B. DES ENJEUX ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS CONSIDÉRABLES

Outre les enjeux de santé publique, la qualité sanitaire des aliments offre des enjeux financiers et économiques considérables.

1. Les indemnisations et interventions au profit des filières sinistrées présentent des enjeux budgétaires conséquents

Le récent projet de loi de finances rectificative pour 2016 a apporté le témoignage des enjeux financiers considérables liés à la sécurité sanitaire en agriculture.

Parmi les ouvertures de crédits alors demandées (889 millions d'euros en autorisations d'engagement et 688,2 millions d'euros en crédits de paiement), 157,9 millions d'euros en autorisations d'engagement et 72,3 millions d'euros en crédits de paiement devaient financer les interventions des pertes économiques de FranceAgriMer dans le cadre de la crise de l'influenza aviaire, tandis que 123,5 millions d'euros d'autorisations d'engagement étaient destinées au Fonds national de gestion des risques en agriculture (FNGRA), en lien avec le plan de refinancement et de consolidation de l'agriculture , dont certains aspects pouvaient recouvrir les sinistres sanitaires constatés en cours d'année.

L'impact financier de l'influenza aviaire, selon le Gouvernement

La stratégie de surveillance et d'éradication a nécessité une augmentation des ressources humaines consacrées au dossier influenza aviaire (recrutement temporaire d'une cinquantaine d'agents supplémentaires) et par là une augmentation des crédits d'intervention pour les opérations de surveillance, d'abattage et de nettoyage/désinfection.

L'État soutient les filières dont les maillons en production primaire et intermédiaire sont les plus impactés. Les modalités d'indemnisation des pertes de revenu tiendront compte de la diversité des modes d'élevage.

130 millions d'euros serviront à indemniser les éleveurs du Grand Sud-Ouest et les accouveurs pour compenser les pertes de revenus engendrées par la mise en oeuvre du plan d'assainissement global de la zone de restriction et pour les aider à passer la phase d'assainissement non productive.

Les investissements des éleveurs et des accouveurs qui seraient nécessaires pour la restructuration des filières seront cofinancés par l'État, pour être en capacité de lever 220 millions d'euros d'investissement sur 5 ans. Le FEADER et les régions y concourront.

Le FNGRA participe au financement des dispositifs de gestion des aléas climatiques, sanitaires, phytosanitaires et environnementaux dans le secteur agricole, à travers trois sections :

- la première section du FNGRA contribue au financement de l'indemnisation des pertes économiques liées à l'apparition d'un foyer de maladie animale ou d'organismes nuisibles aux végétaux ou à un incident environnemental, par l'intermédiaire de fonds de mutualisation agréés par l'autorité administrative ;

- la deuxième section du FNGRA contribue au financement des aides au développement de l'assurance contre les dommages causés aux exploitations agricoles ;

- la troisième section du FNGRA contribue à l'indemnisation des calamités agricoles et intervient pour les récoltes non engrangées et les cultures non assurables.

Le FNGRA intervient dans les domaines sanitaires en remboursement d'une partie des indemnisations accordées par le (seul) fonds de mutualisation agréé, le fonds national agricole de mutualisation sanitaire et environnemental (FMSE), en complément des crédits européens.

Le régime du FNGRA a connu une évolution récente à la suite de laquelle, depuis le 1 er janvier 2015, en application des nouvelles dispositions réglementaires, le FNGRA n'intervient que pour les pertes économiques inférieures à 30 % du revenu annuel moyen (les pertes économiques supérieures à 30 % du revenu annuel moyen étant quant à elles prises en charge par le FEADER).

Si les pertes de production sont supérieures à 30 % de la production annuelle moyenne calculée au cours des trois années précédant le sinistre, les dépenses des fonds de mutualisation seront prises en charge à hauteur de 65 % maximum par des fonds européens, soit 100 % du financement public, le solde, soit 35 % restant à la charge du fonds de mutualisation.

Si les pertes de production sont inférieures à 30 % de la production annuelle moyenne calculée au cours des trois années précédant le sinistre, il est prévu que les dépenses des fonds de mutualisation soient prises en charge à hauteur de 65 % maximum par des fonds nationaux, soit 100 % du financement public, le solde, soit 35 % restant à la charge du fonds de mutualisation.

Les outils d'indemnisation des exploitants agricoles touchés par des risques sanitaires

Les fonds de mutualisation, dont relève le fonds national agricole de mutualisation sanitaire et environnemental (FMSE), ont vu leur statut précisé par le décret n° 2011-2089 du 30 décembre 2011 et le décret n° 2013-819 du 12 septembre 2013.

Le FMSE est une association régie par la loi du 1 er juillet 1901 qui a été agréée par l'arrêté du 24 septembre 2013 pour une durée de trois ans. Le renouvellement de l'agrément a été demandé lors de l'assemblée générale du 6 avril 2016 et a été accordé par arrêté du 20 octobre 2016.

Son objet est de contribuer à l'indemnisation de tout producteur agricole affilié qui a subi des pertes économiques en raison de l'apparition d'un événement sanitaire ou environnemental.

Le FMSE est susceptible d'indemniser les préjudices économiques consécutifs aux événements sanitaires (organismes nuisibles aux végétaux et maladies animales) définis à l'article R. 361-51 du code rural.

Il est également susceptible d'indemniser les coûts et pertes économiques consécutifs aux incidents environnementaux définis à l'article 71 du règlement (CE) n° 73/2009 du conseil du 19 janvier 2009 et précisé par l'arrêté du 8 août 2012 pris en application de l'article R. 361-52 du code rural.

À ce titre, il est prévu que les fonds de mutualisation indemnisent les pertes économiques occasionnées par :

- les maladies animales figurant dans la liste des maladies animales établie par l'Organisation mondiale de la santé animale ou à l'annexe I de la décision 2009/470/ CE du Conseil du 25 mai 2009 relative à certaines dépenses dans le domaine vétérinaire ;

- les organismes nuisibles aux végétaux énumérés par l'article L. 251-3 du code rural et de la pêche maritime, faisant l'objet de mesures de lutte obligatoire ou présentant un caractère anormal ou exceptionnel.

Les coûts et pertes économiques suivants sont considérés comme éligibles à l'indemnisation par un fonds de mutualisation lorsqu'ils sont consécutifs à l'apparition de l'un des événements mentionnés à l'article R. 361-51 ou à l'article R. 361-52 :

- les coûts ou pertes liés à la perte d'animaux ou de végétaux ;

- les coûts ou pertes liés à une réduction d'activité sur notamment lorsqu'elle est liée à une baisse des performances zootechniques des animaux ou de rendement des végétaux ;

- les coûts ou pertes, d'ordre économique et commercial, notamment ceux issus d'une restriction ou d'une interdiction de circulation ou d'échange, d'une limitation des zones de pâturage, d'un changement de destination de la production, de la restriction d'utilisation ou de la destruction de produits de l'exploitation, de traitements sanitaires, de la restriction de l'usage des sols ou d'un déclassement commercial de la production.

Le FMSE comprend une section commune à l'ensemble des producteurs agricoles et des sections spécialisées couvrant une ou plusieurs filières de production distinctes.

La section commune participe à l'indemnisation des agriculteurs, en complément des indemnités versées par les sections spécialisées . Elle peut procéder, sur ses ressources, et sur décision du conseil d'administration, au versement d'indemnités compensant tout ou partie des pertes économiques subies par les producteurs lorsque l'indemnisation de ces préjudices ne relève pas des sections spécialisées. Elle élabore les programmes d'indemnisation correspondant à ces incidents.

Plusieurs sections spécialisées ont été créées : « Plants de pomme de terre », « Légumes transformés », « Légumes », « Porcs », « Fruits », « Betteraves », « Ruminants », « Pépinières - horticulture », « Aviculture », et « Pommes de terre », soit dix sections spécialisées opérationnelles dont les ressources doivent couvrir la majeure partie des risques sanitaires qui touchent les productions animales et végétales au taux d'indemnisation maximum prévus par la réglementation.

Le FMSE verse aux agriculteurs 100 % du montant des indemnités fixées par les programmes d'indemnisation ; 65 % de ce montant est remboursé par l'État, les 35 % restants étant financés par les cotisations versées par les agriculteurs affiliés.

L'agrément en tant que fonds de mutualisation permet la perception de cotisations pour abonder la section commune et la création de sections spécialisées, lesquelles sont abondées par la levée de cotisations des producteurs affiliés à ces sections.

L'association tire ses ressources des cotisations versées par les agriculteurs à sa section commune ou à ses sections spécialisées et des subventions publiques pouvant atteindre 65 % des indemnisations versées.

Les ressources de l'exercice 2015 s'élèvent à 20,6 millions d'euros comprenant 14,2 millions d'euros de cotisations brutes versées par les agriculteurs, 2,1 millions d'euros de reprise de provisions pour risques et charges et 4,2 millions d'euros de fonds publics -FEADER ou FNGRA.

En 2015, le bilan pour les fonds d'indemnisation avait été moins lourd. Onze programmes d'indemnisation 11 ( * ) , dont le détail est présenté dans le tableau ci-dessous, avaient été engagés dans le cadre du FMSE durant l'année 2015 pour couvrir des pertes subies en 2014.

Programmes

Indemnités versées

Demande de subventions publiques

Méloïdogyne

0,48

0,31

Polychlorobiphényles (PCB)

0,13

0,08

Enroulement chlorotique de l'abricotier

0,17

0,11

Virus de la Sharka (production de fruits)

4,1

2,6

Cynips du châtaignier

0,08

0,02

Feu bactérien (production de fruits)

0,07

0,05

Pseudomonas syringae pv. Actinidiae (kiwi)

0,64

0,41

Virus de la Sharka (pépinières)

0,32

0,21

Opogona sacchari (pépinières)

0,12

0,08

Fièvre catarrhale ovine (BTV1)

0,41

0,26

Brucellose porcine

0,03

0,02

Source : réponse au questionnaire des rapporteurs spéciaux

Par ailleurs, s'agissant du FNGRA, les indemnisations des propriétaires des animaux alors abattus sur ordre de l'administration avaient représenté 17,1 millions d'euros, pour un total de 1 133 bénéficiaires.

Ceux-ci s'étaient répartis comme suit :

EXERCICE 2015

Maladie

Subventions (milliers d'euros)

Nombre de bénéficiaires

Total général

17 090

1 133

Tuberculose bovine

10 401

697

Salmonella

5 346

399

Tremblante

704

10

Autres

64

6

Brucellose bovine

95

6

ESB

10

6

Brucellose porcine

337

5

FCO

9

1

Loque américaine

6

1

Newcastle

80

1

SHV

38

1

Source : réponse au questionnaire des rapporteurs spéciaux

Le tableau ci-dessous récapitule les principales interventions réalisées à ce titre de 2013 à 2015.

Montants des indemnisations (en milliers d'euros)

Maladie

2013

2014

2015

Tuberculose bovine

17 003

13 069

10 401

Salmonella

3 340

1 177

5 346

Tremblante

411

72

704

ESB

21

46

10

Source : réponse au questionnaire des rapporteurs spéciaux

La tuberculose bovine ressortait alors comme le premier motif d'indemnisation avec un versement de 10,4 millions d'euros destinés à compenser les procédures de dépeuplement impliquant 697 éleveurs.

En 2016, s'agissant de la fièvre catarrhale ovine, l'impasse de financement constatée, à ce titre, dans les comptes du FMSE a eu pour effet de limiter sa contribution. Le programme d'intervention du FMSE, faute de ressources financières, n'a couvert que l'indemnisation des coûts de blocage en périmètre interdit.

Toutefois, afin d'assurer l'indemnisation de tous les éleveurs touchés, y compris ceux situés en zone réglementée, la mise en oeuvre d'une indemnisation au titre d'une aide du régime cadre exempté a été décidée pour un montant de 25 millions d'euros et déposée dans le cadre de la notification des « aides nationales ».

Les indemnisations ont été relativement concentrées, ce qui pourrait, sous réserves, être l'indice d'une relative maîtrise des risques. Les vingt premiers bénéficiaires ont absorbé 27,4 % (4,7 millions d'euros) des indemnités versées en 2014 comme le montre le tableau ci-dessous qui indique les montants accordés aux cinquante plus grands bénéficiaires des indemnisations individuelles accordées par le programme 206 de la mission budgétaire.

EXERCICE 2015

Bénéficiaire

Maladie

Subvention (K€)

Élevage 1

Tremblante

579,26

Élevage 2

Tuberculose bovine

576,35

Élevage 3

Salmonella

445,62

Élevage 4

Salmonella

350,84

Élevage 5

Tuberculose bovine

321,65

Élevage 6

Salmonella

248,49

Élevage 7

Salmonella

204,34

Élevage 8

Tuberculose bovine

194,81

Élevage 9

Salmonella

193,43

Élevage 10

Salmonella

192,00

Élevage 11

Tuberculose bovine

186,00

Élevage 12

Salmonella

181,11

Élevage 13

Salmonella

168,07

Élevage 14

Tuberculose bovine

150,80

Élevage 15

Tuberculose bovine

139,56

Élevage 16

Brucellose porcine

136,93

Élevage 17

Salmonella

131,07

Élevage 18

Tuberculose bovine

120,00

Élevage 19

Salmonella

114,18

Élevage 20

Salmonella

106,73

Élevage 21

Tuberculose bovine

102,87

Élevage 22

Salmonella

100,06

Élevage 23

Salmonella

99,46

Élevage 24

Salmonella

93,12

Élevage 25

FCO

92,96

Élevage 26

Tuberculose bovine

91,93

Élevage 27

Salmonella

91,04

Élevage 28

Tuberculose bovine

90,00

Élevage 29

Tuberculose bovine

87,56

Élevage 30

Tuberculose bovine

85,00

Élevage 31

Salmonella

83,02

Élevage 32

Salmonella

82,55

Élevage 33

Salmonella

82,33

Élevage 34

Salmonella

72,39

Élevage 35

Tuberculose bovine

71,42

Élevage 36

Salmonella

71,14

Élevage 37

Salmonella

69,21

Élevage 38

Salmonella

68,66

Élevage 39

Salmonella

60,80

Élevage 40

Salmonella

60,24

Élevage 41

Salmonella

60,12

Élevage 42

Tuberculose bovine

59,85

Élevage 43

Salmonella

56,76

Élevage 44

Tuberculose bovine

52,50

Élevage 45

Tuberculose bovine

51,83

Élevage 46

Salmonella

50,89

Élevage 47

Tuberculose bovine

50,40

Élevage 48

Tuberculose bovine

50,32

Élevage 49

Tuberculose bovine

50,00

Élevage 50

Salmonella

46,76

Source : réponse au questionnaire des rapporteurs spéciaux

2. La maîtrise des risques sanitaires est un élément pris en compte au titre de la conditionnalité des aides européennes

Par ailleurs, toujours pour les dépenses publiques, il faut tenir compte des refus d'apurement communautaires liés à des non conformités sanitaires.

Ainsi, en 2015, un refus d'apurement de 123 millions d'euros est venu sanctionner les primes bovines de la période 2007-2009 pour cause de non application des réductions et exclusions en cas de notifications de mouvements d'animaux réalisées hors des délais réglementaires.

Il convient de rappeler que la réforme de la politique agricole commune (PAC) de 2003 a imposé qu'un certain nombre de dispositions réglementaires dites « exigences relatives au respect des dispositions réglementaires » - ERMG - dans le domaine de l'environnement, des conditions agricoles et environnementales, du sanitaire et du bien-être animal soient mises en oeuvre par les exploitants pour les éléments qu'il contrôle. Ce dispositif, qui doit être contrôlé par les autorités nationales, conduit à des sanctions dont l'économie a été modifiée dans le cadre de la PAC 2015. Renonçant à un mécanisme automatique de prononcé de sanctions pécuniaires pour les anomalies mineures, le nouveau dispositif de sanctions introduit un système de réfactions des aides conditionnées au maintien des non conformités constatées lors d'un premier contrôle à l'issue de le deuxième année suivant celui-ci.

Cet assouplissement du principe de conditionnalité demeure limité si bien que le risque associé au non-respect des ERMG représente un enjeu financier important.

On rappelle que le barème des réductions des aides s'étage entre 1 % et 5 % selon la gravité de l'infraction.

3. Les impacts économiques sont considérables

Ces données sont loin d'épuiser les enjeux monétaires de la sécurité sanitaire des aliments.

En ce qui concerne les revenus des différents échelons de la filière agroalimentaire, ces enjeux sont a priori limités par le niveau du chiffre d'affaires des filières dans la mesure où toute suspicion grave de non innocuité des aliments entraîne le risque d'une disparition totale des consommations domestiques, ou par l'étranger, des produits alimentaires.

Dans ce contexte, le maintien du statut officiel « indemne » représente des enjeux considérables qu'on appréhende généralement à travers la fermeture des marchés d'exportation en cas de perte de ce statut mais qu'il faut aussi considérer sous l'angle de la consommation intérieure.

4. La sécurité sanitaire des aliments est une variable à part entière des conditions de régulation du commerce international

Les normes sanitaires doivent être prises en compte comme des éléments déterminants du commerce international des denrées alimentaires.

Au plan symbolique, trop souvent vues comme des « barrières non-tarifaires » aux échanges, elles mériteraient d'être considérées sous un angle plus positif, celui de l'affirmation de modèles concurrents permettant d'offrir plus ou moins de garanties aux consommateurs.

L'accord sur l'application des mesures sanitaires et phytosanitaires (« accord SPS ») de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), est entré en vigueur en 1995 (année de création de l'OMC).

Il définit les règles fondamentales relatives à l'innocuité des produits alimentaires ainsi que les prescriptions sanitaires pour les animaux et les végétaux.

Il permet aux pays d'établir leurs propres normes mais il encadre celles-ci en précisant que les réglementations doivent être fondées sur des données scientifiques et ne doivent être appliquées que dans la mesure où elles sont nécessaires pour protéger la santé et la vie des personnes et des animaux ou préserver les végétaux.

L'accord SPS encourage les membres à appliquer les normes internationales, notamment celles expressément reconnues dans l'accord (Codex alimentarius, Organisation mondiale de la santé animale - OIE - et Convention internationale pour la protection des végétaux - CIPV -).

En outre, les réglementations nationales ne doivent pas entraîner des discriminations injustifiables entre les pays où existent des conditions similaires.

Chaque pays est libre d'adopter des mesures ayant pour effet de relever le niveau de protection sanitaire dès lors que ces mesures sont basées sur une analyse des risques.

L'accord établit un cadre définissant ce que les membres peuvent faire mais ne prescrit en aucune façon la manière dont les membres doivent appliquer les normes. Enfin, le principe transversal de transparence s'applique également au champ SPS et chaque membre est tenu de notifier à l'OMC les projets de mesure et les mesures adoptées afin que les autres membres puissent en prendre connaissance.

Le comité SPS, qui se réunit trois fois par an, offre une plateforme aux membres pour échanger sur la mise en oeuvre de cet accord et les différends commerciaux soulevés par un membre sur une mesure mise en place ou en projet par un membre.

À la fin 2015, 403 différends ont été abordés dont 31 % concernant la sécurité sanitaire des aliments (25 % sur la santé végétale et 39 % sur la santé animale) et près de 150 différends ont été résolus.

Les figures ci-dessous dénombrent le nombre de difficultés commerciales soulevées dans le cadre du comité SPS de l'OMC depuis 1995 (au total, 403) ainsi que leur répartition selon le domaine concerné.

Sur les 403 différends soulevés, 83 ( dont 22 en sécurité sanitaire des aliments) ont été soulevés par l'Union européenne et 79 (dont 44 en sécurité sanitaire des aliments) ont été soulevés à l'encontre de l'Union européenne.

Enfin, les membres peuvent également saisir l'organe de règlement des différends (ORD) de l'OMC à l'encontre d'une mesure mise en place par un membre.

Depuis 1995, 43 cas portés devant l'ORD concernent la mise en oeuvre de l'accord SPS et 17 ont fait l'objet d'un arbitrage, dont 5 concernant l'Union européenne (2 sur les produits carnés issus d'animaux traités avec des hormones, 3 sur les autorisations d'organismes génétiquement modifiés). Un autre cas mettant en cause l'Union européenne concerne l'interdiction d'importation de viande de volaille ayant subi des traitements chimiques visant à réduire la contamination par des agents pathogènes. Sur ce point, une demande de constitution du panel a été adressée en 2009 mais celui-ci n'a finalement pas été constitué.

L'Union européenne a pour sa part saisi, en avril 2014, l'ORD concernant l'embargo sur les porcs et les produits porcins mis en place par la Fédération de Russie au prétexte de la présence de la peste porcine africaine dans certains États membres de l'Union européenne. Le panel a été constitué et le rapport est attendu prochainement. L'Union européenne reproche à la Fédération de Russie de ne pas reconnaître la régionalisation mise en place par l'Union européenne, conformément au code terrestre de l'OIE (la régionalisation est une méthode de lutte contre la propagation des maladies qui permet d'isoler les zones indemnes des zones où la maladie est présente).

Il convient de noter que deux cas récents (Allemagne contre Inde - mesures concernant l'Influenza aviaire hautement pathogène ; Argentine contre Allemagne - mesures concernant la fièvre aphteuse) ont directement fait référence à la bonne application des normes internationales de l'OIE par les membres.

Enfin, le diagramme ci-dessous rapporte le nombre de sujets résolus, partiellement résolus ou non.

Plus de la moitié des problématiques SPS ne semble pas se régler dans le cadre de l'OMC.

Au vu des difficultés à résoudre les différends commerciaux dans le cadre des instances multilatérales, les partenaires commerciaux privilégient de plus en plus les négociations bilatérales.

Ces dernières années, la négociation d'accords de libre-échange bilatéraux a ainsi fortement augmenté. On citera par exemple la négociation du partenariat transatlantique du commerce et d'investissement (PTCI) en cours de négociations depuis 2013 entre l'Union européenne et les États-Unis, dans le cadre duquel un chapitre SPS est discuté.

Quant aux enjeux sur la santé publique, considérables en eux-mêmes, des travaux de recherche tentent de les monétiser dans le prolongement des études sur la valeur de la vie.

Vos rapporteurs spéciaux rappellent à ce sujet les travaux publiés récemment par deux chercheurs de l'INRA sur l'évaluation des externalités négatives liées à l'utilisation des produits phytosanitaires ainsi que celle publiée en 2015 dans la revue Journal of Clinical Endocrinology and Metabolism qui estimait les coûts annuels des affections sanitaires liées à l'exposition de la population européenne aux seuls pesticides organophosphorés et organochlorés à quelque 120 milliards d'euros.

Recommandation : développer les études sur l'impact monétaire des différentes composantes des pathologies sanitaires liées à l'alimentation.


* 11 Il existe une divergence sur ce point selon les sources disponibles.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page