CONCLUSION

La consultation des élus locaux organisée par la Délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation confirme les projections présentées dans le tome I du présent rapport.

L'investissement public local chute de façon très importante et constitue déjà, en 2015, le premier levier de compensation des baisses de dotations.

Les dépenses de fonctionnement diminuent également. En leur sein, les dépenses de personnels constituent un enjeu particulier : si les collectivités doivent pouvoir envisager des économies, elles ne peuvent être les seules à faire preuve de responsabilité. Aussi l'État ne peut-il pas leur demander des efforts toujours plus importants alors que par ailleurs il annonce des mesures telles que la revalorisation des salaires des fonctionnaires, ce qui rendra l'objectif des collectivités territoriales encore plus difficile à atteindre.

Les élus locaux sont particulièrement inquiets et démunis face à des perspectives qu'ils jugent insurmontables, trop complexes à appréhender, et dont ils ne parviennent pas à mesurer précisément les conséquences .

La confusion risque d'augmenter alors que la réforme de la DGF est annoncée par étapes et sans orientations précises à ce jour, malgré la volonté affichée du Gouvernement de prévoir les premières mesures dès le projet de loi de finances pour 2016.

Les élus locaux veulent plus de temps, de simplicité et d'équité . Au-delà d'un nouveau calendrier, ils attendent des évolutions plus structurelles visant soit la simplification de la fiscalité locale, soit une réforme profonde de la DGF.

En tout état de cause, ils doivent être mieux informés, et ce, dès avant la fin de l'année 2015.

La Délégation demande donc que les préfets adressent rapidement à chaque collectivité une description précise de l'impact financier de la baisse des dotations afin que chacune soit en mesure de prendre des décisions adaptées.

Le tome III des travaux relatifs aux finances locales formulera un certain nombre de propositions pour l'ensemble des collectivités territoriales, tenant compte de ces constats.

ANNEXES

ANNEXE I : ENQUÊTE RÉALISÉE PAR L'INSTITUT DE SONDAGE IFOP

1. Note de synthèse de l'Ifop : consultation des élus locaux sur les conséquences de la baisse des dotations de l'État pour leur collectivité

Un rejet massif de la baisse des dotations de l'État

La baisse des dotations de l'État suscite un rejet massif de la part des élus des collectivités territoriales qui ont participé à la consultation de l'Ifop organisée par la Délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation du Sénat. Au-delà du fait d'être considérée comme nécessaire par à peine plus du quart des élus s'étant exprimés (27 %), cette baisse des dotations est jugée efficace par moins d'un élu sur cinq pour diminuer les déficits publics (18 % contre 68 % ne la jugeant pas efficace). Cette évaluation sévère, mais peu surprenante, vilipendant à la fois la légitimité et l'efficacité de cette contraction des dotations de l'État, s'exprime en outre dans un contexte plus large de défiance de la réforme territoriale , jugée elle aussi négativement par une écrasante majorité d'élus : près de huit d'entre eux sur dix considèrent, en effet, que la réforme ne génèrera pas d'économies dans les collectivités (78 %, dont 34 % « pas du tout »).

La défiance vis-à-vis de la baisse des dotations, comme de la réforme territoriale en général, est, assez logiquement, d'autant plus forte que la collectivité de l'élu interrogé est petite et qu'elle dispose donc de ressources propres plus réduites, la rendant plus dépendante aux dotations de l'État pour financer leur fonctionnement et leurs investissements. Ainsi, seuls 24 % des élus des communes les plus petites (moins de 500 habitants) considèrent cette baisse comme nécessaire, un jugement partagé à hauteur de 29 % par les élus des communes comptant 500 à 1 999 habitants, et 32 % dans les communes les plus grandes (plus de 2 000 habitants). Dans les collectivités plus importantes (en dehors de l'échelon communal), la sévérité des jugements décroît et le soutien apparait même majoritaire dans les régions (34 % pour les élus d'EPCI - établissement public de coopération intercommunale -, 43 % au niveau départemental et 58 % jugent cette baisse « nécessaire » dans les régions).

Des écarts du même ordre, bien que moins importants, sont à l'oeuvre concernant l'impact économique de la réforme territoriale, puisque cette réforme ne permettra pas de générer des économies selon 83 % des élus des communes les plus petites et 75 % des élus des communes les plus grandes, contre 67 % des élus de régions ou seulement 57 % des élus de départements. De même, ce sont les élus issus des plus petites entités territoriales qui sont les plus sévères quant à l'efficacité de la baisse des dotations : seuls 16 % des élus des communes de moins de 500 habitants la jugent efficace, contre 24 % dans les communes de plus de 2000 habitants, 25 % dans les régions et 31 % dans les départements.

Le jugement des élus interrogés sur la baisse de la dotation varie également selon que ceux-ci appartiennent ou non à une collectivité qui projette de recourir à nouveau à des mesures de mutualisation (35 % contre 20 % dans les collectivités qui n'envisagent pas de le faire à nouveau) ou qui envisage une fusion avec d'autres communes (36 % contre 25 % dans les communes qui n'envisagent pas de fusion).

Un rejet de cette baisse des dotations lié à différents facteurs

Pour une majorité des élus interrogés dans le cadre de cette consultation (56 %), cette baisse des dotations est jugée « insurmontable » pour leur collectivité , contre moins de deux sur cinq (39 %) la trouvent surmontable, dont seulement 2 % considèrent qu'elle est « tout à fait » surmontable. Ce constat acerbe est d'ailleurs clairement corrélé au peu d'engouement que suscitent la baisse des dotations et la réforme territoriale. En effet, 80 % des élus qui considèrent cette baisse comme étant insurmontable la jugent inefficace (contre 68 % de l'ensemble des élus), et 84 % d'entre eux (contre 78 % au global) sont sceptiques quant à l'impact économique de la réforme.


• Une prise de conscience forte de l'impact (même limité) de la baisse des dotations sur les collectivités...

Plus de huit élus interrogés sur dix (84 %) déclarent connaître l'incidence de la baisse des dotations de l'État sur le budget de leur collectivité, et un tiers d'entre eux (33 %) affirme même en avoir une connaissance précise . Pour la grande majorité de ces élus déclarant connaître cet impact (70 %), la baisse des dotations représente moins de 10 % des ressources du budget annuel de leur collectivité , et seul un quart d'entre eux (25 %) l'évalue à plus de 10 %, dont moins d'un sur dix (9 %) à plus de 15 %. Dans les départements, comme dans les villes les plus grandes (plus de 10 000 habitants), la proportion d'élus qui évaluent l'impact à moins de 10 % est encore plus forte (respectivement 89 % et 88 %). Précisons ici que cette bonne connaissance (déclarée) de l'incidence de la baisse des dotations sur le budget de leur collectivité vient renforcer le sentiment d'inquiétude exprimé précédemment et majoritairement par les élus ayant participé à cette consultation.


• ... mais qui reste difficile à évaluer très précisément

Parallèlement, une majorité des élus interrogés (57 %) ne parvient pas à évaluer la baisse des dotations en équivalent pourcentage de fiscalité . La moitié de ceux qui y parviennent l'évaluent à plus de 9,9 %, l'autre moitié à moins de 9,9 %, et en moyenne elle s'élève, pour eux, à 12,8 %. De même, seuls 48 % des élus ayant pris part à la consultation affirment connaître l'incidence des mesures de renforcement de la péréquation pour leur collectivité, et pour la plupart d'entre eux (38 %) « dans les grandes lignes » uniquement. En outre, plus des trois quarts des élus (77 %) ne sont pas en mesure d'évaluer le pourcentage de fiscalité représenté par le fonds de péréquation qui concerne leur collectivité.

La difficulté à se positionner de manière affirmée sur ces indicateurs les plus précis de l'enquête révèle un point de vigilance important à prendre en considération pour les décideurs, à savoir que les élus locaux font montre d'un certain « décrochage » face à un système complexe dont ils semblent avoir des difficultés à se saisir pleinement.

Relevons d'ailleurs que, sur ces différents aspects, ce sont les élus des plus petites collectivités qui sont les moins disposés à les évaluer . Alors que 32 % des élus des EPCI, 30 % des élus des départements, 25 % des élus des régions et 20 % des élus des communes de plus de 10 000 habitants ne savent pas ce que représentera la baisse des dotations en équivalent pourcentage de fiscalité, cette proportion s'élève à 68 % chez les élus des petites communes et à 53 % chez les élus des communes moyennes . De la même façon, si respectivement 34 %, 37 %, 45 %, 55 % des élus des départements, des communes les plus grandes, des régions et des EPCI ne sont pas en mesure d'évaluer la part du fond de péréquation concernant leur collectivité, elle atteint 75 % dans les communes moyennes et même 85% dans les petites communes. Notons aussi, concernant l'incidence des mesures de renforcement de péréquation, que les départements et les communes de plus de 10 000 habitants se distinguent , puisque respectivement 65 % et 67 % des élus de ces collectivités qui ont été interrogés déclarent connaître l'effet de celles-ci sur leur collectivité (contre 48 % en moyenne).


• Un sentiment d'iniquité très massivement partagé

Pour deux tiers des élus ayant pris part à cette consultation en ligne (66 %), les critères actuels d'éligibilité et de répartition de la DGF ne sont pas équitables . Elus des communes et des EPCI sont plus nombreux (67 % et 68 %) que ceux des régions et des départements (51 % et 42 %) à partager ce sentiment et, en définitive, seul un peu plus d'un quart des élus (26 %) estiment que ces critères sont équitables.

À la question des attentes prioritaires à l'égard de l'état cette idée d'une révision du système sur la base de critères plus équitables (notamment entre rural et urbain) est spontanément évoquée par les élus ayant participé à cette consultation.

Une baisse des dotations qui se traduit avant tout par une baisse des dépenses d'investissement et de fonctionnement

Pour faire face à la baisse des dotations au sein des collectivités, les élus ont fait le choix prioritaire de revoir à la baisse les investissements et les frais de fonctionnement. Ainsi, 44 % des élus interrogés déclarent avoir répondu à cette baisse en diminuant en priorité les dépenses d'investissement dans le budget 2015 de leur collectivité, et 32 % en réduisant les dépenses de fonctionnement. Qui plus est, 45 % des élus envisagent, à l'horizon 2017, une baisse des dépenses d'investissement encore plus forte qu'entre 2014 et 2015, et 36 % une baisse des dépenses de fonctionnement encore plus importante que pour l'année écoulée, des arbitrages qui à ce stade paraissent aller à l'encontre des projets de reprise de croissance attendus par le Gouvernement.

L'augmentation de la fiscalité est, pour l'heure, une réponse moins prioritaire pour absorber cette baisse (13 % des élus ont activé ce levier en priorité), et la hausse de l'endettement l'est encore moins (levier prioritaire pour seulement 5 % des élus). Cependant, plus d'un élu sur cinq (22 %) estiment que la hausse de la fiscalité sera plus forte d'ici 2017 qu'entre 2014 et 2015, et de même pour la hausse de l'endettement pour un élu sur cinq (20 %).

Au-delà de ce constat global, ces arbitrages sont loin d'être homogènes au sein des collectivités françaises. On notera ainsi que si dans les départements la priorité a été donnée à la baisse des dépenses d'investissement (37 % devant la baisse des dépenses de fonctionnement 24 %), c'est en revanche sur ce levier que les régions ont mis l'accent (41 %) devant la hausse de l'endettement (25 %).


• Une baisse des dotations non sans risque d'ici 2017

D'ailleurs, la baisse des investissements est perçue comme le risque le plus important pour les collectivités d'ici 2017, par plus de sept élus sur dix (72 %), un risque notamment partagé dans les communes de moins de 10 000 habitants (75 %, contre 17 % dans les départements). Ce risque est cité loin devant d'autres, comme le désengagement dans certains secteurs (39 %), l'érosion du taux d'épargne brute (19 %), le risque de déficit et la dégradation de la capacité de désendettement (17 % chacun), des sujets qui bien que cités de manière plus secondaire par l'ensemble des élus sont en revanche nettement plus relevés par les élus départementaux .

Plus globalement et au-delà de ces risques détaillés, la crainte de difficultés financières est élevée , avec près de deux tiers des élus (65 %) qui estiment que les difficultés de ce type interviendront d'ici 2017, une crainte qui apparaît assez homogène au sein des collectivités , seuls les élus de région se montrant un peu plus confiants que dans les autres collectivités à cet égard (50 % contre 64 % à 65 % dans les départements, les EPCI et les communes).


• Des élus qui veulent plus de temps, de simplicité et d'équité

Pour plus de sept élus sur dix qui ont participé à cette consultation (71 %), ce sont surtout les équipements et l'urbanisme qui seront les premiers touchés par cette nouvelle donne financière des collectivités liée à la baisse des dotations, devant les subventions aux associations (citées par 45 % d'entre eux), les services administratifs et personnels (32 %) et le développement économique (22 %). La culture (14 %), l'éducation et la formation (10 %) et les services sociaux (8%) ne sont mentionnés que dans une moindre mesure. Notons que ce sont les élus de province qui sont les plus inquiets quant aux conséquences sur les équipements et l'urbanisme (71 % contre 56 % en région parisienne) et sur le développement économique (23 % contre 6 % en région parisienne).

Dans ce contexte, plus d'un quart des élus interrogés (26 %) attendent en priorité de la part de l'État un nouveau calendrier pour étaler dans le temps la baisse des dotations, puis une simplification de la fiscalité ainsi qu'une dotation globale entièrement péréquatrice (22 % chacun). L'attente de plus de simplicité en matière fiscale est, toutefois, plus forte chez les élus des communes de moins de 10 000 habitants (24 %) que dans les communes les plus grandes (10 %), dans les EPCI (14 %) et surtout dans les départements (6 %). Les élus départementaux se positionnent davantage sur le changement de calendrier (28 %) ou sur d'autres attentes (22 %), et près d'un tiers d'entre eux (31 %) ne se prononcent pas.

2. Résultats de la consultation

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