V. L'EAU EN MONTAGNE : AU-DELÀ D'UNE ABONDANCE APPARENTE, UN RISQUE RÉEL DE RARÉFACTION

A. LE RÔLE FONDAMENTAL DE LA MONTAGNE POUR LA RESSOURCE EN EAU

Les zones de montagne sont les « châteaux d'eau » du pays. En raison de leur étendue et de leur relief, elles concentrent une part importante des précipitations dans les parties hautes des bassins versants. De fait, la plupart des grands fleuves français prennent leur source en montagne.

1. Les caractéristiques des rivières de montagne
a) Des cours d'eau au débit saisonnier mais puissant

Les cours des rivières de montagne sont généralement très variés, depuis les têtes de bassin, aux zones humides remarquables, jusqu'aux fonds de vallées encaissés où se concentrent les emprises urbaines et les terres agricoles.

Leur alimentation est très variable sur l'année, avec des débits d'étiage en hiver. Mais, dans l'ensemble, elles se caractérisent par des pentes et des débits élevés, soutenus par les glaciers et la neige, qui leur confèrent un potentiel attractif pour l'hydroélectricité.

Elles constituent aussi des zones de production sédimentaire, qui ont souvent été surexploitées dans le passé.

Les principaux problèmes rencontrés par les rivières de montagne sont les suivants : 50 % des masses d'eau, en moyenne, sont identifiées avec des problèmes de morphologie, de continuité biologique ou sédimentaire ; 40 % avec des problèmes de quantité, liés aux prélèvements ou aux éclusées, aux dérivations, etc. Les problèmes de qualité de l'eau arrivent très loin derrière les deux catégories de problème précédentes (ex : pesticides 3 %).

b) Les difficultés du traitement des eaux en montagne

Les températures basses, les fortes variations de charge du fait de l'activité saisonnière intense de la saison de ski (multiplication par 10 à 20 de la population), ainsi que les contraintes diverses (couloirs d'avalanche, protection Natura 2000, distances, rejets dans des cours d'eau en étiage, etc.), rendent les traitements difficiles et génèrent des surcoûts importants.

Le surcoût pour la réalisation d'une station d'épuration est estimé à 44 %, en moyenne, par rapport aux stations situées en zone non montagneuse.

2. Les effets prévisibles du changement climatique
a) Un climat plus chaud et plus sec

Les modèles s'accordent sur une hausse généralisée des températures de l'air, sur tout le pays et à toutes les saisons. Pour le bassin Rhône-Méditerranée, qui correspond essentiellement aux massifs des Alpes et du Jura, la température moyenne annuelle pourrait s'élever de 3 à 5 °C à l'horizon 2080, par rapport aux moyennes constatées sur la période 1970-2000. Les températures estivales pourraient augmenter entre 3 et 6 °C.

Les précipitations estivales devraient baisser. Pour les autres saisons, les résultats de la modélisation sont moins clairs et les divers travaux de recherche donnent des résultats différents. À l'horizon 2080, les précipitations moyennes annuelles baisseraient.

La hausse des températures impliquera une diminution du couvert neigeux, à la fois du fait de moindres chutes de neige et d'une fonte accélérée.

Néanmoins, les événements de pluviométrie extrême pourraient devenir plus fréquents et plus intenses en hiver, notamment dans les régions méditerranéennes.

b) Des ressources en eau plus variables et moins abondantes

Les études scientifiques estiment qu'à l'horizon 2046-2065, le réchauffement climatique devrait se traduire, pour les cours d'eau à régimes nivaux, par des étiages hivernaux moins sévères, mais aussi par des débits de printemps et d'été en diminution, en raison d'une fonte accélérée de moindres quantités de de neige, comme de pluie. Au-delà de l'horizon 2080, les régimes nivaux pourraient être plus fortement remis en cause.

Les projections d'évolution des paramètres de température, d'évapotranspiration et de neige font apparaître de manière très nette une tendance à la raréfaction de la ressource en eau.

Les résultats des études d'impacts sur les débits le confirment. Au-delà du problème des ressources moyennes annuelles, la tension en période d'étiage risque de s'aggraver fortement là où elle existe déjà, voire d'apparaître sur des territoires aujourd'hui en situation de confort hydrique. En effet l'impact d'un moindre enneigement, d'une fonte accélérée et de conditions estivales asséchantes apparaît très nettement dans les projections : des étiages plus intenses, plus longs, débutant plus tôt dans l'année.

Malgré ces projections de baisse généralisée de la ressource en eau, les débits élevés et l'impact des crues ne devraient pas baisser, et pourraient même s'aggraver. La gestion de ce risque ne doit donc pas être oubliée, et un suivi attentif du développement des connaissances sur ce sujet est nécessaire.

L'eau dans le plan national d'adaptation au changement climatique

Dans le domaine de l'eau, le plan national d'adaptation au changement climatique (PNACC) pour la période 2011-2015 propose les points suivants :

- améliorer la connaissance des impacts du changement climatique sur les ressources en eau et des impacts de différents scénarios possibles d'adaptation ;

- se doter d'outils efficaces de suivi des phénomènes de déséquilibre structurel, de rareté de la ressource et de sécheresse, dans un contexte de changement climatique ;

- développer les économies d'eau et assurer une meilleure efficience de l'utilisation de l'eau, au niveau de chaque usager, en particulier dans les zones actuellement déficitaires, avec un objectif global de 20 % d'économie sur l'eau prélevée, hors stockage d'eau hivernal, d'ici 2020 ;

- accompagner un développement d'activités et une occupation des sols compatibles avec les ressources en eau disponibles localement ;

- renforcer l'intégration des enjeux du changement climatique dans la planification et la gestion de l'eau (en particulier dans les documents d'urbanisme).

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