COMPTES RENDUS DES DÉPLACEMENTS

Déplacement dans les Bouches-du-Rhône
(Jeudi 12 et vendredi 13 avril 2018)

Composition de la délégation : Mme Catherine Troendle, présidente, M. Michel Amiel, rapporteur, Mme Jacky Deromedi et M. Martin Lévrier.

- Dîner de travail avec Mme Daniele Perrot, présidente, et M. Gérard Leca, administrateur, de l'Association Départementale pour le Développement des Actions de Prévention des Bouches-du-Rhône (ADDAP 13)

Financée par le conseil départemental des Bouches-du-Rhône, l'ADDAP 13 a mené ses premières actions dans le TER entre Aix-en-Provence et Marseille, où elle réalisait des actions de prévention et de médiation pour prévenir les dégradations. Les bons résultats obtenus ont incité d'autres communes à faire appel à ses services. Aujourd'hui, l'association compte 180 éducateurs spécialisés dans le département.

L'ADDAP 13 participe à différents programmes : elle travaille sur l'insertion professionnelle des jeunes dans les quartiers difficiles dans le cadre du plan « Sécurité Marseille » ; au titre du plan de prévention « sport-collège », des animateurs ouvrent les gymnases dans les collèges, de 17 heures à 21 heures, pour y accueillir les habitants du quartiers, ce qui a entraîné une diminution notable des dégradations ; une trentaines d'éducateurs de rue effectuent de la médiation sociale urbaine à Marseille, à Aix-en-Provence et à Miramas ; dans le cadre d'opérations « anti-été chauds », des jeunes ont été pris en charge dans des camps gérés par des militaires pendant les vacances scolaires.

Concernant plus spécifiquement les mineurs enfermés, l'ADDAP 13 a organisé des ateliers de découverte des métiers à la prison de Luynes. Ces ateliers permettent d'établir avec un éducateur un premier contact qui peut se poursuivre par la suite. D'une manière générale, il est important d'assurer la continuité du parcours éducatif avant, pendant et après la détention, si possible avec un unique référent chargé du suivi du jeune.

Au titre des bonnes pratiques, les représentants de l'ADDAP ont signalé que le parquet des mineurs avait pour habitude de convoquer les parents en cas d'absentéisme scolaire, ce qui a parfois pour effet de remobiliser les familles.

Les échanges ont également porté sur la question des mineurs non accompagnés, dont le nombre a considérablement augmenté, puisqu'on en dénombre environ 800 dans le département alors que leur nombre n'excédait pas 150 à 200 il y a une vingtaine d'années, et sur le problème posé par le trafic de stupéfiants qui alimente une économie parallèle à l'origine d'une part importante de la délinquance juvénile.

- Visite de l'institut thérapeutique, éducatif et pédagogique Les Cadeneaux (commune des Pennes-Mirabeaux)

L'institut thérapeutique, éducatif et pédagogique (Itep) Les Cadeneaux, dirigé par M. Yves Tentorini, occupe un terrain clôturé d'une superficie de 43 hectares. Il accueille des jeunes âgés entre onze et vingt ans. La plupart y sont placés sur décision de la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH), d'autres sur décision du juge des enfants. Une partie des jeunes sont hébergés durant la semaine dans l'une des 54 places d'internat, tandis que d'autres sont accueillis seulement pendant la journée. Le week-end, l'internat étant fermé, les jeunes concernés retournent dans la famille ou sont accueillis dans une autre structure d'hébergement.

Un éducateur travaille spécifiquement sur le volet « insertion professionnelle » des jeunes accueillis à l'Itep ; il a noué des liens avec des entreprises locales, des artisans principalement, qui savent que le jeune qu'ils accueillent en apprentissage continuera d'être suivi par l'Itep, ce qui est un gage de sécurité. L'Itep mène en outre des actions de « préapprentissage » en formant notamment aux métiers de bouche, aux métiers de l'hôtellerie-restauration et aux métiers du bâtiment. Des « séjours de rupture », d'une durée de deux semaines à un mois, sont parfois organisés pour que les jeunes découvrent une autre région et un autre métier.

Les membres de la délégation ont pu échanger avec plusieurs mineurs accueillis à l'Itep :

• Valentin vit en internat depuis deux ans ; il suit les cours de l'atelier boucherie ; après avoir effectué trois stages chez un même employeur, il ambitionne de passer le CAP ; il explique qu'il passe l'après-midi en classe, dans des groupes de quatre ou cinq élèves ayant à peu près le même niveau ;

• Loïc, âgé de quinze ans, vit à l'Itep depuis le mois de septembre 2017 ; la décision de le placer à l'Itep a été prise à la demande de ses parents en raison de ses problèmes de comportement au collège ; il suit trois heures de cours les matins et découvre l'après-midi les métiers de la maçonnerie ;

• Jonathan est passé par un centre éducatif fermé (CEF) et a été détenu dans l'établissement pénitentiaire pour mineurs (EPM) La Valentine ; il a quitté l'école au niveau de la classe de CM 1 ; il explique que le passage en CEF l'a aidé à mieux se maîtriser et à mieux communiquer avec les adultes ; il apprend à l'Itep le métier de peintre en bâtiment ; M. Tentorini fait observer que le retard scolaire de ce jeune homme rend difficile son entrée en centre de formation des apprentis (CFA) et qu'il serait donc souhaitable que l'entrée en CFA repose davantage sur la connaissance du métier que sur les compétences scolaires ; il ajoute que l'on a trop tendance à donner des médicaments aux jeunes pour les calmer, ce qui les place dans une forme « d'enfermement chimique » qui réduit leur capacité à se projeter dans l'avenir ;

• Un autre jeune prénommé Loïc explique avoir été envoyé à l'Itep en mai 2017 après avoir fait un faux signalement à la suite de la diffusion d'un avis de recherche ; il a également été exclu de son collège ; il déclare ne pas aimer se trouver aux Cadeneaux et demande sa « libération » ; l'évaluation par la MDPH a diagnostiqué chez ce jeune un trouble de l'opposition.

Les membres de la délégation ont ensuite rencontré, sous la forme d'une table ronde, une partie du personnel de l'Itep : trois chefs de service, une éducatrice de la protection judiciaire de la jeune (PJJ), une éducatrice spécialisée, un médecin, une infirmière et un psychologue.

Les échanges ont notamment porté sur le partenariat entre la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) et l'Itep. L'Itep des Cadeneaux est particulièrement impliqué dans ce partenariat puisque 10 % des jeunes qu'il accueille sont suivis conjointement par la PJJ, contre une moyenne de 3 % dans les Itep. Lorsqu'un jeune fait l'objet d'une mesure décidée par le juge des enfants, la PJJ joue le rôle pilote mais elle a besoin de partenaires pour bien accomplir sa mission.

La PJJ et les Itep sont encouragés par leurs administrations respectives à signer des conventions : Les Cadeneaux ont mis au point une convention qui vise à « modéliser » les bonnes pratiques ; cet exercice favorise une bonne connaissance, par les cadres de la PJJ et de l'Itep, des procédures de l'autre administration. Trop souvent, les réussites observées sur le terrain résultent d'initiatives individuelles plus que de la mise en oeuvre de procédures préétablies.

Quand un mineur est suivi par deux institutions, la PJJ doit élaborer un projet commun de prise en charge, afin de garantir la cohérence des actions menées. Chaque mineur accueilli aux Cadeneaux fait l'objet d'un projet personnalisé d'accompagnement. Le décloisonnement entre administrations progresse, même si les valeurs institutionnelles de la PJJ et des Itep ne sont pas toujours les mêmes.

Il est essentiel d'associer l'éducation nationale à la prise en charge des jeunes, mais cette administration reste perçue comme trop cloisonnée. Cette perception peut s'expliquer par le fait qu'il existe des règles relatives au « secret partagé » dans le secteur médico-social, qui n'ont pas d'équivalent à l'éducation nationale, ce qui peut empêcher les enseignants de percevoir tous les aspects d'une situation individuelle. Les « classes relais » gagneraient à être développées pour soutenir certains élèves en situation d'échec scolaire.

Les liens noués entre la PJJ et l'Itep permettent de conduire un travail de prévention qui s'inscrit dans la durée, alors que les placements en centre éducatif renforcé (CER) ou en centre éducatif fermé (CEF) sont souvent trop courts pour qu'un travail de fond puisse être mené à son terme.

Les échanges se sont poursuivis au cours d'un déjeuner de travail auquel s'est joint le Dr Guillaume Bronsard, psychiatre à la maison de l'adolescent de Marseille, qui a notamment évoqué les techniques de confinement thérapeutique, d'une durée de 48 heures, qui visent à calmer un jeune placé en présence d'un éducateur.

- Visite de l'établissement pénitentiaire pour mineurs (EPM) La Valentine à Marseille

La directrice de l'établissement, Mme Sophie Bondil, a accueilli la délégation à l'EPM La Valentine, qui a ouvert en 2007.

L'EPM compte 59 places, plus une cellule de protection d'urgence utilisée en cas de risque suicidaire. Il n'accueillait que 46 détenus au moment de la visite de la délégation, ce qui permettait de respecter le principe de l'encellulement individuel.

88 % de ces détenus sont des prévenus, en attente de leur jugement principalement pour des faits de trafic de drogue, d'atteintes aux biens ou de violences. 83 % des détenus sont âgés de plus de seize ans.

En 2017, 28 % des détenus à La Valentine étaient des mineurs non accompagnés (MNA), alors que ce chiffre n'était que de 17 % en 2016. Le travail avec ces jeunes est particulièrement difficile en raison de leur isolement et de la barrière de la langue.

La gestion de la violence en prison est une priorité pour la direction de l'établissement. Chaque fait donne lieu à un passage en commission de discipline ou devant le magistrat. L'EPM développe un programme sur le thème du respect et travaille avec les aumôniers et avec l'éducation nationale. Ces efforts ont permis de stabiliser les violences entre détenus et de faire reculer les violences physiques contre le personnel.

L'EPM compte plusieurs unités d'hébergement qui comptent chacune dix détenus. Les jeunes sont enfermés dans leur cellule chaque soir à 19h20. Chaque cellule est équipée d'un poste de télévision qui est coupé à partir de minuit.

Les détenus partagent des temps collectifs au moment des repas, qu'ils prennent par groupes de cinq, ce qui donne l'occasion de travailler avec eux sur la socialisation, et ils bénéficient de 19 heures d'enseignement scolaire par semaine, assurées par une dizaine de professeurs. Deux ateliers de découverte professionnelle sont également organisés.

Deux infirmières sont présentes du lundi au vendredi à l'unité sanitaire, et un médecin y travaille à mi-temps. Deux chirurgiens-dentistes et deux psychologues interviennent régulièrement.

Une association de soutien aux familles, la Halte Saint-Vincent, est présente les mercredis après-midi ainsi que les samedis et dimanches.

La mission locale de Marseille participe à la préparation de la sortie de détention. La PJJ veille à ce que la sortie de détention soit suivie d'un placement en CEF ou d'une mesure de suivi en milieu ouvert.

Visite du quartier pour mineurs de l'établissement pénitentiaire de Villepinte
(Mercredi 9 mai 2018)

Composition de la délégation : Mme Catherine Troendlé, présidente, M. Michel Amiel, rapporteur, Mmes Catherine Conconne, Jocelyne Guidez et Chantal Deseyne.

L'établissement pénitentiaire de Villepinte, mis en service en 1991 et disposant d'une capacité totale de 13 000 places, souffre déjà d'un vieillissement prématuré. La maison d'arrêt dispose d'une capacité de 583 places, dont 40 sont réservées aux mineurs, regroupés dans un quartier distinct.

1) Entretien avec Mme Léa Poplin, directrice de l'établissement

Le premier problème abordé est celui de l'encellulement individuel. En raison de la capacité limitée des lieux au regard des besoins dans le département de la Seine-Saint-Denis, l'établissement ne peut garantir à tout moment l'encellulement individuel des mineurs.

La durée très variable de la détention provisoire, pouvant aller de quinze jours à huit mois, pose un problème : en raison d'une absence de visibilité sur la date de sortie du mineur, tout investissement éducatif ou social dans son processus de réinsertion peut difficilement être envisagé.

Concernant le personnel de l'administration pénitentiaire, la direction a estimé que le degré de formation et de préparation à la réalité de la délinquance et du milieu carcéral demeurait souvent insuffisant. Les formations spécifiques aux publics détenus mineurs sont encore plus rares, ce qui contribue à expliquer le turn over élevé du personnel qui a du mal à s'adapter à la psychologie particulière de l'adolescent.

Il serait utile qu'une politique ambitieuse de ressources humaines soit engagée pour encourager les surveillants à travailler dans les quartiers pour mineurs. Cela passe notamment par des échanges plus réguliers et institutionnalisés avec les éducateurs de la PJJ, et éventuellement par une plus grande spécialisation des corps de l'administration pénitentiaire.

Le dialogue entre les différents intervenants est assuré par la commission pluridisciplinaire unique (CPU) réunie une fois par semaine et où siègent l'administration pénitentiaire, la PJJ, l'éducation nationale ainsi que les services de soins.

Le sujet du passage de la minorité à la majorité a donné lieu à des échanges particulièrement riches. Il a notamment été noté que, bien que les populations mineures et majeures de l'établissement pénitentiaire de Villepinte soient soumises à une règle de séparation stricte tant que dure la minorité, cette dernière s'interrompt dès que le mineur atteint l'âge de dix-huit ans. Les jeunes majeurs passent par le quartier « nouveaux arrivants » de la maison d'arrêt puis sont orientés vers le module « respect » développé au sein de l'établissement, ce qui leur permet de bénéficier de conditions de détention particulières.

L'établissement accueille peu de mineurs non accompagnés (MNA), la plupart des détenus étant originaires du département. Un mineur détenu à Villepinte présente un profil de radicalisation, contre une trentaine de majeurs.

2) Entretiens avec les différents intervenants

• L'administration pénitentiaire

Les surveillants pénitentiaires veillent d'abord au respect d'un emploi du temps réglé : lever à 7 heures du matin, petit-déjeuner, temps scolaire, une heure de promenade, suivie d'activités sportives (essentiellement de la musculation et de la gymnastique) durant deux heures, deux fois par semaine.

Le faible nombre d'activités pose la question du contenu de la détention et, partant, de la mission de l'administration pénitentiaire. Une journée plus riche permettrait au surveillant de se placer dans un autre rôle que celui de la répression des débordements.

• Les éducateurs de la PJJ

L'équipe est composée de huit éducateurs et de deux personnes en service civique. Le message porté par cette équipe est essentiellement celui d'une préservation de l'esprit de l'ordonnance de 1945. De même que les surveillants, ils déplorent le trop faible contenu éducatif donné à la détention.

La formation dispensée aux éducateurs de la PJJ ne les prépare pas suffisamment préparatoire au contact avec le milieu pénitentiaire. Le recentrage de l'éducateur de la PJJ autour de la mission pénale depuis 2005 ne semble pas correspondre aux aspirations réelles des professionnels et a été décrit comme « violent ».

Les éducateurs déplorent leur faible effectif ainsi que leur consultation limitée sur la vie pénitentiaire du jeune détenu. Ils ne sont pas tenus informés des affectations ou des transferts de cellule. De façon générale, leur mission les porte davantage à privilégier les prises en charge en milieu ouvert et à constater de meilleures coordinations avec l'administration pénitentiaire en établissement pénitentiaire pour mineurs (EPM).

• L'éducation nationale

Les enseignants indiquent que beaucoup de détenus ont été déscolarisés très jeunes, le décrochage devenant plus fréquent à partir de la classe de 4 e .

L'emploi du temps des jeunes détenus comporte entre neuf et douze heures de cours par semaine. Les cours sont dispensés par groupes de cinq élèves, afin d'assurer un enseignement plus individualisé et de limiter le risque d'incident entre les jeunes détenus. L'enseignement s'interrompt pendant les vacances scolaires.

Les enseignants ont mis en place des projets avec l'aide des surveillants et des éducateurs de la PJJ, par exemple autour du street art , de la fabrication d'un journal, de l'entretien d'un jardin pédagogique, d'un atelier cuisine et d'un atelier géométrie.

À la fin de la détention, les éducateurs de la PJJ orientent les jeunes vers les centres de formation des apprentis (CFA) ou vers les missions locales.

• Les services de soins

Les professionnels de santé ont rappelé leur attachement au principe de la confidentialité des soins. Ils ont exposé les modalités de la prise en charge du jeune détenu, qui peut fournir l'occasion de procéder à des examens de dépistage et comporte une visite médicale systématique avec un pédopsychiatre.

Les équipes ont souligné la prévalence de certains troubles du comportement, dont la plupart préexistent à l'incarcération et sont illustratifs de certains échecs de l'aide sociale à l'enfance.

• Rencontre avec de jeunes détenus

Il est ressorti plusieurs points de la rencontre de la mission avec trois détenus, âgés de quinze à dix-sept ans :

- tous déplorent le manque d'activités, notamment pendant le week-end : ils restent alors dans leur cellule 23 heures sur 24, avec seulement une heure de promenade ; le temps passé en cellule est essentiellement occupé par la télévision ;

- le volume des cours est à leur sens trop limité ;

- la possibilité de communiquer avec leur famille est limitée par le prix élevé de la communication téléphonique (20 euros pour une heure de communication).

Visite du centre éducatif fermé (CEF) de Savigny-sur-Orge
(Mercredi 23 mai 2018)

Composition de la délégation : Mme Catherine Troendle, présidente, M. Michel Amiel, rapporteur, Mmes Jacky Deromedi, Nassima Dindar, Chantal Deseyne et Marie Mercier et M. Martin Lévrier.

1. Déjeuner de travail au restaurant d'application

Ce restaurant d'application, qui fonctionne grâce à l'appui d'une entreprise privée, accueille des jeunes suivis par la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) mais aussi des jeunes orientés par la mission locale.

Mme Marie-Hélène Chopin, directrice territoriale de la PJJ, a indiqué que les jeunes qui y sont formés peuvent d'abord obtenir un certificat de qualification professionnelle puis qu'ils peuvent éventuellement poursuivre leurs études jusqu'au niveau du CAP. Une place est réservée à un jeune placé au CEF.

La PJJ s'efforce de maintenir en CEF pendant au moins quatre mois les jeunes qui y sont placés, considérant que ce délai est le minimum pour conduire un véritable travail avec le jeune. Le premier mois est utilisé pour travailler sur son projet.

Les jeunes placés au CEF ont un passé de délinquance plus lourd que ceux suivis par l'unité éducative d'accueil de jour (UEAJ). Deux CEF dans le département de l'Essonne relèvent du secteur public : celui de Savigny-sur-Orge et celui de Bures-sur-Yvette. La PJJ gère deux autres structures d'hébergement collectif situées à Draveil et à Epinay-sur-Orge. Les familles d'accueil sont un bon dispositif mais il n'y en a plus dans le département, faute de familles s'état portées candidates ; le faible niveau de l'indemnisation qui leur est accordée constitue sans doute un facteur d'explication.

La PJJ expérimente des sorties progressives du CEF, pour éviter une rupture trop brutale, en accord avec le magistrat. Elle travaille sur ce point en partenariat avec les services de l'aide sociale à l'enfance (ASE). Le magistrat peut autoriser le jeune à rendre visite à sa famille, ce qui permet d'évaluer si un retour en famille est envisageable à l'issue du placement.

La PJJ a signé une convention avec le conseil régional d'Ile-de-France pour la formation professionnelle des jeunes ; l'objectif est de leur permettre d'accéder aux dispositifs de droit commun, en maintenant un suivi assuré par un éducateur qui peut intervenir en cas de problème. La PJJ souhaite développer des partenariats pour former les jeunes aux métiers de l'informatique et de l'environnement.

2. Visite du centre d'exposition « Enfants en justice »

Ouvert en 2001, ce centre d'exposition est installé dans les locaux d'un ancie centre d'observation de l'éducation surveillée, qui a fonctionné de 1945 à 1972. Ce centre d'observation accueillait des jeunes pour procéder à l'évaluation de leur situation et de leur profil et communiquer ces informations au juge des enfants.

Le centre d'exposition retrace l'histoire de l'éducation surveillée puis de la PJJ. Il se visite sur rendez-vous et reçoit de nombreux groupes tout au long de l'année.

3. Visite des installations de l'UEAJ de Savigny-sur-Orge et du CEF

Le CEF jouxte les installations de l'unité éducative d'activités de jour (UEAJ) de Savigny-sur-Orge sur le site de la Ferme de Champagne, qui sont mises à la disposition des mineurs placés au CEF. Outre le restaurant d'application, sont notamment présents un atelier de génie civil, un plateau logistique et un potager, qui permettent de proposer aux mineurs placés d'être initiés à ces activités et, selon leurs affinités et les possibilités, de suivre une formation qui peut être qualifiante, à l'instar de certains certificats de qualification professionnelle (CQP) ou du certificat d'aptitude à la conduite en sécurité (CACES) d'engins de manutention. Dans ces activités, les mineurs placés du CEF côtoient des jeunes relevant de l'accueil en milieu ouvert ainsi que des missions locales. Le champ des possibles n'est pas limité par cette offre in situ : par exemple, l'entretien des extérieurs et des pelouses est confié à une entreprise qui forme certains jeunes.

Le CEF entretient sur les pelouses attenantes plusieurs enclos contenant différents animaux : ânes, chèvres, chiens primitifs (husky et malamute), rats domestiques, poules, fourmis. Ces animaux servent ont une fonction pédagogique, dans le cadre de ce que le CEF nomme la « zoopédagogie » : l'exposition aux animaux ayant pour objectif de créer un rapport informel (« faisant ressortir leur âme d'enfant »), de faire découvrir le fonctionnement des sociétés animales et de faire réfléchir les mineurs placés sur leur place dans la société humaine. Plus généralement, le CEF mise sur l'expérience pratique et le geste manuel plutôt que sur les « grands discours qui les dépassent [les mineurs placés] ».

S'agissant du CEF lui-même, le bâtiment est ceint d'une clôture peu élevée, les issues en sont fermées. Les chambres sont individuelles et fermées pendant la journée. Les repas sont pris en commun ; le couvert est mis par les mineurs placés. Des salles de détente et de musculation sont à la disposition des mineurs placés, ainsi qu'un terrain de sport, un potager et une cabane (servant de lieu de rencontre avec les familles) dans l'enceinte même du CEF.

4. Table ronde en présence de M. Simon, directeur interrégional de la protection judiciaire de la jeunesse (DIRPJJ) pour l'Île-de-France et l'outre-mer, Mme Chopin, directrice territoriale de la PJJ de l'Essonne, M. Rontard, directeur du CEF, Mme Balladur, responsable d'activité éducative ainsi qu'un éducateur spécialisé de milieu ouvert.

Le directeur a rappelé les principes de fonctionnement du CEF :

- capacité de douze places dont une réservée pour actes terroristes, non occupée (onze mineurs placés étaient accueillis, dont un en fugue) - le centre peut théoriquement recevoir des jeunes filles mais les locaux ne sont pas adaptés ;

- séjours de six mois renouvelables une fois : accueil en trois modules d'une durée d'un à deux mois (accueil, autonomie puis préparation de la sortie) ;

- forte présence adulte : équipe de direction (3 p.), quinze éducateurs, une équipe pédagogique de quatre personnes dont un professeur des écoles, un pôle médico-psychologique comprenant une infirmière, un psychiatre et une psychologue ; le CEF compte également six personnels d'entretien ; une réunion d'équipe interdisciplinaire se tient chaque semaine afin de faire le point sur la situation de chaque jeune - les conclusions en sont communiquées au jeune concerné ;

- prise en charge permanente par des éducateurs ;

- emplois du temps hebdomadaires comprenant quatre activités de jour, des temps d'enseignement et du sport ;

- reconstruction du lien avec les familles à compter du module 2 (après un à deux mois de présence au CEF) ;

- bilans éducatifs et médicaux réalisés dès l'arrivée et permettant un suivi et une remise à niveau pendant le séjour - de nombreux mineurs placé arrivent en effet après une période de déscolarisation et dans un état physique dégradé.

Le CEF met en oeuvre un suivi individualisé des mineurs placés, comparé à de l'« orfèvrerie », qui est permis par un taux d'encadrement très élevé et une présence conséquente des jeunes. Par le placement en milieu contraint, avec une autorité permanente favorisant un travail éducatif, il s'agit de mettre les mineurs placés dans un climat éducatif relativement calme, permettant un renouvellement des liens avec les familles (l'absence des pères, extrêmement fréquente, a été soulignée comme une difficulté majeure), une accroche des jeunes avec un domaine professionnel en vue d'une reprise d'études voire d'une embauche. Le CEF propose également des séjours dits d'apaisement dans une ferme du Sud de la France produisant du fromage de chèvre, dans laquelle les jeunes vivent en communauté avec la famille qui les accueille et participent à la production et à la vente.

La principale difficulté que rencontre le CEF est le turnover important de ces éducateurs, tant titulaires que contractuels. La stabilisation des équipes autour d'un projet éducatif est un enjeu majeur pour le centre. Le respect par les mineurs placés des interdits (téléphone portable, cannabis) est également difficile à assurer. Les fugues sont courantes mais d'une durée variable ; elles ne justifient pas à elles seules une incarcération. La direction du CEF ne connaît pas le devenir des mineurs placés.

Le DIRPJJ a rappelé le coût de l'accueil en CEF (600 à 700 euros par jeune et par jour) et, plus généralement, des dispositifs de placement au regard du suivi en milieu ouvert, nettement moins onéreux. Ce dernier peut s'avérer plus adapté pour certains jeunes, pour lesquels le placement est parfois « un traumatisme » et un « arrachement au foyer ». L'expérimentation prévue par l'article 52 du projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice d'une mesure éducative d'accueil de jour, se situant entre le suivi en milieu ouvert et le placement, est saluée. L'efficacité des mesures de réparation, simples, rapides et concrètes, a été mise en avant.

Le partenariat avec les familles et l'adhésion de ces dernières aux mesures sont un facteur important de leur réussite. Ainsi, les services de la PJJ effectuent une à deux visites mensuelles ; préalablement à l'exécution d'une mesure en milieu ouvert, un entretien préalable avec le jeune est systématiquement mené par la PJJ en présence d'au moins un des deux parents ou d'un tiers. L'importance du partenariat avec les conseils départementaux dans le cadre de l'aide sociale à l'enfance (ASE) a également été soulignée ; le lien avec l'ASE est assuré par les éducateurs en milieu ouvert de la PJJ. Le DIRPJJ a exprimé le souhait que les schémas départementaux de l'enfance incluent un volet consacré à la protection judiciaire de la jeunesse.

Les sénateurs membres de la délégation ont ensuite mené des échanges informels avec des mineurs placés, les interrogeant sur leur parcours, leur quotidien au CEF et leurs perspectives.

Déplacement dans l'agglomération lyonnaise
(Lundi 18 juin 2018)

Composition de la délégation : Mme Catherine Troendlé, présidente, Mmes Catherine Conconne et Jacky Deromedi et M. Michel Forissier.

1) Visite du centre hospitalier Le Vinatier

Ont participé à cette réunion MM. Mariotti, directeur de l'établissement et Berrichel, directeur des soins, et les Drs Perrin, chef du pôle de la psychiatrie de personne âgée, Salvarelli, chef de pôle de la psychiatrie adulte, et Clementin, chef du pôle des urgences psychiatriques.

Le centre hospitalier Le Vinatier présente la particularité d'être un établissement de santé mono-disciplinaire, et non un centre hospitalier universitaire généraliste autorisé à dispenser des soins psychiatriques. Il dispose de quatre pôles de psychiatrie polyvalents, dont un dédié à la pédopsychiatrie.

Les prises en charge sont structurées en fonction de l'âge du patient et doivent prendre en compte plusieurs critères :

- le critère réglementaire, selon lequel la compétence pédopsychiatrique s'interrompt à l'âge de seize ans ;

- le critère pathologique, qui conduit le thérapeute à distinguer les troubles psychiatriques consécutifs aux troubles de l'adolescence (intervenant souvent à partir de douze ans), d'autres troubles psychiatriques plus isolés ;

- le critère thérapeutique, qui commande que le soin soit apporté dans un souci de continuité.

Les intervenants ont insisté sur la tension qu'ils observaient entre la demande de liberté exprimée par les mineurs dont ils assurent le suivi et la demande de contention exprimée par certains parents. Ils en conçoivent une certaine inquiétude quant au rôle assigné à la psychiatrie, de plus en plus perçue comme une alternative non pénale à l'incarcération. Ils notent même une dérive visant à diriger vers le centre hospitalier spécialisé les personnes dont les comportements, sans être de nature délictuelle, font l'objet d'ordonnances de placement provisoire (OPP) du procureur de la République.

La différence importante entre la problématique strictement psychique, qui requiert un soutien et un suivi social étayé, et la problématique psychiatrique, qui seule relève de la pathologie mentale, a également été mentionnée. Alors que la structure psychiatrique n'a vocation qu'à assurer le traitement de la seconde, elle est souvent identifiée comme pouvant apporter une solution à la première.

Concernant le cas particulier des mineurs, l'admission au Vinatier se fait très majoritairement après une orientation par le centre médico-psychologique (CMP). Ils sont accueillis dans un service dédié afin de ne pas les mélanger avec les adultes, puis sont éventuellement redirigés vers le service de pédopsychiatrie.

De façon générale, l'établissement déplore le cloisonnement entre le milieu sanitaire, auquel ils sont associés en raison de leur vocation thérapeutique, et du milieu médico-social. Il serait souhaitable de travailler sur le moment intermédiaire entre un premier suivi en CMP, qui fournit des consultations de ville, et une admission au centre du Vinatier.

2) Établissement pénitentiaire pour mineurs de Meyzieu

Table ronde avec les acteurs de l'EPM

Dans un premier temps, une table-ronde avec les principaux acteurs de l'établissement a permis de présenter à la fois le projet d'établissement et d'évoquer les conditions de travail des personnels et d'accueil des jeunes.

Outre le maire de Meyzieu, M. Christophe Quiniou, participaient à cette table-ronde M. Arnaud Fontaine, directeur de l'EPM, M. Bruno Fenayon, directeur-adjoint, Mme Lydia Dimier, directrice du service de l'enseignement, Mme Nora Medjani, psychologue de l'éducation nationale, ainsi que M. Atsu Gadegbeku, chef de détention et le lieutenant Christelle Baggio.

Dans ce cadre a été dressé un premier bilan de l'expérience de l'EPM de Meyzieu, qui a ouvert ses portes en juin 2007 et qui est parmi l'un des tout premiers établissements inaugurés à la suite de la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice, dite loi Perben I. Le sénateur Michel Forissier a d'ailleurs été associé au lancement de ce programme à Meyzieu, dont il était alors le premier magistrat.

D'une surface de 6 880 m², l'EPM s'étend sur 4,3 hectares. Accueillant quarante-deux jeunes, quarante garçons et deux filles, pour une capacité maximale de soixante places, l'EPM a connu, à l'été 2007, une hausse sans précédent du nombre de détenus, qui a atteint 54 personnes. La moyenne d'âge des détenus, dont près de 90 % se trouvent en détention provisoire, est de seize ans et demi, le centre n'accueillant pas, pour le moment, de jeunes de moins de treize ans.

Les détenus bénéficient d'un suivi médical - qui couvre l'ensemble des soins, y compris bucco-dentaires - assuré dès leur entrée dans l'établissement.

Le transfert vers les structures pour adultes des détenus dépassant l'âge de dix-huit ans n'est pas automatique : en cas de projet professionnel ou éducatif en cours, le maintien dans l'EPM de détenus atteignant leur majorité est possible pendant six mois.

Ont été ensuite abordées les questions relatives à la scolarité des jeunes détenus, notamment pendant l'été et les difficultés éprouvées par certains d'entre eux pour réintégrer le système scolaire (seuls 10 % des mineurs détenus étant scolarisés avant leur incarcération). Les enseignements sont dispensés à des groupes de cinq élèves maximum, regroupés par niveau. Ils sont également suivis par une psychologue de l'éducation nationale qui élabore, de concert avec eux et en partenariat avec la protection judiciaire de la jeunesse, un projet de sortie de l'EPM.

Les enseignants, dont l'affectation en EPM relève du volontariat, rencontrent des difficultés pour entrer en relation avec les familles, y compris par téléphone. Les formations professionnelles, essentiellement sur la partie théorique, proposées à l'EPM (CAP vente et CAP électricité) ont également été présentées ainsi que les modalités d'acquisition des savoirs fondamentaux.

Les personnels de l'administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse ont témoigné de leur collaboration dans le suivi constant des jeunes, afin notamment d'éviter certains passages à l'acte, comme la violence entre détenus ou le suicide. Ils ont souligné les échanges fructueux entre les agents de la PJJ et de l'administration pénitentiaire, à l'instar des bonnes relations entre le binôme de la direction de l'établissement (M. Arnaud Fontaine est issu de la PJJ, tandis que M. Bruno Fenayon est un agent de l'administration pénitentiaire).

Ils ont toutefois souligné les difficultés éprouvées lors de l'incarcération de mineurs très violents, sous l'emprise de stupéfiants. Ils ont également relevé l'accroissement du nombre des mineurs non accompagnés (MNA) en provenance des pays de l'Est et dont les trois-quarts seraient en fait majeurs, leur présence générant un surcroît des dégradations au sein de l'établissement (incendie de cellules notamment) et rendant difficile une approche pédagogique favorisant, à terme, leur insertion.

Visite des locaux et rencontre avec les jeunes détenus

Avec M. Arnaud Fontaine, directeur de l'établissement, la délégation a ensuite visité les locaux de l'établissement : les différents quartiers, dont le quartier disciplinaire et le quartier réservé aux jeunes filles, ainsi que les infrastructures sportives, dont le gymnase, où elle a pu assister à une séance d'entraînement de baskets avec deux jeunes, respectivement âgés de seize et dix-sept ans, placés sous la responsabilité de leur moniteur de sport. Elle a également visité les ateliers de formation en électricité, ainsi que la médiathèque et une serre destinée aux activités de jardinage accessibles aux détenus.

Elle a enfin pu rencontrer une douzaine de jeunes détenus, dont un mineur non accompagné d'origine serbe et une jeune fille de seize ans qui était en classe de première avant son incarcération. Les débats ont permis à la fois de mieux connaître le parcours des détenus, parvenus dans l'EPM au terme d'un parcours délinquantiel, ainsi que leurs aspirations professionnelles une fois leur peine purgée.

Si le sentiment d'une rupture avec le milieu d'origine semble partagé, l'idée de vivre une détention dans des conditions spécifiques, voire privilégiées, a été exprimée par deux mineurs qui avaient précédemment connu l'incarcération en quartiers pour mineurs (QPM).

Visite de l'École nationale de la protection judiciaire de la jeunesse
(Jeudi 6 septembre 2018)

Composition de la délégation : M. Michel Amiel, rapporteur, Mmes Laurence Rossignol et Chantal Deseyne.

1. Visite de l'école nationale de la protection judiciaire de la jeunesse (ENPJJ)

Mme Anne Devreese, directrice, a souligné que l'ENPJJ se positionne comme un centre de ressources pour tous les acteurs de la protection de l'enfance, avec une expertise spécifique sur le sujet de l'enfance délinquante.

L'école est un centre de formation, de recherche et d'édition, ainsi que de documentation grâce à sa bibliothèque et à sa médiathèque. Elle entretient des liens forts avec l'école nationale de la magistrature (ENM) et avec l'école nationale de l'administration pénitentiaire (Enap).

Mme Aurélie Roussel, chargée de communication, a expliqué que l'ENPJJ, installée à Roubaix depuis 2008, dans les locaux d'une ancienne filature, dispose de 6 000 mètres carrés dédiés à la formation. Chaque promotion est formée pendant deux ans en alternance.

2. La formation dispensée à l'ENPJJ

M. Frédéric Phaure, directeur du service de la formation, a indiqué que l'ENPJJ dispense des enseignements dans le cadre de la formation initiale, mais aussi dans le cadre de l'accompagnement à l'emploi, au moment de la prise de poste, et de la formation continue. La formation concerne les éducateurs de la PJJ ainsi que d'autres professionnels de l'enfance en danger.

Les enseignements dispensés conduisent à présenter l'état du droit, l'état de la recherche et l'état des pratiques, ce qui permet de faire connaître les innovations professionnelles. Les étudiants passent un tiers de leur temps à l'école et deux tiers en stages pratiques. La pédagogie se veut individualisée et progressive.

Les éducateurs doivent être au minimum titulaires d'un diplôme de niveau bac + 2, mais beaucoup sont en pratique titulaires d'une licence voire d'un master. Ils sont recrutés par un concours externe, par un concours dit de « troisième voie », s'ils ont déjà une expérience professionnelle, ou par un concours réservé aux éducateurs spécialisés.

L'école prévoit de développer une formation de préparation à la prise de poste pour les éducateurs nommés en CEF, qui pourrait notamment intéresser les éducateurs spécialisés. Une formation d'adaptation à l'emploi est par ailleurs organisée pour les éducateurs et les surveillants affectés en établissement pénitentiaire pour mineurs (EPM). Les professionnels ne passent cependant que quatre semaines regroupés sur un même site, ce qui est court pour apprendre à se connaître, et beaucoup de surveillants pénitentiaires ont du mal à se libérer pour participer à cette formation, en raison de leurs contraintes professionnelles.

3. Echanges avec des éducateurs en formation

La délégation s'est entretenue avec Mme Ludivine Decourcelles, MM. David Gosset et Bilel Bensabra, en deuxième année de formation, et Mme Audrey Pierson, en première année de formation, en présence de M. Benoist Jolly, directeur du pôle « interventions éducatives ».

Les stagiaires ont exposé leur parcours, leurs précédentes expériences professionnelles, leurs motivations pour choisir la carrière d'éducateurs et leurs premières expériences au contact des jeunes suivis par la PJJ.

Les échanges ont notamment porté sur le travail avec l'administration pénitentiaire, les éducateurs ayant un rôle important à jouer pour maintenir le lien avec l'extérieur, et avec l'éducation nationale, ainsi que sur la préparation de l'entrée des jeunes dans les dispositifs de droit commun et sur les difficultés posées par l'importante consommation de cannabis de beaucoup de ces jeunes. Cette consommation se produit souvent en réaction aux traumas qu'ils ont subis pendant l'enfance.

4. Échanges avec des formateurs

La délégation s'est ensuite entretenue avec MM. Virginie Meresse, Stéphanie Buchet, Stéphanie Desbarrieux et Gaëlle Cappelaere, formatrices, en présence de M. Benoist Jolly.

Les formatrices présentes ont notamment souligné l'intérêt de lieux de formation tels que l'ENPJJ pour travailler sur la complémentarité entre les différents intervenants auprès des jeunes.

Elles ont mis en garde contre un recours trop exclusif aux CEF, qui ne doivent pas devenir la solution retenue faute des places disponibles dans des structures plus adaptées. Elles ont déploré que le recentrage de la PJJ sur le pénal ait conduit à s'intéresser davantage à l'acte délinquant et moins au contexte dans lequel évolue le jeune. Les familles d'accueil bénévoles jouent un rôle éducatif important mais il est difficile d'en recruter dans certains territoires, l'indemnisation proposée étant très faible.

5. Entretien avec M. Maël Virat, chercheur en psychologie à l'ENPJJ

L'ENPJJ est active dans le domaine de la recherche, par exemple en psychologie du développement, sujet sur lequel travaille M. Virat.

M. Virat a d'abord expliqué comment la consommation de cannabis ou de médicaments comme la Ritaline altère la fabrication de la gaine de myéline qui joue un rôle important dans la maturation du cerveau chez l'adolescent et le jeune adulte.

Ils a ensuite souligné que les adolescents ont du mal à se contrôler lorsqu'ils sont dans une « situation chaude », en présence de leurs pairs. Si la sanction pénale est dissuasive de manière rationnelle, elle l'est moins quand l'adolescent est confronté à une situation chaude.

Une longue incarcération peut réduire les capacités d'auto-régulation de l'adolescent qui a peu d'occasion d'exercer sa capacité d'auto-contrôle dans un environnement carcéral. L'incarcération a de plus un impact sur la définition de soi, sur l'identité, et elle incite le détenu à se percevoir comme en opposition avec la société conventionnelle. Or le respect de la loi résulte davantage de la sensation de faire partie de la communauté qui la promulgue que de la peur de la sanction.

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