B. UN COÛT AVANT TOUT HUMAIN, MAIS AUSSI ÉCOLOGIQUE ET FINANCIER

Les feux de forêts représentent avant tout un risque pour la population environnante et son écosystème.

1. Un risque susceptible d'engendrer de nombreuses pertes humaines

Les pertes humaines liées aux incendies de forêts sont hélas régulières, avec au premier rang les habitants dans les zones exposées au risque, mais aussi les secouristes . À l'échelle mondiale, 2 000 personnes sont décédées directement à la suite d'un incendie de forêt ces trente dernières années, et six millions d'habitants sont exposés chaque année aux effets indirects des feux comme la fumée, d'après l'IRSTEA.

Si la saison des feux de 2017 n'a donné lieu à aucune perte en France, malgré son intensité, ce n'était hélas pas le cas des autres pays européens. Le Portugal déplorait la même année 114 victimes alors que plus de 550 000 hectares avaient été ravagés par les feux.

Les grands incendies de 2003 avaient causé en France le décès de huit personnes, dont quatre sapeurs-pompiers . Depuis, pas moins de sept sapeurs-pompiers sont morts en cours d'intervention contre les flammes. 6 ( * ) La campagne « feux de forêts » de cette année a été également marquée par le décès d'un pilote de la flotte de la Sécurité civile, dont l'avion s'est écrasé alors qu'il luttait contre un incendie de grande ampleur sévissant dans le Gard.

2. De sérieuses répercussions sur la biodiversité et l'environnement

En dehors des dommages qu'ils peuvent provoquer sur les habitations et les infrastructures, les incendies de forêts représentent une menace importante pour la biodiversité et l'environnement . Les forêts françaises sont une réserve précieuse de faune et de flore, la fédération des forestiers privés de France, Fransylva, recense ainsi 138 essences sur le sol national. Elles sont par ailleurs des capteurs essentiels de dioxyde de carbone .

Les dommages écologiques des feux de forêts

Ainsi que le relevait la mission interministérielle d'évaluation relative à la défense de la forêt contre l'incendie, « l'incidence environnementale des incendies de forêt ne se limite pas à la perte de biodiversité, ni aux dommages aux écosystèmes : les incendies entraînent également le rejet dans l'atmosphère de particules et de gaz (dont du CO 2 ), la fuite de minéraux, ainsi que la destruction de l'horizon organique du sol ; ils affectent les taux d'infiltration de l'eau dans le sol et rendent ainsi les surfaces brûlées sujettes à une érosion accélérée pouvant induire pertes de sol, coulées de boues et glissements de terrain. Des incendies de forêt récurrents, combinés avec des épisodes de sècheresses, peuvent conduire à la désertification. »

Source : Rapport de la mission interministérielle d'évaluation relative à la défense de la forêt contre l'incendie, avril 2016

3. La difficile mesure de l'incidence financière des dégâts causés par les incendies

Les montants parfois cités sur le coût des dommages causés par les incendies de forêts doivent être interprétés avec beaucoup de précaution et ne peuvent que donner un ordre d'idée sur l'ampleur des dégâts, car ils ne font pas encore l'objet d'une évaluation financière rigoureuse. À titre d'exemple, la revue des études menées par l'association « Forêt méditerranéenne » 7 ( * ) que les incendies de 2003 au Portugal avaient causé des dégâts estimés à plus d'un milliard d'euros, pour 430 000 hectares de forêts parcourus par les feux.

Cette absence d'évaluation financière est sans doute l'angle mort le plus manifeste du dispositif de défense des forêts contre les incendies (DFCI). Celui-ci a en effet été régulièrement déploré par les rapports des missions d'inspection interministérielle précités ou de la Cour des comptes, cette dernière affirmant que « le recensement, l'identification et l'estimation des coûts induits par les catastrophes naturelles présentent d'importantes lacunes.[...]. les conséquences économiques à court et moyen terme des feux de forêt sont presque totalement ignorées, à l'exception de celles sur les récoltes de bois en Aquitaine » 8 ( * ) .

D'après l'ONF, la mise en place d'une comptabilité précise des dommages causés par les feux soulève davantage une difficulté méthodologique, l'outil en lui-même n'étant pas nécessairement compliqué à mettre en oeuvre. Pour arriver à des résultats pertinents, la méthode nécessiterait aussi une évaluation contrefactuelle, soit la mesure du coût de l'inaction, qui demeure un obstacle pour les chercheurs ou les actuaires.

L'estimation des conséquences socio-économiques des feux de forêts n'est pas un objectif en elle-même. Elle permettrait en effet une mise en perspective bienvenue et objective des dépenses engagées dans la prévention et la lutte contre les feux de forêts, relativement aux dégâts causés ou évités .

Recommandation n°10 : afin d'améliorer la connaissance des coûts des dommages liées aux feux de forêts, engager un travail d'élaboration d'un outil d'évaluation économique des préjudices et des dégâts causés ou susceptibles d'être causés.


* 6 Un sapeur-pompier mort en 2016, 2 sapeurs-pompiers en 2012, 4 sapeurs-pompiers en 2006, 2 pilotes de Canadair décédés en 2005 (en cours d'exercice), 1 sapeur-pompier mort en 2005, 2 pilotes de Canadair décédés en 2004 (en cours d'exercice).

* 7 Note de l'association « Forêt méditerranéenne », « Changer notre regard sur les incendies de forêt et agir sans délais », avril 2019.

* 8 Cour des comptes, rapport public annuel de 2009, insertion sur « l'État face à la gestion des risques naturels : feux de forêt et inondations » .

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