B. LES RÉSULTATS DES VISITES SANITAIRES

1. Les visites sanitaires bovines

Dans le passé, les taux de réalisation des visites vétérinaires sanitaires ont été fréquemment insuffisants .

Taux de réalisation des visites vétérinaires sanitaires

Année

Taux de réalisation

2005-2006

95 %

2006-2007

94 %

2007-2008

92 %

2008-2009

75 %

Ils se sont toutefois progressivement améliorés depuis, sans pour autant que ces progrès témoignent d'une couverture plus satisfaisante des enjeux sanitaires.

Année

Visites programmées

Refus de visite

Visites réalisables

Visite réalisées

Délai dépassé

Taux de réalisation

2012

113 471

367

108 966

86 887

22 079

79,74 %

2013

111 078

378

106 357

86 664

19 693

81,48 %

2014

161 549

517

158 510

146 252

12 258

92,27 %

2015

188 749

661

180 998

163 322

17 666

90,00 %

Après deux premières campagnes (2005/06 et 2006/07) à peu près satisfaisantes, les campagnes suivantes ont montré une forte diminution du taux de réalisation (92 % pour la campagne 2007/2008 ; 75 % pour la campagne 2008/2009).

Celle-ci semble avoir fait suite à des facteurs externes, comme la vaccination contre la fièvre catarrhale, ou à une démotivation des vétérinaires.

À partir de 2012, les taux de réalisation augmentent régulièrement pour s'établir en 2014 à 92,27 %.

Ces taux de réalisation sont considérés comme proches d'une réalisation complète par le CGAAER qui, à partir de cette appréciation discutable, juge qu'il n'y a pas de sous réalisation de la visite sanitaire bovine, appréciation à laquelle on peut se rallier sous réserve de pouvoir constater la poursuite des progrès réalisés.

En revanche, les conclusions du rapport du CGAAER relatives à la perception de la visite sanitaire ressortent comme nettement défavorables. Elles sont résumées dans l'encadré ci-après.

La perception des visites vétérinaires sanitaires bovines par les acteurs

Pour les éleveurs, la perception est globalement défavorable : « peu utile, répétitive, chronophage, simple formalité administrative...

Le questionnaire est jugé peu adapté aux spécificités des élevages et aux pathologies rencontrées...La confusion existe entre la visite sanitaire bovine et le bilan sanitaire d'élevage (BSE), sachant que les deux sont souvent réalisées en même temps. L'absence de valorisation a eu un effet très négatif sur la dynamique... ».

Pour les instances représentatives des éleveurs, la vision est surtout négative pour la fédération nationale des groupements de défense sanitaire du bétail (FNGDS en 2010) et la fédération nationale bovine (FNB), pour lesquelles la VSB visait à soutenir le maillage des vétérinaires ruraux ; souvent superficielle, elle a seulement montré que 99 % des élevages étaient en situation sanitaire satisfaisante (estimation jugée surestimée par la FNGDS), mais rien n'a été fait pour le 1 % restant.

La VSB n'est pas un outil d'épidémiosurveillance, alors que c'est une priorité. Il faudrait mieux exploiter les données issues des abattoirs, des équarrissages, du terrain (beaucoup de données sont déjà connues) pour une surveillance globale. La VSB pourrait avoir un intérêt dans les élevages marginaux ou non professionnels. Il faudrait au moins l'élargir aux questions relevant du « paquet hygiène ».

La fédération nationale des producteurs de lait (FNPL) avait formulé un avis plus positif, la visite à visée sanitaire préventive et collective étant jugée complémentaire du bilan sanitaire d'élevage (BSE). Le couplage VSB/BSE est souhaitable, permet de délivrer un conseil spécialisé et a des vertus de sensibilisation ; il serait nécessaire d'alléger la VSB dans les élevages satisfaisants et de la renforcer dans les élevages à problèmes. Les aspects de bien-traitance animale devraient être abordés.

Pour les vétérinaires sanitaires, la vision est positive, mais avec de nombreuses observations et des souhaits d'évolution des objectifs et du questionnaire. Indispensable pour les élevages où les vétérinaires vont rarement, une simplification devrait être apportée pour ceux dans lesquels ils interviennent chaque semaine. Le couplage VSB/BSE est très fréquent car la VSB sert d'appel à un bilan plus concret et devient utile pour l'éleveur.

Pour les instances vétérinaires (SNGTV, ordre des vétérinaires, syndicat national des vétérinaires d'exercice libéral (SNVEL), fédération des syndicats vétérinaires de France (FSVF)), la VSB doit rester dans le cadre du mandat sanitaire et correspondre à un besoin de veille sanitaire. Cette rencontre permet de faire un point hors des urgences et de faire passer des messages de biosécurité. L'outil doit être fortement remanié pour maintenir un réseau de surveillance ; un module locorégional est souhaité ainsi qu'une préparation par l'éleveur. La complexité de l'accès aux bases de données nécessite une refonte de ce système. La FSVF a une vision négative car les informations sont sous utilisées par les pouvoirs publics, les élevages non satisfaisants ne sont pas suivis et il n'existe pas d'information vers les vétérinaires.

Pour les services déconcentrés du ministère de l'agriculture, le double objectif de soutenir le maillage vétérinaire et de détecter les élevages à problèmes reste d'actualité. Il est essentiel que la VSB reste en lien avec le mandat sanitaire. Cependant l'absence de retours d'information est déplorée et une formation des vétérinaires est jugée nécessaire.

Source : rapport n° 15055 du GAAER sur les visites sanitaires en élevage

2. Les autres visites

Les autres visites sont souvent trop récentes pour faire l'objet d'un bilan complet mais leurs taux de réalisation apparaissent très insuffisants alors que leur fréquence est inférieure.

Les visites sanitaires avicoles, biennales, ont concerné, en 2013/2014, 9 142 élevages de plus de 250 volailles sur la thématique générale de l'analyse de risque. 75 % des visites ont effectivement été faites. Les visites sanitaires non réalisées sont mentionnées « hors délai ».

Année

Visites programmées

Visites non réalisables

Refus

Visites réalisables

Visites réalisées

Taux de réalisation

2013-2014

9 142

690

92

8 452

6 318

74,75 %

Le taux de réalisation est faible mais la jeunesse de la visite sanitaire avicole et son appropriation par les vétérinaires, le plus souvent de groupement, peuvent expliquer ce taux.

Selon le CGAAER, cette performance s'expliquerait également par le fait que les élevages de volailles sont moins suivis par les DD(CS)PP que les élevages de bovins et que la désignation des vétérinaires sanitaires par les éleveurs de volailles est encore très récente.

La mission a en outre relevé, dans les départements visités, que très peu de grilles remplies par le vétérinaire avaient été envoyées par l'éleveur aux abattoirs de destination de ses volailles, alors même que ce dispositif est jugé devoir contribuer à la rénovation des contrôles en abattoirs de volailles dont le niveau n'est pas conforme à des préoccupations sanitaires tangibles.

Les visites sanitaires porcines ont débuté en 2015 et il est jugé difficile d'en tirer des conclusions.

3. Le problème du choix du vétérinaire

Les visites sanitaires faisant l'objet d'un financement public il aurait pu être décidé d'en réserver la conduite à des vétérinaires désignés par l'administration. Telle n'a pas été la solution choisie.

La visite sanitaire bovine concerne un grand nombre d'exploitations (180 000 élevages en 2014), d'où un grand nombre de visites à programmer par campagne. Elle est conduite par le vétérinaire sanitaire qui est le plus souvent également le vétérinaire traitant de l'exploitation . Il exerce généralement en clientèle rurale ou mixte à prédominance rurale.

La relation est bilatérale, basée sur la confiance entre l'éleveur et le vétérinaire, l'éleveur fait le choix d'un vétérinaire donné pour un type de prestation donnée. La concurrence entre vétérinaires dépend du maillage territorial.

Pour les veaux de boucherie (2 800 élevages en 2012 ), sous-ensemble des visites bovines, parfois exclu des visites sanitaires avec une organisation en filière intégrée, la visite sanitaire doit trouver sa place, dans une relation éleveur/vétérinaire peu construite, car le suivi d'élevage est du ressort du technicien de groupement. L'éleveur désigne le plus souvent comme vétérinaire sanitaire le vétérinaire de l'intégrateur , avec des prestations codifiées par ce dernier ; le vétérinaire peut disposer des données d'élevage. La notion de confiance entre éleveur/vétérinaire sanitaire est moins importante. Le succès de la visite sanitaire repose sur la capacité du vétérinaire à transmettre le message porté par la visite et donc à intéresser l'éleveur à cette priorité.

Pour l'élevage porcin (20 000 élevages en 2014) , ensemble relativement homogène en termes de suivi sanitaire, les exploitations sont généralement encadrées par des groupements ou des coopératives qui disposent soit en interne, soit en prestataire de service de vétérinaires spécialisés chargés du suivi sanitaire des cheptels et de l'établissement du bilan sanitaire d'élevage. Ce vétérinaire est le plus souvent un vétérinaire sanitaire enregistré dans plusieurs départements. L'éleveur reçoit également beaucoup d'informations d'ordre sanitaire des différents intervenants (groupements ou coopératives). Le vétérinaire sanitaire, généralement spécialisé en production porcine, doit être en capacité de bien individualiser et de rendre prioritaire auprès de l'éleveur le message général de la visite sanitaire.

Pour l'élevage avicole (20 000 élevages de plus de 250 volailles) , la situation est plus complexe : l'élevage avicole concerne de nombreuses espèces présentant des sensibilités aux maladies différentes d'où une difficulté supplémentaire qui se rajoute à la grande variabilité de la taille des exploitations, de la basse-cour à l'élevage industriel, et à l'existence d'élevages traditionnels (canards gras). Une partie de la production nationale correspondant aux gros élevages appartient à des filières intégrées (producteurs d'aliments ou abattoirs par exemple).

Dans ce cas, l'encadrement sanitaire est totalement pris en charge par l'intégrateur comme pour les veaux. Le vétérinaire sanitaire qui est le vétérinaire de l'intégrateur doit porter auprès de l'éleveur le message spécifique lié à la visite sanitaire et en montrer l'intérêt. Pour l'autre partie de la production, en général des petits élevages, les relations vétérinaire/éleveur sont moins formalisées. La visite sanitaire permet d'identifier ces élevages et d'initier une relation qui peut être importante en cas d'épizootie voire de mieux informer les éleveurs pour l'anticiper ; le vétérinaire sanitaire et l'éleveur doivent construire un partenariat.

Pour les petits ruminants (45 000 élevages d'ovins et 11 000 élevages de caprins en 2014) , la diversité des productions est importante : les élevages d'ovins allaitants ou laitiers, intégrés ou pas, les élevages de chèvres sont autant de cas spécifiques. Les élevages de petits ruminants intégrés dans des filières de production - laitière par exemple - peuvent être très structurés et sont suivis de près (production de Roquefort).

Le vétérinaire sanitaire doit individualiser le message de la visite sanitaire par rapport aux autres informations disponibles ; il doit apporter une réelle plus-value.

Par contre pour beaucoup d'élevages - plus conventionnels - le contact avec le vétérinaire est rare, voire inexistant et la visite sanitaire est l'occasion de l'amener dans ces élevages. La transhumance avec l'absence de vétérinaire sanitaire, resté au lieu du siège de l'exploitation est une composante spécifique pour certains élevages de bovins et d'ovins.

Dans les exploitations mixtes (bovin et porcin et/ou volaille), le vétérinaire traitant n'est pas nécessairement le vétérinaire sanitaire. Ainsi un vétérinaire rencontré par la mission, dont un client possédait à la fois un élevage de bovins et un élevage de porcs a précisé qu'il avait refusé d'être le vétérinaire sanitaire pour les porcs ne s'estimant pas compétent pour cette espèce.

Pour les abeilles , la France compte 41 560 apiculteurs dont environ 3 600 apiculteurs de plus de 50 ruches dits apiculteurs de production qui seraient concernés par la visite sanitaire. On se dirigerait vers une visite sanitaire par un vétérinaire mandaté, les apiculteurs n'ayant pas l'obligation de désigner un vétérinaire sanitaire mais ils sont très attentifs aux compétences en apidologie et pathologie des abeilles des vétérinaires impliqués dans la visite sanitaire.

Les ordonnances de 2012 qui ont modifié le code rural et de la pêche maritime (CRPM) pour intégrer les conclusions des « États généraux du sanitaire » et les textes pris en application ont modifié la dénomination et les missions des vétérinaires sanitaires et mandatés : désormais la visite sanitaire est réalisée par le vétérinaire sanitaire habilité et non par le vétérinaire mandaté.

La mission a pu constater des difficultés de compréhension des éleveurs et des organisations professionnelles agricoles (OPA) quant au statut des vétérinaires « traitant, sanitaire/habilité, mandaté » intervenant au titre de la visite sanitaire et/ou du BSE.

Cette complexité est accrue dans les élevages mixtes (bovins/porcins, volailles/bovins...) dans lesquels plusieurs vétérinaires traitants et plusieurs vétérinaires sanitaires peuvent intervenir ou encore lorsque le vétérinaire sanitaire n'est pas le vétérinaire traitant :

- en élevage bovin allaitant ou laitier , la visite sanitaire est généralement effectuée par le vétérinaire traitant qui est également le vétérinaire sanitaire, l'élevage pouvant néanmoins avoir plusieurs vétérinaires traitants ;

- pour les élevages en intégration ou en groupements , le vétérinaire sanitaire qui effectue la visite sanitaire est souvent le vétérinaire spécialisé de l'intégrateur ou du groupement qui assure également le suivi de l'élevage . En cas d'urgence, un autre vétérinaire traitant, en général le vétérinaire local est susceptible d'intervenir dans cet élevage. Il a été signalé à la mission que c'est l'éleveur qui disposait du choix du vétérinaire de la visite sanitaire, même si une certaine pression de la part des intégrateurs a été mentionnée ;

- dans les élevages mixtes (bovins et élevage intégré avicole ou porcin), les visites sanitaires sont la plupart du temps effectuées par deux vétérinaires distincts, celui qui s'occupe des bovins et celui qui s'occupe des espèces en intégration, tous deux vétérinaires sanitaires ;

- dans d'autres élevages mixtes l'éleveur a choisi son vétérinaire traitant bovin comme vétérinaire sanitaire pour la visite sanitaire de toutes les espèces de l'élevage ce qui peut poser un problème de compétence pour les espèces industrielles ;

- les vétérinaires travaillant pour des groupements ou pour des intégrateurs, arrivent du fait de l'organisation de leur cabinet, à couvrir un grand rayon d'action . Il a été signalé à la mission qu'un groupement de porcs présent sur 11 départements couvre l'intégralité des élevages avec des vétérinaires répartis sur les quatre sites appartenant au même cabinet vétérinaire présents dans quatre départements.

En conclusion de ces auditions des vétérinaires, la mission du CGAAER estime que :

- « ces situations mettent à mal la notion de maillage territorial de proximité et posent des problèmes de concurrence ;

- quand plusieurs vétérinaires interviennent sur un élevage, les vétérinaires traitants locaux signalent leur lassitude de devoir participer à la gestion de « crise », lorsqu'une épizootie concernait des espèces pour lesquelles ils n'intervenaient pas au titre de la visite sanitaire ou du suivi d'élevage alors que les vétérinaires de groupement, éloignés, « restaient tranquillement chez eux... » .

4. Le maillage territorial des services sanitaires (vétérinaires et services d'analyse) est troué

Dans son rapport consacré à la comparaison internationale des moyens de la politique sanitaire des aliments, le CGAAER a pu formuler des observations nuancées sur le niveau général de disponibilité de moyens vétérinaires en France.

Le rapport a notamment fait ressortir la modicité relative des vétérinaires publics en France indiquant que le faible nombre de vétérinaires publics rapporté au cheptel français « laisse (toutefois) craindre que cette ressource publique ne soit pas suffisante pour la gestion des crises sanitaires. »

Dans le même temps, il a pu mettre en exergue le potentiel offert par les vétérinaires privés en termes de contribution à la surveillance sanitaire concluant, d'une part, que si « le nombre de vétérinaires publics est moins important en France que dans d'autres pays, globalement le nombre d'acteurs vétérinaires et paravétérinaires disponibles pour la surveillance sanitaire des élevages est en France plutôt satisfaisant » et, d'autre part, que « la comparaison des ratios UGB/vétérinaires plaide en faveur du modèle de gouvernance sanitaire retenu par la France avec un partenariat public - privé . »

Chiffres des effectifs vétérinaires et para vétérinaires par pays

Source : Organisation mondiale de la santé animale (OIE)

Ces constats globaux plutôt rassurants paraissent devoir être fortement nuancés par la prise en compte des réalités fines de terrain.

C'est du moins la conclusion que vos rapporteurs spéciaux tirent du rapport du CGAAER sur les visites sanitaires en élevage.

Celles-ci développent, s'agissant de la présence vétérinaire dans les zones rurales, des problématiques analogues à celles valant pour la présence médicale, au point que l'évocation de « déserts vétérinaires » n'apparaît pas exagérée à vos rapporteurs spéciaux.

Depuis la diminution des prophylaxies et l'apparition d'un épisode de fièvre aphteuse en 2001, les questions posées par la répartition des vétérinaires ruraux sur le territoire et par leur efficience comme acteur incontournable du sanitaire sont récurrentes.

Le rapport Risses (2001) avait proposé la création des visites sanitaires bovines réalisées par des vétérinaires titulaires du mandat sanitaire.

La désertification des zones rurales et la réduction du maillage territorial qui touchent de nombreuses professions atteignent également la population de vétérinaires ruraux. Elle diminue régulièrement, en lien avec la difficulté du métier, la relativisation de la notion de service public et le regroupement en cabinet de groupe, laissant des territoires « orphelins ».

La situation des élevages a aussi beaucoup changé : augmentation de la taille des troupeaux, complexification des problématiques d'élevage et de production, développement des groupements de producteurs, des élevages en intégration ou assimilés, amélioration de la compétence des éleveurs.

Un point important est désormais le partage de l'information, la structuration de l'organisation entre les différents acteurs du sanitaire au niveau local avec un niveau de proximité variable selon les espèces et leur densité, les productions, les zones géographiques.

La désaffection des vétérinaires pour l'activité rurale s'amplifie ; elle a des causes sociologiquement explicables par le nouveau profil des étudiants : souvent très attentifs à la bien traitance animale et à la mouvance végétarienne, à l'attractivité des territoires comme lieu de vie, en lien sans doute, avec leur origine urbaine.

À cela s'ajoute le fait que l'activité rurale est perçue comme plus contraignante et moins rémunératrice. Exercer une activité difficile qui engage sa responsabilité professionnelle pour une rémunération moindre conduit inéluctablement à une baisse de l'activité rurale.

La part de l'activité rurale dans le chiffre d'affaires global de la profession vétérinaire s'est réduite dans des proportions considérables, témoignant d'une profonde désaffection pour une activité traditionnelle, en passe d'être marginalisée.

Elle a dû passer de 90 % au début des années soixante à moins de 20 % actuellement. Les grandes prophylaxies sont terminées ; la gestion administrative des prophylaxies ciblées a été pour la plupart déléguée aux OVS, mis en place à l'issue des états généraux du sanitaire ; parallèlement, les OVVT sont encore des coquilles vides.

En ce qui concerne les prophylaxies, leur part dans le revenu du vétérinaire rural varie selon les cabinets entre 1 % et 5 % du chiffre d'affaires. Cela signifie que les prophylaxies traditionnelles représentent une fraction limitée tant du revenu des vétérinaires que des charges des éleveurs, alors même que la qualification sanitaire des élevages est le prérequis à toute activité économique.

On peut considérer que, de 1960 à 1990, le revenu de l'activité vétérinaire rurale se répartissait en un tiers d'actes médicaux, un tiers de vente de médicaments et un tiers de prophylaxies collectives alors que le revenu du cabinet rural se répartit actuellement avec une relative parité entre actes médicaux et vente de médicaments vétérinaires.

On peut noter néanmoins une part grandissante dans quelques cabinets du volet conseil en élevage (jusqu'à 30 %).

Du côté des éleveurs, le poste désigné « produits et honoraires vétérinaires » représente 3 % à 4 % des charges en élevage allaitant limousin par exemple

L'administration vétérinaire a vu parallèlement son format se réduire.

Du point de vue des vétérinaires, le maillage territorial dépend essentiellement du nombre de clients qui s'adressent à eux. La contribution de la visite sanitaire au maintien du maillage territorial pour des vétérinaires exerçant en zone rurale ou en clientèle mixte à prédominance rurale n'est pas établie en raison du niveau des recettes liées à cette activité.

Cependant, pour certains vétérinaires exerçant en clientèle mixte à prédominance canine, la visite sanitaire constitue certainement un instrument du maintien de leur activité rurale, faute de quoi ils pourraient se consacrer exclusivement à la clientèle canine.

Vos rapporteurs spéciaux relèvent que les impacts de la dégradation du maillage territorial par les vétérinaires sanitaires sont jugés « déjà perceptibles » par la mission du CGAAER : par exemple, la mission a été informée que, dans le cadre de l'épizootie d'influenza aviaire en cours dans le sud-ouest, les DD(CS)PP concernées n'avaient pas les moyens humains pour réaliser les prélèvements adéquats et ne pouvaient pas mobiliser des vétérinaires mandatés qui n'existaient pas.

Observation : alors que le CGAAER établit un soupçon de lien entre la crise de l'influenza aviaire et l'existence de « déserts vétérinaires », des déficits de moyens vétérinaires semblent peser sur la veille sanitaire dans plusieurs territoires ruraux.

Le conseil supérieur de l'ordre (CSO) plaide pour une meilleure intégration dans le maillage territorial des vétérinaires canins installés en zone périurbaine, et qui, sans participer à la visite sanitaire car ils n'assurent pas le suivi des élevages, constituent une ressource importante de compétence en temps de crise et un relais majeur de transmission des informations vers les détenteurs d'animaux.

Le lien entre les DD(CS)PP et ces vétérinaires devrait être renforcé car le message sanitaire doit aussi être diffusé dans les petits élevages (moins de 250 volailles par exemple pour lesquels le risque de diffusion et d'entretien de maladies est important, moins de 20 petits ruminants, moins de 50 ruches, moutons tondeuses ...).

Le CGAAER conclut sur ce point en estimant que si la visite sanitaire n'est pas un instrument du maintien du maillage territorial qui dépend étroitement du nombre d'éleveurs et de la santé financière de leurs exploitations, son rôle est important dans le maintien du lien entre les vétérinaires, les éleveurs et l'administration locale , lien mis à mal par la RGPP et la nouvelle gouvernance sanitaire, la diminution des prophylaxies et leur délégation aux OVS, la modification de la sociologie vétérinaire (regroupement de cabinets et individualisme plus fort des jeunes générations). Pour que ce lien perdure, il doit être animé et la visite sanitaire est un des moyens. En outre, ce lien fort favorisera la réactivité du réseau de vétérinaires sanitaires en cas de crise.

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