PREMIER ENJEU - DÉMONTRER LA SOLIDITÉ DE SON MODÈLE ÉCONOMIQUE

I. UNE CONCURRENCE EXACERBÉE

Créée en janvier 2013, la SFIL devait répondre à une pénurie d'offre bancaire sur le marché du secteur public local. Or, à peine est-elle entrée en activité que la concurrence a commencé à s'exacerber.

Ainsi, dès la deuxième réunion du conseil d'administration, le 28 février 2013, Philippe Wahl, alors président du directoire de La Banque postale, soulignait que « les autres banques sont de retour sur le marché. Les taux de marge plongent, ce qui est une vraie préoccupation ». Lors de la réunion du 18 avril 2013, il expliquait que le marché était passé d'une situation de « pénurie » à celle d'un « excès de financement », puisque l'offre était alors estimée à 25 milliards d'euros pour une demande de 21 milliards d'euros. À l'époque, l'atonie du crédit immobilier - et même sa régression sensible en 2012 - avait conduit les banques à réorienter une partie de leurs liquidités disponibles vers le secteur public local.

Le problème de la concurrence accrue et de son effet sur les marges a été évoqué à peu près à chaque réunion du conseil d'administration depuis la création de la SFIL.

Dans sa réponse au questionnaire de votre rapporteur, LBP rappelle que « la concurrence est devenue extrêmement forte en moins de deux ans avec aujourd'hui plus de douze acteurs :

« - les banques institutionnelles : Banque européenne d'investissement et Caisse des dépôts qui à elles seules financent quasiment 50 % du besoin d'emprunts ;

« - les banques traditionnelles du secteur : BPCE, Crédit agricole ;

« - les banques opportunistes qui interviennent surtout sur les grandes contreparties : Société générale, Crédit mutuel mais surtout les banques allemandes Pfandbriefbank (1 milliard d'euros de production en 2014) et Saarland bank qui interviennent sur des montants supérieurs à 10 millions d'euros avec des prix très agressifs ;

« - une part du marché est captée par les flux nouveaux mixés avec des refinancements de prêts structurés (SFIL, en 2014, a fait 800 millions d'euros de production) ;

« - enfin depuis 2015, l'Agence France Locale 17 ( * ) [...] .

« Le marché estimé à 20 milliards d'euros est devenu un marché de l'offre (plus de 30 milliards d'euros recensés) avec de fortes tensions sur les marges (actuellement on est autour de 0,8 %-0,9 %) ».

Dans ce contexte, LBP a abaissé son seuil d'octroi de crédit de 100 000 à 50 000 euros afin d'élargir son périmètre de clients et elle a travaillé avec la SFIL en vue de proposer une gamme de produits plus complète.

Néanmoins, l'environnement économique ainsi que les élections municipales en 2014 (fin du cycle électoral) ont continué de peser négativement sur l'activité de l'ensemble LBP/SFIL. Lors de la réunion du conseil d'administration du 27 août 2014, Rémy Weber, président du directoire de La Banque postale s'alarmait à nouveau de la concurrence, qui pèse à la fois sur les volumes et sur les marges 18 ( * ) , et qui s'inscrit dans un contexte de demande baissière de la part du secteur public local résultant de plusieurs facteurs (« élections municipales (...) , un plan de restriction budgétaire sans précédent (...) , la réforme territoriale en cours avec un impact sur les plans d'investissements des départements et régions dans l'attente d'une clarification du calendrier et des attributions de compétences »). Il indiquait notamment que « le taux de couverture des appels d'offre atteint jusqu'à 300 % ».

Or, la SFIL ne peut dégager de résultat que si l'activité de commercialisation - de « production » - atteint un certain volume anticipé dans son budget annuel, compte tenu d'un taux de marge prévisionnel. En 2014, la production du mois de décembre a permis à LBP de tenir l'objectif prévu en début d'année d'environ 3 milliards d'euros de prêts. Début 2015, LBP estimait que le marché du financement du secteur public local s'élevait à environ 18 milliards d'euros dont 13 milliards d'euros sur lesquels elle peut intervenir, le reste étant financé par des émissions obligataires, les banques institutionnelles (BEI, CDC) ou encore par la SFIL. Une part de marché de 25 % sur ce marché de 13 milliards d'euros représente donc une production d'environ 3 à 3,5 milliards d'euros par an.

Au 9 octobre 2015, la production LBP s'élève à 2,4 milliards d'euros, en avance par rapport à la production en 2014 à la même date, ce qui permet de penser que le montant de production en 2015 sera supérieur à celui de l'année précédente (3,3 milliards d'euros). La SFIL considère que cette évolution favorable confirme le fait que les facteurs qui expliquent la faible appétence des banques commerciales généralistes pour le financement du secteur public local ont une nature largement structurelle et ne se sont pas atténués depuis deux ans.

Cependant, le plan d'affaires présenté à la Commission européenne et approuvé par cette dernière reposait plutôt sur une hypothèse de production de l'ordre de 5 milliards d'euros avec un niveau de marge supérieur.


* 17 En mars 2015, l'Agence France Local a réalisé une émission obligataire de 750 millions d'euros à sept ans avec un spread de 22 points de base par rapport à l'OAT. Elle vise, à terme, la couverture d'un besoin de financement de l'ordre de 4 à 5 milliards d'euros.

* 18 D'après l'observatoire Finance Active de la dette des collectivités territoriales 2015, les marges bancaires se seraient contractées de 23 % entre 2013 et 2014.

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