C. LES BIOCARBURANTS SONT ÉGALEMENT UTILES À LA LUTTE CONTRE LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES ET CONTRE LA POLLUTION ATMOSPHÉRIQUE

Au-delà de leur intérêt énergétique, les biocarburants présentent des bénéfices sur le plan environnemental, puisqu'ils permettent selon les études transmises au rapporteur 155 ( * ) :

- de contribuer à la lutte contre les changements climatiques , en raison de leurs plus faibles émissions de gaz à effet de serre (GES) par rapport aux carburants d'origine fossile ;

- et de concourir à la lutte contre la pollution atmosphérique , leurs émissions de certains polluants étant égales ou inférieures à celles des carburants d'origine fossile.

1. La contribution à la lutte contre les changements climatiques

Ainsi que l'a indiqué l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) 156 ( * ) dans une étude publiée en 2010 - fondée sur l'analyse du « cycle de vie » des biocarburants et ne tenant pas compte des changements d'affectation des sols - les biocarburants de première génération émettent moins de GES que l'essence ou le gazole purs.

Tout d'abord, ces biocarburants consomment moins d'énergie non renouvelable « du puits à la roue » que l'essence et le gazole purs 157 ( * ) , le différentiel s'établissant :

- entre 18 et 85 % pour les bioéthanols, les réductions étant supérieures pour l'éthanol en tant que tel plutôt que pour son dérivé, l' « éthyl tertio butyl éther » (ETBE) et pour les bioéthanols issus de canne à sucre plutôt que ceux tirés du blé ;

- entre 65 et 82 % pour les biogazoles , les diminutions étant plus fortes pour les huiles végétales pures (HVP) et les esters d'huiles usagées (EMHAU) et de graisses animales (EMGA) que pour les esters végétaux (EMHV).

Le tableau ci-dessous rappelle les taux de réduction de consommation d'énergie non renouvelable ainsi calculés par l'Ademe, selon la nature de la matière première utilisée.

Réduction des consommations d'énergie non renouvelable
par type de biocarburant 158 ( * )

Bioéthanols

ETBE
de blé

ETBE
de betterave

ETBE
de maïs

ETBE
de canne à sucre

Éthanol
de blé

Éthanol
de betterave

Éthanol
de maïs

Éthanol
de canne à sucre

- 18 %

- 20 %

- 22 %

- 54 %

- 49 %

- 52 %

- 53 %

- 85 %

Biogazoles

EMHV
de colza

EMHV
de tournesol

EMHV
de soja

EMHV
de palme

EMHAU

EMGA

HVP

- 65 %

- 68 %

- 69 %

- 78 %

- 81 %

- 81 %

- 82 %

De plus, les biocarburants engendrent des émissions de GES 159 ( * ) en quantité moindre que l'essence ou le gazole purs, selon cette même étude 160 ( * ) , l'écart d'émission atteignant :

- entre 24 et 72 % pour les bioéthanols , les réductions étant là encore supérieures pour l'éthanol en tant que tel plutôt que pour son dérivé, l' « éthyl tertio butyl éther » (ETBE) et pour les biocarburants issus de canne à sucre par rapport à ceux issus de blé ;

- entre 59 et 91 % pour les biogazoles , les baisses étant plus élevées pour les esters d'huiles usagées (EHMAU) et de graisses animales (EMGA) que pour les esters végétaux (EMHV) ou les huiles végétales pures (HVP).

Le tableau ci-après indique les taux de diminution des émissions de GES ainsi établis par l'Ademe, selon la nature de la matière première utilisée.

Réduction des émissions de GES par type de biocarburant 161 ( * )

Bioéthanols

ETBE
de blé

ETBE
de betterave

ETBE
de maïs

ETBE
de canne à sucre

Éthanol
de blé

Éthanol
de betterave

Éthanol
de maïs

Éthanol
de canne à sucre

- 24 %

- 42 %

- 31 %

- 47 %

- 49 %

- 66 %

- 56 %

- 72 %

Biogazoles

EMHV
de colza

EMHV
de tournesol

EMHV
de soja

EMHV
de palme

EMHAU

EMGA

HVP

- 59 %

- 73 %

- 77 %

- 76 %

- 90 %

- 91 %

- 65 %

Hormis cette étude réalisée par l'Ademe, le rapporteur a également eu connaissance d'éléments de bilan complémentaires établis par la DGEC.

On a déjà indiqué que le droit européen prévoit , parmi les critères de durabilité des biocarburants, une réduction des émissions de GES fixée entre 35 et 60 % par l'actuelle directive 162 ( * ) et entre 50 et 65 % par la prochaine 163 ( * ) .

Afin de s'assurer de l'application de ces objectifs, les opérateurs économiques doivent soumettre des données aux États membres 164 ( * ) , dans les conditions prévues par la directive du 23 avril 2009 dite « EnR I » (article 18) 165 ( * ) .

À partir de ces données, la DGEC a établi un bilan des réductions des émissions de GES 166 ( * ) déclarées par les opérateurs économiques , dont les résultats pour septembre 2019 sont les suivants.

Réduction déclarée des émissions de GES par type de biocarburant 167 ( * )

Bioéthanols

ETBE

Betterave

- 58 %

Blé

- 66 %

Canne à sucre

- 74 %

Maïs

- 65 %

Orge

- 72 %

Seigle

- 50 %

Triticale

- 83 %

Éthanol

Betterave

- 60 %

Blé

- 63 %

Canne à sucre

- 92 %

Maïs

- 71 %

Orge

- 74 %

Résidus viniques

- 69 %

HVHTE

Palme

- 64 %

Biogazoles

EMHA

Huiles et graisses animales

- 73 à 83 % 168 ( * )

EMHU

Huile alimentaire usagée

- 88 %

EMHV

Colza

- 58 %

Palme

- 60 %

Soja

- 60 %

Tournesol

- 67 %

HVHTG

Huile alimentaire usagée

- 90 %

Huiles et graisses animales 169 ( * )

- 91 %

Palme

- 64 %

Au contraire des biocarburants de première génération, ceux de deuxième génération n'ont pas fait l'objet d'évaluations aussi exhaustives que celles présentées plus haut.

Pour autant, plusieurs constations peuvent être rappelées :

- de manière générale, le ministère de la Transition écologique et solidaire (METS) évalue la réduction des GES permise par les biocarburants issus de déchets ou de résidus entre 80 et 85 % 170 ( * ) ;

- plus spécifiquement, l'Ademe, dans sa contribution écrite transmise au rapporteur, évalue cette réduction à 85 % pour l'éthanol tiré de paille de blé et entre 82 et 85 % pour le gazole et l'essence de synthèse produit à partir du bois 171 ( * ) ;

- dans le même ordre d'idées, la direction générale de l'aviation civile (DGAC), dans sa réponse au questionnaire adressé par le rapporteur, estime que les biocarburants aéronautiques peuvent représenter jusqu'à 90 % de gains en émissions sur l'ensemble du cycle de vie, en particulier ceux « mobilisant des déchets ou des résidus ».

2. La participation à la lutte contre la pollution atmosphérique

L'étude précitée de l'Ademe 172 ( * ) fait apparaître des bilans plus favorables pour les estimations de potentiel photo-oxydant par rapport à l'essence ou au gazole purs 173 ( * ) :

- pour les bioéthanols , des éthanols incorporés dans l'essence E10 de même que l' « éthyl tertio butyl éther » (ETBE) dans une moindre mesure ;

- pour les biogazoles , des esters produits à partir d'huiles usagées (EMHAU), de graisses animales (EMGA) ou d'huiles végétales pures (HVP).

Cependant, il faut préciser que cet indicateur, construit à partir de modélisations fondées sur l'analyse de l'ensemble du cycle de vie des biocarburants, est selon l'Ademe moins « robuste » que ceux construits sur le bilan énergétique et les émissions de GES, dont les résultats ont déjà été exposés plus haut.

Dans d'autres études plus récentes et de nature différente transmises au rapporteur, qui ont été réalisées à partir de l'observation directe d'émissions de polluants 174 ( * ) , l'agence indique que l'effet des biocarburants sur la pollution de l'air est très variable selon le type de polluants, les carburants, l'âge des véhicules et les conditions d'usage ou de circulation

L'Ademe précise qu' un éventuel effet positif apparaît plus notable dans les véhicules anciens que dans les véhicules récents.

Par ailleurs, on retiendra que les carburants riches en éthanol et les huiles végétales hydrotraitées (HVO) présentent des émissions d'oxyde d'azote stables ou inférieures par rapport aux carburants d'origine fossile, selon l'étude conduite par l'agence en 2018 sur l'évaluation de différentes filières d'autobus urbains 175 ( * ) .


* 155 En l'espèce par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) et la direction générale de l'aviation civile (DGAC).

* 156 Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), Analyses du cycle de vie appliquées aux biocarburants de première génération consommés en France, février 2010.

* 157 Ibid., p. 21 et 22.

* 158 Source : Agence nationale de l'environnement et du développement durable (Ademe).

* 159 Sans prise en compte du changement d'affectation des sols.

* 160 Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), Analyses du cycle de vie appliquées aux biocarburants de première génération consommés en France, février 2010, p. 23 à 26.

* 161 Source : Agence nationale de l'environnement et du développement durable (Ademe).

* 162 La directive du 23 avril 2009 dite « EnR I » , actuellement applicable, prévoit une réduction de 35 % appliquée initialement, de 50 % à compter du 1 er janvier 2017 et de 60 % à compter du 1 er janvier 2018 pour les installations mises en service à partir du 1 er janvier 2017 (article 17).

* 163 La directive du 11 décembre 2018, dite « EnR II » , qui doit être transposée avant le 30 juin 2021, prévoit une réduction d'au moins 50 % pour les biocarburants produits dans des installations mises en service au plus tard le 5 octobre 2015, 60 % entre le 6 octobre 2015 et le 31 décembre 2020 et 65 % à partir du 1 er janvier 2021 (article 29).

* 164 Arrêté du 23 novembre 2011 pris en application de l'ordonnance n° 2011-1105 du 14 septembre 2011 et du décret n° 2011-1468 du 9 novembre 2011 relatif à la durabilité des biocarburants et des bioliquides (article 5).

* 165 Directive 2009/28/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables et modifiant puis abrogeant les directives 2001/77/CE et 2003/30/CE.

* 166 Sans prise en compte de la problématique du changement d'affectation des sols.

* 167 Source : direction générale de l'énergie et du climat (DGEC).

* 168 En fonction de la catégorie (III ou I et II).

* 169 De catégorie III.

* 170 Cour des comptes, Rapport public annuel, Les biocarburants : des résultats en progrès, des adaptations nécessaires, février 2016, p. 229.

* 171 Sans prise en compte des changements d'affectation des sols.

* 172 Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), Analyses du cycle de vie appliquées aux biocarburants de première génération consommés en France, février 2010, p. 29 à 31.

* 173 C'est-à-dire les impacts dus aux substances organiques émises et conduisant à la formation d'ozone de basse atmosphère.

* 174 Les données figurant dans les différentes études mentionnées dans cette sous-partie par le rapporteur ne sont donc pas comparables entre elles : les premières correspondent à un potentiel d'impact global résultant des différentes phases du cycle de vie du biocarburant, par opposition à des résultats de mesures effectives de polluants atmosphériques lors de la seule phase de combustion du carburant dans le moteur.

* 175 Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), Panorama et évaluation des différentes filières d'autobus urbains, décembre 2018.

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