C. DES RÈGLES DE RÉPARTITION DES FLUX FINANCIERS COMPLEXES MAIS CONSENSUELLES

Si le montant et le calendrier de versement des flux financiers dus par les Émirats arabes unis à la France sont strictement encadrés par l'accord de 2007 - qui a été jusqu'ici et dans l'ensemble, malgré le caractère tardif de l'ouverture prévisionnelle du musée, respecté -, il n'en est pas de même concernant la répartition de ces recettes entre les différentes parties prenantes du projet du côté français.

Une partie des fonds est fléchée de façon directe et exclusive en direction du musée du Louvre : au total, en excluant les défraiements relatifs aux expositions temporaires (qui relèvent d'un simple remboursement de frais engagés et non d'une contribution nette), le Louvre devrait bénéficier d'au moins la moitié du total des flux prévus par l'accord , ce qui s'explique à la fois par la place singulière qu'occupe l'institution dans le paysage patrimonial français et par le rôle prépondérant du musée au sein du projet. Cette répartition ne paraît pas injuste dans la mesure où l'essentiel du risque « réputationnel » est supporté par le Louvre ; au surplus, la demande émirienne concernait spécifiquement cette institution.

Répartition des versements prévus par l'accord entre les flux exclusivement destinés au Louvre et ceux devant être répartis entre le Louvre, l'Agence France-Muséums et les autres musées français

(en %)

Source : commission des finances du Sénat (à partir de l'accord intergouvernemental de 2007)

Mais les règles exactes de répartition entre les musées français des 430 millions d'euros qui n'étaient pas exclusivement destinés au Louvre n'étaient pas définies par l'accord de 2007 ni par le contrat de 2008 et ont été déterminées par l'Agence France-Muséums, en accord avec les établissements partenaires.

Deux questions se posaient : la répartition des ressources « partageables » entre l'Agence France Muséums et les établissements publics culturels d'une part, et la distribution des sommes entre les établissements culturels d'autre part.

L'Agence France-Muséums a résolu ces difficultés à travers l'adoption de règles à l'unanimité en conseil d'administration . La contrepartie du délicat équilibre trouvé réside dans une relative complexité .

Ainsi, en matière d'expertise technique , le partage des flux entre musées partenaires est établi sur une double base , forfaitaire pour une part, au titre d'un accompagnement régulier, et « ponctuelle », sur des commandes précises.

En outre, concernant les prêts et les expositions temporaires, les versements sont étalés dans le temps : ils débutent quelques années avant le prêt effectif ou la tenue de l'exposition temporaire pour tenir compte des coûts de préparation supportés par les musées français.

Les montants alloués aux musées sont calculés au prorata de la taille de l'exposition . La répartition entre les musées du total de la contribution émirienne - qui s'élève à 75 millions d'euros hors défraiements - n'est pas encore connue car, à ce stade, le programme d'expositions temporaires n'a pas été totalement déterminé.

Lorsqu'une exposition est réalisée en collaboration entre plusieurs musées, le musée qui est le principal porteur du projet reçoit la totalité de la somme et la répartition des sommes entre les différents établissements participants n'est pas du ressort de l'Agence.

En matière de prêts, deux situations doivent être distinguées : certains musées 18 ( * ) sont des prêteurs « au long cours » qui bénéficient d'un paiement forfaitaire. La somme des parts forfaitaires représente 79,5 % de la contrepartie aux prêts (soit un peu plus de 150 millions d'euros sur un total de 190 millions d'euros), dont une part prépondérante revient au Louvre en lien avec son implication particulièrement forte dans le programme de prêts.

En revanche, les autres établissements, dont les prêts sont d'ampleur plus réduite, sont rémunérés en fonction du nombre d'oeuvres prêtées . Un acompte de 80 % est versé après la signature de la convention de prêt et le reliquat au retour de l'oeuvre. La part des paiements aux prêteurs « au long cours » résultant de l'indexation sur l'inflation des sommes prévues par l'accord est versée avec un an de retard pour financer ces acomptes.

Pour simplifier, la répartition des flux s'appuie sur trois catégories de musées .

Le Louvre en constitue une à lui tout seul et bénéficie d'une part importante des fonds dans tous les domaines. Au 31 décembre 2016, le Louvre avait bénéficié d'environ 65 % des sommes versées par les Émiriens dans le cadre de l'accord.

Part du Louvre dans les versements effectifs intervenus de 2007 à 2016

(en %)

Note de lecture : la colonne « expertise technique » correspond à la part du Louvre au sein du montant de la redevance qui est réparti entre les musées partenaires du projet.

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données transmises par l'AFM)

Cinq musées nationaux qui collaborent étroitement avec l'Agence France-Muséums et font d'ailleurs partie du conseil d'administration - à l'exception du musée Guimet qui ne dispose pas d'une voix délibérative - se voient également appliquer un traitement particulier sur une base forfaitaire et récurrente.

Les versements au profit des autres établissements, dont le rôle est plus réduit, sont ponctuels et liés à un besoin précis.

Malgré leur apparente complexité, ces règles paraissent acceptées par l'ensemble des parties prenantes .


* 18 Musée du Louvre, Musée des arts asiatiques Guimet, Bibliothèque nationale de France, Musées d'Orsay et de l'Orangerie, Centre Georges-Pompidou, Musée du quai Branly.

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