'eau, nous avons besoin d'une vision plus large, à l'échelle régionale, voire nationale.

Monsieur de Montgolfier, je n'ai compétence que sur l'Agence nationale des titres sécurisés - les effectifs des ARS ressortissent à une autre mission. Nous manquons d'une vision globale sur ces organismes, mais en tout état de cause, les effectifs des opérateurs n'ont cessé de croître depuis deux ou trois ans.

L'ONEMA pose problème dans de nombreux départements.

Le rapport de François Patriat sur la réorganisation des services de l'État en lien avec les collectivités territoriales le disait déjà : nous avons du travail à faire pour mettre de l'ordre.

M. Francis Delattre . - Ne confondons pas décentralisation et déconcentration.

Mme Michèle André, rapporteure spéciale . - Ne désespérons pas. Les services déconcentrés et les collectivités travaillent ensemble très intelligemment. Mais les sigles nouveaux n'ont pas tous été intégrés et nos concitoyens peinent encore à s'y retrouver. Après l'affaire Spanghero, d'aucuns ont suggéré de rattacher la DDCCRF directement au ministre. L'idée semble passée, mais il faudra creuser ces questions d'organisation.

M. Yvon Collin, président . - L'affaiblissement des compétences est un vrai problème. Auparavant, les DDE étaient composées de « X-Ponts » compétents et visionnaires.

Mme Michèle André, rapporteure spéciale . - J'ajoute que les préfectures ont encore une fonction de guichet. Or depuis quelques années, la tension est palpable : les salles d'attente sont pleines, le personnel est débordé, le matériel vieillit. Les procédures ont été en partie dématérialisées, mais il suffit d'une panne informatique pour désorganiser tout un service. Je veux d'ailleurs saluer la haute compétence et le dévouement de ces agents qui travaillent sans avouer la faiblesse des moyens qui leur sont alloués.

A l'issue de ce débat, la commission a donné acte de sa communication à Michèle André, rapporteure spéciale, et en a autorisé la publication sous la forme de rapport d'information .

ANNEXE 1 - LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

I. Au Sénat

Ministère de l'intérieur :

- M. Didier Lallement , secrétaire général ;

- M. Yves Lebreton , directeur adjoint de la modernisation et de l'action territoriale.

Direction générale des collectivités locales (DGCL) :

- M. Bruno Delsol , adjoint au directeur général ;

- M. Alexander Grimaud , directeur de cabinet du directeur général ;

- M. Bruno Triquenaux , expert de haut niveau, chargé du suivi de la démarche de modernisation de l'action publique ;

- M. Olivier Benoist , chef du bureau du contrôle de légalité et du conseil juridique.

Agence nationale des titres sécurisés (ANTS) :

- M. Etienne Guépratte , directeur.

Cour des comptes :

- M. Pierre Jamet , conseiller maître.

II. Lors des déplacements

Les 7 et 8 mars 2013, à Besançon et Lons-le-Saunier

Préfecture de la région Franche-Comté :

- M. Stéphane Fratacci , préfet de région, préfet du Doubs ;

- M. Joël Mathurin , secrétaire général de la préfecture du Doubs ;

- M. Eric Pierrat , secrétaire général aux affaires régionales ;

- M. Christian Haas , directeur de la réglementation et des collectivités locales ;

- Mme Cécile Leclercq-Poulin , directrice régionale et départementale des ressources et des mutualisations ;

- Mme Dominique Sauvageat , conseillère de gestion, préfecture du Doubs ;

- Mme Christelle Taillardat , chef du bureau des ressources humaines et de la formation ;

- Mme Muriel Beugnot , chef du bureau des affaires budgétaires et comptables, chef de la plateforme Chorus régionale ;

- M. Samuel Mesnier , chef du bureau des affaires immobilières et de la logistique ;

- Mme Christine Lorenzelli, responsable delapolitique immobilière de l'Etat ;

- Mme Nadège Calendini , chef du bureau de la délivrance des titres ;

- Mme Claudine Grosperrin , chef du pôle accueil ;

- Mme Martine Durand , chef du bureau du contrôle budgétaire et des dotations ;

- Mme Silviane Gest , chef du bureau du contrôle de légalité et de l'intercommunalité ;

- Mme Marine Webanck , chef du bureau du contrôle de la commande publique ;

- Mme Marie-France Barraux , directrice du service de l'immigration et de l'intégration ;

- Mme Dominique Jon , chef du bureau des nationalités ;

- Mme Danièle Dulment , déléguée régionale aux droits des femmes ;

- Mme Eline Chenillat , déléguée départementale aux droits des femmes ;

- Mme Corinne Biajoux , secrétaire départementale FO ;

- M. Patrick Noblet , secrétaire départemental CFDT ;

- M. Pierre Tournier , secrétaire départemental CGT.

Conseil général du Doubs :

- M. Claude Jeannerot , président.

Commune de Besançon :

- M. Jean-Louis Fousseret , maire ;

- M. Patrick Ayache , directeur général des services de la mairie de Besançon.

Préfecture du Jura :

- M. Francis Vuibert , préfet du Jura ;

- M. Antoine Poussier , secrétaire général de la préfecture du Jura ;

- M. Michel Balsier , directeur de la réglementation et des libertés publiques ;

- M. Marc Charpenay , directeur des collectivités territoriales et des moyens de l'Etat ;

- M. Pascal Bouvier , chef de la mission développement territorial ;

- M. Jean-Luc Deleglise , chef du bureau des collectivités territoriales ;

- Mme Audrey Tarantino , adjointe au chef du bureau des collectivités territoriales ;

- Mme Josiane Dole , chef du bureau des ressources humaines ;

- M. Philippe Preux , chef du bureau du budget et de la logistique ;

- Mme Laurence Jeantet , chef du bureau des usagers de la route ;

- M. Julien Charasse , chef du bureau de la nationalité ;

- Mme Laure Dormoy , chef du bureau de la performance ;

- M. Cédric Debon , sous-préfet de Dole ;

- M. Joël Bourgeot , sous-préfet de Saint-Claude ;

- M. Jean-Xavier Retournay , secrétaire général de la sous-préfecture de Saint-Claude ;

- M. Bernard Cressot , directeur départemental des finances publiques (DDFiP) ;

- M. Philippe Vincent , secrétaire général adjoint à la direction départementale des territoires ;

- Mme Frédérique Joly , syndicat autonome des préfectures et de l'administration centrale du ministère de l'intérieur (SAPACMI) ;

- MM. Joseph Bazucchi et Christophe Gérard , représentants CFDT ;

- M. Jérôme Petit , représentant FO.

Les 6 et 7 juin 2013, à Toulouse et Albi

Préfecture de la région Midi-Pyrénées :

- M. Henri-Michel Comet , préfet de région, préfet de Haute-Garonne ;

- M. Thierry Bonnier , secrétaire général de la préfecture de la Haute-Garonne ;

- M. Robert Vincent , secrétaire général aux affaires régionales ;

- M. Renaud Fournales , secrétaire général adjoint au secrétaire général pour les affaires régionales ;

- M. Alain Gros , directeur des ressources humaines ;

- Mme Marie-Christine Marty , chef du bureau des ressources humaines ;

- Mme Martine Bontempi , directrice des relations avec les collectivités locales (DRCL) ;

- M. François Balanant , DRCL ;

- Mme Lydie Rivière , DRCL ;

- Mme Dominique Bacle , direction départementale de la cohésion sociale ;

- M. Philippe Riou , direction départementale de la protection des populations ;

- Mme Anne-Marie Sigal , service du pilotage et de la mutualisation interministérielle (SPMI) ;

- M. Raymond Jean-Duvignac (SPMI) ;

- M. Stéphane Lalanne , direction de la réglementation et des libertés publiques (DRLP) ;

- Mme Catherine Largenté , DRLP ;

- M. Marc Cotte , DRLP ;

- M. Jean Fray , DRLP ;

- M. François Beyries , sous-préfet de Muret ;

- Mme Rose-Marie Vengut , secrétaire générale de la sous-préfecture de Muret ;

- M. Christophe Thouy , secrétaire général de la sous-préfecture de Saint-Gaudens ;

- Mme Catherine Hugonnet , déléguée régionale aux droits des femmes ;

- M. Jean-Paul Turlan , représentant FO ;

- Mme Audrey Gonzalez , représentante UNSA ;

- MM. David Bourgeois et Jacques Lager , représentants CFDT ;

- MM. Paul Bonsignore et Jean-Bernard Moll , représentants CGT.

Préfecture du Tarn :

- Mme Josiane Chevalier , préfète du Tarn ;

- Mme Béatrice Steffan , secrétaire générale de la préfecture du Tarn ;

- M. Jean-Yves Chiaro , sous-préfet ;

- Mme Nicole Gandia , directrice des libertés publiques et des collectivités territoriales ;

- Mme Marie-Annick Clermont , chef du bureau des titres ;

- MM. Alain André, Denis Platet et Dominique Sanchez , représentants FO ;

- Mme Dominique Accart et M. William Lefebvre , représentants CFDT.


* 1 Cf . Sénat, rapports d'information n° 486 (2008-2009), « La nouvelle génération de titres d'identité : bilan et perspectives », et n° 596 (2009-2010), « Le véritable prix du passeport biométrique ».

* 2 Cf . Sénat, rapport d'information n° 35 (2010-2011), « La RGPP dans les préfectures : pour la délivrance des titres, la qualité du service public est-elle en péril ? ».

* 3 Ainsi que l'a mis en évidence la mission commune d'information du Sénat sur la RGPP et les services publics locaux, ce renforcement constitue « l'aboutissement des réformes conduites au cours des vingt dernières années ». Pour davantage de développements, votre rapporteure spéciale renvoie au rapport d'information n° 666 (2010-2011) - Tome I, « La RGPP : un défi pour les collectivités territoriales et les territoires » de Dominique de Legge.

* 4 Cf . rapport d'information précité de Dominique de Legge.

* 5 Cf . rapport d'information précité de Dominique de Legge.

* 6 Le réseau des préfectures a peu évolué depuis la réforme conduite en 1926 par Raymond Poincaré.

* 7 Communiqué de presse du ministère de l'intérieur, 1 er octobre 2012.

* 8 Rapport au Premier ministre.

* 9 Dans un référé en date du 5 novembre 2010 sur la gestion du parc immobilier des préfectures et des sous-préfectures ( Cf. infra ), la Cour des comptes estimait que 71 % des surfaces des locaux préfectoraux relevaient du régime de mise à disposition.

* 10 Véritable « conseil d'administration » de l'Etat en région, le CAR constitue le lieu de délibération collégiale des décisions stratégiques et le cadre dans lequel le préfet de région s'assure de la cohérence de l'action de l'Etat dans la région et de la mise en oeuvre des priorités gouvernementales. Sous l'autorité du préfet de région, le CAR réunit les préfets départementaux, les directions régionales et les DDI.

* 11 Cf . Cour des comptes, rapport public thématique « L'organisation territoriale de l'Etat » (juillet 2013).

* 12 Nouveau programme immobilier.

* 13 Cf . par exemple, Sénat, rapport spécial n° 148 (2012-2013), Tome III - Annexe n° 27 a, « Sécurité (gendarmerie nationale et police nationale) » de Jean-Vincent Placé.

* 14 Dans sa décision n° 23, le CIMAP du 17 juillet 2013 a prévu que « les usagers pourront régler en ligne par paiement sécurisé le coût des titres, ou par timbre fiscal, en particulier la carte grise des véhicules, qu'ils font établir en préfecture. Ces nouvelles modalités de paiement, qui permettront de réduire les temps d'attente, seront expérimentées avant la fin de l'année 2013 ».

* 15 Pour davantage de développements sur cette réforme, votre rapporteure spéciale renvoie au rapport n° 148 (20123-2013), Tome III - Annexe 6, « Conseil et contrôle de l'Etat » de Charles Guené.

* 16 Cf . rapport d'information précité « Le véritable prix du passeport biométrique ».

* 17 Article 953 du code général des impôts (CGI). Une décote de 3 euros est appliquée si le demandeur fournit lui-même ses deux photographies d'identité.

* 18 Soit désormais 15 contre 9 auparavant.

* 19 Cf . rapport précité « La nouvelle génération de titres d'identité : bilan et perspectives ».

* 20 Cf . rapport précité « La nouvelle génération de titres d'identité : bilan et perspectives ».

* 21 Annexé au projet de loi de règlement des comptes et de gestion pour 2012.

* 22 Elle n'est recevable qu'à la condition d'être adressée, par le titulaire du certificat d'immatriculation du véhicule concerné, par lettre recommandée avec accusé de réception, dans le délai de quarante-cinq jours suivant l'envoi de l'avis d'amende forfaitaire (trente jours pour une amende forfaitaire majorée).

* 23 Le risque encouru correspond à sept ans de prison et à 30 000 euros d'amende.

* 24 Pour contester les amendes déjà reçues, la victime d'usurpation doit faire une requête en exonération auprès de l'officier du ministère public compétent par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quarante-cinq jours, en joignant le récépissé du dépôt de plainte. Aucun paiement de l'amende et aucune consignation ne sont à faire dans ce cas.

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