TROISIÈME PARTIE - REPENSER LE FNADT POUR RENFORCER SON EFFICACITÉ EN FAVEUR DES TERRITOIRES LES PLUS FRAGILES

I. DE NOUVELLES ORIENTATIONS POLITIQUES POUR LE FNADT AU SERVICE DE LA RÉUSSITE DU DÉVELOPPEMENT RURAL

A. MAINTENIR LE FNADT TOUT EN L'INSCRIVANT DANS LE CONTEXTE INSTITUTIONNEL DE DEMAIN

1. Le FNADT : un instrument financier nécessaire, qui doit cependant évoluer

En débutant ce contrôle budgétaire, je n'ai exclu aucune hypothèse quant à l'avenir du FNADT, son maintien ou sa réorganisation. Le FNADT représente en effet un faible montant, comparativement à d'autres dotations comme la DETR, et seulement 5 % de la contribution de l'État aux CPER 2015-2020, sans pour autant faire l'objet d'un ciblage précis. La recherche d'une plus grande efficience aurait donc pu conduire à proposer l'intégration du FNADT au sein d'un autre outil de financement.

Il ressort toutefois des auditions, déplacements et consultations écrites effectués un bilan globalement positif du FNADT , malgré son manque de lisibilité et ses difficultés d'évaluation.

Sa souplesse et sa polyvalence ont été largement citées comme des atouts indéniables pour permettre à l'État de soutenir des projets innovants ou complexes, contribuant à la politique d'aménagement du territoire. La possibilité pour le FNADT de financer à la fois des dépenses d'investissement et de fonctionnement, ainsi que des acteurs privés, en fait un outil complémentaire, et non concurrent, de la DETR, du FSIL et des fonds structurels européens . À cet égard, les doctrines définies dans plusieurs régions, consistant à privilégier l'utilisation de certaines aides à différentes échelles territoriales ou à rechercher la complémentarité entre la DETR et le FSIL, participent à un effort, souhaitable, de mise en cohérence des moyens budgétaires de l'État.

Compte tenu de sa complémentarité, il apparaît nécessaire de conserver le FNADT . Cependant, les mutations institutionnelles, la nouvelle organisation territoriale et les logiques locales résolument tournées vers des stratégies globales de développement et de contractualisation, ainsi que la nécessité de réduire les inégalités territoriales qui se creusent, doivent nous conduire à repenser le rôle du FNADT pour le rendre plus efficace .

2. Un paysage institutionnel en mutation sous l'effet de la réforme territoriale

Si certains des objectifs de la loi d'orientation du 25 juin 1999 pour l'aménagement et le développement durable du territoire demeurent d'actualité - notamment le soutien aux territoires ruraux en déclin et aux zones urbaines en difficulté - les lois de réforme territoriale adoptées au cours des dernières années 55 ( * ) conduisent à des changements institutionnels dont la politique d'aménagement du territoire doit tenir compte.

Parmi les évolutions en cours revêtant une importance spécifique pour le FNADT, il convient de citer :

- l' élargissement et le renforcement des intercommunalités . Selon l'assemblée des communautés de France (AdCF), les intercommunalités de plus de 50 communes, au nombre de 46 au 1 er janvier 2016, pourraient être quatre fois plus nombreuses début 2017 56 ( * ) au regard des projets de schémas départementaux de coopération intercommunale. En outre, le nombre d'intercommunalités devrait diminuer de 40 % , passant d'environ 2 000 à ce jour à 1 300 début 2017 ;

- les nombreux regroupements de communes au sein de communes nouvelles . Selon l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), 1 090 communes se sont regroupées en 317 communes nouvelles en 2015, alors même que les fusions et associations ne représentaient auparavant que quelques communes chaque année. Ce mouvement devrait s'amplifier ;

- la mise en place des métropoles , désormais au nombre de quinze (Nice, Lyon, Bordeaux, Brest, Grenoble, Lille, Montpellier, Nantes, Rennes, Rouen, Strasbourg, Toulouse, Nancy, Grand Paris, Aix-Marseille-Provence) ;

- l'établissement d'une nouvelle carte des régions , dont le nombre a été réduit de 22 à 13 en métropole, et la réforme parallèle de l'administration territoriale de l'État.

Ces profonds changements institutionnels ont été décrits et analysés avec justesse par nos collègues membres de la commission des lois, Mathieu Darnaud, René Vandierendonck, Pierre-Yves Collombat et Michel Mercier, dans le cadre d'une mission de contrôle et de suivi de la mise en oeuvre de la réforme territoriale 57 ( * ) .

3. De nouveaux outils contractuels en faveur du développement des territoires ruraux

Parallèlement aux changements institutionnels en cours, émerge une nouvelle façon de penser et de concevoir le développement local et l'aménagement du territoire, à laquelle le FNADT doit s'adapter. Une approche intégrée, reposant sur des stratégies globales définies au niveau local , est désormais privilégiée ; l'objectif étant de donner les moyens aux collectivités locales d'être actrices de leur propre développement et de s'inscrire dans une vision prospective.

Dans le cadre de la réforme de la politique de la ville 58 ( * ) , des contrats de ville uniques ont été créés, tenant compte des enjeux de développement économique, de développement urbain et de cohésion sociale et associant les citoyens concernés. À la fin novembre 2015, 122 contrats de ville avaient été signés sur les 390 prévus. Parmi les parties prenantes à ces contrats, 120 communes sont éligibles à la dotation politique de la ville (DPV), fixée à 100 millions d'euros en 2016.

Dans cette même logique, j'ai défendu dès mon arrivée au Sénat en 2015, une proposition de loi, déposée précédemment par Pierre Jarlier et les membres du groupe Union des démocrates et indépendants du Sénat. Elle visait à instaurer des contrats territoriaux de développement rural 59 ( * ) afin d' « initier une réelle dynamique territoriale dans les secteurs ruraux en difficulté » 60 ( * ) . Les contrats, signés sur une période pluriannuelle, devaient être conclus entre l'État et les territoires répondant aux critères des zones de revitalisation rurale. Cette proposition de loi fut adoptée par le Sénat le 22 octobre 2015 , contre l'avis de la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité de l'époque, qui avait alors considéré que ce texte proposait des solutions inadaptées aux questions pertinentes soulevées.

Le 20 mai 2016, lors du troisième comité interministériel aux ruralités, le ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, Jean-Michel Baylet, a annoncé la création de « contrats de ruralité », similaires aux contrats territoriaux de développement rural proposés quelques mois plus tôt par le Sénat. Aux termes de la circulaire du 23 juin 2016 61 ( * ) , ces contrats seront signés entre l'État et les pôles d'équilibre territorial et rural (PETR) ou, à défaut, les intercommunalités intéressées pour une durée de six ans et auront « pour objectif de coordonner tous les outils, dispositifs et moyens existants pour développer les territoires ruraux et accélérer la réalisation de projets concrets au service des habitants et des entreprises » 62 ( * ) .

Les premiers contrats devront être élaborés avant la fin de l'année 2016, en vue d'une signature avant le 30 juin 2017. Ils seront « notamment financé [s], sur une base annuelle, par le Fonds de soutien à l'investissement local (FSIL) qui comportera dès 2017 une part spécifiquement dédiée aux contrats de ruralité » 63 ( * ) cumulable avec la DETR et avec l'autre part du FSIL.


* 55 Cf. Loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, dite loi Maptam ; loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral ; loi n° 2015-292 du 16 mars 2015 relative à l'amélioration du régime de la commune nouvelle, pour des communes fortes et vivantes ; loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi NOTRe.

* 56 AdCF, « Communautés XXL : s'adapter au changement d'échelle », janvier 2016.

* 57 Sénat, rapport d'information n° 493 (2015-2016) fait par Mathieu Darnaud, René Vandierendonck, Pierre-Yves Collombat et Michel Mercier, au nom de la commission des lois.

* 58 Loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine.

* 59 Proposition de loi n° 470 (2014-2015) visant à instaurer des contrats territoriaux de développement rural.

* 60 Exposé des motifs de la proposition de loi précitée.

* 61 Circulaire du 23 juin 2016 du ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales à l'attention des préfets de région et de département.

* 62 Circulaire du 23 juin 2016 précitée.

* 63 Circulaire du 23 juin 2016 précitée.

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