Rapport d'information n° 668 (2015-2016) de Mme Catherine GÉNISSON et M. Gérard ROCHE , fait au nom de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale et de la commission des affaires sociales, déposé le 8 juin 2016

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N° 668

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2015-2016

Enregistré à la Présidence du Sénat le 8 juin 2016

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (1) et de la commission des affaires sociales (2) sur l' avenir du Fonds de solidarité vieillesse ,

Par Mme Catherine GÉNISSON et M. Gérard ROCHE,

Sénateurs.

(1) Cette mission est composée de : M. Jean-Noël Cardoux, Président ; MM. Jérôme Durain, Jean-Marie Vanlerenberghe, Vice - Présidents ; Mme Annie David, M. Gilbert Barbier, Mme Aline Archimbaud, Secrétaires ; Mmes Agnès Canayer, Caroline Cayeux, MM. Yves Daudigny, Gérard Dériot, Mmes Catherine Deroche, Anne Emery-Dumas, Catherine Génisson, MM. Jean-Pierre Godefroy, Alain Milon, Philippe Mouiller, Gérard Roche, René-Paul Savary.

(2) Cette commission est composée de : M. Alain Milon , président ; M. Jean-Marie Vanlerenberghe , rapporteur général ; M. Gérard Dériot, Mmes Colette Giudicelli, Caroline Cayeux, M. Yves Daudigny, Mme Catherine Génisson, MM. Jean-Pierre Godefroy, Gérard Roche, Mme Laurence Cohen, M. Gilbert Barbier, Mme Aline Archimbaud , vice-présidents ; Mme Agnès Canayer, M. René-Paul Savary, Mme Michelle Meunier, M. Jean-Louis Tourenne, Mme Élisabeth Doineau , secrétaires ; M. Michel Amiel, Mme Nicole Bricq, MM. Olivier Cadic, Jean-Pierre Caffet, Mme Claire-Lise Campion, MM. Jean-Noël Cardoux, Daniel Chasseing, Olivier Cigolotti, Mmes Karine Claireaux, Annie David, Isabelle Debré, Catherine Deroche, M. Jean Desessard, Mme Chantal Deseyne, M. Jérôme Durain, Mmes Anne Emery-Dumas, Corinne Féret, MM. Michel Forissier, François Fortassin, Jean-Marc Gabouty, Mme Françoise Gatel, M. Bruno Gilles, Mmes Pascale Gruny, Corinne Imbert, MM. Éric Jeansannetas, Georges Labazée, Jean-Baptiste Lemoyne, Mmes Hermeline Malherbe, Brigitte Micouleau, Patricia Morhet-Richaud, MM. Jean-Marie Morisset, Philippe Mouiller, Louis Pinton, Mmes Catherine Procaccia, Stéphanie Riocreux, M. Didier Robert, Mme Patricia Schillinger, MM. Michel Vergoz, Dominique Watrin, Mme Evelyne Yonnet .

LES OBSERVATIONS DES RAPPORTEURS

Les observations des rapporteurs

Créé lors de la réforme des retraites de 1993 , le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) est un établissement public administratif qui demeure mal connu , alors même qu'il est évoqué à chaque présentation des comptes de la sécurité sociale.

Chargé d' incarner la distinction entre les dépenses contributives relevant des régimes de retraite et les dépenses de solidarité nationale qui sont de la responsabilité de l'État, le FSV avait initialement pour mission de financer deux dispositifs : le minimum vieillesse et les cotisations retraite pour les périodes de chômage (périodes assimilées) des personnes indemnisées .

Les élargissements successifs de sa mission de financement , notamment à des dispositifs ne relevant pas strictement du champ de la solidarité nationale comme avec le minimum contributif (Mico) en 2011, ont contribué à fortement brouiller sa mission . Ils se sont accompagnés d'un creusement de son déficit qui, particulièrement marqué depuis la crise de 2009, s'établit en 2016 à 3,9 milliards d'euros .

Ce déficit est particulièrement préoccupant puisqu'il représente désormais près de la moitié du déficit de la sécurité sociale (9,1 milliards d'euros) et que, dans le même temps, les régimes de base de l'assurance vieillesse renouent avec l'équilibre , pour la première fois depuis 11 ans.

L'analyse des dépenses du FSV montre cependant que ce retour à l'équilibre n'est que théorique : la nature forfaitaire des dépenses du FSV pour la prise en charge de cotisations des périodes assimilées (qui représentent 12,5 milliards sur les 20 milliards d'euros de dépenses du fonds) fait que ces financements ne correspondent pas à la dépense réelle des régimes, les trimestres validés pouvant au moment de la liquidation de la retraite de son bénéficiaire se révéler inutiles. Dès lors, les résultats de la branche vieillesse et du FSV sont intrinsèquement liés rendant illusoire la satisfaction d'un retour à l'équilibre de la première alors que le déficit du second demeure élevé.

Au regard de ces constats de persistance du déficit du FSV, de perte de lisibilité de sa mission et de confusion qu'il créé actuellement dans le financement de la branche vieillesse, votre commission formule deux propositions fortes .

Elle préconise tout d'abord de recentrer le FSV sur sa mission de financement des seules dépenses au coeur du système de solidarité nationale, à savoir le minimum vieillesse et les cotisations pour les périodes assimilées. Cette proposition implique de rebasculer le financement de l'intégralité du Mico vers les régimes de base, ce qui, à recettes constantes pour le FSV, conduit à le remettre à l'équilibre . Elle rend la situation des régimes moins satisfaisante avec le retour d'un déficit de l'ordre de 2,1 milliards d'euros , mais correspond davantage à la réalité

Elle propose ensuite d'intégrer les résultats financiers du FSV dans les tableaux d'équilibre du régime général, d'une part, et des régimes de base, d'autre part, au sein des lois de financement de la sécurité sociale, afin de permettre au Parlement de délibérer sur les résultats consolidés de la sécurité sociale et non plus sur un résultat « hors FSV » qui n'a aucune pertinence .

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) est un établissement public administratif créé par la loi n° 93-936 du 22 juillet 1993 relative aux pensions de retraite et à la sauvegarde de la protection sociale. Placé sous la double tutelle des ministères chargés de la sécurité sociale et du budget, il est chargé d'assurer le financement, auprès des régimes d'assurance vieillesse, d'un certain nombre de dispositifs de solidarité au moyen de recettes de nature fiscale.

En 2016, son budget s'élève à plus de 20 milliards d'euros et affiche un déficit prévisionnel de 3,9 milliards d'euros 1 ( * ) .

La création de ce fonds, en 1993, a marqué une étape dans les relations entre l'État et les gestionnaires des régimes sociaux concernant le financement de la sécurité sociale. La prise en charge des dépenses dites de solidarité constituait en effet un débat depuis les années 1970 en raison des préoccupations suscitées par la dégradation de la situation économique sur l'équilibre à moyen et long terme des régimes de retraite. Les partenaires sociaux considéraient que les dépenses de solidarité constituaient des « charges indues » pour les régimes de base et en premier lieu pour le régime général, qui reposait depuis 1945 sur une logique d'assurance. La distinction entre les dépenses contributives et les dépenses de solidarité était alors perçue comme une clarification de la responsabilité des différents acteurs et une diversification des financements : aux partenaires sociaux la responsabilité de gérer les régimes finançant les dépenses contributives au moyen des cotisations sociales ; à l'État, celle de financer les dispositifs de solidarité avec des ressources fiscales.

Cette proposition se retrouve formulée dès 1987 par la commission d'évaluation et de sauvegarde de l'assurance vieillesse. En 1991, le Livre blanc sur les retraites évoque la dissociation entre le contributif et le non contributif comme l'une des réformes susceptibles de « transformer en profondeur l'organisation du système actuel des retraites » . La première tentative de mise en oeuvre de cette distinction revient au gouvernement de Pierre Bérégovoy avec le projet de loi sur les pensions et la sauvegarde de la protection sociale porté, à la fin de l'année 1992, par René Teulade. Ce projet de loi, finalement abandonné, visait à créer un fonds de solidarité au périmètre et aux ressources toutefois différents de ce qui serait créé quelques mois plus tard.

C'est en effet à l'occasion de la première grande réforme des retraites, menée par le gouvernement d'Édouard Balladur, que la distinction entre les domaines contributif et non contributif va finalement être mise en oeuvre. Elle est vue comme une concession faite aux partenaires sociaux, alors que le projet de loi augmente, d'une part, la durée de cotisation requise pour l'obtention d'une retraite à taux plein et allonge, d'autre part, la période de référence prise en compte pour le calcul du salaire annuel moyen (passage des 10 aux 25 meilleures années). Le FSV est alors chargé de financer un nombre limité de dispositifs de solidarité au moyen de 1,3 point de contribution sociale généralisée (CSG) qui lui est affecté. Ce nouvel impôt, créé deux ans auparavant, a l'avantage d'être dynamique et d'assurer un financement suffisant et pérenne pour les dépenses de solidarité choisies pour relever du FSV. La création de ce dernier permettait également de remettre à l'équilibre les régimes de retraite de base.

Dans son rapport établi pour la discussion parlementaire du projet de loi de 1993, notre collègue Alain Vasselle résume le triple objectif assigné au FSV : il « vise à répondre à un problème de nature structurelle qui est celui de la nécessité de clarifier le domaine du non contributif par rapport au contributif afin d'engager les réformes évoquées (...) : financement distinct, remise en ordre des avantages redistributifs, responsabilisation des partenaires sociaux à l'égard de l'évolution des dépenses d'assurance vieillesse » 2 ( * ) .

Plus de vingt ans après, le bilan du FSV apparaît contrasté. Alors que pour la première fois depuis 11 ans, les régimes de base de l'assurance vieillesse affichent en 2016 un excédent de près de 900 millions d'euros, le FSV conserve un déficit très élevé, particulièrement marqué depuis la crise de 2009. Très sensible à la conjoncture économique, le FSV a en effet pour première dépense la prise en charge des cotisations retraite au titre des périodes de chômage (11 milliards d'euros en 2016).

De même, les ressources du FSV sont frappées, depuis 2001, par une très forte instabilité et se sont révélées insuffisantes pour couvrir la progression des charges. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 a apporté une nouvelle illustration de cette instabilité en modifiant pas moins de 12 milliards d'euros dans les transferts de recettes affectées au FSV à la suite de l'arrêt de Ruyter de la Cour de justice de l'Union européenne 3 ( * ) .

Par ailleurs, les élargissements successifs des missions du FSV, en particulier à des dispositifs ne relevant pas exclusivement du champ de la solidarité nationale comme avec le financement d'une part du « minimum contributif » depuis 2011, ont entraîné une perte de lisibilité de son objet initial.

La création du FSV n'a pas non plus entraîné de remise en ordre des avantages redistributifs, dont le nombre demeure élevé et les financeurs multiples. Il est encore aujourd'hui difficile d'avoir une vision claire et exhaustive du coût global de la solidarité dans le système des retraites.

Enfin, la gouvernance du fonds connaît actuellement une situation de blocage. Alors que son conseil d'administration et son comité de surveillance ne se sont plus réunis depuis 2013, la publication du décret du 7 octobre 2015 4 ( * ) , visant à intégrer administrativement le fonds au sein de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav) suscite d'importantes réserves de la part des partenaires sociaux.

Ces différents constats ont conduit la Mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) du Sénat à lancer un état des lieux sur le FSV. A l'heure de rendre leurs conclusions et malgré un bilan en demi-teinte qu'ils ont cherché à objectiver, vos rapporteurs demeurent convaincus de la pertinence de la logique d'un FSV recentré sur un nombre restreint de dispositifs de solidarité et financé par des ressources suffisantes et stables.

Si le système de retraites réduit les inégalités entre les personnes pensionnées, l'existence du FSV permet d'en assurer un meilleur contrôle démocratique. Vos rapporteurs formuleront une série de propositions visant à la fois à rendre plus transparente la compréhension du financement des dispositifs de solidarité mais aussi à donner une image plus objective de la situation financière de la branche vieillesse .

Très attachés à la préservation des dispositifs de solidarité que le FSV finance, vos rapporteurs souhaitent que cette clarification permette de relégitimer un instrument qui, bien que technique, n'en incarne pas moins la dimension de solidarité permettant au système de retraite de demeurer socialement juste, équitable et universel.

Exposé général

EXPOSÉ GÉNÉRAL

PREMIÈRE PARTIE - LA MISSION DÉNATURÉE DU FONDS DE SOLIDARITÉ VIEILLESSE

I. UNE PERTE PROGRESSIVE DE LISIBILITÉ, SOURCE DE CONFUSION

A. UNE MISSION DEVENUE ILLISIBLE

1. A l'origine, le FSV finance un nombre restreint de dispositifs de solidarité

La loi du 22 juillet 1993 relative aux pensions de retraite et à la sauvegarde de la protection sociale a confié au Fonds de solidarité vieillesse (FSV) la charge de financer les régimes de retraite de base pour la gestion de cinq dispositifs de solidarité vieillesse .

Ces dispositifs, listés à l'article L. 135-2 du code de la sécurité sociale, sont traditionnellement classés en deux catégories :

- les dispositifs permettant la prise en charge de prestations , sous forme d'allocations supplémentaires versées à un assuré en plus de sa pension ;

- les dispositifs permettant la prise en charge de cotisations : certaines périodes d'inactivité (chômage dès 1993...) ou non cotisées (service national lors de la création du fonds) sont assimilées à des périodes validées, qui comptent dans le calcul du nombre de trimestres requis pour l'ouverture des droits à pension. Les trimestres sont réputés validés mais non cotisés, le FSV assurant auprès des régimes la compensation financière.

Au titre des prises en charge de prestations , le FSV assure en 1993 le financement du minimum vieillesse (MV) 5 ( * ) ainsi que des majorations de pension pour enfant (ME) 6 ( * ) et pour conjoint à charge (MCC) 7 ( * ) .

S'agissant des prises en charge de cotisations , le fonds finance depuis 1993 les périodes assimilées au titre du chômage 8 ( * ) et du service national 9 ( * ) .

Les modalités de calcul des financements assurés par le FSV auprès des régimes diffèrent selon les types de prises en charge :

- pour les prestations , ces prises en charge s'effectuent « au centime d'euros » près en fonction des factures transmises par les régimes de base concernés justifiant des dépenses réelles auprès de leurs bénéficiaires ;

- pour les cotisations , ces prises en charge sont en fait un forfait versé aux régimes dont les modalités de calcul, complexes, sont fixées aux articles R. 135-16-1 et suivants du code de la sécurité sociale. Les dépenses du fonds relatives à la prise en charge des cotisations ont donc un caractère théorique au regard des besoins de financement réels des régimes 10 ( * ) .

Le nombre de dispositifs de solidarité financés par le FSV était donc au départ relativement limité. Le minimum vieillesse et la prise en charge des périodes assimilées au titre du chômage constituent toujours deux des principales dépenses du Fonds ( cf. ci-contre Les charges et produits du FSV en 2016).

Produits 2016

(en millions d'euros)

PA = Périodes assimilées

Charges 2016

(en millions d'euros)

Source : Fonds de solidarité vieillesse

2. Depuis 2001, les élargissements successifs des missions du FSV ont brouillé sa lisibilité

Les missions du fonds vont s'élargir dès 1995 avec deux dispositifs de solidarité à destination des anciens combattants d'Afrique du Nord (AFN) : d'une part, la prise en charge des cotisations au titre des périodes de perception de l'allocation de préparation à la retraite (APR-AFN ) 11 ( * ) , qui était versée jusqu'à ce que le bénéficiaire soit en mesure de percevoir une retraite à taux plein ; d'autre part, la prise en charge du temps de service en Afrique du Nord afin de le déduire de la durée de cotisation obligatoire progressivement augmentée à partir de la réforme de 1993 12 ( * ) . Ce premier élargissement ne semble pas dévoyer l'objet du FSV qui demeure bien le financement des dispositifs de retraite des régimes de base relevant de la solidarité nationale.

Les élargissements successifs, qui interviennent à partir de 2001, vont, pour certains, suivre cette logique de consolidation de l'objet initial du fonds mais, pour d'autres, échapper à la stricte séparation entre le domaine relevant de la solidarité et le domaine relevant d'une logique assurantielle.

a) Les élargissements consolidant les missions initiales du FSV

• Le FSV a tout d'abord accompagné l'élargissement du dispositif du minimum vieillesse . Outre la réforme intervenue en 2007, avec la création de l'allocation de solidarité aux personnes âgées, le bénéfice de cette dernière a été étendu à Mayotte en 2007 et à Saint-Pierre-et-Miquelon en 2016.

• De plus, les catégories de périodes assimilées pour lesquelles le FSV prend en charge les cotisations retraite ont été multipliées. En 2010, les périodes d'arrêt de travail 13 ( * ) pour cause de maladie, de maternité 14 ( * ) , d'accident du travail-maladie professionnelle (AT-MP) ou d'invalidité ont été intégrées à ce dispositif de validation gratuite. De même, des périodes assimilées peuvent être prises en charge pour les périodes de volontariat : civil 15 ( * ) jusqu'en 2012 et désormais civique 16 ( * ) ou associatif 17 ( * ) .

Depuis la dernière réforme des retraites en 2014, les périodes de stage ou de formation peuvent être également validées gratuitement 18 ( * ) .

• En 2010, la loi portant réforme des retraites 19 ( * ) a confié au FSV la mise en réserve de ressources nécessaires au financement de la dérogation d'âge pour l'ouverture du droit à la retraite à un taux plein à 65 ans au lieu de 67 ans permise aux parents de trois enfants et plus ou d'un enfant handicapé et relevant du régime général, de la Mutualité sociale (MSA) et du Régime social des indépendants (RSI). La mesure doit prendre effet à partir de juillet 2016, lorsque les premiers parents concernés, nés en 1951, atteindront 65 ans.

Les réserves ont été constituées depuis 2011 sur la base de 0,5 point de forfait social et de 0,2 point de prélèvement social sur les revenus du capital et ont atteint, à la fin de l'année 2015, un montant de 887 millions d'euros. Le niveau de dépenses estimé pour le financement de cette dérogation s'élèverait à 305 millions d'euros à horizon 2022 et 373 millions d'euros en 2050. L'utilisation de l'excédent de réserves fait actuellement l'objet de discussions. Cette mission s'apparente à la mission initiale confiée au fonds en matière de droits familiaux de retraite (majorations de pension pour enfant et pour conjoints à charge).

• Enfin, il convient d'ajouter à l'élargissement des missions du fonds, le financement de trois mesures ponctuelles qui ont consisté au versement d'une prime exceptionnelle à destination des plus petites retraites. En 2004 20 ( * ) et en 2008 21 ( * ) , une prime, respectivement de 70 euros et de 200 euros , a ainsi été versée principalement aux bénéficiaires du minimum vieillesse. De même en 2014 22 ( * ) , à la suite de la décision du Gouvernement de ne pas revaloriser l'ensemble des retraites au 1 er octobre 2014, une prime de 40 euros a été versée à tous les titulaires d'une pension de base et complémentaire inférieure à 1 200 euros mensuel.

Si la nature de ces primes exceptionnelles peut être considérée comme relevant bien de la solidarité nationale, en particulier celles de 2004 et 2008 visant les bénéficiaires du minimum vieillesse, elles ont toutefois contribué à brouiller la mission du FSV. Chargé d'assurer le financement de ces dispositifs, le fonds n'a pas reçu les recettes supplémentaires destinées à les compenser, aggravant d'autant son déficit.

Évolution des dépenses du FSV

Date d'affectation
de la charge

Charge prévue
à l'origine mais
qui ne relève plus désormais du FSV

Charge non prévue à l'origine et qui
ne relève plus désormais du FSV

Charge prévue
à l'origine
et relevant toujours du FSV

Charge non prévue
à l'origine
et relevant désormais du FSV

1994

Minimum vieillesse
(puis ASPA
à partir de 2007)

Majoration
de pension
pour enfant
(jusqu'en 2011
et sort du compte
en 2016)

Majoration
de pension pour conjoint à charge

PA service national (jusqu'en 2003)

PA chômage

1995

PA APR-AFN
(jusqu'en 2009)

Pension vieillesse
Anciens combattants (jusqu'en 2004)

2001

PA Volontariat civil

(jusqu'en 2012)

Chômage
et pré-retraite
Agirc-Arrco

2004

Prime exceptionnelle
de 70 €

2007

ASPA Mayotte

2008

Prime exceptionnelle
de 200 €

2010

PA arrêt de travail

PA Volontariat civique

2012

Mico (part forfaitaire puis
50% dépense réelle)

2015

PA stage

PA apprentis

PA Volontariat associatif

Prime exceptionnelle
de 40 €

2016

ASPA Saint Pierre-
et-Miquelon

ASPA : Allocation de solidarité pour personnes âgées ; PA : périodes assimilées ; APR-AFN : allocation de préparation à la retraite pour les anciens combattants en Afrique du Nord ; Mico : minimum contributif.

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après FSV

b) Les élargissements plus contestables

• Le premier élargissement problématique, au regard de l'objet initial du FSV, est intervenu en 2001 avec la prise en charge par ce dernier du règlement d'un contentieux ancien entre l'État et les deux principaux régimes de retraite complémentaire, l'Agirc-Arrco 23 ( * ) . En effet, ces régimes attribuaient, depuis 1984, des points de retraite complémentaire pour les périodes de chômage lorsqu'un ancien salarié percevait certaines allocations 24 ( * ) . L'État s'était alors engagé à compenser financièrement l'Agirc-Arrco 25 ( * ) . Si ces régimes avaient bien reporté au compte de leurs assurés les points correspondants, l'État n'avait pas de son côté réglé les factures qui lui avaient été adressées.

Ce n'est qu'en 2000, à la suite de la signature d'une convention entre l'État et l'Agirc-Arrco 26 ( * ) , que ce contentieux a trouvé une issue par un accord sur les modalités de prises en charge des sommes non remboursées depuis 1984 et de celles à venir. En 2000, la dette cumulée s'élevait à un montant de 1,4 milliard d'euros.

Le financement de ce contentieux a été mis à la charge du FSV en 2001 27 ( * ) . Le Sénat s'était d'ailleurs opposé à ce transfert constatant que « ce montage (en sus des difficultés comptables qu'il présente) soulage le budget de l'État mais alourdit les dépenses du FSV » 28 ( * ) . A partir de 2001, le FSV a donc financé chaque année d'une part, l'amortissement de la dette aux deux régimes et ce jusqu'à son extinction en 2005 pour l'Agirc et en 2010 pour l'Arrco, et d'autre part, les cotisations des périodes postérieures à 2001. Les sommes versées chaque année sont depuis lors fixées par arrêté ministériel et s'élèvent en moyenne à 378 millions d'euros par an. Le caractère contestable de cet élargissement réside principalement dans le fait de faire financer par le FSV des régimes complémentaires alors que sa mission initiale ne portait que sur les régimes de base .

• En 2010, la loi portant réforme des retraites a chargé le FSV du financement d'une part du minimum contributif (Mico), ce qui a véritablement contribué à la perte de sa lisibilité. Servi par le régime général, le régime des salariés agricoles, celui des artisans et commerçants ainsi que par le régime des cultes, le Mico est en effet un dispositif hybride au regard de la distinction entre les domaines contributif et non contributif. Les bénéficiaires du Mico se distinguent nettement de ceux du minimum vieillesse en ce qu'ils ont contribué pendant tout ou partie de leur carrière au système de retraites. Dès lors, comme le notait le rapport de juin 2013 du Haut Conseil du financement de la protection sociale, le Mico « paraît davantage relever d'une logique de solidarité «professionnelle» interne à ces régimes (les régimes de base), même si son attribution, désormais soumise à une condition portant sur le montant de la retraite totale, peut en partie interroger » 29 ( * ) .

Le minimum contributif (Mico)

Le Mico (art. L. 351-10 du code de la sécurité sociale) s'adresse aux travailleurs , ressortissants du régime général, du régime des salariés agricoles et du régime social des indépendants 30 ( * ) , ayant cotisé pendant tout ou partie de leur carrière sur la base de revenus modestes .

Il constitue un complément visant à porter la pension du bénéficiaire à un montant plafonné, depuis le 1 er janvier 2016, à 1 135,73 euros . Le montant de la pension calculée sur la base des droits de l'assuré est complété par le versement du Mico pour atteindre ce minimum de pension.

Les conditions pour en bénéficier :

- avoir atteint l'âge légal (60 à 62 ans pour les générations nées entre 1950 et 1973) ou l'âge du taux plein (65 à 67 ans) ;

- avoir effectué une carrière complète (soit de 160 à 170 trimestres validés ).

Les montants maximums versés :

- le Mico de base : 629,62 euros ;

- le Mico majoré : 688 euros (si le retraité justifie d'au moins 120 trimestres cotisés ).

Le Mico de base peut être réduit si le retraité ne totalise pas le nombre de trimestres à valider (160 à 170 en fonction de sa génération).

Quelques chiffres :

Nombre de bénéficiaires : 6 millions de personnes en 2011 dont 4,9 pour le régime général (soit plus du tiers de la population des retraités).

Coût total du dispositif : 7 milliards d'euros (dont 3,5 milliards financés par l'intermédiaire du FSV depuis 2011).

Ce caractère hybride du Mico a justifié la solution intermédiaire retenue en 2010 pour son financement. Fixé par la LFSS pour 2011, le montant forfaitaire financé par le FSV aux régimes s'élève à 3,5 milliards d'euros (3 milliards d'euros pour la Cnav, 400 millions d'euros pour la MSA et 100 millions d'euros pour le RSI), ce qui représente l'équivalent de la moitié du coût du dispositif. La LFSS pour 2012 a porté cette enveloppe globale à 3,9 milliards d'euros, reconduite en 2013, 2014 et 2015. La LFSS pour 2015 31 ( * ) a modifié les conditions de prise en charge du Mico par le FSV : depuis le 1 er janvier 2016, le FSV finance les régimes à hauteur d'une fraction de son coût réel, fixée par décret, qui ne pourra être inférieure à 50 %. Pour 2016, le montant estimé s'élève à 3,5 milliards d'euros.

Le financement du Mico par le FSV demeure controversé comme le montre la décision embarrassée du Gouvernement, prise en LFSS pour 2016, de ne pas l'inclure dans la nouvelle section du compte du fonds rassemblant les dépenses de solidarité, créée à la suite de l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne de Ruyter 32 ( * )

• Enfin, la LFSS pour 2015, afin de donner au Gouvernement un fondement juridique au versement de la prime exceptionnelle de 40 euros, a modifié l'article L. 135-2 du code de la sécurité sociale fixant les missions du FSV, en confiant à ce dernier « le financement d'avantages non contributifs instaurés au bénéfice des retraités de l'ensemble des régimes, lorsque les dispositions les instituant le prévoient » . Cette formulation sibylline autorise en réalité le pouvoir réglementaire à élargir, sans autorisation du Parlement, les missions du FSV.

Le maintien de cette disposition, à l'occasion de la réécriture de l'article L. 135-2 du code la sécurité sociale dans la LFSS pour 2016, a permis à la commission des affaires sociales du Sénat de maintenir son opposition sur l'opportunité d'une telle liberté laissée à l'exécutif : « Comme en 2014, votre commission s'oppose à un élargissement du périmètre du FSV qui ne prenne pas la forme d'une disposition spécifique en loi de financement. Déjà fortement déficitaire, le FSV a dû financer (...) d'un alourdissement de son déficit la prime pour les retraités modestes sur l'exercice 2014 (...). Il ne semble pas opportun que de nouvelles charges puissent être décidées par décret » 33 ( * ) .

A l'issue de leurs travaux, vos rapporteurs ne peuvent que reprendre à leur compte cette position constante de votre commission. Le FSV nécessite aujourd'hui de voir clarifier et de stabiliser ses missions de solidarité nationale.

Le compte du FSV dans sa forme antérieure à la LFSS pour 2016 s'avère donc relativement complexe.

Prévision FSV 2016

(en millions d'euros bruts)

Prévision FSV
actualisée mars 2016

COMPTE FSV

2014

2015

2016

CHARGES

25 500

25 666

20 614

A - Charges de gestion technique

25 499

25 665

20 613

I - Charges techniques

24 967

25 393

20 155

a. Transferts avec les régimes de base

24 675

25 068

19 802

Prises en charge de cotisations

12 960

13 050

13 144

Au titre du service national

28

27

29

Au titre du chômage

11 415

11 112

11 220

Au titre des arrêts de travail (maladie, maternité, AT-MP, invalidité)

1 516

1 586

1 643

Au titre des stagiaires

0

233

233

Au titre des apprentis

0

93

18

Prises en charge de prestations

11 716

12 018

6 658

Au titre du minimum vieillesse (MV)

3 111

3 143

3 129

Au titre des majorations de pensions

4 704

4 744

39

Majoration pour enfants

4 660

4 704

0

Majoration pour conjoint à charge

44

40

39

Minimum contributif

3 900

3 900

3 490

Versement exceptionnel de 40 €

232

b. Transferts avec les régimes complémentaires

292

325

353

Au titre du chômage

292

325

353

II - Diverses charges techniques

242

259

458

ANV, remises/annul/créances sur produits

95

107

3

Frais d'assiette, de recouvrement et de dégrèvement

91

96

399

Autres charges techniques (MV)

56

56

56

III- Dotations aux provisions

290

12

0

IV - Charges financières

0

0

0

B - Charges de gestion courante

1

1

1

C - Charges exceptionnelles

0

0

0

PRODUITS

22 023

21 760

16 642

A - Produits de gestion technique

22 020

21 757

16 639

I - Contributions, impôts et produits affectes

17 300

16 675

16 580

Contributions, impôts et taxes

17 300

16 675

16 580

CSG et autres contributions

12 242

12 062

16 221

CSG

11 048

10 835

9 499

Contributions sociales diverses

1 194

1 227

6 722

Forfait social

1 000

1 003

0

Contrib. s/avantages retraite + préretraite

186

215

200

Prélèvement social s/revenus du patrimoine et placements

0

0

4 091

Prélèvement de solidarité s/revenus du patrimoine et placements

0

0

2 431

Autres cotis/contrib. (Perco)

8

8

0

Impôts et taxes

5 058

4 613

359

C.S.S.S.

1 498

708

0

Contribution additionnelle

1 020

100

0

Redevance fréquences (licence UMTS)

37

37

37

Taxe sur les salaires

2 491

3 752

310

Autres (déshér.)

12

15

12

II - Produits techniques

4 712

4 777

57

Prise en charge CNAF au titre des majorations enfants

4 660

4 704

0

Régularisation PEC cotisations et prestations exercices antérieurs

52

73

57

III - Divers produits techniques

0

0

0

IV- Reprises sur provisions

6

306

0

V - Produits financiers

2

0

2

B - Produits de gestion courante

0

0

0

C - Produits exceptionnels

3

3

3

Résultat net

- 3 477

- 3 906

- 3 971

B. LA PERTE DE LISIBILITÉ DES MISSIONS DU FSV, SOURCE DE CONFUSION DANS LE FINANCEMENT DE LA PROTECTION SOCIALE

1. La distinction entre les domaines contributif et non contributif, censée être incarnée par le FSV dans la branche vieillesse, est difficile à mettre en oeuvre

En théorie, la distinction du « contributif » et du « non contributif » consiste à séparer les dépenses qui sont directement proportionnées à l'effort de cotisation (part dite contributive) des droits acquis sans contrepartie de cotisations ou non proportionnels aux cotisations acquittées (part dite non contributive). Aux avantages présentés par cette distinction en particulier en matière de clarification des relations financières entre l'État et la sécurité sociale s'oppose « la difficulté de procéder concrètement à cette dissociation » , comme le notait dès 1993 le rapport de votre commission sur le projet de loi instituant le FSV 34 ( * ) .

Cette difficulté a été bien documentée par une série de travaux du Conseil d'orientation des retraites (COR) sur les mécanismes de solidarité dans le système des retraites 35 ( * ) , qui ne représentent toutefois qu'une partie de la solidarité nationale à l'égard des personnes âgées 36 ( * ) .

Pour comprendre les seuls mécanismes de solidarité dans le système de retraite, le COR distingue :

- les mécanismes implicites , qui tiennent aux règles propres à chaque régime de liquidation des retraites et qui intègrent une dimension non-contributive ;

- des mécanismes explicites qui correspondent à des prises en charges de cotisation ou au versement de prestations de solidarité retraite (soit le coeur de la mission du FSV).

Parmi les mécanismes implicites , peuvent être cités la validation d'un trimestre dès la 150 e heure payée au SMIC travaillée (soit un peu plus de 4 semaines seulement) ou encore le calcul de la pension sur une base différente du salaire de carrière (25 meilleures années pour le régime général, 6 derniers mois pour les régimes de fonctionnaires).

Ces mécanismes non contributifs implicites sont financés directement par les régimes dans le cadre d'une solidarité « professionnelle » .

En considérant les seuls mécanismes explicites non contributifs, le COR constate que le FSV est loin de les financer intégralement. Relativement complexes et nombreux, ces dispositifs peuvent être classés en cinq catégories 37 ( * ) : les minimas de pension et de revenus ; la prise en compte des périodes d'inactivité professionnelle ; les départs anticipés ; les droits familiaux de retraite (qui recoupent pour une partie la prise en compte des périodes d'inactivité professionnelle) ; enfin les pensions de réversion.

Pour ces cinq catégories, le FSV peut ou non intervenir :

- s'agissant des minima de pension et de revenus : si le FSV finance intégralement le minimum vieillesse et depuis 2011 une fraction du Mico pour le régime général, le régime des salariés agricoles et le régime social des indépendants, il n'intervient pas dans le financement du minimum garanti (Miga), pension minimale au sein du régime de la fonction publique, ni dans celui de la pension minimale de référence (PMR) au sein du régime des exploitants agricoles. Ces deux minima de pension sont financés directement par ces régimes 38 ( * ) ;

- s'agissant de la prise en compte des périodes d'inactivité professionnelle (hors droits familiaux de retraite) : c'est la catégorie au sein de laquelle le FSV intervient le plus largement en prenant en charge les cotisations retraite au titre des périodes assimilées dans des conditions qui n'ont cessé de s'élargir depuis sa création. Le maintien de salaire au sein de la fonction publique explique que les régimes de fonctionnaires ne sont pas concernés par le financement du FSV. Dans les régimes complémentaires, certaines périodes d'inactivité peuvent donner lieu à l'attribution de points sur la base des rémunérations antérieures, le FSV finançant uniquement les points acquis en période de chômage ou de pré-retraite ;

- s'agissant des départs anticipés pour les carrières longues ou pour certaines personnes dans des situations particulières : créé par la loi de 2003 sur les retraites 39 ( * ) , le dispositif de départ anticipé pour les personnes ayant effectué des carrières longues a été étendu en 2012 40 ( * ) aux personnes âgées de 60 ans et justifiant d'un début de carrière avant 20 ans. L'élargissement du dispositif a contribué au départ à la retraite de 157 000 personnes supplémentaires en 2014, soit un quart environ des départs enregistrés. Cette mesure de solidarité, au coût estimé à 2 milliards d'euros en 2014 pour les régimes de base 41 ( * ) , est supportée intégralement par ces derniers. Cette remarque vaut également pour les dispositifs visant les personnes handicapées, celles en situation d'inaptitude, d'invalidité ou encore exposées à l'amiante ;

- s'agissant des droits familiaux de retraite : parmi les quatre dispositifs principaux (12 milliards d'euros), le FSV n'en finance plus qu'un seul au coût marginal (38 millions d'euros). La Caisse nationale d'allocations familiales (Cnaf) a en effet repris le financement de la majoration de pension pour enfant (4,7 milliards d'euros en 2015) après que le FSV l'a assuré entre 1993 et 2011 42 ( * ) . Elle finance également l'allocation vieillesse pour parent au foyer 43 ( * ) (4,5 milliards d'euros en 2013). De leur côté, les régimes de retraite de base prennent en charge directement les majorations de durée d'assurance accordées pour chaque enfant à raison de 4 trimestres pour l'accouchement et 4 autres pour l'éducation (soit 4 milliards d'euros en 2013) 44 ( * ) . Au titre des droits familiaux de retraite, le FSV ne finance donc plus désormais que la majoration pour conjoint à charge. Vos rapporteurs s'étonnent d'ailleurs que le financement de cette majoration n'ait pas été transféré à la Cnaf en même temps que celui de la majoration pour enfant, ce qui aurait permis de clarifier les sources de financement ;

- s'agissant enfin des pensions de réversion : ces pensions représentent une partie de la retraite dont bénéficiait ou aurait pu bénéficier l'assuré décédé qui est reversée sous certaines conditions à son conjoint ou ses ex-conjoints survivants. Versées en 2010 à plus de 4,2 millions de personnes pour un montant de 30 milliards d'euros tous régimes confondus, elles participent d'une forte réduction des inégalités entre hommes et femmes et constitue donc bien un instrument de solidarité au sein du système de retraites, pour lequel le FSV n'est pas concerné.

S'il occupe une place importante dans le financement des dispositifs de solidarité explicites, le FSV n'en a donc pas le monopole.

2. Dans ce contexte, la lecture des résultats financiers du FSV est difficile à appréhender
a) Des résultats financiers théoriques

Le FSV ne finançant qu'une partie des dépenses de solidarité de la branche vieillesse, son résultat financier ne donne pas d'indication précise sur le coût global de cette solidarité.

De plus, les résultats financiers du fonds s'avèrent pour une part essentielle théoriques. La principale composante des dépenses du FSV réside en effet dans la prise en charge des cotisations au titre des périodes assimilées, au premier rang desquelles les périodes de chômage. Elles s'élèvent en 2015 à plus de 13 milliards d'euros sur les 20 milliards d'euros de charges du fonds. Or, les modalités de calcul de ces prises en charge ne s'appuient pas sur la dépense réelle des régimes, comme c'est le cas pour les prestations financées par le FSV, mais sur une base forfaitaire (voir encadré).

D'une manière générale, ces règles prennent pour base le calcul d'une assiette forfaitaire, qui comprend le Smic horaire auquel est appliqué un taux de réfaction (souligné pour chaque type de prise en charge dans l'encadré), fixé par décret, dépendant du type de période assimilée. Cette assiette est ensuite multipliée par un nombre d'heures de travail théorique, annuelle ou quotidienne en fonction de l'unité de calcul retenue (une période, un nombre de personnes concernées par une situation ou par une prestation), le tout soumis au taux de cotisation d'assurance vieillesse en cours.

Ces règles très complexes révèlent en fait l'impossibilité d'évaluer précisément le montant des charges induites par la prise en charge des périodes assimilées. Comme l'explique le rapport d'activité du FSV pour 2014 : « La charge effective que représentent ces validations gratuites n'apparaissent pas directement dans les comptes des régimes au moment de leur report au compte, elle ne peut être constatée qu'a posteriori, au moment de la liquidation des droits. Aussi, face à cette impossibilité de déterminer avec précision le coût annuel de ces validations pour les régimes, il a été décidé de fixer la contribution du FSV de manière forfaitaire, (...) sur la base d'une assiette de référence calculée par rapport à une fraction du Smic horaire » .

Les règles de calcul, en 2016, des prises en charge de cotisations
par le FSV pour les « périodes assimilées »

- ... au titre du chômage 45 ( * )

Assiette annuelle forfaitaire [ 90% Smic x 1820h (durée annuelle du travail sur la base de 35 heures hebdomadaires) x taux de cotisation d'assurance vieillesse de base (en 2016 : 17,65%)]

X

Nombre de chômeurs selon le FSV [ nombre de chômeurs indemnisés ( communiqué par Pôle emploi et calculé en moyenne annuelle des effectifs en fin de mois) + 29 % du nombre de chômeurs non indemnisés]

- ... au titre du service national (puis services civil, civique et associatif)

Moyenne annuelle des effectifs mensuels x [ 90 % Smic
x 1 820 h x taux de cotisation retraite]

- ... au titre d'un arrêt de travail

*pour maladie : nombre d'indemnités journalières (IJ) x [taux de cotisation x 18 % Smic horaire x 7 h (durée quotidienne théorique de travail)] ;

*pour maternité : nombre d'IJ x [taux de cotisation x 11 % Smic horaire x 7 h]

*pour invalidité : nombre d'assurés concernés par une pension sur une année x [ 33% Smic horaire x 1820h (durée annuelle théorique de travail) x taux de cotisation]

*pour accident du travail - maladie professionnelle :

- si courte durée (IJ) : nombre d'IJ x [ 32 % Smic horaire x 7 h
x taux de cotisation]

- si longue durée (rente) : nombre d'assurés concernés x [ 22 % Smic horaire
x 1 820 h x taux de cotisation]

- ... au titre d'un stage

81 % des effectifs x [ 90 % Smic x 1 820 h x taux de cotisation]

- ... au titre d'un apprentissage

Nombre de trimestres x [taux de cotisation x 50 % plafond de sécurité sociale]

Les taux de réfaction, établis par la direction de la sécurité sociale sur la base des données statistiques disponibles transmises par les régimes et du coût estimé de ces prises en charge, permettent de prendre en compte plusieurs facteurs :

- la validation de quatre trimestres maximum d'assurance vieillesse par an : les périodes d'activité même inférieures à un an peuvent être suffisantes pour valider quatre trimestres et donc les périodes assimilées restent subsidiaires et ne sont pas prises en compte en totalité 46 ( * ) ;

- certaines périodes d'interruption d'activité sont trop courtes pour permettre de valider des droits et sont donc exclues des remboursements du fonds ;

Ces règles représentent « une cote mal taillée », de l'aveu même de toutes les personnes auditionnées par vos rapporteurs et rendent théoriques les résultats financiers du FSV et par conséquent ceux de la branche vieillesse.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 fait ainsi apparaître les régimes de base avec un excédent de 900 millions d'euros, alors même que le déficit du FSV s'élève à 3,7 milliards d'euros 47 ( * ) . Au regard des limites observées quant aux modalités de calcul des dépenses du FSV, ce retour à l'équilibre des régimes de base apparaît lui aussi comme théorique. Il semble plus juste de considérer, pour l'année 2016, que la branche vieillesse demeure avec un besoin de financement de 2,9 milliards d'euros plutôt que de déplorer le déficit persistant du FSV.

D'autant que le fonds joue véritablement un rôle de stabilisateur automatique des régimes de base, et en premier lieu de la Cnav, face aux variations de la conjoncture économique. Lorsque celle-ci se dégrade et que le chômage monte, la baisse des cotisations subie par les régimes est compensée en partie par la hausse du financement du FSV au titre du chômage. Dès lors, les résultats des régimes de base et du FSV sont bien intrinsèquement liés.

b) Une présentation séparée des comptes du FSV au sein des LFSS qui fait débat

La présentation distincte des comptes du FSV au sein des lois de financement fait débat. Elle résulte des dispositions organiques du code de la sécurité sociale, en particulier l'article L.O. 111-3 qui détermine le domaine des lois de financement de la sécurité sociale.

Extrait de la loi n° 2015-296 du 22 décembre 2015
de financement de la sécurité sociale pour 2016

Article 39

Pour l'année 2016, sont approuvés les prévisions de recettes, réparties par catégorie dans l'état figurant en annexe C à la présente loi, et le tableau d'équilibre, par branche, de l'ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

(en milliards d'euros)

Prévisions
de recettes

Objectifs
de dépenses

Solde

Maladie

194,9

201,1

- 6,2

Vieillesse

228,7

227,8

0,9

Famille

48,8

49,6

- 0,8

Accidents du travail
et maladies professionnelles

14,0

13,4

0,6

Toutes branches
(hors transferts entre branches)

472,8

478,3

- 5,6

Article 40

Pour l'année 2016, sont approuvés les prévisions de recettes, réparties par catégorie dans l'état figurant en annexe C à la présente loi, et le tableau d'équilibre, par branche, du régime général :

(en milliards d'euros)

Prévisions
de recettes

Objectifs
de dépenses

Solde

Maladie

171,7

177,9

- 6,2

Vieillesse

123,6

123,1

0,5

Famille

48,8

49,6

- 0,8

Accidents du travail
et maladies professionnelles

12,5

12,0

0,5

Toutes branches
(hors transferts entre branches)

344,0

350,0

- 6,0

Article 41

I. - Pour l'année 2016, sont approuvés les prévisions de recettes, réparties par catégorie dans l'état figurant en annexe C à la présente loi, et le tableau d'équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

(en milliards d'euros)

Prévisions
de recettes

Prévisions
de dépenses

Solde

Fonds de solidarité vieillesse

16,4

20,1

- 3,7

Ces dernières doivent en effet approuver, pour le dernier exercice budgétaire clos, l'année en cours et celle à venir, « les tableaux d'équilibre par branche (...) des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, du régime général et des organismes concourant au financement de ces régimes » .

Le FSV est désormais le seul organisme concourant au financement des régimes de base, défini comme tel au sein des lois de financement. Il découle des dispositions organiques que les LFSS présentent, pour chacun des trois exercices budgétaires qu'elles couvrent, trois tableaux d'équilibre distincts (voir encadré).

Or, si les chiffres présentés dans le tableau d'équilibre des branches du régime général sont agrégés à ceux figurant dans le tableau d'équilibre des régimes de base, les comptes du FSV demeurent présentés séparément sans jamais être agrégés aux chiffres de la branche vieillesse des régimes de base ni à ceux des comptes de la sécurité sociale.

Cette présentation a l'avantage de permettre un meilleur contrôle parlementaire sur les comptes du FSV, qui font l'objet d'une délibération et d'un vote chaque année. Parmi les fonds chargés de financer certaines dépenses de solidarité au sein des autres branches de la sécurité sociale et fonctionnant sur le modèle du FSV, ce dernier fait ainsi figure d'exception. Le fonds Couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C), par exemple, finance une dépense de solidarité nationale (la couverture maladie universelle complémentaire) auprès des organismes de base ou complémentaire chargés de la verser aux bénéficiaires, tout en étant financé par des recettes de nature fiscale. Ses comptes font l'objet d'une présentation spécifique au sein d'une annexe de la LFSS mais sont intégrés directement dans les comptes de la branche maladie. Par conséquent, le Parlement n'approuve pas directement les prévisions de recettes ou de dépenses du fonds CMU-C comme pour le FSV.

A l'inverse, cette présentation distincte est problématique quant à la vision d'ensemble des comptes de la sécurité sociale. Ces derniers sont en effet constamment présentés en deux temps : « régimes de base hors FSV » puis « régimes de base + FSV » . La presse, se faisant l'écho de l'évolution du déficit de la sécurité sociale, reprend constamment cette distinction en titrant bien souvent sur le seul déficit des régimes de base 48 ( * ) .

Cette présentation fait d'ailleurs l'objet d'une critique récurrente de la Cour des comptes dans son « avis sur la cohérence des tableaux d'équilibre par branche » rendu chaque année dans le cadre du contrôle de l'application des lois de financement de la sécurité sociale (voir encadré).

Vos rapporteurs demeurent très attachés à ce que les comptes du FSV soient présentés de façon séparée par rapport aux comptes de la branche vieillesse. Le contrôle parlementaire permis par cette distinction leur apparaît essentiel au regard de la nature des dispositifs concernés, qui constituent la clé de voûte de la solidarité nationale dans le domaine des retraites, et des montants engagés.

Ils souscrivent cependant à la préconisation de la Cour de modifier le contenu des tableaux d'équilibre visant à faire apparaître les résultats du FSV avec ceux des régimes de base de la sécurité sociale afin de ne plus pouvoir présenter un déficit de la sécurité sociale « hors FSV ».

Extrait du rapport sur l'application
des lois de financement de la sécurité sociale
,
Cour des comptes, septembre 2015, pp. 71, 72 et 73

« Comme les exercices précédents, la présentation distincte du solde du fonds de solidarité vieillesse de ceux des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et, en leur sein, de celui du régime général, procure une information partielle sur le déficit des régimes de sécurité sociale » (...)

« L'isolement du FSV dans un tableau d'équilibre distinct nuit à la lisibilité de l'information procurée sur les résultats du régime général et de l'ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale.

« En effet, l'essentiel des ressources (9/10 e ) du FSV bénéfice à la branche vieillesse du régime général, ce qui a pour effet de réduire, toutes choses égales par ailleurs, son déficit. Pour autant, les ressources affectées au fonds (...) ne couvrent pas la totalité de ses concours aux régimes de sécurité sociale (...), ce qui conduit à placer le fonds en déficit.

« L'absence de rattachement du FSV au tableau d'équilibre du régime général de sécurité sociale à proportion des prises en charge de cotisations et de prestations dont le FSV le fait bénéficier conduit à minorer le niveau du déficit général (à hauteur de - 3,2 milliards d'euros pour 2014) par rapport à la réalité des ressources dont la branche vieillesse du régime général a réellement disposé au titre de ce même exercice.

« Le déficit de l'ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale (- 9,3 milliards d'euros est également minoré à hauteur de la totalité de celui du FSV (- 3,5 milliards d'euros).

« Afin de faire apparaître le déficit véritable de l'ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et, en leur sein, celui du régime général, la Cour recommande :

« - de supprimer le tableau d'équilibre relatif à la catégorie des «organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale» ;

- d'intégrer une rubrique «FSV» distincte, d'une part dans le tableau d'équilibre de l'ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, d'autre part dans celui du régime général de sécurité sociale.

« Tout en continuant à assurer une information propre aux produits, aux charges et au résultats du fonds de solidarité vieillesse, une présentation de cette nature permettrait de fournir une information plus pertinente sur ceux de l'ensemble des régimes et du régimes général de sécurité sociale ».

Dans le PLFSS pour 2016, l'annexe 4 a toutefois été enrichie afin de présenter les comptes consolidés du régime général et du FSV , ainsi que l'ensemble des régimes obligatoires de base (ROBSS) et du FSV . Le tableau présentant les comptes des ROBSS+FSV est reproduit ci-dessous.

Source : PLFSS pour 2016, annexe 4, p. 13

Cette présentation, si elle constitue un premier pas, n'est toutefois pas satisfaisante puisque les comptes de la branche vieillesse ne sont jamais agrégés avec ceux du FSV. Elle permet toutefois de bien faire apparaître le déficit consolidé de la sécurité sociale de 12,8 milliards d'euros en 2016, comprenant les transferts entre régimes de base.

Vos rapporteurs proposent donc d'aller plus loin et de permettre un vote sur cet équilibre consolidé.

II. UN DÉFICIT PERSISTANT, DES RESSOURCES INSUFFISANTES ET INSTABLES

A. UN FINANCEMENT INSUFFISANT, UN ENDETTEMENT QUI N'EST DÉSORMAIS PLUS PRIS EN CHARGE

1. L'explosion du déficit depuis 2009 s'explique principalement par la prise en charge des cotisations pour les périodes assimilées au titre du « chômage »

Trois périodes peuvent être distinguées pour suivre l'évolution du compte du FSV depuis sa création au 1 er janvier 1994 (voir graphiques).

• Entre 1994 et 2000 , le fonds est en situation d'équilibre voire en léger excédent. Les recettes affectées, principalement 1,3 point de CSG, suffisent à financer les charges pour un budget avoisinant 10 milliards d'euros par an. En 2000, les réserves financières du FSV s'élèvent à 1,6 milliard d'euros.

• L'année 2001 marque un premier tournant avec l'apparition d'un déficit de 86 millions d'euros, consécutif à la diminution des recettes liée à la baisse de 0,15 point du taux de CSG affecté au fonds. Entre 2001 et 2006 , le déficit du FSV se creuse mais reste contenu en dessous de 2 milliards d'euros. Le fonds renoue même avec les excédents en 2007 et 2008.

• La crise économique de 2008-2009 va contribuer à durablement dégrader le résultat du fonds avec l'envolée du nombre de chômeurs. En 2011, le FSV se voit également attribuer le financement d'une fraction du Mico entraînant une dépense supplémentaire de 3,5 milliards d'euros. Un panier de huit recettes nouvelles (voir tableau p. 38) est affecté au FSV mais ne suffit pas à compenser la progression de la dépense liée au chômage, ni le financement du Mico.

Le déficit du FSV se creuse durablement et avoisine désormais les 4 milliards d'euros par an (3,9 milliards en 2015 et 2016).

Comptes du FSV 1994-2019

solde prévisionnel

Solde du FSV 1994-2014 et prévisions 2015-2019

La dépense liée au chômage est la principale raison de la progression des dépenses du FSV mais elle ne s'explique pas uniquement par l'envolée du nombre de demandeurs d'emploi. La comparaison de ces deux données, illustrée par le graphique ci-dessous, montre en effet une sur-réaction de la dépense liée au chômage par rapport au nombre de chômeurs.

Évolutions comparées du nombre de chComptes 1994-2019

ômeurs pris en charge par le FSV
et du montant des dépenses chômage (régimes de base)

D'après la règle de calcul 49 ( * ) permettant de déterminer le montant versé par le FSV au régime général et au régime des salariés agricoles, seuls régimes de base concernés par ce dispositif, deux facteurs distincts apparaissent pour expliquer l'évolution de cette dépense.

Il y a, d'une part, un effet volume lié principalement à la progression du nombre de chômeurs du fait de la conjoncture économique. De façon moins marquée, la modification de certains paramètres dans la détermination du nombre de chômeurs « au sens du FSV » contribue également à augmenter la dépense.

Ainsi, la part des chômeurs non indemnisés prise en compte est passée de 23,5 % en 1994, à 25,5 % en 1998 puis à 29 % en 1999. De même, la liste des allocations retenues pour établir les effectifs de chômeurs indemnisés a évolué. Elle est fixée à l'article L. 135-2 du code de la sécurité sociale et vise aujourd'hui 14 types d'allocations chômage 50 ( * ) .

D'autre part, un effet prix joue également dans la détermination du montant de la dépense et relativise l'impact qu'aurait sur cette dernière une baisse éventuelle du nombre de chômeurs. Cet effet concerne la progression du coût individuel du chômeur (ou assiette forfaitaire) pris en charge et qui dépend du Smic horaire moyen, du nombre d'heures légales travaillées dans l'année, du taux de cotisation d'assurance vieillesse et du taux de réfaction appliqué. Or ces paramètres ont fortement augmenté entre 1994 et aujourd'hui. Ainsi, d'après les données obtenues auprès du FSV, le Smic horaire moyen est passé de 5,37 euros à 9,67, le taux de réfaction du Smic horaire de 60 % à 90 % dès 1996 et le taux de cotisation de 16,35 % à 17,65 % en 2016. Seul le paramètre du nombre d'heures de travail a diminué avec le passage de la durée légale hebdomadaire de travail de 39 à 35 heures. La prise en compte de la diminution du nombre d'heures travaillées, mise en oeuvre dès 2002, n'a toutefois été intégrée dans le calcul du coût unitaire du chômeur... qu'en 2015 !

Évolution du paramétrage de la facturation chômage FSV
en indice (100 en 1994)

Ces différents effets expliquent l'évolution beaucoup plus marquée de la dépense « chômage » du FSV par rapport à la progression du nombre de demandeurs d'emplois. A recettes constantes, il semble qu'une diminution du taux de chômage au-dessous de 8 % de la population active pourrait ramener le FSV à l'équilibre .

2. Jusqu'au début de l'année 2016, la reprise de la dette du FSV était assurée par la Caisse d'amortissement de la dette sociale

La persistance du déficit du FSV entre 2001 et 2010 a conduit ce dernier à creuser un déficit cumulé de 7,2 milliards d'euros . Ce déficit, comme ceux de tous les organismes gestionnaires du régime général de la sécurité sociale, était porté, en termes de trésorerie, par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss). Partant du constat que le portage de déficits passés n'entrait pas dans l'objet social de l'Acoss, la LFSS pour 2011 51 ( * ) a organisé un plan de reprise du déficit cumulé porté par l'Acoss, au 31 décembre 2010, ainsi que de ses déficits prévisionnels pour la période 2011-2017, à hauteur de 130 milliards d'euros, par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades). Ainsi, les 7,2 milliards d'euros de déficit cumulé du FSV ont été intégrés dès 2011 au sein de l'enveloppe de 68 milliards d'euros de reprise de dette par la Cades. Les déficits prévisionnels du FSV devaient ensuite être repris annuellement par la caisse jusqu'en 2018, dans le respect d'un plafond annuel de reprise de 10 milliards d'euros et d'un plafond global de 62 milliards d'euros sur la période (pour atteindre les 130 milliards d'euros de la reprise autorisée par la LFSS pour 2011).

Ce plan de reprise a toutefois été perturbé par la LFSS pour 2016 52 ( * ) . Afin de pallier le risque d'exposer à la remontée des taux d'intérêt le stock de dette sociale croissant qui demeurait à la charge de l'Acoss, elle a ainsi supprimé le plafond annuel de reprise de dette par la Cades de 10 milliards d'euros et a permis une reprise immédiate de dette de l'Acoss à hauteur de 23,6 milliards d'euros. Cette reprise permet d'atteindre dès 2016 le plafond global de reprise de 62 milliards d'euros décidé par la LFSS de 2011 et qui n'a pas été remis en cause. Permettant d'optimiser la gestion de la dette sociale, cette solution ouvre toutefois une période d'incertitude pour le FSV quant au portage de sa dette prévisionnelle à partir de 2016.

Ce déficit cumulé pourrait atteindre un montant de 13,6 milliards d'euros en 2019 . Aucune solution à ce stade ne semble avoir été envisagée pour répondre au problème de son financement.

B. DES RESSOURCES MARQUÉES PAR L'INSTABILITÉ

1. En 23 ans d'existence, le FSV a seulement connu cinq années sans modification de ses ressources

A son origine, le financement du FSV était simple et suffisant.
La loi lui avait affecté 1,3 point de CSG 53 ( * ) ainsi qu'une fraction des droits sur les alcools et les boissons non alcoolisées. Ces recettes, plus dynamiques que les dépenses, ont conduit dans le courant des années 1990 à des situations d'excédent et à la constitution de réserves (1,6 milliard d'euros en 2000).

Dans un contexte budgétaire de plus en plus contraint, plusieurs mesures ont été prises dès 2001 visant à recycler cet excédent . Le FSV devait tout d'abord devenir l'une des principales ressources du Fonds de réserve des retraites (FRR) 54 ( * ) , par l'affectation de ses excédents annuels. De plus, un transfert de 0,15 point de CSG du FSV à la branche maladie a été décidé la même année, et de 0,1 point supplémentaire en 2002, pour le financement de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA).
En contrepartie, le législateur a affecté au FSV un panier de recettes moins dynamiques, qui a eu pour conséquence de complexifier le compte du fonds et d'en compromettre l'équilibre.

C'est en effet à partir de 2001 que le déficit du FSV a commencé à se creuser et que l'instabilité des recettes va s'accélérer (voir tableau ci-contre). L'année 2001 est également marquée par le début du financement de la prise en charge de la majoration de pension pour enfant par la Cnaf, qui la financera intégralement à partir de 2011 au point que cette prestation n'apparait plus, depuis 2016, dans le compte du FSV. C'est aussi à partir de 2001 qu'une fraction du solde de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) est affectée au fonds, rendant de plus en plus difficile la prévisibilité des recettes annuelles.

Évolutions des recettes du FSV depuis 1994

Date d'affectation
de la recette

Recette prévue
à l'origine mais
qui ne relève plus désormais du FSV

Recette non prévue
à l'origine et qui
ne relève plus désormais du FSV

Recette prévue
à l'origine
et relevant toujours du FSV

Recette non prévue
à l'origine et relevant désormais du FSV

1994

CSG activité
(jusqu'en 2015)

CSG remplacement (jusqu'en 2015)

CSG patrimoine

CSG placement

CSG jeux
(jusqu'en 2015)

Droits sur les alcools
(jusqu'en 2009)

1996

Contribution employeur
à la prévoyance
(jusqu'en 2000)

2000

Solde C3S
(jusqu'en 2015)

2001

Financement Cnav-ME
(jusqu'en 2015)

Prélèvement social patrimoine et placement (jusqu'en 2013
puis depuis 2016)

2004

Contribution avantages
pré-retraite ou cessation anticipée d'activité
(jusqu'en 2008)

Contribution sur retraites
à prestations définies

2011

Taxe sur les salaires

Contribution add.
à la C3S
(jusqu'en 2015)

Forfait social
(jusqu'en 2015)

Contrib. add. sur rentes>400 €
(retraite chapeau)

Fonds en consignation
ou en déshérence
(jusqu'en 2015)

Redevance sur fréquence UMTS de 2 e gén.
(jusqu'en 2015)

Contribution épargne salariale (jusqu'en 2015)

Pénalité art. L. 2242-5-1 du code du travail

2016

Prélèvement de solidarité
sur le patrimoine et les produits
de placement

Changements de taux d'affectation :

6 changements de fraction pour la CSG sur les cinq catégories de revenus

7 changements de fraction pour la CSG patrimoine et placement (CSG sur les revenus du capital)

Dans l'histoire mouvementée des recettes du FSV, l'année 2011 constitue une deuxième année charnière . La LFSS pour 2011 devait assurer le volet financier de la réforme des retraites qui était en cours de discussion au Parlement à l'automne 2010. La principale mesure concernant le FSV était le transfert du financement d'une fraction du Mico, ce qui représentait une dépense supplémentaire de plus de 3,5 milliards d'euros. Pour compenser cette nouvelle mission, la LFSS pour 2011 a mis en oeuvre une « tuyauterie » par essence complexe en affectant un nouveau panier de recettes au FSV. On notera que parmi les recettes transférées en 2011, seules deux catégories subsistent encore dans les comptes du FSV en 2016 : une fraction de la taxe sur les salaires et la contribution additionnelle sur les retraites chapeaux.

Il serait possible d'épiloguer longuement sur les nombreuses évolutions ayant touché les recettes du FSV. Elles révèlent une indéniable inventivité en matière de « plomberie » financière, les administrations sociales jouant, par voie législative ou réglementaire, avec les catégories, les taux et les fractions de ressources mises à la disposition du FSV. Pour une vision exhaustive de ces évolutions, vos rapporteurs renvoient le lecteur curieux aux rapports annuels d'activité du FSV 55 ( * ) , qui établissent la liste complète de ces modifications.

Entre 1994 et 2016, sur 23 exercices budgétaires, le FSV n'aura donc connu que cinq années sans modification du périmètre de ses ressources. Cette forte instabilité conduit à rendre difficilement compréhensible la lecture de son compte, et ce d'autant plus que ce dernier a connu en 2016 une refonte importante.

2. En 2016, le compte du FSV et ses ressources ont été, une nouvelle fois, complètement modifiés pour répondre aux conséquences de l'arrêt de Ruyter de la CJUE

La LFSS pour 2016 a considérablement modifié les ressources du FSV à la suite de l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) du 26 février 2015 de Ruyter (voir encadré).

L'arrêt de Ruyter et la mise en conformité avec le droit communautaire

« Dans un arrêt du 26 février 2015, la Cour de Justice de l'Union européenne (CJUE) a remis en cause la faculté de soumettre à des prélèvements affectés à des régimes de sécurité sociale les revenus du capital perçus par des personnes rattachées à un régime de sécurité sociale d'un autre État-membre de l'Union européenne. Cette décision remet ainsi en question le principe de territorialité sur lequel se fonde depuis 1991 l'assujettissement aux prélèvements sociaux des revenus du capital, dont le produit total annuel s'élève à plus de 18 milliards d'euros (pour un taux de 15,5 %). Selon l'interprétation retenue par la Cour, ceux-ci étant affectés au financement des prestations de sécurité sociale, bénéficiant aux seuls assurés à la sécurité sociale en France, l'assujettissement de personnes affiliées dans d'autres États de l'Union pouvait être regardé comme étant de nature à contrevenir au principe d'unicité de la législation sociale applicable à un travailleur et, par suite, comme une entrave à la liberté de circulation au sein de l'Union.

Afin de tenir compte de cette décision, le droit national doit être modifié pour changer l'affectation de ces prélèvements afin de garantir qu'ils ne soient plus dirigés vers le financement des prestations de sécurité sociale française. En effet, à l'heure actuelle, ces prélèvements sont essentiellement répartis entre les différentes branches du régime général (et à titre majoritaire, à l'assurance maladie), donc à des dépenses entrant dans le champ principal du règlement n° 883/2004 de coordination des systèmes de sécurité sociale, comme les prestations de sécurité sociale retracées dans les comptes des différentes branches du régime général.

Afin de mettre en conformité les comptes du [FSV] avec cette jurisprudence communautaire, deux nouvelles sections étanches sont créées dans les comptes en vue d'affecter certaines recettes à certaines catégories de dépenses et les recettes affectées au FSV, dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité, sont renouvelées afin d'éviter d'éventuelles contestations. Ainsi, les charges afférentes au Mico, bien que de nature non contributive, constituent le complément de prestations qui elles, le sont. Aussi cette dépense pourrait être regardée comme contributive et doit être financée par une recette autre que les prélèvements sur les revenus du capital. Inversement, les prises en charge de cotisations de retraite résultant de la validation gratuite de trimestres de chômage, d'arrêts de travail, du volontariat du service civique et de l'apprentissage ainsi que le financement du minimum vieillesse, prestations non contributives dont peuvent bénéficier l'ensemble des résidents qui remplissent les conditions d'âge et de ressources, seront regroupées dans une section étanche qui se verra affecter des prélèvements sociaux sur le capital 56 ( * ) ».

Extrait de l'annexe n°8
du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, p. 12.

Cette décision juge contraire au droit communautaire le fait que la France soumette à des prélèvements sociaux (voir encadré infra ) les revenus du capital des ressortissants d'un autre État-membre de l'Union européenne résidant en France ou percevant des revenus du capital de source française tout en n'étant pas affiliés à la sécurité sociale française.

Les prélèvements sociaux sur les revenus du capital en 2016

Les revenus du capital sont constitués par les revenus du patrimoine et les revenus de placement.

Ils sont frappés par :

- la CSG au taux de 8,2 % 57 ( * ) ;

- la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) au taux de 0,5 % ;

- les prélèvements sociaux au taux de 4,5 % ;

- le prélèvement de solidarité au taux de 2 % ;

- la contribution de solidarité pour l'autonomie au taux de 0,3 %.

Le taux d'imposition sur les revenus du capital s'élève donc à 15,5 %. Ces prélèvements n'étant pas déductibles de l'impôt sur le revenu de la personne physique (IRPP), ces revenus sont soumis à un taux marginal d'imposition de 64,5 %.

La nature de la CSG et de la CRDS fait l'objet d'un différend ancien entre la France et la commission européenne 58 ( * ) , cette dernière refusant d'assimiler ces prélèvements à des impositions de toute nature en raison de leur affectation au financement de la sécurité sociale. Le principe d'unicité de la législation sociale au sein de l'Union interdit en effet qu'un contribuable, assuré au sein d'un régime de protection sociale d'un État-membre, soit redevable d'un prélèvement obligatoire finançant la protection sociale d'un autre État-membre 59 ( * ) .

Après l'arrêt de Ruyter , le Gouvernement disposait de deux options : soit ne plus soumettre aux prélèvements sociaux les revenus français du capital des ressortissants de l'UE, assuré social dans un autre État-membre ; soit modifier l'affectation des prélèvements sociaux sur le capital à des dépenses ne pouvant pas être considérées comme finançant le système assurantiel de protection sociale français.

La première option présentait l'inconvénient d'une perte de recettes non négligeable, estimée à environ 300 millions d'euros 60 ( * ) par an sur les 15 milliards d'euros de recettes des prélèvements sociaux sur les revenus du capital. La seconde option aurait pu conduire le Gouvernement à affecter ces prélèvements sociaux au budget de l'État, quitte à les reverser ensuite à la sécurité sociale 61 ( * ) . Il s'y est toutefois refusé au motif « que cela aurait été un coup de canif à la vocation de la CSG, que la Cour de Luxembourg aurait aussi pu interpréter comme un contournement de ses décisions » 62 ( * ) . La décision prise dans la LFSS pour 2016 a finalement consisté à affecter les prélèvements sociaux sur les revenus du capital principalement à la Cades et au FSV, ces deux organismes étant censés ne pas financer, ou pas directement, le système assurantiel de protection sociale 63 ( * ) .

• Les conséquences pour les recettes du FSV

Les recettes du FSV ont donc été, à cette occasion, recentrées principalement sur trois ressources assises sur les revenus du capital : 7,6 points de CSG ; 3,35 points de prélèvements sociaux et la totalité (2 points) des prélèvements de solidarité.

Aux yeux de vos rapporteurs, cette solution fragilise doublement les recettes du FSV .

A court terme, elle entraîne une très forte imprévisibilité des ressources . En effet, les recettes des prélèvements sociaux sur les revenus du capital sont beaucoup plus erratiques que celles assises sur les revenus d'activité. Comme le montre le graphique ci-dessous, entre 2004 et 2015, le rendement des prélèvements sur le capital est très fortement instable d'une année sur l'autre même s'il enregistre une dynamique moyenne de 1,8 % par an sur la période. L'instabilité de ces prélèvements est due à leurs différentes assiettes qui ont chacune des sous-jacents différents : revenus immobiliers, placements obligataires ou en action...

A plus long terme, il n'est pas exclu que cette solution entraîne une nouvelle contestation devant la CJUE . Si la réorganisation du compte du FSV affectant les recettes des prélèvements sociaux sur les revenus du capital vers les dépenses de solidarité pourrait éventuellement satisfaire les exigences européennes, il semble plus délicat de justifier le financement de la Cades, donc de la dette sociale, par ces prélèvements. Dès lors, si la France devait être une nouvelle fois condamnée et contrainte à réaffecter ces recettes vers des dépenses non sociales, le FSV pourrait subir un nouveau bouleversement de ses recettes.

Évolution des recettes tirées des prélèvements sociaux
sur les revenus du capital

Il convient au passage de souligner l'impact budgétaire qu'entraîne en termes de frais d'assiette, de recouvrement et de dégrèvement, un financement du FSV presqu'exclusivement assuré par des recettes sur les revenus du capital. Ces frais sont en effet passés de 96 millions d'euros en 2015 à 343 millions d'euros en 2016. Cette explosion s'explique par le précompte forfaitaire, pratiqué par la direction générale des finances publiques (DGFIP), facturé aux organismes auxquels sont affectés des prélèvements sur les revenus du patrimoine. En matière de recettes assises sur ces derniers, les montants versés par la DGFIP au FSV sont calculés à partir des rôles émis et non pas des recettes effectivement recouvrées par les services. Les restes à recouvrer, les admissions en non-valeur et les dégrèvements ne sont pas imputés au FSV. En contrepartie, un précompte forfaitaire de 3,6 % est facturé. Compte tenu de la forte progression des recettes tirées des prélèvements sur les revenus du capital affectées au FSV en 2016 (passant d'un total de 0,85 à 12,95 points après la LFSS pour 2016), le coût de précompte s'élèverait à 243 millions d'euros. Il s'ajoute aux frais d'assiette et de recouvrement sur l'ensemble des recettes du FSV, soumis à un taux de 0,5 % soit 80 millions d'euros. Cette charge de plus de 200 millions d'euros correspond à l'écart entre le déficit du FSV pour 2016 prévu en loi de financement (-3,7 milliards d'euros) et celui affiné au 1 er avril 2016 (-3,9 milliards d'euros) 64 ( * ) .

• Les conséquences pour l'organisation du compte du FSV

La décision d'affecter les recettes des prélèvements sociaux sur les revenus du capital au FSV a conduit à la réorganisation de son compte en trois sections, de façon à s'assurer que ces recettes financent uniquement des dépenses de solidarité (voir ci-après).

Budget du FSV en 2016

(selon la nouvelle organisation issue de la LFSS 2016)

(en millions d'euros)

Section 1 : prestations non contributives

CHARGES (art. L. 135-2 CSS - I)

PRODUITS (art. L. 135-3 CSS - I)

Prise en charge des cotisations

12 956

CSG sur revenus
du patrimoine

9 440

PA chômage

11 031

PA service civique

29

PA maladie

1 645

PA stages de la formation prof.

233

PA apprentissage

18

Prélèvement social
sur revenus du capital

4 091

Prise en charge des prestations

3 095

Minimum vieillesse

3 095

Transfert avec les régimes complémentaires

339

Prélèvement de solidarité sur revenus du capital

2 431

Autres charges nettes

157

Charges de gestion courante

0,5

SOUS-TOTAL CHARGES DE LA SECTION 1

16 546

SOUS-TOTAL PRODUITS DE LA SECTION 1

15 924

Section 2 : prestations contributives

CHARGES (art. L. 135-2 CSS - II)

PRODUITS (art. L. 135-3 CSS - II)

Minimum contributif

3 490

Taxe sur les salaires

270

Majoration de pension pour conjoint à charge

39

Contributions sur avantages de retraite et pré-retraites (retraite chapeau)

186

Redevance (licence UMT

37

SOUS TOTAL CHARGES DE LA SECTION 2

3 529

SOUS-TOTAL PRODUITS DE LA SECTION 2

493

Section 3

CHARGES (art. L. 135-2 CSS - III)

PRODUITS (art. L. 135-3 CSS - III)

Maintien du bénéfice de l'âge d'annulation de la décote à 65 ans pour les parents de 3 enfants ou d'enfants handicapés.

305 (à horizon 2022)

373 (à horizon 2050)

(Premiers versements à partir du 1er juillet 2016)

Recettes mises en réserve (depuis 2011 : 0,5 point
de forfait social et 0,2 point des prélèvements sociaux sur les revenus du capital)

Produits financiers résultant du placement des disponibilités excédant les besoins
de trésorerie de cette section.

887

Montant des réserves non utilisées

514

RÉSULTATS NET

Résultats section 1

-622

Résultats section 2

-3 036

Résultats FSV

-3 658

Source : Commission des affaires sociales d'après annexe 8 du PLFSS pour 2016

Comme l'indiquait l'annexe 8 du PLFSS pour 2016 (voir passage souligné dans l'encadré ci-dessus), la création de deux nouvelles sections résulte de l'ambiguïté de la nature du minimum contributif et de la majoration de pension pour conjoint à charge . Si elles relèvent bien, d'après le Gouvernement, du domaine de la solidarité, elles viennent en complément d'une pension, qui, elle, est de nature contributive. Pour couper court à toute éventuelle contestation, deux sections distinctes ont donc été créées.

En conséquence, les recettes de la section 1 ne peuvent pas être fongibles avec les autres recettes du FSV . Un excédent de cette section ne pourrait ainsi pas financer le déficit de la section 2. Or, la répartition actuelle des recettes entre les sections conduit à un déséquilibre important et structurel de la section 2 alors même que les perspectives pluriannuelles du FSV prévoient un excédent de la section 1 de 138 millions d'euros en 2019 65 ( * ) .

Une incertitude demeure aujourd'hui sur l'utilisation de la section 3 et de son éventuel excédent de plus de 500 millions d'euros. Le décaissement progressif devrait entraîner des intérêts supplémentaires résultant du placement des disponibilités excédant les besoins de trésorerie de cette section. Ces produits financiers sont toutefois actuellement très faibles.

D'après les informations obtenues par vos rapporteurs, le FSV a dès le 1 er janvier 2016 appliqué très strictement ce nouveau cadre en considérant que le cloisonnement en sections devait être interprété aussi bien d'un point de vue budgétaire, comptable que financier . Les versements mensuels réalisés par le FSV aux régimes de retraite, sous la forme d'acomptes, distinguent désormais le paiement des dispositifs de solidarité de la section 1 de ceux de la section 2.

Il semble donc que l'instabilité des ressources du FSV ait accompagné au fil des années le creusement de son déficit, justifiant l'image, chère à votre rapporteur d'un fonds utilisé comme « dépanneuse » pour répondre aux évolutions conjoncturelles touchant le déficit des différentes branches de la sécurité sociale.

III. LE FSV N'A PAS PERMIS DE RENFORCER LA RESPONSABILITÉ DES PARTENAIRES SOCIAUX DANS LE SYSTÈME DE RETRAITES ET SUBIT DÉSORMAIS UNE CRISE DE SA GOUVERNANCE

A. UNE RESPONSABILISATION MANQUÉE DES PARTENAIRES SOCIAUX

1. Dans le domaine contributif, la création du FSV n'a pas empêché les gouvernements successifs d'être les principaux artisans des réformes des retraites au sein des régimes de base

La création du FSV, en isolant certaines dépenses de solidarité au sein de la branche vieillesse, devait permettre de recentrer la responsabilité des partenaires sociaux sur la gestion des dépenses du domaine contributif . Or, les principales réformes intervenues depuis lors (2003, 2008, 2010 et 2014) pour assurer le rééquilibrage financier de la branche vieillesse l'ont été à l'initiative des gouvernements successifs. Les partenaires sociaux ont été consultés mais n'ont jamais joué un rôle de moteur alors même qu'ils sont à la tête des conseils d'administration des principales caisses nationales de retraite.

Le faible poids des partenaires sociaux dans la gestion des régimes de base contraste avec l'importance de leur rôle au sein des régimes complémentaires. Les récentes négociations ayant abouti à l'accord national interprofessionnel du 30 octobre 2015 relatif aux retraites complémentaires Agirc-Arrco l'ont encore récemment montré. Cet accord courageux et ambitieux, tant pour sa capacité à repousser la perspective d'extinction des réserves financières de l'Agirc-Arrco que pour l'ingéniosité des mesures proposées 66 ( * ) , a été trouvé sans l'intervention du Gouvernement qui a laissé libre les partenaires sociaux de mener à bien leurs négociations. Les représentants de l'Agirc-Arrco ont d'ailleurs rappelé devant la Mecss du Sénat « l'engagement (...) des partenaires sociaux, acteurs intermédiaires dans un pays qui s'en méfie, à continuer à porter une part de l'intérêt général (...) sans s'en remettre à la puissance publique » 67 ( * ) .

La gestion des régimes de retraite complémentaires échappe en effet à l'action du Gouvernement. Les comptes de ces régimes, même s'il s'agit de régimes obligatoires, ne relèvent pas du domaine des lois de financement de la sécurité sociale et ne sont donc pas intégrés à ceux de la branche vieillesse. Or, la réforme constitutionnelle de 1996, qui a instauré les LFSS, a marqué une étape décisive dans « l'étatisation » des finances sociales.

Les déficits ou excédents de la sécurité sociale, qu'il s'agisse des dépenses assurantielles ou de solidarité, sont en priorité de la responsabilité du Gouvernement et non des partenaires sociaux. La création du FSV n'aura donc pas contribué à renforcer la responsabilité des partenaires sociaux dans la gestion des dépenses contributives depuis 1994.

2. Dans le domaine du non contributif, les partenaires sociaux ne sont plus associés à la gouvernance du FSV depuis juin 2013

Conformément à l'article L. 135-1 du code de la sécurité sociale, la gouvernance du fonds s'appuie sur deux organes : un conseil d'administration, assisté d'un comité de surveillance.

Le conseil d'administration , composé des représentants des administrations sociales et financières, a pour rôle principalement (art. R. 135-4 CSS) :

- d'adopter le budget de gestion administrative ;

- d'approuver le rapport annuel d'activité et les comptes annuels ;

- de délibérer de toute question relative au fonctionnement du fonds ;

- de proposer au Gouvernement toutes mesures tendant à maintenir l'équilibre financier du fonds ;

- d'examiner le rapport annuel sur le contrôle interne des opérations que le fonds prend en charge.

Composition du conseil d'administration du FSV

La composition du conseil d'administration est fixée à l'article R. 135-2 du code de la sécurité sociale. Il comprend :

- le Président, nommé par décret sur proposition du ministre chargé de la sécurité sociale pour une durée de trois ans ;

- deux représentants du ministre chargé de la sécurité sociale (deux représentants de la direction de la sécurité sociale) ;

- deux représentants chargés du ministre du budget (un représentant de la direction du budget et un de la direction générale des finances publiques) ;

- un représentant du ministre de l'économie (un représentant de la direction générale du trésor) ;

- un représentant du ministre chargé des personnes âgées (un représentant de la direction générale de la cohésion sociale).

Le comité de surveillance , ouvert aux parlementaires et partenaires sociaux, assiste le conseil d'administration dans la définition des orientations du FSV.

Composition du comité de surveillance du FSV

La composition du comité de surveillance est déterminée à l'article R. 135-6 du même code. Il est composé comme suit :

- deux membres de l'Assemblée nationale et deux membres du Sénat ;

- un membre de la Cour des comptes ;

- un membre du corps de l'inspection générale des finances ;

- un membre du corps de l'inspection générale des affaires sociales ;

- le Président du conseil d'administration de la Cnav ;

- le Président du conseil central d'administration de la MSA ;

- les présidents des conseils d'administration des caisses des artisans, des professions industrielles et commerciales et des professions libérales (régime social des indépendants) ;

- cinq représentants des assurés sociaux (CGT, CGT-FO, CFDT, CFTC, CFE-CGC) ;

- cinq représentants des employeurs et travailleurs indépendants (3 Medef, 1 CGPME et 1 UPA) ;

- quatre personnes qualifiées ;

- un représentant des régimes de retraite autres que ceux énumérés ;

- trois représentants désignés par le Comité national des retraités et personnes âgées.

Présidé par un parlementaire 68 ( * ) , le comité donne son avis sur le rapport annuel d'activité et répond à toute demande de consultation formulée par le conseil d'administration. Il permet surtout aux représentants des assemblées parlementaires et des partenaires sociaux d'être tenus informés de la situation financière du fonds. Ce comité n'en est pas pour autant devenu une instance de dialogue sur la nature des prises en charge financées par le FSV.

Depuis 2013, ces deux organes n'ont plus été convoqués, à la suite de l'expiration du mandat du président du conseil d'administration, Etienne Maire, intervenue le 27 septembre 2013. Le décret qui devait nommer un successeur n'a pas été pris avant le mois de mars 2016 69 ( * ) , ce qui a conduit à un certain nombre de blocages dans le fonctionnement habituel du fonds.

Faute de réunion du conseil d'administration, les comptes de l'organisme n'ont pu être approuvés depuis l'exercice 2013. De plus, l'établissement a été conduit, sur autorisation des administrations de tutelle, à reconduire l'enveloppe de crédits correspondant au budget initial de l'exercice 2013 en 2014, 2015 et 2016. Le conseil d'administration n'a pas non plus approuvé le marché de certification des comptes conclu en 2014. Enfin certains projets ont été suspendus, en particulier celui visant à mettre en place un contrôle interne et une cartographie des risques.

La vacance du poste de président du conseil d'administration conduit également à ce que le comité de surveillance ne soit pas non plus réuni, son rôle étant d'assister le conseil. L'absence de réunion du comité de surveillance a empêché l'approbation des rapports annuels d'activité élaborés depuis 2012.

Interrogée par vos rapporteurs, la direction de la sécurité sociale (DSS) relativise les conséquences de l'absence de réunion du conseil d'administration au vu de sa composition réunissant les tutelles . L'enjeu principal résidait dans l'impossibilité d'approuver les comptes du fonds et les budgets primitifs, ce qui posait problème essentiellement s'agissant des dépenses de gestion administrative. En effet, s'agissant des dépenses techniques (financement des prises en charge de cotisations et de prestations) qui sont régies par des dispositions législatives et réglementaires, l'approbation de ces prévisions n'apparaît pas primordiale. Ces dernières faisaient surtout l'objet d'une simple présentation devant le conseil d'administration, le fonds étant tributaire des données transmises par l'Acoss, les régimes ou Pôle emploi.

Les représentants de la DSS ont toutefois regretté l'absence de réunion du comité de surveillance, ce que partagent unanimement les partenaires sociaux auditionnés . Ces derniers ne sont en effet plus directement informés depuis 2013 des évolutions financières du fonds, ce qui s'avère particulièrement dommageable dans un contexte de forte instabilité de ses ressources.

Dès lors, les importantes réformes intervenues au cours de l'année 2015, tant au niveau des ressources du fonds (LFSS pour 2016) que de son organisation administrative (décret du 7 octobre 2015), ont été menées sans la moindre consultation ni des partenaires sociaux, ni des parlementaires.

Vos rapporteurs déplorent cette situation et souhaitent que la nomination du président du FSV puisse permettre la réunion le plus rapidement possible du comité de surveillance.

B. L'INTÉGRATION ADMINISTRATIVE DU FSV AU SEIN DE LA CNAV SUSCITE DES RÉSERVES

1. Ce que prévoit le décret du 7 octobre 2015

Le décret du 7 octobre 2015 70 ( * ) modifie l'ensemble des articles réglementaires du code de la sécurité sociale concernant le FSV (art. R. 135-1 à R. 135-16-7, R. 351-12, D. 634-2 et D. 815-9).

L'article R. 135-8 dispose désormais que :

« La gestion administrative, financière et comptable du fonds donne lieu à une convention entre le fonds et la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés. Cette convention (...) précise la nature des tâches réalisées pour le compte du fonds ainsi que les modalités de remboursement des frais correspondants (...).

« Dans le cadre de la gestion assurée par la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (...), l'agent comptable de cette caisse assure les fonctions d'agent comptable du fonds. Pour l'exercice de cette mission, les comptes du fonds sont tenus de manière séparée de ceux de la Caisse nationale d'assurance vieillesse et de la branche vieillesse du régime général. »

Outre l'intégration du FSV à la Cnav, le décret prévoit la fusion des postes de président du conseil d'administration (occupée jusqu'alors à titre gracieux par un magistrat de la Cour des comptes) et de directeur général . Aux termes de l'article R. 135-7 modifié, le président du conseil d'administration reprend l'intégralité des attributions du directeur dont la fonction disparaît. Le décret du 7 octobre spécifie le rôle du Président pour établir, « sur la base des éléments qui lui sont transmis par les régimes, administration ou services concernés, un rapport annuel sur le contrôle interne des opérations que le fonds prend en charge ». Alors que le projet de mise en place d'un contrôle interne avait été suspendu faute de pouvoir être approuvé par le conseil d'administration, cet ajout semble bienvenu.

Le décret précise également certaines modalités de calcul des prises en charge de cotisations et de prestations. Les dispositions relatives à ces modalités sont d'ores et déjà appliquées par le fonds.

Ce n'est pas encore le cas pour les dispositions liées à la gouvernance . Une discussion est en cours entre le fonds, ses administrations de tutelle et la Cnav pour élaborer les termes de la convention. Dans un contexte de baisse des dépenses de gestion des organismes de sécurité sociale, cette convention doit être l'occasion de réduire les coûts du FSV.

Une réduction de la masse salariale est en effet attendue. Jusqu'à présent, le FSV se composait d'une équipe de six équivalents temps plein (ETP), sur les neuf qui lui étaient affectés, et d'un agent comptable intervenant en adjonction de service. Leurs missions se concentraient essentiellement autour de quatre séries de tâches :

- la prévision, le suivi et le contrôle des dépenses ;

- les opérations et le suivi de la trésorerie, le contrôle et l'ordonnancement des recettes. Le FSV est ainsi en relation avec 22 régimes de retraite qui lui facturent des dépenses ainsi qu'avec l'Acoss et le Trésor public pour la prévision de ses recettes ;

Source : FSV

- les études, la gestion des données et l'information des tutelles et des partenaires ;

- la comptabilité du fonds.

En intégrant administrativement le FSV à la Cnav, le Gouvernement espère limiter le nombre d'agents affectés au FSV à un ou deux ETP dont le président. Une mutualisation des tâches des agents supprimés semble possible au sein de la Cnav. Vos rapporteurs attirent l'attention du Gouvernement sur les conséquences de cette mesure concernant le personnel du FSV. En tant qu'organisme de sécurité sociale, le FSV emploie des salariés de droit privé qui ne peuvent être statutairement affectés dans une autre caisse. En cas de refus de certains agents de rejoindre la Cnav, des procédures de reclassement, voire des licenciements, devraient être envisagés.

Une réduction des frais immobiliers pourrait également être un levier d'économie. Le siège du FSV, où se sont déplacés vos rapporteurs pour leur audition avec les représentants du fonds, est situé rue Villaret de Joyeuse dans le 17 e arrondissement de Paris. Ces locaux sont loués auprès de la Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires (CRPCEN). Un déménagement du FSV dans des locaux appartenant à la Cnav pourrait être envisagé.

Actuellement, le coût de gestion du fonds est de 1,1 million d'euros par an, répartis à 82 % pour les salaires et 8 % pour la location des bureaux.

2. Des mesures contestées

Ce décret a suscité des critiques tant sur la méthode que sur le fonds.

L'absence de concertation des acteurs concernés par cette réforme a tout d'abord été vivement critiquée. Les membres du comité de surveillance du FSV n'ont pas été tenus informés du projet de décret y compris de façon informelle. Le conseil d'administration de la Cnav, obligatoirement consulté pour tout projet de décret concernant la caisse, a très majoritairement exprimé un avis négatif. Son président, Gérard Rivière, s'en est expliqué devant votre commission lors de son audition sur le PLFSS pour 2016 : « La Cnav n'a pas été consultée sur l'intégration du FSV. (..) La consultation du conseil d'administration sur le projet de décret a abouti à un avis très largement négatif, avec une cohésion peu courante de l'ensemble des représentants des partenaires sociaux sur ce point ». Le décret est perçu comme entraînant une « confusion des missions (...) entre celles relevant de la contributivité, financées par des cotisations assises sur la masse salariale, et celles relevant de la solidarité nationale, qui ne sont pas de la compétence de la Cnav » 71 ( * ) .

Sur le fond , cette intégration administrative suscite trois séries d'interrogations.

La première tient à l'absence de cohérence de cette réforme de rapprochement du FSV et de la Cnav avec la volonté de cloisonner les dépenses entre le domaine de la solidarité et celui du contributif à la suite de l'arrêt de Ruyter . Votre rapporteur a d'ailleurs déjà eu l'occasion de souligner le caractère « surprenant » 72 ( * ) de cette intégration. La convention devra préciser de façon non équivoque les termes de la séparation des comptabilités ainsi que de toutes les opérations comptables en particulier entre le FSV et la Cnav. Le risque d'une Cnav « juge et partie » n'est en effet pas à exclure en particulier pour la mise en oeuvre des procédures de contrôle interne destinées à vérifier les factures transmises par l'ensemble des régimes de retraite.

La deuxième tient aux réserves des rapporteurs quant à l'ampleur des économies réellement envisageables . D'après les informations obtenues lors de leurs auditions, les tâches menées par les agents du FSV n'ont pas forcément leur équivalent au sein des services de la Cnav. Il n'est donc pas exclu que la suppression des postes du FSV ne soit en réalité supportée par la Cnav à la charge de laquelle pèsera cette réduction des effectifs. A court terme, cette intégration pourrait même générer des dépenses supplémentaires liées par exemple aux aménagements comptables et informatiques auxquels la Cnav devra procéder pour assurer la gestion du FSV. Des frais pourraient également intervenir pour liquider la procédure de rupture du contrat liant le FSV au cabinet d'expertise certifiant ses comptes.

Enfin, cette intégration interroge sur la volonté de maintenir existante la distinction entre les domaines contributif et non contributif . Les partenaires sociaux ont exprimé leur vigilance sur ce point. La gestion des dépenses de solidarité par la principale caisse du domaine contributif ne contribue pas à renforcer cette distinction à laquelle vos rapporteurs sont très attachés.

DEUXIÈME PARTIE - LE NÉCESSAIRE RECENTRAGE DU FSV SUR SA MISSION D'ORIGINE

I. SI LA SUPPRESSION DU FSV POURRAIT ÊTRE SUGGÉRÉE, TEL N'EST PAS LE CHOIX DE VOS RAPPORTEURS

A. LA SUPPRESSION DU FSV : UN SCÉNARIO ENVISAGEABLE, UNE PORTÉE TRÈS LIMITÉE

Le bilan contrasté du FSV depuis 1994 pourrait interroger quant à l'opportunité même de maintenir cette structure administrative. La piste de sa suppression, que vos rapporteurs ont souhaité étudier lors de leurs travaux, n'a toutefois pas suscité une forte adhésion parmi l'ensemble des personnes auditionnées.

La suppression présente en effet une portée très limitée.

Elle aurait pour principal avantage de simplifier la lecture du financement de la sécurité sociale en supprimant un intermédiaire qui peut être actuellement source de confusion. La suppression du FSV se traduirait cependant par le transfert de sa mission qui impliquerait de définir un nouveau circuit de financement des régimes. L'État, en l'espèce l'Acoss, se substituerait-il au FSV en finançant directement chacun des régimes concernés ou financerait-il la Cnav qui se chargerait de répartir les ressources entre chaque régime ? Ce circuit resterait à déterminer, ce qui ne serait pas d'ailleurs sans susciter des inquiétudes de la part des « petits » régimes, comme ces derniers l'ont exprimé devant vos rapporteurs. Il convient de préciser qu'une suppression éventuelle du FSV n'entraînerait évidemment pas la disparition des prestations prises en charge. Elle nécessiterait seulement de redéfinir les modalités de leurs financements.

Si l'argument de la simplification mérite d'être discuté, la portée d'une suppression semble pour le reste très limitée . La disparition du FSV n'entraînerait en effet aucune économie substantielle, et ce d'autant plus depuis que ses effectifs ont été diminués à la suite de son intégration administrative au sein de la Cnav.

D'après vos rapporteurs, cette solution présenterait plus d'inconvénients que d'avantages.

B. LA LOGIQUE D'UN FSV RECENTRÉ DEMEURE PERTINENTE DANS NOTRE SYSTÈME DE RETRAITE

1. Un rôle symbolique d'incarnation de la solidarité

Vos rapporteurs partagent l'opinion largement exprimée au cours de leurs auditions de l'importance de maintenir incarnée la distinction entre les dépenses contributives et les dépenses de solidarité dans le système des retraites. Elle permet en effet de mettre en exergue le rôle de redistribution que jouent les retraites en France en permettant de réduire les inégalités.

D'après les chiffres du COR, pour les personnes nées entre 1955 et 1964, le rapport inter-décile pour les salariés (10 % des personnes les mieux payées par rapport aux 10 % des personnes les moins payées) est de 5,85 alors que pour les retraités (10 % des retraités ayant une retraite de droits propres parmi les plus élevées par rapport aux 10 % des retraités ayant les plus faibles pensions), ce rapport tombe à 4,10 alors même que les pensions de droits propres, obtenues par la seule contribution, sont plus dispersées (rapport inter-décile 6,66) que les salaires perçus (5,85).

Au prix d'un recentrage de la mission du FSV , détaillé dans la suite de ce rapport, vos rapporteurs estiment que ces dépenses de solidarité doivent être classées en trois catégories :

- les dépenses de solidarité « coeur de système » financées par le FSV et recentrées autour du minimum vieillesse et de la prise en charge des cotisations pour périodes non travaillées (au premier rang desquelles les périodes de chômage) ;

- les droits familiaux de retraite , financés par la Cnaf et qui nécessiteraient de lui transférer le financement de la majoration de pension pour conjoint à charge ;

- les mesures de solidarité professionnelle dont la nature hybride ne leur permet pas d'être classées de façon définitive dans le domaine contributif ou dans celui du non contributif. Elles seraient financées par les régimes de base ce qui impliquerait de rebasculer l'intégralité du financement du Mico vers les régimes.

Vos rapporteurs ont conscience des critiques théoriques qui pourraient être apportées au recentrage du FSV autour de ces deux seules prises en charge. Au regard de l'importance qu'elles jouent dans le niveau de vie des retraités les plus modestes et des enjeux financiers considérables qu'elles représentent (plus de 16 milliards d'euros en 2016), il leur semble pourtant essentiel de maintenir un circuit de financement facilement identifiable et, par voie de conséquence, un meilleur contrôle démocratique les concernant.

2. Un meilleur contrôle démocratique des dépenses de solidarité

L'existence du FSV permet d'exercer un contrôle démocratique renforcé des dépenses de solidarité à la fois par le Parlement mais aussi par les partenaires sociaux.

Le contrôle parlementaire sur le FSV s'exerce principalement à l'occasion de l'adoption des tableaux d'équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base figurant en lois de financement. Le vote des articles concernés permet chaque année qu'un débat ait lieu sur les résultats financiers du fonds et que les parlementaires se prononcent à ce sujet.

Dans le cadre de la LFSS pour 2016, votre commission a ainsi rejeté l'article 28 du projet de loi au motif que « le financement par le déficit (des) dépenses de solidarité (n'était) pas acceptable, faisant supporter aux générations futures le poids de dépenses courantes d'aujourd'hui » 73 ( * ) . Le FSV est le dernier organisme concourant au financement de la sécurité sociale dont les comptes ne sont pas intégrés au sein d'une branche. Les autres organismes de financement comme le Fonds de réserve des retraite, la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie ou encore le Fonds CMU, déjà évoqué dans ce rapport, font l'objet d'une information figurant au sein de l'annexe 8 du PLFSS mais ne voient pas leurs comptes adoptés spécifiquement par les parlementaires. La délibération sur les résultats du FSV permet donc un contrôle accru des dépenses de solidarité qu'il finance .

Vos rapporteurs saluent l'avancée que constitue la présentation d'un tableau consolidé des comptes de la sécurité sociale dans l'annexe 4 du PLFSS. Ils considèrent toutefois qu'une délibération des parlementaires sur ces chiffres consolidés permettrait une meilleure transparence sur la situation financière de la sécurité sociale. Ils reprennent à leur compte la préconisation de la Cour des comptes visant d'une part, à supprimer le tableau d'équilibre relatif à la catégorie des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et d'autre part, à intégrer une rubrique « FSV » distincte dans le tableau d'équilibre de l'ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et dans celui du régime général de sécurité sociale. Cette proposition permettrait de mettre un terme à la présentation des comptes de la sécurité sociale « hors FSV » qui n'a pas véritablement de pertinence . Elle nécessite de modifier l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale.

Recommandation n° 1 : Modifier l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale pour intégrer une rubrique « FSV » dans les tableaux d'équilibre de l'ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et dans celui du régime général de sécurité sociale.

Le contrôle des partenaires sociaux est assuré au sein du comité de surveillance du FSV. Si ce comité ne dispose pas d'un pouvoir décisionnel, il permet à ses membres d'être tenus informés des résultats financiers du FSV et de ses évolutions.

L'ensemble des partenaires sociaux auditionnés par vos rapporteurs ont regretté l'absence de réunion de ce comité depuis 2013 manifestant ainsi leur attachement à l'existence du FSV.

Vos rapporteurs considèrent donc le maintien du FSV comme nécessaire mais jugent indispensable de recentrer sa mission, de stabiliser ses ressources et de relancer ses instances de dialogue.

II. L'AVENIR DU FSV : RECENTRER SES MISSIONS, STABILISER SES RESSOURCES ET RELANCER SES INSTANCES DE GOUVERNANCE

A. RECENTRER LES MISSIONS DU FSV SUR LES DISPOSITIFS DE SOLIDARITÉ « CoeUR DE SYSTÈME »

Vos rapporteurs estiment qu'un recentrage des missions du FSV est indispensable pour rendre sa mission plus lisible et la présentation distincte de ses comptes plus légitime et significative . Le recentrage doit s'effectuer autour des deux dispositifs déjà évoqués : le minimum vieillesse et la prise en charge des cotisations pour les périodes non travaillées .

Cette proposition implique de modifier en conséquence les articles L. 135-2 et L. 135-3 du code de la sécurité sociale qui listent respectivement les dépenses prises en charge par le fonds ainsi que ses recettes afin de :

- supprimer, au sein des dépenses de la première section du FSV, le transfert vers les régimes complémentaires. Ces derniers (représentant environ 300 millions d'euros par an) doivent être assumés directement par l'État, le FSV étant chargé de financer les seuls régimes de base ;

- supprimer également, au sein de la première section, la disposition permettant au Gouvernement d'élargir les missions du fonds par voie réglementaire. Votre commission s'était d'ailleurs déjà opposée à deux reprises à cette disposition, y voyant le risque de faire du FSV « un fonds de défaisance » 74 ( * ) ;

- supprimer enfin la deuxième section du fonds à la fois en dépenses et en recettes. Y figurent actuellement la fraction de Mico financée par le FSV ainsi que la majoration de pension pour conjoint à charge. Ces dispositifs seraient désormais financés respectivement par les régimes de base et par la Cnaf.

Recommandation n° 2 : Recentrer le FSV sur sa mission de financement des dispositifs de solidarité « coeur de système ».

La mise en oeuvre de cette recommandation, à recettes constantes pour la première section, est une mesure forte : elle permet de rétablir l'équilibre financier du FSV en « transférant » son déficit actuel vers les régimes de base servant le Mico, et donc en premier lieu vers la Cnav.

La deuxième section est en effet structurellement en déficit puisqu'elle supporte des charges cumulées d'un montant de 3,5 milliards d'euros et qu'elle n'est seulement abondée que par 500 millions d'euros de recettes environ.

Cette bascule du déficit vers les régimes de base permettrait de clarifier la présentation des comptes de la branche vieillesse en lui faisant porter son besoin de financement . Si l'argument psychologique d'un retour à l'équilibre des régimes de base ne doit pas être sous-estimé, tant il permet de montrer que les efforts accomplis par les réformes successives portent leurs fruits, il demeure toutefois théorique au regard de la nature du Mico et des règles de calcul des financements forfaitaires du FSV.

Avec cette proposition, les régimes de base renoueraient donc en 2016 avec un déficit de l'ordre de 2,1 milliards d'euros.

Par ce recentrage du fonds, vos rapporteurs invitent donc le Gouvernement à une véritable « opération transparence » sur les comptes de la branche vieillesse. Le déficit du FSV ne constitue pas un problème en soi mais traduit le besoin de financement du système des retraites qui, bien que réduit par les réformes successives, demeure conséquent.

Des mesures devront être prises, à l'avenir, pour combler ce déficit persistant.

La suppression de la deuxième section lève également la contradiction induite par la nouvelle organisation du compte du FSV à la suite de l'arrêt de Ruyter . Les recettes de la première section tirées des prélèvements sur les revenus du capital n'étant pas fongibles avec les recettes de la deuxième section, un éventuel excédent de la première section ne pourrait pas être utilisé pour diminuer le déficit de la deuxième section. Dès lors, alors même que les prévisions indiquent que la première section pourrait être à l'équilibre à compter de 2019, le déficit du FSV demeurerait toujours important sans que l'on sache comment seraient utilisés ces éventuels excédents.

Le recentrage des missions du FSV devra s'accompagner à l'avenir d'une stabilisation de ses missions pour conserver la logique du fonds qui est d'assurer, avec des recettes suffisantes, le financement des dépenses au coeur du système de solidarité des retraites.

Recommandation n° 3 : Stabiliser les missions du FSV.

B. STABILISER LES RESSOURCES DU FSV

Comme ce rapport l'a déjà évoqué, l'instabilité des ressources du FSV a été particulièrement forte depuis 2001. Au même titre que pour les missions du fonds, vos rapporteurs considèrent qu'une stabilisation de ses recettes permettrait de lever une partie de la confusion sur son rôle.

Deux obstacles semblent pouvoir s'opposer à moyen terme à l'injonction de vos rapporteurs.

La première tient à l 'utilisation d'un éventuel excédent de la première section , en cas notamment d'amélioration de la situation du chômage. Le FSV pourrait accumuler provisoirement des réserves qui pourraient servir à équilibrer son compte en cas de nouvelle dégradation de la situation de l'emploi. Il est plus vraisemblable qu'en cas d'excédent le Gouvernement décide de diminuer le taux d'affectation au FSV des prélèvements sociaux sur les revenus du capital.

L'instabilité des recettes tirées de ces revenus complique par ailleurs toute prévisibilité ex ante de l'équilibre des comptes de cette section.

De plus, l'affectation des prélèvements sociaux sur les revenus du capital au FSV et à la Cades demeure toujours soumise au risque d'un nouveau contentieux européen qui pourrait contraindre le Gouvernement à remettre sur l'ouvrage le minutieux travail de « tuyauterie » réalisé dans la LFSS pour 2016. A cette occasion, votre commission avait émis l'idée de transférer la composante de la CSG sur les revenus du capital sur le prélèvement social, lequel était, jusqu'en 2014, affecté à l'État et pourrait lui être de nouveau affecté. Un transfert du budget de l'État pourrait alors abonder le FSV afin de financer ses missions. Cette solution présente l'avantage de maintenir l'unité de la CSG dont la nature et la vocation est de financer la sécurité sociale, tout en permettant de fermer le risque de contentieux et de stabiliser définitivement la nature des ressources du FSV.

Recommandation n° 4 : Stabiliser les ressources du FSV au besoin par la substitution aux prélèvements sociaux sur les revenus du capital d'un transfert du budget de l'État vers le fonds.

C. RELANCER LES INSTANCES DE GOUVERNANCE DU FONDS

Le décret du 24 mars 2016 a permis la nomination du président du FSV, qui était un préalable au déblocage de sa gouvernance.

Il semble désormais impératif de réunir au plus vite le conseil d'administration du fonds. Une nécessité de procédure l'impose en effet afin d'adopter les rapports d'activité et les comptes des exercices précédents, qui ne l'ont pas été depuis 2013.

De même, le conseil d'administration devra statuer sur le scénario de retour à l'équilibre proposé par vos rapporteurs et d'en tirer les conclusions en matière de perspectives financières.

Recommandation n° 5 : Convoquer le plus rapidement possible le conseil d'administration du FSV et le faire statuer sur le scénario de retour à l'équilibre proposé par vos rapporteurs.

Le comité de surveillance devra être réuni dans la foulée. Son ordre du jour devra permettre d'informer les parlementaires et les partenaires sociaux sur la réforme administrative en cours et plus particulièrement les négociations de la convention entre les administrations de tutelle et la Cnav permettant l'intégration administrative du fonds au sein de cette dernière.

Une discussion devra également avoir lieu sur la proposition de retour à l'équilibre émise par vos rapporteurs.

Recommandation n° 6 : Convoquer le plus rapidement possible le comité de surveillance du fonds.

Dans le contexte d'intégration administrative du FSV à la Cnav, une attention toute particulière devra être portée à l'enjeu du contrôle interne et de la sécurisation des échanges entre le fonds et ses partenaires, au premier rang desquelles la Cnav. En effet, cette dernière devant désormais assurer la gestion du fonds tout en continuant à en recevoir ses financements, elle se retrouve dans une situation, si ce n'est de conflit d'intérêt, du moins de « juge et partie ». Un programme de contrôle interne et de cartographie des risques avait été lancé en 2013 mais finalement suspendu en raison de l'absence de réunion des organes de gouvernance pour en déterminer le contenu. Le décret du 7 octobre 2015 insistant particulièrement sur cette dimension, vos rapporteurs considèrent comme impératif la reprise des travaux à ce sujet.

Recommandation n° 7 : Reprendre le programme de contrôle interne et de cartographie des risques suspendu depuis 2013.

Le comité de surveillance devra être tenu bien informé des enjeux et de la stratégie retenue pour le contrôle interne.

Vos rapporteurs demanderont également au Gouvernement, à l'occasion de la prochaine de loi de financement de la sécurité sociale, la remise au Parlement d'un rapport permettant d'étudier la pertinence des taux de réfaction figurant dans les règles de calcul des prises en charge de cotisation au titre des périodes assimilées. Ce rapport devra expliciter les bases statistiques sur lesquelles se fonde la détermination de ces taux et évaluer les différences éventuelles entre le coût réel supporté par les régimes de base pour la prise en charge de ces cotisations et les financements apportés par le fonds.

Recommandation n° 8 : Remettre au Parlement un rapport explicitant et évaluant les taux de réfaction contenus dans les règles de calcul des prises en charge des cotisations au titre des périodes assimilées.

Enfin, vos rapporteurs rappellent que l'arrêté permettant de mettre en oeuvre la comptabilisation des périodes assimilées au titre de la maternité pour le calcul du salaire annuel moyen, prévu à l'article 98 de la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites n'a toujours pas été pris. Les modalités de prise en charge de cette dépense, prévues à l'article R. 135-16-7 du code de la sécurité sociale nécessitent la prise d'un arrêté fixant la fraction du montant des indemnités journalières à retenir.

Recommandation n° 9 : Prendre l'arrêté prévu à l'article R. 135-16-7 du code de la sécurité sociale permettant la mise en oeuvre de la comptabilisation des périodes assimilées au titre de la maternité pour le calcul du salaire annuel moyen.

EXAMEN EN COMMISSION

__________

Réunie le mercredi 8 juin 2016, sous la présidence de M. Alain Milon, président, la commission entend la présentation du rapport d'information de M. Gérard Roche et Mme Catherine Génisson sur l'avenir du fonds de solidarité vieillesse (FSV).

M. Alain Milon, président . - Nous en venons à l'examen du rapport sur l'avenir du Fonds de solidarité vieillesse, présenté par nos collègues Catherine Génisson et Gérard Roche. Je leur laisse la parole.

M. Gérard Roche , rapporteur. - A quoi sert le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) et où va-t-il ? C'est à ces deux questions que nous allons tenter de répondre ce matin, avec Catherine Génisson, en vous présentant les conclusions du rapport qui nous a été confié en janvier dernier par la Mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss).

Nous tenons à remercier son président, Jean-Noël Cardoux, d'avoir proposé ce sujet qui, bien que technique, renvoie au financement des dispositifs de solidarité nationale qui font de notre système de retraites un puissant agent de redistribution et de réduction des inégalités entre personnes retraitées. Il faut le dire, car le manque de confiance de nos concitoyens à l'égard de l'assurance vieillesse montre qu'ils n'en ont pas suffisamment conscience.

Alors que le FSV ne cesse d'être évoqué à chaque présentation des résultats des comptes de la sécurité sociale, cet établissement administratif créé par la réforme des retraites de 1993 demeure très mal connu. Sauf erreur, notre rapport sera d'ailleurs le premier rapport public rendu sur le sujet, devançant ainsi la Cour des comptes qui a également prévu de s'y intéresser prochainement.

En intitulant notre rapport, « Le vrai rôle du Fonds de solidarité vieillesse », nous entendons faire oeuvre de pédagogie. Ce rapport rappelle la genèse de ce fond et explique l'étendue de ses missions dont l'élargissement, notamment à des dispositifs ne relevant pas exclusivement du champ de la solidarité nationale, a conduit à dénaturer son objet initial. Il fait également état de l'évolution de ses recettes, qui s'avèrent aussi instables qu'insuffisantes, et de sa gouvernance actuellement en crise. Car vingt-trois ans après sa création, le bilan du FSV apparaît contrasté.

Pour la première fois depuis 11 ans, les régimes de base de l'assurance vieillesse affichent en 2016 un excédent estimé à 900 millions d'euros dans la LFSS pour 2016.

Le FSV conserve un déficit de 3,9 milliards d'euros en 2016, un chiffre comparable à celui de 2015 mais en hausse de 200 millions d'euros par rapport aux prévisions de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2016, d'après les chiffres rendus publics hier par la Commission des comptes de la sécurité sociale.

La persistance de ce déficit, très élevé depuis la crise de 2009, demeure plus que jamais préoccupante alors que dans le même temps le déficit du régime général de la sécurité sociale semble diminuer pour s'établir à 9,1 milliards d'euros. Le FSV représente donc à lui seul près de la moitié du déficit de la sécurité sociale hors transferts.

La LFSS pour 2016 a par ailleurs alimenté la chronique sur l'instabilité des ressources du FSV en modifiant pas moins de 12 milliards sur les 16 milliards d'euros de recettes qui lui sont affectées, à la suite de l'arrêt de Ruyter de la Cour de justice de l'Union européenne.

Le projet d'intégration administrative du FSV au sein de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav), engagé par le décret du 7 octobre 2015, interroge quant à l'avenir du fonds et suscite d'importantes réserves de la part des partenaires sociaux.

Persistance du déficit, instabilité et fragilisation des ressources, élargissement des missions à des prestations relevant du domaine assurantiel, évolution de sa gouvernance... Voici les constats qui ont conduit la Mecss à lancer un état des lieux sur le FSV.

A travers notre titre, « Le vrai rôle du FSV », nous voulons également aborder ce que devrait être la mission du fonds. Nous formulons en ce sens une proposition forte visant à recentrer le FSV sur sa mission d'origine, le financement des seuls dispositifs de solidarité nationale de la branche vieillesse. Cette proposition permet de remettre à l'équilibre le FSV en transférant son déficit aux régimes de base. Notre rapport montre en effet que le déficit actuel du fonds n'est rien d'autre qu'un besoin de financement supplémentaire de la branche vieillesse. Avec cette proposition, c'est une « opération vérité » sur le financement du système de retraite qui est ainsi menée. Je laisse à Catherine Génisson le soin de vous présenter notre état des lieux du FSV.

Mme Catherine Génisson , rapporteure. - L'origine du FSV nous plonge dans l'une des principales controverses qui existe entre l'État et les partenaires sociaux depuis la création de la sécurité sociale en 1945, à savoir la distinction entre les dépenses contributives et les dépenses de solidarité. L'idée qui a présidé à la création du FSV en 1993, portée à l'origine par le gouvernement de Pierre Bérégovoy et concrétisée par celui d'Édouard Balladur était la suivante : aux partenaires sociaux, la responsabilité de gérer les régimes de base finançant les dépenses contributives au moyen des cotisations sociales ; à l'État, celle de financer les dispositifs de solidarité avec des ressources fiscales.

Lors de sa création, la loi a confié au FSV la mission de financer les régimes de base pour la prise en charge de deux dispositifs :

- le minimum vieillesse, devenu à la suite de la réforme de 2007, l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA). Je note au passage que le rapport de notre collègue député Christophe Sirugue sur la simplification des minima sociaux n'aborde pas directement la question des circuits de leur financement et n'interfère donc pas avec nos travaux ;

- et le deuxième dispositif : les cotisations retraite des personnes au chômage pour qu'elles puissent valider leurs trimestres, ces derniers n'étant pas pour autant cotisés. Dans le jargon du FSV, ces périodes sont appelées « périodes assimilées ». La dépense « chômage » est aujourd'hui la principale du fonds puisqu'elle représente 11 milliards d'euros en 2016.

Dès 1995, ces missions ont été progressivement élargies. Certains élargissements ont consolidé l'objet initial du FSV, comme la multiplication des périodes assimilées qui concernent désormais les arrêts de travail pour maladie ou maternité ou encore les périodes de service civique, de stage ou d'apprentissage.

D'autres sont toutefois plus contestables. C'est en particulier le cas de la prise en charge par le FSV d'une partie du minimum contributif (Mico), décidé par la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites. Le Mico est une allocation différentielle destinée à compléter la retraite de personnes ayant cotisé toute leur vie sur la base de revenus modestes. Versé à plus de 6 millions de retraités, il représente un coût d'environ 7 milliards d'euros par an dont la moitié est financée par le FSV.

L'élargissement de la mission du FSV au Mico est contestable car la nature de ce dernier est hybride : bien que de nature non contributive, cette allocation constitue le complément de prestations de retraite qui elles, le sont. On parle souvent, à propos du Mico, d'un dispositif de solidarité professionnelle par opposition à la solidarité nationale qui ne s'appuie sur aucune prestation pour être versée.

Par la multiplication de ses missions et la dénaturation de son objet initial avec des missions ne relevant pas exclusivement de la solidarité nationale, le FSV a perdu en lisibilité ce qui entraîne une certaine confusion dans le financement de la protection sociale.

S'appuyant sur les travaux du Conseil d'orientation des retraites, notre rapport s'arrête longuement sur l'ensemble des dispositifs de solidarité au sein du système de retraites et montre que le FSV est loin d'en avoir le monopole en termes de financement.

La Caisse nationale d'allocations familiales (Cnaf) finance ainsi les droits familiaux de retraite au premier rang desquels la majoration de pension pour enfant, qui s'élève à 10 % de la pension de base de chaque parent d'au moins trois enfants. Son coût de 4,7 milliards d'euros a été financé par le FSV entre 2001 et 2015.

Les régimes de base financent également une partie des dispositifs de solidarité : les règles de calcul pour la liquidation d'une pension intègrent par exemple une dimension non-contributive comme le fait de calculer la pension non pas sur la totalité des salaires d'une carrière mais sur les vingt-cinq meilleures années ; certains minima de pension, comparables au Mico, ne sont pas pris en charge par le FSV comme la prestation minimum de retraite au sein du régime des non-salariés agricoles ou le minimum garanti pour les régimes de la fonction publique.

Le problème que soulève ce constat est que le FSV, censé incarner la distinction entre les domaines contributif et non contributif dans la branche vieillesse, n'offre en réalité qu'une vision partielle du coût global de la solidarité dans le système des retraites.

Cette confusion est renforcée par la nature théorique des résultats financiers du fonds. Si la prise en charge des prestations qu'il finance pour le compte des régimes (le minimum vieillesse essentiellement) s'effectue à « l'euro près » en fonction des factures transmises par ces derniers, celle des cotisations pour périodes assimilées est calculée sur une base forfaitaire, qui ne correspond pas à la dépense réelle des régimes.

En effet, alors que le FSV finance les cotisations pour les périodes d'inactivité au moment où le bénéficiaire est arrêté, la validation des trimestres ne pourra être constatée qu'a posteriori, au moment de la liquidation de ses droits. Par ailleurs, il est impossible de savoir si un trimestre validé sera finalement utile au futur pensionné, sachant que ce dernier a pu valider un même trimestre en tant que chômeur indemnisé (ce qui est possible à partir du 50 e jour d'indemnisation) mais également dans le cadre d'un travail temporaire (un trimestre est validé dès la 150 e heure payée au Smic soit à partir de 4,2 semaines). Des taux de réfaction, fixés par l'administration et censés prendre en compte ces incertitudes, sont à la base des règles de calcul des dépenses liées aux périodes assimilées et varient significativement d'une période à l'autre. Nous souhaitons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport permettant d'expliciter et d'évaluer ces taux de réfaction intervenant dans le calcul des prises en charge de cotisations au regard du coût réellement supporté par les régimes.

Le caractère théorique de ces dépenses forfaitaires, qui représentent en 2016 12,5 milliards sur les 20 milliards d'euros de dépenses du FSV, interroge quant au retour à l'équilibre observé pour les régimes de base. Les dépenses du FSV permettent-elles de remettre artificiellement à l'équilibre les régimes de base ou au contraire, sont-elles à la hauteur de leurs dépenses ? Aucune des personnes auditionnées n'a été en mesure de nous répondre.

Ce qui est certain cependant, c'est que les résultats des régimes de base et du FSV sont intrinsèquement liés. Ce constat invite à revoir les modalités de présentation des comptes du FSV et de la branche vieillesse au sein des lois de financement. Gérard Roche abordera cette question.

J'en viens maintenant à la persistance du déficit du FSV. La crise économique de 2009 a contribué à durablement dégrader le résultat du fonds avec l'envolée du nombre de chômeurs. Le compte du FSV, qui était à l'équilibre en 2008, a atteint un déficit de plus de 3 milliards d'euros en 2009 et 4 milliards d'euros en 2010. Il varie depuis lors entre 3,5 et 4 milliards d'euros chaque année.

Ce déficit s'explique principalement par l'instabilité et l'insuffisance des recettes du fonds, qui n'ont pas suivi le dynamisme des dépenses.

A son origine pourtant, le financement du FSV était simple et suffisant. Il bénéficiait de l'affectation de 1,3 point de CSG, ce qui avait permis au début des années 2000 de générer un excédent de 1,6 milliard d'euros. Cet excédent, accumulé au cours d'années relativement prospères économiquement, n'était d'ailleurs pas une anomalie pour un fond très exposé à la conjoncture.

Pourtant, dès 2001, les gouvernements successifs ont commencé à modifier le panier de recettes affectées au FSV en diminuant la fraction de CSG qui lui était attribuée.

En 23 ans d'existence, plus d'une quinzaine de recettes fiscales différentes ont été affectées au FSV, ce dernier n'ayant seulement connu que cinq années sans modification de ses ressources. L'inventivité de l'administration en matière de « plomberie » financière, qui est bien connue dans cette commission, a pleinement fonctionné pour le FSV.

La LFSS pour 2016 s'inscrit dans cette tradition en ayant modifié 12 milliards d'euros de recettes affectées au FSV. Elles sont désormais recentrées autour des seuls prélèvements sur les revenus du capital, conséquence de l'arrêt de Ruyter de la Cour de justice de l'Union européenne.

Je rappelle en deux mots le sens de cet arrêt : la France ne peut pas assujettir les revenus du capital des ressortissants d'un État-membre de l'Union Européenne à des prélèvements obligatoires finançant notre sécurité sociale si ces contribuables n'y sont pas affiliés et relèvent d'un autre système de protection sociale au sein de l'Union. Pour pouvoir conserver cette ressource qui représente 300 millions d'euros, le Gouvernement a décidé de réaffecter les 15 milliards d'euros que représentent les prélèvements sur les revenus du capital vers le FSV et la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades). En contrepartie, le FSV a abandonné les recettes tirées de la fraction de CSG sur les revenus d'activité et de remplacement ainsi que la part de contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) qu'il percevait.

La décision d'affecter les recettes des prélèvements sociaux sur les revenus du capital au FSV a conduit à la réorganisation de son compte, principalement en deux sections, de façon à s'assurer que ces recettes financent bien uniquement des dépenses de solidarité.

La première section, financée par ces nouvelles recettes, retrace les dépenses de solidarité, soit le minimum vieillesse et les cotisations pour les périodes non travaillées ; la seconde, qui est très partiellement financée par une fraction de la taxe sur les salaires, regroupe les dépenses considérées comme contributives au premier rang desquels le Mico.

En effet, si la première section est à peu près à l'équilibre avec les recettes tirées des prélèvements sur le capital, la seconde accuse un déficit structurel de plus de 3 milliards d'euros. Or, la règle d'infongibilité entre les deux sections, liées à l'impossibilité pour les prélèvements sur les revenus du capital de financer des dépenses contributives, conduit à ce que, à recettes constantes, la nouvelle section 2 du FSV soit durablement en déficit.

Je passe sur l'incertitude pesant sur la pérennité de la décision du Gouvernement de continuer à prélever de la CSG et de la CRDS sur ces revenus du capital tout en les affectant à des dépenses de solidarité et au remboursement de la dette sociale. Cela sera-t-il suffisant pour fermer le contentieux européen ? L'avenir nous le dira.

Notre rapport note cependant que ce nouveau panier de recettes est beaucoup plus erratique puisque les prélèvements sur les revenus du capital varient fortement d'une année sur l'autre.

Je termine cet état des lieux en évoquant la crise de gouvernance que rencontre actuellement le fonds.

Cette crise tient tout d'abord au fait que les deux organes chargés d'assurer le pilotage du FSV ne se sont plus réunis depuis 2013. Il en est ainsi du conseil d'administration, réunissant les administrations de tutelle que sont les ministères des affaires sociales et du budget, et du comité de surveillance, composé de parlementaires, des partenaires sociaux et des représentants des régimes de base.

Une importante réforme a pourtant été décidée par le décret du 7 octobre dernier, visant à intégrer administrativement le FSV à la Cnav. Cette réforme, qui n'a fait l'objet d'aucune concertation, suscite d'importantes réserves.

La première tient au fait que la Cnav se retrouve désormais à devoir contrôler les dépenses vers les régimes de base tout en étant le principal récipiendaire de ces financements. Le risque d'être « juge et partie » n'est donc pas exclu en cas de contentieux.

La seconde est liée à l'absence de cohérence entre un tel rapprochement et la volonté de cloisonner plus strictement les dépenses contributives et les dépenses de solidarité.

Enfin, la troisième a trait à la faible portée d'une telle intégration en termes d'économies, alors qu'il s'agit de la principale motivation. Elle devrait se traduire par la suppression de 5 des 6 équivalents temps plein du FSV. Les modalités sont en cours de négociation dans le cadre de la convention entre les administrations de tutelle et la Cnav.

La suppression de ces postes n'entraînera toutefois pas la suppression des tâches accomplies par les agents du fonds et qui ne seront pas si facilement mutualisées avec des fonctions existant déjà à la Cnav. C'est donc cette dernière qui devrait supporter le coût de la suppression de ces postes.

Voici donc les principaux constats que nous formulons dans ce rapport et qui ont servi de ligne directrice à nos propositions pour un FSV recentré et équilibré financièrement. Je laisse Gérard Roche vous exposer les pistes de notre réflexion.

M. Gérard Roche . - Au regard de ce bilan contrasté, la première piste que nous aurions pu emprunter était celle de la suppression du FSV. Cette piste nous est rapidement apparue comme une fausse route.

Le principal avantage que présente la suppression du FSV aurait été de simplifier les mécanismes de financement de l'assurance vieillesse en supprimant un intermédiaire. La perte de lisibilité du FSV et la persistance de son déficit font qu'il est aujourd'hui difficile de comprendre son rôle. Son existence permet même de masquer le déficit de la branche vieillesse. La difficulté à mettre en oeuvre le principe de la distinction au sein des dépenses de retraite pourrait conduire à remettre en cause l'idée qu'elle soit incarnée par un organe administratif extérieur aux régimes.

Deux éléments nous ont cependant conduits à privilégier la piste du maintien du FSV recentré sur sa mission initiale.

Il nous semble tout d'abord important, malgré les difficultés techniques qui ont été soulignées, de maintenir incarnée la distinction entre les dépenses de solidarité et les dépenses contributives afin de mettre en exergue le rôle très important de redistribution que jouent les retraites en France.

Ces dépenses de solidarité sont de trois types :

- les droits familiaux de retraite, qui renvoient à l'ensemble des avantages retraite procurés par la situation familiale. Ils doivent être financées par la Cnaf ;

- les mesures de solidarité professionnelle qui s'appuient sur l'existence d'une pension de retraite contributive, comme le Mico. Elles doivent être prises en charge directement par les régimes ;

- enfin, les dépenses de solidarité que nous appelons dans le rapport « coeur de système », qui se limitent au minimum vieillesse et à la prise en charge des cotisations pour périodes assimilées et qui doivent être financées par le FSV.

Au regard de l'importance que ces deux types de dépenses jouent dans le niveau de vie des retraités les plus modestes et des enjeux financiers considérables qu'elles représentent (16 milliards d'euros en 2016), il nous semble essentiel de maintenir un circuit de financement facilement identifiable par l'intermédiaire d'un fonds, permettant un meilleur contrôle démocratique les concernant.

C'est en effet le deuxième élément qui nous conduit à proposer le maintien du FSV. Il permet, d'une part, un contrôle parlementaire renforcé sur les dépenses qui sont à sa charge et d'autre part, une bonne information des partenaires sociaux dans le cadre du comité de surveillance.

Ces deux principes étant posés, nous formulons neuf propositions dans ce rapport parmi lesquelles deux sont particulièrement importantes.

La première vise à recentrer le FSV sur sa mission de financement des seules dépenses « coeur de système », c'est-à-dire sa mission d'origine : l'ASPA et la prise en charge des cotisations des périodes assimilées.

Cette proposition signifie concrètement supprimer la section 2 du compte du FSV à la fois dans ses dépenses et ses recettes. Elle a pour conséquence de basculer le financement du Mico directement auprès des régimes de base avec les recettes actuelles de la section 2 qui sont largement insuffisantes (3,5 milliards de dépenses pour 500 millions de recettes environ).

Cette proposition constitue donc l'« opération vérité » sur les comptes de la branche vieillesse évoquée en introduction : les régimes de base renouent avec un déficit d'environ 2,1 milliards d'euros (3 milliards d'euros de charges supplémentaires que composerait en partie l'excédent actuel de 900 millions d'euros). L'affichage est certes moins plaisant mais il correspond plus à la réalité, au regard du caractère largement théorique des dépenses du fonds.

Bien évidemment, les solutions à apporter à ce déficit ont constitué un point de divergence, le seul d'ailleurs, entre vos deux rapporteurs. Le Gouvernement soutient que la mise en oeuvre, à partir de 2020, de l'allongement de la durée de cotisation prévu dans la réforme de 2014 suffira à remettre à l'équilibre le système de retraites, qui bénéficiera par ailleurs de l'accord sur les régimes complémentaires. La majorité, au sein de cette commission, considère que ce ne sera pas suffisant et qu'un nouveau recul de l'âge légal s'avère nécessaire. J'ai soutenu l'idée, à l'automne dernier lors de la discussion du PLFSS, de repousser d'un an l'âge légal pour le porter à 63 ans. Cette mesure me semble suffisante et socialement acceptable. La question de l'équilibre des régimes de retraite est déjà au centre des débats dans la perspective des rendez-vous électoraux de 2017. Ce n'était pas l'objet de ce rapport de la trancher.

La deuxième proposition ambitieuse tient à la présentation des comptes du FSV au sein de la LFSS. Nous tenons à ce que la représentation nationale puisse formellement voter chaque année sur les comptes du fonds.

En revanche, l'article présentant les tableaux d'équilibre de l'ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et du régime général de sécurité sociale doit désormais évoluer afin d'intégrer une rubrique « FSV ». Le Parlement doit pouvoir délibérer et voter sur des tableaux d'équilibre consolidés alors qu'il ne s'exprime pour l'instant que sur les comptes des régimes de base et ensuite sur ceux du FSV. Nous reprenons ici une proposition constante de la Cour des comptes, formulée chaque année dans son rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale.

Un premier pas a été franchi, dans le dernier PLFSS, avec la présentation d'un tableau consolidé des comptes de la sécurité sociale dans l'annexe 4. Il faut désormais aller plus loin. Cette proposition permettrait de mettre un terme à la présentation des comptes de la sécurité sociale « hors FSV », largement reprise par la presse et qui n'a pas véritablement de pertinence.

Au-delà de ces deux propositions et outre la demande de rapport déjà évoquée, nous proposons qu'après la suppression de la section 2, les recettes et les dépenses du FSV puissent être stabilisées. Cette stabilité doit permettre de conserver la logique du fonds qui est d'assurer, avec des recettes suffisantes, le financement des dépenses au coeur du système de solidarité des retraites. Cette préconisation est évidemment suspendue aux évolutions futures du contentieux entre la France et les institutions européennes à propos des prélèvements sociaux sur les revenus du capital.

De même, nous souhaitons que soient réunis le plus rapidement possible le conseil d'administration et le comité de surveillance pour qu'ils puissent délibérer à la fois sur la réforme administrative en cours mais également sur les propositions que nous formulons. Nos auditions nous ont permis de mesurer la volonté des partenaires sociaux de reprendre leurs travaux au sein du comité de surveillance.

J'ai souvent assimilé le FSV à une « dépanneuse » pour expliquer comment les gouvernements successifs l'avaient utilisé pour financer des mesures qu'ils ne pouvaient faire porter aux régimes ou pour lui prendre une recette destinée à combler le déficit d'une autre branche de la sécurité sociale.

J'espère que ce rapport contribuera à sortir le FSV de cette image pour rendre enfin lisible et stable le circuit de financement de la solidarité dans le système de retraites, solidarité qui constitue, pour notre pays, un effort aussi important que nécessaire à l'égard des personnes âgées les plus modestes.

M. Jean-Noël Cardoux . - Je remercie nos rapporteurs pour leur travail sur un sujet effectivement technique. Je constate qu'ils ont réussi à se mettre d'accord à l'exception de la solution à apporter au besoin de financement de la branche vieillesse que votre proposition centrale permet de bien mettre en évidence. Je salue l'aspect pédagogique de votre rapport qui nous permet d'y voir plus clair sur le FSV : il n'est pas toujours évident de bien suivre son utilisation ni les évolutions de ses recettes. Je souscris pleinement à votre proposition de recentrage du fonds sur sa mission initiale de financement de l'ASPA et des cotisations pour périodes assimilées, qui constituent effectivement l'essence même du FSV. Ma question porte sur l'incertitude en matière de recettes. Je rappelle que la C3S qui rapportait à elle seule 2,5 milliards d'euros au FSV est en voie de suppression. Par ailleurs, les principales ressources désormais affectées au fonds, les prélèvements sociaux sur les revenus du capital, sont toujours menacées d'une remise en cause en cas de nouvelle décision de la CJUE. Quelle pourrait être alors la ressource qui compenserait la perte de ces recettes ? Un transfert de l'Etat vers le FSV pourrait-il être envisagé ?

M. Georges Labazée . - Il n'est pas fait état, dans votre rapport, de l'affectation au FSV de la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (Casa). Pouvez-vous m'assurer que le fonds n'en est plus affectataire ? En tant que rapporteurs de la loi sur l'adaptation de la société au vieillissement, nous avions justement veillé avec mon collègue Gérard Roche à ce que la Casa soit bien désormais affectée à l'investissement pour l'équipement des logements et des établissements accueillant des personnes dépendantes. La montée en charge du fléchage prévu dans la loi de décembre dernier étant en cours en 2016, je souhaiterais m'assurer que le FSV ne bénéficie plus de ce financement dès cette année.

M. Dominique Watrin . - Je salue à mon tour le caractère pédagogique et utile de ce rapport sur le FSV. En supprimant la section 2 du compte du FSV, vous basculez le financement du Mico vers les régimes de base mais d'autres dispositifs sont-ils concernés par cette suppression ? Un mot sur les propositions évoquées pour financer le besoin de financement de la branche vieillesse qui, dans le cadre de votre proposition, serait désormais portée par les régimes de base. Bien évidemment, il nous est difficile d'agréer les pistes évoquées : le recul de l'âge légal représente un recul social évident et le statu quo proposé par le Gouvernement soulève un risque de recettes insuffisantes. Je suis surpris par vos développements sur le caractère erratique des recettes de prélèvements sociaux sur les revenus du capital. Je ne vois pas les revenus du capital baisser. La presse s'est fait encore l'écho ce matin de la progression de l'ordre de 6 à 7 % des fortunes des ultra-riches, celles dépassant les 20 millions d'euros. Le patrimoine financier des Européens devrait par ailleurs augmenter de plus de 7 000 milliards d'euros d'ici à 2020. Pouvez-vous donc préciser votre propos ? N'est-ce pas précisément la bonne piste pour financer les 2 milliards d'euros de déficit restants de la branche vieillesse ?

M. Yves Daudigny . - Je félicite à mon tour les deux rapporteurs pour la pédagogie de leur rapport, rendu dans des délais très brefs. S'agissant de la présentation séparée des comptes de la sécurité sociale et du FSV, je constate que la presse reprend constamment les chiffres du FSV dans les analyses qui sont faites sur les résultats des comptes de la sécurité sociale. C'est le cas par exemple aujourd'hui, au lendemain de la présentation de bons résultats, meilleurs qu'attendus, par la Commission des comptes de la sécurité sociale. J'adhère toutefois à votre proposition permettant au Parlement de voter sur des comptes consolidés. Concernant l'acceptabilité des dépenses de solidarité dans la branche vieillesse, je souscris également à votre proposition permettant de clarifier le circuit de financement. L'évolution des recettes du fonds constitue sans doute la question la plus importante de votre rapport. Le point de départ est simple, vous l'avez rappelé : les cotisations doivent financer les dépenses contributives et la CSG sur l'ensemble des revenus les dépenses de solidarité. N'oublions pas la CRDS qui finance la dette sociale. A partir de ce schéma simple, le « plombier » qu'est Bercy opère des modifications constantes dans la tuyauterie et recours in fine à un transfert d'une part de TVA. Le système atteint aujourd'hui un tel degré de complexité que tout ce qui pourra permettre d'avancer vers plus de simplicité me semble le bienvenu. Vos propositions y contribuent.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe . - C'est bien une « opération vérité » qui est proposée. Elle était nécessaire ! J'avais déjà fait la proposition, lors d'un précédent PLFSS, d'intégrer les comptes du FSV dans ceux des régimes de base de la sécurité sociale mais elle n'avait pas été suivie. Force est de constater que le Gouvernement, comme ceux qui l'ont précédé d'ailleurs, n'y tient pas. Le FSV est devenu au fil des années un « fonds de défaisance » pour toutes les dépenses que le Gouvernement ne peut faire porter aux régimes. La typologie des dépenses de solidarité que vous élaborez me paraît pertinente avec comme conséquence le basculement du financement du Mico vers les régimes de base. Il fait apparaitre le véritable déficit de la branche vieillesse qui s'élève à 2,1 milliards d'euros. Je partage l'interrogation de notre collègue Jean-Noël Cardoux sur les recettes du FSV. Pour l'instant, il est financé avec les prélèvements sociaux sur les revenus du capital, ce qui me paraît d'ailleurs tout à fait moral. La solidarité prend ici tout son sens. La question de notre collègue Dominique Watrin est pertinente : pouvez-vous nous en dire plus sur les variations annuelles de ces recettes ?

Mme Nicole Bricq . - La Cour des comptes n'a-t-elle jamais travaillé sur ce sujet ?

Mme Catherine Génisson . - D'après nos informations, elle devrait le faire prochainement. Le rapport annuel sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale aborde bien évidemment le FSV mais à ce jour la Cour n'a jamais publié de rapport spécifique sur le sujet.

M. Gérard Roche . - L'arrêt de Ruyter n'en a pas fini de faire parler de lui. Si une nouvelle décision de la Cour de justice de l'Union européenne devait remettre en cause l'affectation des prélèvements sociaux sur les revenus du capital, les recettes du FSV seraient effectivement fragilisées. Nous évoquons dans le rapport, comme notre rapporteur général l'avait déjà suggéré lors de la discussion du PLFSS à l'automne dernier, la piste d'une affectation de ces recettes directement à l'Etat qui financerait alors le FSV par un transfert. Je note au passage que dans le cas d'une amélioration de la situation du chômage, les comptes du FSV pourraient assez rapidement se redresser. En effet, un taux de chômage autour de 8 % permettrait de remettre le Fonds à l'équilibre à recettes constantes.

Je réponds à l'inquiétude de Georges Labazée. La Casa n'intervient plus dans le financement du FSV. Je rappelle que dans le cadre de la loi sur le vieillissement, le Sénat a veillé à ce que si l'intégralité des recettes de la Casa n'était pas utilisée, le reliquat soit bien mis en réserve pour le fonds d'investissement pour la construction des EHPAD.

Au sujet du caractère erratique des recettes tirées des prélèvements sur les revenus du capital, je rappelle qu'elles proviennent des revenus du patrimoine et des revenus de placement. L'instabilité de ces prélèvements est due à leurs différentes assiettes (revenus immobiliers, placements obligataires ou en action) qui varient elles-mêmes fortement chaque année. Une variation des recettes entre 5 et 10 points n'est pas rare d'une année sur l'autre.

Pour répondre à la question de Dominique Watrin sur la section 2 du FSV, il est vrai que cette section retrace les dépenses du Mico mais aussi de la majoration de pension pour conjoint à charge, qui est un dispositif peu onéreux (38 millions d'euros) et en voie d'extinction à la suite de sa suppression par la réforme des retraites de 2010. Nous proposons qu'elle soit financée par la Cnaf.

Je rejoins Yves Daudigny sur la très grande difficulté pour y voir clair parmi l'ensemble des dépenses de solidarité dans le système des retraites. Nous proposons donc une typologie, certes imparfaite, mais qui justifie l'existence du FSV chargé de financer les dépenses de solidarité nationale.

Pour conclure, je reviens sur la nécessité de relancer les organes de gouvernance du FSV. Les partenaires sociaux doivent être informés sur les dépenses de solidarité. Il faut que le FSV reprenne vie !

Mme Catherine Génisson . - Ce sujet est effectivement d'une grande complexité et en particulier les règles de calcul permettant d'établir les dépenses forfaitaires du fonds aux régimes pour la prise en charge des cotisations au titre des périodes assimilées. Nous demandons à ce qu'un rapport soit remis au Parlement pour expliciter et évaluer les taux de réfaction qui sont à la base de ces règles. Il permettra d'y voir plus clair y compris pour celles et ceux qui les utilisent car toutes les personnes auditionnées ont considéré que ces taux de réfaction représentaient des « cotes mal taillées ». Ce n'est sans doute pas une source d'économie mais ce sera un plus pour la transparence.

M. Gérard Roche . - Et ce d'autant plus dans la situation à venir où la Cnav va devenir « juge et partie », ce qui renforce l'exigence de transparence et de mise en place de procédures de contrôle interne.

M. Alain Milon, président . - Merci d'avoir éclairé notre commission sur ce sujet effectivement complexe. La commission autorise-t-elle la publication de ce rapport ? Il sera donc publié.

La commission autorise la publication du rapport d'information.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

___________

Dominique Libault, directeur de l'Ecole nationale supérieure de la sécurité sociale

Direction de la sécurité sociale
Thomas Fatome,
directeur
Erwan Le Bras, chef du bureau « régimes de retraite de base »
Mathilde Delpy, chef du bureau de la synthèse financière


• Table ronde des syndicats de salariés

- Confédération générale du travail (CGT)

Jean-Louis Butour , administrateur CGT de la Cnav

Eric Aubin , dirigeant CGT en charge de la protection sociale

- Force ouvrière (FO)

Philippe Pihet , secrétaire confédéral

Gérard Rivière , assistant confédéral au secteur protection sociale

- Confédération française démocratique du travail (CFDT)

Jocelyne Cabanal , secrétaire nationale

Virginie Aubin , secrétaire confédérale

- Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC)

Jean-Louis Deroussen , responsable confédéral retraite

- Confédération française de l'encadrement - Confédération générale des cadres (CFE-CGC)

Jean-Yves Delannoy , délégué national secteur Protection sociale

Leslie Robillard , chargée d'études secteur Protection sociale

Mutualité sociale agricole (MSA)
Franck Duclos
, directeur délégué aux politiques sociales
Sonia El-Heit
, responsable du département retraite

Unédic
Vincent Destival
, directeur général
Marie Morel , directrice service juridique

Conseil d'orientation des retraites (COR)
Pierre-Louis Bras
, président
Yves Guégano , secrétaire général

Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV)
Gérard Rivière
, président
Pierre Mayeur , directeur général

Mouvement des entreprises de France (Medef)
Delphine Benda
, directrice de la protection sociale
Clara Tousch
, chargée de mission à la Direction de la protection sociale
Marine Binckli , chargée de mission à la Direction des affaires publiques

Fonds de solidarité vieillesse (FSV)
Bernard Billon
, directeur,

Frédéric Favié , directeur-adjoint
Thierry Lemaine, agent-comptable

Pôle emploi
Sylvie Clément
, chargée de mission, direction des statistiques, des études et de l'évaluation
Thierry Lafargue , chargé de mission, direction

Régime social des indépendants (RSI)
Gérard Quévillon
, président
Stéphanie Deschaume , directrice de Cabinet
Olivier Maillebuau , attaché de direction

ANNEXES

_______

Liste des allocations de chômage

Code mnémo-
nique

Type d'allocation

Champ FSV L.135-2-4°

Hors champ FSV mais validation de trimestres

Dispositifs exclus des droits à l'assurance vieillesse

ARE

Allocation d'aide au retour à l'emploi (AUD Allocation unique dégressive)

X

ARE-J

Allocation d'aide au retour à l'emploi pour les emplois jeunes

X

AREF

Allocation d'aide au retour à l'emploi formation (hors convention de gestion)

X

ASR

Allocation spécifique de reclassement (CRP) (convention de reclassement personnalisé)

X

ASR-ARE

Allocation spécifique de reclassement = ARE (CRP - convention de reclassement personnalisé)

X

ATA

Allocation temporaire d'attente (succède à l'Allocation d'Insertion AI)

X

ASS

Allocation de solidarité spécifique

X

ASFNE

Allocation spéciale du FNE

X

CATS

Allocation de cessation d'activité de certains travailleurs salariés

X

ASP

Allocation de sécurisation professionnelle

X

ASP-ARE

Allocation de sécurisation professionnelle

X

AFF

Allocation fin de formation (remplacée par l'AFDEF puis le R2F) (expire le 30/06/12)

X

AER-R

Allocation équivalent retraite de remplacement (remplacée par l'ATS)
AER a des bénéficiaires en cours

X

Préretraite

Préretraite

X

ATS - R

Allocation transitoire de solidarité de remplacement ( du 01/07/11 au 31/12/2014)

X

ATS - C

Allocation transitoire de solidarité de complément ( du 01/07/11 au 31/12/2014)

X

AFDEF

Allocation en faveur des demandeurs d'emploi en formation

X

RFF/R2F

Rémunération de fin de formation

X

AER-C

Allocation équivalent retraite de complément (remplacée par l'ATS-C mais AERC a des bénéficiaires en cours)

X

ATP

Allocation de transition professionnelle (CTP - contrat de transition professionnelle)

X

APS

Allocation de professionnalisation et de solidarité (intermittents du spectacle)

X

APS-F

Allocation de professionnalisation et de solidarité (intermittents du spectacle)

X

AFD

Allocation de fin de droit (intermittents du spectacle) à partir de 2008

X

AFD-F

Allocation de fin de droit formation (intermittents du spectacle) à partir de 2008

X

RSP

Rémunération publique des stagiaires

X

ARPE

Allocation de remplacement pour l'emploi (expire le 31/12/11)

X

ADR

Aide différentielle de reclassement

X

ASCRE

Aide spécifique complémentaire de retour à l'emploi

X

ARCE

Aide à la reprise et à la création d'entreprise

X

IDR

Indemnité différentielle de reclassement (CRP - convention de reclassement personnalisé)

X

ACO

Allocation complémentaire

X

APP

Allocation spéciale du FNE préretraite progressive

X

RFPE

Rémunération Formation Pôle Emploi

X

PRP

Allocation Préretraite Progressive (abrogé le 1 er janvier 2005)
(stock de bénéficiaires)

X

AEPE

Allocation Exceptionnelle de Retour à l'Emploi (supprimé)

X

ASC

Allocation Spécifique de Conversion (supprimé)

AFSP-F

Allocations du Fonds de Professionnalisation et de Solidarité Formation (supprimé remplacé par APS)

X

Comptes prévisionnels de 2016 à 2019

CHARGES

2016

%

2017

%

2018

%

2019

%

Prises en charge de cotisations

12 956

2

13 029

1

12 841

- 1

13 004

1

Au titre du volontariat service civique

29

2

30

2

31

2

31

2

Au titre du chômage

11 031

2

11 013

0

10 758

- 2

10 840

1

Au titre de la maladie

1 645

5

1 730

5

1 792

4

1 866

4

Au titre des stagiaires de la formation professionnelle

233

2

238

2

243

2

249

3

Au titre des apprentis

18

0

18

0

18

0

18

0

Prises en charge de prestations

3 095

- 2

3 112

1

3 151

1

3 200

2

Au titre du minimum vieillesse

3 095

- 2

3 112

1

3 151

1

3 200

2

Transferts avec les régimes complémentaires

339

4

352

4

355

1

353

- 1

Autres charges nettes

157

1

162

3

166

3

171

3

Sous-total Section I

16 546

16 656

1

16 514

- 1

16 727

1

Au titre du Mico

3 490

- 11

3 490

0

3 490

0

3 490

0

Au titre des majorations pour conjoint à charge

39

- 5

37

- 5

34

- 0,8

32

- 5

Sous-total Section II

3 529

3 527

0

3 524

0

3 522 522

0

Charges de gestion courante

1

0

1

1

1

1

1

1

TOTAL CHARGES

20 075

20 1822

1

20 038

- 1

20 249

1

PRODUITS

2016

%

2017

%

2018

%

2019

%

Contributions sociales et impôts nets

15 960

- 3

16 151

1

16 488

2

16 901

3

CSG nette

9 440

- 11

9 523

1

9 720

2

9 961

2

CSG sur revenus patrimoine / placement

9 499

869

9 585

1

9 784

2

10 027

2

Reprise nettes des provisions et ANV sur CSG

- 60

0

- 61

3

- 64

4

- 66

4

Prélèvement social revenus du capital

4 091

4 151

1

4 239

2

4 346

3

Prélèvement solidarité sur les revenus du capital

2 431

2 467

1

2 520

2

2 584

3

Reprises nettes sur impôts et taxes

- 2

- 84

9

+

10

3

10

4

Autres produits nets

- 36

0

- 36

0

- 36

0

- 36

0

Sous-total Section I

15 924

16 116

1

16 453

2

16 865

3

Taxe sur les salaires

270

- 93

279

3

289

4

300

4

Contributions sur avantages de retraite et de préretraite

186

- 4

191

3

198

3

205

4

Redevance (licence UMTS)

37

0

37

0

37

0

37

0

Sous-total Section II

493

506

3

523

3

541

3

TOTAL PRODUITS

16 417

16 622

1

16 976

2

17 406

3

RÉSULTATS SECTION I

- 622

- 540

- 13

- 61

- 89

138

++

RÉSULTATS SECTION II

- 3 036

- 3 020

- 1

- 3 001

- 1

- 2 981

- 1

RESULTATS FSV

- 3 658

- 3 560

- 3

- 3062

- 14

- 2 843

- 7

Source : Annexe 8 PLFSS pour 2016


* 1 Commission des comptes de la sécurité sociale, juin 2016.

* 2 Rapport fait au nom de la commission des affaires sociales du Sénat sur le projet de loi relatif aux pensions de retraite et à la sauvegarde de la protection sociale, n°370, Alain Vasselle, 17 juin 1993.

* 3 Cour de justice de l'Union européenne, 26 juin 2015, ministre de l'économie et des finances, contre Gérard de Ruyter.

* 4 Décret n° 2015-1240 du 7 octobre 2015 portant dispositions relatives au fonds de solidarité vieillesse.

* 5 Instauré en 1956, le minimum vieillesse constitue historiquement le premier minimum social. Depuis 2007, les différentes allocations de solidarité constitutives du minimum vieillesse ont été regroupées au sein de l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA). Versée sous forme d'allocation différentielle, l'ASPA permet de garantir un niveau de vie proche du seuil de pauvreté à toute personne âgée au minimum de 65 ans et qui réside sur le territoire français. Ce seuil est fixé depuis 2014 à 800 euros par mois pour une personne seule et à 1 242 euros mensuels pour un couple. L'ASPA est perçue sur demande et est recouvrable sur succession au-delà d'un actif net supérieur à 39 000 euros.

* 6 ME : cette majoration de pension de 10 % est accordée à tous les parents ayant élevé au moins trois enfants (pendant au moins 9 ans avant leur 16 e anniversaire). Elle concerne la pension du principal régime de base de l'assuré.

* 7 MCC : d'un montant de 609,80 euros par an (fixé en 1976 et non modifié depuis lors), cette majoration de pension s'ajoute à la pension vieillesse de base et est servie sous condition de ressources. La MCC a été supprimée par la réforme des retraites de 2010 mais continue à être versée pour les pensionnés qui en bénéficiaient au 31 décembre 2010 et ce tant qu'ils en respectent les conditions d'attribution.

* 8 Un chômeur indemnisé peut valider un trimestre dès qu'il a atteint 50 jours d'indemnisation.

* 9 Les périodes de service national étaient assimilées à une période d'assurance donnant lieu à une validation gratuite par les régimes de retraite jusqu'en 2003. La suppression de la conscription a entraîné l'extinction du dispositif.

* 10 Pour une présentation des règles de calcul des prises en charge de cotisations, voir les développements et l'encadré p. 24 et suivantes.

* 11 Loi n° 94-1162 du 29 décembre 1994 de finances pour 1995.

* 12 Loi n° 95-5 du 3 janvier 1995 relative à la pension de vieillesse des anciens combattants en Afrique du Nord.

* 13 Loi n° 2009-1646 du 24 décembre 2009 de financement de la sécurité sociale pour 2010. Pour les assurés en arrêt de travail, un trimestre est validé gratuitement dès le 60 e jour d'indemnisation (indemnité journalière, pension d'invalidité, rente AT-MP).

* 14 Depuis 2012, les indemnités journalières « maternité » sont reportées au compte de l'assurée à hauteur de 125 % du SMIC et peuvent ainsi entrer dans le calcul du salaire annuel moyen. Toutefois, l'arrêté précisant les modalités de mise en oeuvre n'a toujours pas été pris.

* 15 Loi n° 2000-242 du 14 mars 2000 relative aux volontariats civils (et) à la réforme du service national. Ces périodes sont prises en charge sur le modèle des périodes de service national.

* 16 Loi n° 2010-241 du 10 mars 2010 relative au service civique.

* 17 Loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire.

* 18 Loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites.

* 19 Loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites.

* 20 Décret n° 2004-1491 du 30 décembre 2004 portant attribution d'un versement exceptionnel aux personnes bénéficiaires de l'allocation supplémentaire de l'article L. 815-2 du code de la sécurité sociale et de l'allocation viagère aux rapatriés âgés.

* 21 Décret n° 2008-241 du 7 mars 2008 portant attribution d'un versement exceptionnel aux personnes bénéficiaires de l'allocation de solidarité aux personnes âgées, de l'allocation supplémentaire vieillesse et de l'allocation viagère aux rapatriés âgés.

* 22 Décret n° 2014-1711 du 30 décembre 2014 instituant un versement exceptionnel au bénéfice des titulaires de pensions de retraite inférieures à 1 200 euros mensuels

* 23 L'Association générale des institutions de retraite des cadres (Agirc) et l'Association pour les régimes de retraite complémentaire des salariés (Arrco).

* 24 L'allocation de solidarité spécifique (ASS), les allocations spéciales du Fonds national de l'emploi (ASFNE) ou encore les allocations de préretraite progressive.

* 25 L'assiette de cotisation pour la validation de ces périodes était la suivante : salaire perçu au cours de la dernière année civile d'activité X taux de cotisation fixés par la convention Agirc-Arrco (4 % pour l'Arrco, taux progressifs par tranche de salaire pour l'Agirc).

* 26 Convention du 23 mars 2000.

* 27 Prévu initialement par la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2001, le transfert du financement de ce règlement au FSV a été censuré par le Conseil constitutionnel au motif que cette disposition ne relevait pas du champ de la LFSS, les régimes complémentaires n'étant pas considérés comme des régimes de base de la sécurité sociale. La disposition a finalement été adoptée dans le cadre de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale.

* 28 Rapport d'information n° 382 fait au nom de la commission des affaires sociales du Sénat sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale : les fonds sociaux, Charles Descours, Jean-Louis Lorrain et Alain Vasselle, juin 2001.

* 29 Rapport d'étape sur la clarification et la diversification des ressources des régimes de la protection sociale, Haut Conseil de financement de la protection sociale, juin 2013.

* 30 Un dispositif comparable existe au sein des régimes de la fonction publique (le minimum garanti) et du régime des exploitants agricoles (la pension minimale de référence).

* 31 Loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015.

* 32 Voir les développements sur la réorganisation du compte du FSV p. 39 et suivantes.

* 33 Rapport n° 134 fait au nom de la commission des affaires sociales du Sénat sur le PLFSS pour 2016, tome VII, Jean-Marie Vanlerenberghe, novembre 2015.

* 34 Rapport sur le projet de loi relatif aux pensions de retraite, juin 1993, déjà cité.

* 35 On citera en particulier : Les droits non contributifs dans les régimes complémentaires Arrco-Agirc , document n° 7 de la séance plénière du 25 mai 2011 ; Financement des dispositifs de solidarité au régime général, document n° 7 de la séance plénière du 24 octobre 2012 ; Le financement des dispositifs de solidarité en termes de droits à retraite des salariés du secteur privé, document n° 11 de la séance plénière du 26 novembre 2013.

* 36 Le COR souligne en effet qu'une vision exhaustive de cette solidarité implique de considérer non seulement les mécanismes de solidarité du système de retraite mais aussi l'ensemble des transferts entre actifs et inactifs opérés dans le cadre de la fiscalité directe et des prestations sociales destinées aux personnes âgées (aides au logement, allocation personnalisée d'autonomie...).

* 37 Selon la classification retenue dans le rapport de la commission pour l'avenir des retraite présidée par Yannick Moreau, Nos retraites demain : équilibre financier et justice , juin 2013. Vos rapporteurs considèrent toutefois que cette typologie, si elle permet de bien comprendre l'étendue des dispositifs non-contributifs, inclut parmi ces derniers des dispositifs ne relevant pas, selon eux, de la solidarité nationale. Il en est ainsi des pensions de réversion qui participent en réalité au revenu de remplacement d'un ménage pour lequel ce dernier a contribué.

* 38 Lors de leur audition par vos rapporteurs, les représentants de la MSA ont d'ailleurs regretté l'absence de prise en charge de la PMR par le FSV alors même que les exploitants agricoles s'acquittent de la CSG.

* 39 Loi n°2003-775 du 21 août 2013 portant réforme des retraites.

* 40 Décret n° 2012-247 du 2 juillet 2012 relatif à l'âge d'ouverture du droit à pension de vieillesse.

* 41 D'après les chiffres de la commission des comptes de la sécurité sociale (septembre 2015).

* 42 Pour cette majoration, la Cnaf finançait intégralement, depuis 2011, le FSV qui lui-même abondait les régimes. La LFSS pour 2016 a décidé de ne plus faire transiter cette dépense par les comptes du fonds.

* 43 L'AVPF permet aux parents de trois enfants ou plus, ne travaillant pas ou qu'à temps partiel, de prendre en charge les cotisations de retraite afin de valider les périodes concernées pour lesquelles l'équivalent d'un Smic est reporté au compte. Au final, le bénéficiaire de l'AVPF valide des trimestres qui sont également réputés cotisés au moment de la liquidation des droits à la retraite. Ce dispositif est soumis à conditions, en particulier de ressources du foyer.

* 44 Une femme valide automatiquement quatre trimestres à la naissance d'un enfant ; au titre de l'éducation d'un enfant, quatre trimestres peuvent également être validés soit intégralement par un parent soit à parts égales entre les deux. Ces trimestres sont utiles si le parent ne dispose pas, à l'issue de sa carrière, de la totalité des trimestres requis.

* 45 Pour une analyse plus complète des composantes de la dépense liée au chômage et à leurs évolutions, voir p. 34 et suivantes.

* 46 On rappellera que le paiement d'une cotisation minimale permet aux ressortissants du régime non-salarié agricole de valider quatre trimestres et à ceux du régime social des indépendants trois trimestres. La validation des trimestres permet l'ouverture des droits mais ne joue pas sur le niveau de pension.

* 47 Des prévisions moins optimistes ont été présentées en juin 2016 par la Commission des comptes de la sécurité sociale qui estime que le déficit du FSV devrait atteindre 3,9 milliards d'euros.

* 48 Ainsi d'un article des Échos , du 16 mars 2016, titrant : « Le déficit du régime général a été ramené à 6,6 milliards d'euros en 2015 » , alors même que le contenu de l'article expliquait bien la nuance à apporter si l'on prenait en compte le déficit du FSV : « Le constat est plus nuancé si l'on additionne les résultats du fonds de solidarité vieillesse, qui finance les retraites des chômeurs, et qui paie au prix fort le niveau très élevé du nombre de demandeurs d'emplois (...). Le solde total (régime général+FSV) a donc atteint -10,6 milliards l'an passé » .

* 49 Pour rappel : Dépense chômage = nombre de chômeurs au sens du FSV [nombre de chômeurs indemnisés+ 29 % du nombre de chômeurs non indemnisés] X coût individuel du chômeur [90 % Smic horaire X 1820h (soit la durée annuelle du travail à raison de 35h hebdomadaires X taux de cotisation retraite (soit en 2016 17,65 %)].

* 50 Sur 35 types d'allocations versées par Pôle emploi en 2016 : 12 autres types d'allocations chômage sont hors champs du FSV mais ouvrent droit à validation de trimestres, tandis que les 9 derniers types d'allocation sont exclus des droits à l'assurance vieillesse. Cf. annexe n° 1.

* 51 Article 9 de la loi n° 2010-1594 du 20 décembre 2010 de financement de la sécurité sociale pour 2011.

* 52 Loi n° 2015-1702 du 22 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale pour 2016.

* 53 La CSG frappe cinq types de revenus : les revenus d'activité, les revenus de remplacement (chômage, retraite...), les revenus du patrimoine, les revenus de placement (ces deux dernières catégories constituant les revenus dits du capital) et les sommes engagés ou les produits réalisés à l'occasion des jeux.

* 54 Loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel.

* 55 Disponibles en ligne, ils sont toutefois difficiles à trouver et mériteraient d'être plus accessibles depuis le site internet du FSV.

* 56 Souligné par vos rapporteurs, voir le développement sur les conséquences de cet arrêt sur l'organisation du compte du FSV p. 43 et suivantes.

* 57 Pour rappel, le taux de CSG diffère selon la catégorie de revenus :

- 7,5 % sur les revenus d'activité ;

- 6,6 % sur les revenus tirés de l'indemnisation du chômage ;

- 6,2 % sur les pensions de retraite ;

- 6,9 % sur les sommes engagées ou produits réalisés à l'occasion des jeux.

* 58 Pour une synthèse complète sur ce contentieux, on se réfèrera utilement à l'étude sur le cadre juridique actuel applicable aux cotisations et contributions sociales réalisée par Jean-Luc Matt et publiée dans le rapport du Haut Conseil sur le financement de la protection sociale sur La lisibilité des prélèvements et l'architecture financière des régimes sociaux, juillet 2015.

* 59 La Cour de justice des communautés européennes avait d'ailleurs jugé contraire au droit communautaire la soumission à la CSG des revenus d'activité pour un travailleur exerçant son activité en France mais affilié dans un autre État-membre des communautés (CJCE, 15 février 2000, Commission contre France). L'arrêt de Ruyter réaffirme cette contradiction pour les revenus du capital qui continuaient à être soumis à la CSG et à la CRDS depuis 2000 alors que la CSG ne peut depuis lors être prélevée sur des revenus d'activité que s'ils sont perçus en France (critère de territorialité) et si le travailleur est bien affilié à la sécurité sociale française (critère d'affiliation).

* 60 Selon la première estimation évoquée devant votre commission par le secrétaire d'État au budget, Christian Eckert, le 8 octobre 2015.

* 61 Cette option avait d'ailleurs la préférence du rapporteur général de votre commission.

* 62 Compte-rendu de l'audition de Christian Eckert devant votre commission, 8 octobre 2015.

* 63 Pour une vision complète sur la réaffectation des prélèvements sociaux sur les revenus du capital à la suite de l'arrêt de Ruyter, voir le tome VII du rapport de votre commission sur le PLFSS pour 2016, en particulier le commentaire de l'article 15 (pp. 83 et suivantes).

* 64 Cf. annexe 2 Les comptes prévisionnels du FSV de 2016 à 2019.

* 65 Cf. annexe 2.

* 66 Pour une analyse de cet accord, voir le rapport sur la LFSS pour 2016 de la commission des affaires sociales du Sénat et plus particulièrement le tome V sur l'assurance vieillesse, Gérard Roche, novembre 2015.

* 67 Audition de François-Xavier Selleret, directeur général de l'Agirc-Arrco, devant la Mecss, le 3 novembre 2015, annexé au tome V du rapport sur la LFSS pour 2016.

* 68 Le dernier Président du comité de surveillance était le député Dominique Dord.

* 69 Décret du 24 mars 2016 portant nomination de Bernard Billon, président du conseil d'administration du fonds de solidarité vieillesse.

* 70 Décret n° 2015-1240, déjà cité.

* 71 Audition du 14 octobre 2015, voir compte-rendu annexé au tome V du rapport de votre commission sur le PLFSS pour 2016, p. 19. Déjà cité.

* 72 Dans son rapport sur le PLFSS pour 2016, p. 18.

* 73 Rapport de votre commission sur le financement de la sécurité sociale pour 2016, tome VII, p. 137, déjà cité.

* 74 D'après le mot du rapporteur général, Jean-Marie Vanlerenberghe, lors de l'audition du secrétaire d'État au budget, Christian Eckert, par la Mecss le 5 avril 2016.

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