B. OBSERVATIONS DU SÉNAT FRANÇAIS : POUR UN DIALOGUE ENTRE L'UNION EUROPÉENNE ET L'UNION ÉCONOMIQUE EURASIATIQUE

L'aspiration de la Russie à maintenir et à renforcer ses liens historiques, économiques et sécuritaires, avec les pays qui faisaient partie de l'URSS a conduit à l'émergence de nouvelles formes d'intégration régionale, en particulier la mise en place le 1 er janvier 2015 d'une Union économique eurasiatique .

Au sein de l'Union européenne, le processus de rapprochement entre Etats membres a été librement consenti . Les élargissements de l'Union européenne ont toujours résulté d'une aspiration spontanée et indépendante des pays voisins à la rejoindre, fondamentalement liée à son attractivité, et non à l'usage de la contrainte.

Par ailleurs, il faut éviter que s'instaure une forme de concurrence entre les structures d'intégration régionale aboutissant à ce que des choix binaires et exclusifs soient imposés à des pays situés dans leur voisinage commun, comme cela a été le cas avec l'Ukraine, alors que ces pays auraient au contraire vocation à devenir des passerelles entre Union européenne et Union eurasiatique. L'exemple de l'Arménie, membre de l'Union eurasiatique, qui a conclu un partenariat complet avec l'UE en mars 2017, montre, à l'inverse, qu'il est possible d'aboutir à des accords compatibles avec une double appartenance des Etats à chacun des deux espaces, au bénéfice de tous.

L'idée -ancienne - de faire émerger un « grand espace commun de l'Atlantique au Pacifique » et de promouvoir, dans cette optique, une convergence entre les organisations régionales du continent eurasien, reste à long terme pertinente et pourrait constituer, un jour, un objectif partagé.

Encore faudrait-il, cependant, que la Russie démontre sa volonté d'y contribuer , ce qu'elle ne fait pas aujourd'hui lorsqu'elle favorise, par son appui aux séparatistes en Ukraine, la séparation entre le Donbass et le reste du pays, qu'elle se refuse à se conformer à ses engagements dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce ou encore lorsqu'elle privilégie ou encourage l'adoption de mesures protectionnistes vis-à-vis de l'Union européenne.

Par ailleurs, on ne peut que relever la contradiction entre l'affichage de cet appel à un vaste espace de libre-échange à l'échelle du continent eurasien et le discours russe revendiquant la construction d'un ordre économique alternatif à celui que la Russie tend à considérer comme celui du monde occidental.

Le Sénat n'en est pas moins favorable, sur le principe, à un approfondissement des discussions techniques entre l'Union européenne et l'Union économique eurasiatique et - une fois réglée la question ukrainienne - à la reprise d'un dialogue politique entre ces deux organisations .

Enfin, concernant le projet chinois de la Route de la Soie « Belt and Road Initiative », il est vrai qu'il constitue, par les sommes en jeu et ses implications géostratégiques, un défi immense tant pour la Russie - qui sans doute n'a pas intérêt à rester à l'écart mais qui mesure la menace qu'il représente pour l'avenir de l'Union économique eurasiatique - que pour l'Union européenne - qui doit veiller à la préservation de ses propres intérêts. La France - et plus largement l'Union européenne - et la Russie auraient donc tout intérêt à échanger davantage à ce sujet avant que sa mise en oeuvre soit par trop avancée.

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