AVANT-PROPOS
de Claudine Lepage

La francophonie a toujours beaucoup inspiré les politiques, chercheurs ou sociologues qui ont écrit de nombreux ouvrages ou rapports sur le sujet. Avec Louis Duvernois, également sénateur représentant les Français de l'étranger et membre de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication du Sénat, nous avons souhaité apporter un nouvel éclairage sur le sujet. Un éclairage qui se nourrit des nombreux déplacements effectués, dans le cadre de notre mandat, dans les pays francophones mais également des auditions que nous avons pu mener ces dernières semaines. Il se nourrit également de notre mandat à l'Assemblée parlementaire de la francophonie mais aussi de notre participation aux groupes interparlementaires d'amitié du Sénat, France-Corne de l'Afrique pour Louis Duvernois, France-Canada et France-Togo pour ma part.

Nous savons bien évidemment que ce rapport sur la francophonie n'est pas le premier mais nous savons également et n'en doutons pas, qu'il sera suivi de nombreux autres.

Les lectures, auditions, rencontres de ces derniers mois montrent que tous les acteurs n'ont pas la même vision ni la même définition de ce qu'est la francophonie. Et ceci est tout à fait normal. Certains mettent principalement l'accent sur la culture, d'autres davantage sur l'économie tout en ayant pleinement conscience que les deux aspects sont, de fait, profondément liés et se nourrissent l'un de l'autre ; le rapport de Jacques Attali « La francophonie et la francophilie, moteurs de la croissance durable » en est un exemple.

Pour ma part, et les nombreux déplacements effectués en Afrique ou au Canada n'ont fait que renforcer cette vision, la francophonie est d'abord et surtout le partage d'une même langue. Une langue qui a bien entendu des différences selon les latitudes où elle est parlée mais une même langue quand même.

Je considère la langue française comme étant le ciment de la francophonie, en découle ensuite une culture, des valeurs, une économie mais sans cette langue commune rien ne serait possible.

Or, la pratique de la langue française dans le monde n'est bien évidement pas inscrite dans le marbre, elle doit faire face aux évolutions de la société ou aux stratégies d'influence mises en place par d'autres pays. La situation de la République Démocratique du Congo (RDC) est particulièrement frappante. Si la RDC est le pays francophone le plus peuplé du monde (100 millions d'habitants d'ici à 2030) seulement 50 % de sa population parle couramment le français.

Cet exemple est pour le moins significatif et démontre que le nombre de locuteurs francophones qui est couramment avancé, 770 millions à l'horizon 2050, ne restera qu'une vue de l'esprit si de sérieux efforts ne sont pas entrepris pour maintenir le niveau qualitatif et quantitatif de locuteurs dans les pays considérés aujourd'hui comme francophones.

Si plusieurs causes expliquent la fragilité du français ou son recul, et nous le verrons par la suite, il me paraît important, dans cet avant-propos, de mettre l'accent sur le manque de stratégie globale de la France à tous les niveaux. À ce titre, la décision prise par le comité d'organisation de Paris 2024, de choisir comme slogan, un slogan en anglais « Made for sharing » reflète bien le manque d'ambition francophone de notre pays. Cette décision est d'autant plus regrettable que cette campagne de promotion pour ces jeux olympiques aurait pu, à l'inverse, être une formidable occasion de se tourner davantage vers les pays francophones.

Ce choix fait par les organisateurs de Paris 2024 semble démontrer qu'il n'existe pas en France de stratégie d'influence globale visant à promouvoir le français et la francophonie ; l'omniprésence de l'anglais dans les institutions européennes est également là pour le confirmer.

Pourtant, la situation politique mondiale, avec notamment le Brexit, pourrait être l'occasion de donner un nouveau souffle au multilinguisme et donc, également, à la langue française, ce qui pourrait permettre de parvenir, à terme, au renouvellement de la francophonie.

Parvenir à une francophonie renouvelée c'est en tout cas le sens des propositions qui seront faites dans ce rapport.

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