B. ASSOCIER DES FINANCEMENTS PUBLICS ET PRIVÉS AU DÉVELOPPEMENT DE SYSTÈMES DE FORMATION PROFESSIONNELLE

La politique de formation en Afrique subsaharienne devra combler le décalage entre l'offre et la demande d'emploi et, au-delà, l'inadéquation entre les compétences actuellement enseignées et les besoins des entreprises.

Nombreux, aujourd'hui, sont les pays africains qui s'accordent dans leurs politiques sectorielles pour lier «formation professionnelle», «emploi» et «croissance». Dans les pays en transition qui ont réussi la scolarisation de base, l'enjeu porte sur l'adaptation permanente de la capacité nationale de formation à l'élévation régulière des besoins en compétences des entreprises. Dans les pays les moins avancés qui restent tributaires de nombreuses contraintes structurelles, l'enjeu porte sur la création ou la rénovation de systèmes souples et multiformes de formation pour développer l'employabilité de la population active.

Dans tous les cas, c'est un enjeu majeur. Aujourd'hui, une majorité de jeunes africains sont victimes d'une politique de formation inadaptée, entre les compétences enseignées et la demande des employeurs. S'ils ont pu bénéficier d'une scolarité dans le secondaire ou, pour certains, ont eu accès à l'Université, ils n'ont pas acquis les compétences recherchées par les entreprises. Les offres d'emplois se concentrent sur des qualifications techniques, de la supervision des processus de fabrication et de la qualité dans les secteurs exportateurs.

Alors même que l'Afrique est la région du monde qui compte la plus forte proportion d'étudiants dans les filières littéraires et des sciences sociales, ce décalage entraîne inéluctablement une inadéquation de la formation aux besoins des entreprises et, par la suite, un chômage massif.

De nombreux pays sont en train de structurer des fonds de financements de la formation professionnelle. Les finalités et modalités d'intervention des fonds se différencient selon le niveau économique des pays. Ainsi dans beaucoup de pays d'Afrique sub-saharienne où l'emploi dit «informel» représente entre 80 % et 90 % des emplois et où le niveau scolaire est faible, les formations d'artisans sont prédominantes tandis que dans des pays semi-industrialisés comme l'Afrique du sud, où le secteur industriel représente 30 % des emplois avec un important secteur tertiaire moderne, les demandes adressées aux fonds proviennent davantage des secteurs dits «modernes». Les fonds interviennent comme appui de la structuration des systèmes de formation professionnelle qui sont en plein développement.

La France a un système de formation professionnelle très développé. L'Agence française de développement et les syndicats professionnels doivent s'associer aux pouvoirs publics locaux, écoles, universités et entreprises pour répondre à une demande croissante d'expertise dans un domaine particulièrement stratégique en matière d'influence économique.

Le modèle de l'Institut des métiers de l'aéronautique de Nouaceur (Casablanca- Maroc) fournit un exemple particulièrement réussi de ce que la coopération française dans ce domaine peut faire de mieux.

Cet institut a pour objectif de former des opérateurs, des techniciens et des cadres intermédiaires en langue française. Cet institut, fonctionnant sur le principe du partenariat public (Ministère de l'Emploi, de la formation professionnelles, de l'Industrie, de l'Économie et des Finances, AFD) et privé (groupement des industries aéronautiques et de l'IUMM français) assure également la formation professionnelle tant sur les coeurs de métiers que sur les activités support et annexes (qualité, marketing).

Le groupe de travail estime que ce modèle de formation, mixte et concret, permet une politique de formation et d'emploi, lisible et efficace.

Il pourrait aisément s'adapter aux secteurs de l'automobile, de la téléphonie, du textile, de l'habillement, dans le cadre d'un rayonnement économique régional voire international. Il pourrait s'enrichir d'une politique d'échanges et de mobilité avec les partenaires français et européens francophones.

56) Promouvoir des partenariats public-privé en faveur du développement de système de formation professionnelle en Afrique.

C. DÉVELOPPER DES PARTENARIATS AVEC DES UNIVERSITÉS FRANCOPHONES

Or on observe actuellement deux phénomènes s'agissant de l'accueil des étudiants africains en France : d'une part, les familles n'ont souvent plus les moyens financiers d'envoyer leurs enfants en France et privilégient des universités francophones du continent africain, comme les universités marocaines ; d'autre part, pour les familles dont les revenus sont plus élevés, les premiers cycles de l'université française sont peu attractifs et subissent pleinement la concurrence universitaire internationale, les étudiants se tournant vers les structures de pays qui ne sont pas forcément francophones. Dans les deux cas, c'est la qualité d'accueil de ces publics dans les universités françaises qui est en question.

En dehors des propositions relatives à l'accueil des étudiants, le Groupe de travail estime que les partenariats entre les universités françaises et africaines peuvent être une solution d'avenir. A une époque où la France soutient l'université Paris-Sorbonne-Abou Dhabi, créée par un accord de coopération internationale entre l'université Paris-Sorbonne et le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche de l'émirat d'Abou Dhabi, (Émirats arabes unis), il estime qu'un projet comparable, par exemple à Dakar avec la création d'une grande université francophone en lien avec une université française et les instances de la Francophonie, permettrait d'attirer les étudiants francophones d'Afrique de l'Ouest vers un enseignement en français délivré par des professeurs francophones originaires d'Afrique ou de pays francophones dont la France.

Un autre moyen de garder dans l'orbite francophone les meilleurs étudiants pourrait consister à encourager, par exemple par des bourses, la cotutelle de thèse (disposition permettant à un étudiant d'effectuer son travail de recherche sous la responsabilité de deux directeurs de thèse : l'un en France et le second dans son pays).

57) Créer une université francophone pilote à l'image de la Paris-Sorbonne-Abou Dhabi.

58) Encourager le développement de thèses en cotutelle franco-africaine.

D. PROMOUVOIR L'ENSEIGNEMENT FRANCOPHONE EN LIGNE

Troisième révolution après l'invention de l'écriture et celle de l'imprimerie, la révolution numérique apparaît comme une opportunité pour diffuser la langue française et le savoir-faire français et un défi.

Une opportunité, celle de repenser l'élaboration et la transmission des savoirs, de manière interactive, en mettant les étudiants en France comme en Afrique au coeur du projet pédagogique de l'enseignement supérieur. Un défi, celui de construire une université performante, innovante et ouverte sur le monde.

Le développement des cours en ligne (Massive Open Online Course) dans les dix prochaines années redéfinira la carte universitaire internationale.

Les cours en ligne se multiplient; ces cours ouverts et massifs, désignés sous l'acronyme MOOCs (massive open online courses), sont nés il y a quelques années aux États-Unis. Ces cours en ligne sont non seulement gratuits et accessibles à distance, mais ils peuvent déboucher sur une certification. Ces cours, auxquels sont associés un accompagnement pédagogique et la possibilité d'interagir avec les enseignants et les autres participants, permettent de former des étudiants de tous les continents.

La France a un rôle à y jouer, à la hauteur de la qualité de son enseignement et de sa recherche, en termes de coopération avec les pays en développement et les pays francophones. La diffusion de cours en ligne, en français, demeure une expression forte de sa politique en faveur de la francophonie.

Aux Etats-Unis, des plateformes numériques privées ou publiques présentent aux étudiants du monde entier des cours dans toutes les disciplines. Sur certaines plateformes on peut compter jusqu'à 4 à 5 millions d'inscrits sur les quelques 500 cours en ligne. Un des premiers MOOCs a été suivi par  160 000 inscrits dans le monde, faisant dire à son créateur qu'il lui aurait fallu dispenser 250 ans de cours en amphithéâtre pour toucher un tel public.

Il s'agit là d'une rupture fondamentale car jamais auparavant une mise à disposition des connaissances sous une forme aussi élaborée que celle-ci n'avait été possible.

Le Gouvernement a annoncé la création d'une fondation chargée de susciter et de coordonner une offre de formation d'enseignement numérique innovante et d'offrir une meilleure visibilité nationale et internationale à l'offre française, de proposer une première plateforme comme outil d'intérêt commun pour héberger les formations numériques des établissements, qu'il s'agisse de MOOCs certifiant, de formations en ligne diplômant es ou qualifiantes.

Le C.N.R.S., Sorbonne Paris Cité, l'Ecole Centrale Paris, Paris 10 et l'E.H.E.S.S., le CNAM, l'Ecole Polytechnique, Sciences-Po, H.E.C., l'Institut Mines Telecom ont déjà mis en place des dispositifs d'enseignement à distance.

Des partenariats européens se sont également noués, entre Paris 5, l'université de Berlin et l'INRIA, France Université Numérique étant ouverte à l'ensemble de nos partenaires.

L'Institut de la Banque mondiale s'est investi dans des programmes de formation à distance, de même que le CEFEB, organe de formation de l'AFD, qui vise à devenir une Université virtuelle. L'Institut International d'Ingénierie de l'Eau et de l'Environnement (CI2E) basé à Ouagadougou a ouvert la voie dans les pays francophones. L'Agence universitaire de la francophonie (AUF) peut également dans ce domaine jouer un rôle essentiel pour rendre accessible au Sud l'enseignement supérieur et promouvoir en même temps la francophonie. Association d'universités fondée en 1961 à Montréal, l'AUF elle-même a très tôt contribué à la création de campus numériques. L'AUF dispose aujourd'hui d'une soixantaine de lieux sécurisés et équipés pour permettre la formation à distance.

Le groupe de travail invite le Gouvernement à poursuivre son effort en faveur des universités numériques en coordination avec les partenaires francophones.

59) Développer des universités numériques en coordination avec les partenaires francophones.

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