C. CRÉER LES CONDITIONS D'UNE DYNAMIQUE DE TERRITOIRE

1. Faire confiance aux acteurs de terrain

Au cours de leurs travaux, vos rapporteurs ont pu constater un décalage entre les attentes des acteurs de terrain et l'approche du sujet par l'administration , à savoir notamment les ARS et les administrations centrales du ministère en charge de la santé.

Cette situation tient :

- d'une part, à des pratiques et doctrines hétérogènes entre les régions. Si une souplesse est nécessaire pour s'adapter aux situations locales, les variations d'approches et, par exemple, le caractère aléatoire du soutien à certaines initiatives d'un territoire à l'autre, crée de la confusion dans l'action de l'État et laisse aux acteurs de terrain - élus locaux ou professionnels de santé - un sentiment d'incompréhension ;

- d'autre part, à un fonctionnement perçu comme technocratique et rigide, du fait d'une réticence de certaines ARS à accompagner des idées sortant des cadres « classiques ». Les approches de la télémédecine en sont un exemple, comme cela sera souligné plus loin.

Face à ces constats, les propositions que vos rapporteurs sont amenés à formuler répondent à ce besoin général de mieux prendre en compte les initiatives du terrain, les accompagner et développer un cadre de confiance entre les professionnels et élus et l'administration .

Les ARS, dont il est indispensable de renforcer l'unité d'action, doivent jouer un rôle moteur en la matière.

Le président du conseil national de l'ordre des médecins, dans une brochure de janvier 2017 « Construire l'avenir à partir des territoires », dénonçait le caractère « hyper administré » et « totalement déconnecté des besoins des territoires » de notre système de santé : « Alors que le système est arrivé au point mort, incapable de se réinventer, naissent dans les territoires des initiatives courageuses qui certes s'affranchissent parfois des règles, mais démontrent qu'il est possible de bouger » .

Ces initiatives ont été recensées par le Cnom dans un intéressant rapport 31 ( * ) recensant des actions conduites dans différents domaines pour améliorer l'offre de soins. Nourrissant les analyses de vos rapporteurs, elles ouvrent des perspectives et montrent la mobilisation des professionnels et élus pour proposer des solutions nouvelles (regroupements de professionnels, réseaux, stages, télémédecine, délégations d'acte...).

2. Construire une approche concertée au niveau des territoires de proximité

Plusieurs interlocuteurs ont par ailleurs mis en avant la nécessité d'une action concertée et territorialisée en vue d'ajuster au mieux la « ressource » en offre de soins, et son organisation, aux besoins des populations, en s'attachant à valoriser les complémentarités, y compris entre les soins de ville et l'hôpital.

Si plusieurs outils existent, tels que les contrats locaux de santé prévus par la loi HPST ou les conseils territoriaux de santé, vos rapporteurs ont noté, comme l'ont notamment relevé les représentants des maires, que les contacts avec les élus locaux s'étaient noués à des degrés variables selon les ARS. Or, ce dialogue est essentiel pour poser un diagnostic partagé, identifier les besoins et coordonner les initiatives.

Le représentant du collège des directeurs généraux d'ARS a ainsi souligné les effets « dévastateurs » de la concurrence entre territoires et la nécessité de créer une dynamique de travail dans les territoires de proximité avec les professionnels et les élus . La révision des zonages en cours forme une opportunité d'engager cette concertation. L'échelle du territoire de vie retenue semble l'échelon de proximité pertinent pour mener des actions cohérentes et coordonnées.

Dans ce cadre, le recensement, par les ARS, de l'ensemble des dispositifs existants et de la manière dont ils s'articulent ou se concurrencent permettrait de disposer, à titre préalable, d'un état des lieux exhaustif des mesures engagées au niveau d'un territoire. Cela contribuerait à la fois à améliorer la connaissance et la lisibilité de l'ensemble des dispositifs, d'identifier les incohérences éventuelles entre eux ou les besoins insuffisamment pris en compte.

Cette analyse territoriale permettrait également de mettre en avant les bonnes pratiques éventuellement transposables à d'autres territoires.

En outre, l' évaluation systématique des actions engagées fait incontestablement défaut : la fonction de suivi de tous les dispositifs mis en place et de leur impact devrait être développée et ses résultats partagés.

Enfin, comme l'avait suggéré la Cour des comptes dans un rapport précité de septembre 2015 sur la recomposition territoriale de l'offre de soins, une modulation plus importante du montant des crédits délégués aux ARS via le FIR pourrait être envisagée, en tenant compte des besoins des territoires déficitaires en offre de soins.

- Confier aux ARS la mission de recenser l'ensemble des dispositifs existants au niveau des territoires de proximité. Associer les professionnels de santé et les élus locaux au suivi régulier et à l'évaluation des initiatives mises en place

- Renforcer les moyens d'action des ARS par une plus forte modulation des crédits du fonds d'intervention régional (FIR)


* 31 « Améliorer l'offre de soins : initiatives réussies dans les territoires », rapport de mission du Dr François Arnault, Cnom, décembre 2016.

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