LES OBSERVATIONS
DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

Recommandation n° 1 : favoriser le rapprochement, tant administratif que budgétaire, entre écoles supérieures en arts plastiques et écoles supérieures d'arts appliqués avec pour objectif la rationalisation de la cartographie des formations et le renforcement de l'attractivité des établissements.

Recommandation n° 2 : conditionner les crédits accordés dans le cadre du Plan de relance en vue d'accompagner les établissements dans leurs projets immobiliers au respect d'une logique territoriale et à l'intégration au sein de pôles scientifiques et technologiques.

Recommandation n° 3 : développer les préparations publiques et imposer l'utilisation de Parcoursup en vue d'ouvrir l'accès aux écoles supérieures en arts plastiques.

Recommandation n° 4 : repenser le suivi des élèves à l'issue de leur formation et réviser les indicateurs d'insertion professionnelle actuellement mis en oeuvre, afin de cerner au mieux l'adéquation entre la formation et la réalité du marché du travail.

Recommandation n° 5 : imposer la mise en place d'un cursus Licence-Master-Doctorat au sein des écoles supérieures en arts plastiques afin de renforcer leur attractivité et l'employabilité de leurs étudiants.

A. DES ÉCOLES SOUMISES À UNE CONCURRENCE NATIONALE ET INTERNATIONALE

1. Un enseignement fragmenté entre écoles nationales et écoles territoriales

L'enseignement supérieur en arts plastiques s'organise principalement autour de :

- 10 écoles nationales supérieures d'art - 4 sont situées à Paris et en région parisienne et 6 sont situées en région - qui sont placées sous la tutelle financière et pédagogique du ministère de la culture 1 ( * ) ;

- 34 écoles territoriales placées sous la tutelle pédagogique du ministère de la culture mais dont les ressources dépendent des communes d'implantation.

Crédits alloués aux écoles nationales en 2021 2 ( * )

(en millions d'euros)

École

Montant

ENSAD - École nationale supérieure des arts décoratifs

11,68

ENSBA - École nationale supérieure des beaux-arts

8,64

ENSCI - École nationale supérieure de création industrielle

4,30

Écoles d'art en Région

12,28

Total

36,9

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

11 000 étudiants sont formés au sein de ces établissements. Le nombre d'étudiant reste cependant inégal au sein de ces écoles, variant de 58 à 847.

La question des écoles territoriales doit notamment être posée, la Cour des comptes relève, en effet, un maillage géographique resserré mais une grande disparité entre écoles sur un même territoire. Ainsi l'école supérieure d'art du Pays basque accueille 54 étudiants et peine à rivaliser avec ses voisines toulousaine (314 étudiants) ou bordelaise (218 étudiants).

2. Une concurrence nationale et internationale

L'enseignement supérieur en arts plastiques ne saurait se résumer aux seules écoles nationales et territoriales. Les écoles d'arts appliqués - 80 au total qui accueillent 9 500 étudiants - placées sous la tutelle du ministère de l'éducation nationale concourent également à cet enseignement. L'affirmation des arts visuels fragilise aujourd'hui la distinction traditionnelle entre arts plastiques et arts appliqués. Les arts visuels intègrent en effet les beaux-arts, les arts décoratifs, les métiers d'art, les arts appliqués à l'industrie, le design, le cinéma et la photographie, les jeux vidéo, les images animées et les supports numériques

Les universités participent également de cette concurrence. 15 d'entre elles, soit le double du nombre des écoles supérieures en arts plastiques, proposent aujourd'hui des formations dont les contenus sont de plus en plus similaires à ceux dispensés dans les établissements nationaux supérieurs.

À côté des structures publiques, les établissements privés , dont les formations sont axées en particulier sur le design et le numérique, attirent entre 15 000 et 20 000 étudiants, en dépit de coûts élevés de scolarité.

À cette concurrence nationale s'ajoute celle des établissements étrangers. 53 % des étudiants de l'école La Cambre située à Bruxelles sont ainsi français. L'école de design d'Eindhoven, les écoles d'art de Genève et de Lausanne ou les universités anglo-saxonnes sont également très attractives. Il convient de relever à ce stade que seule l'École nationale supérieure de création industrielle (ENSCI) apparaît bien placée dans les classements internationaux. Les écoles, nationales comme territoriales, accueillent en moyenne de 12 à 13 % d'élèves étrangers, principalement issus de Chine et de Corée du Sud et secondairement du Japon et de Taiwan. Ce recrutement apparaît insuffisamment diversifié, peinant à attirer des étudiants venant d'Europe centrale ou d'Afrique subsaharienne, alors même que la scène artistique africaine est jugée en plein essor.

3. Une réflexion à mener sur le pilotage...

La multiplicité des acteurs dans le domaine de l'enseignement des arts plastiques finit de fait par fragiliser la cohérence des formations dispensées. Elle rend illusoires les objectifs d'insertion professionnelle affichés et affecte son attractivité à l'international.

Sans porter d'appréciation sur la pédagogie ou l'évolution des enseignements en tant que tels, il convient néanmoins aujourd'hui de réfléchir aux incidences de celles-ci sur le fonctionnement des écoles et par-delà sur la tutelle actuellement mise en oeuvre. Le rapprochement entre écoles supérieures d'arts plastiques et écoles d'art appliqués peut apparaître indispensable en vue d'un renforcement de leur attractivité.

Il induit une nouvelle gestion administrative et budgétaire et, concomitamment, une nouvelle tutelle. Cet objectif de rationalisation apparaît indispensable dans un souci d'amélioration de la qualité de la dépense publique.

Par ailleurs, le soutien de l'État aux établissements territoriaux même s'il est modeste - 9 % du financement desdites écoles, soit 13,6 millions d'euros - mériterait sans doute d'être repensé. Il s'agirait ainsi de favoriser une révision du maillage en faveur d'une plus grande complémentarité.

Recommandation n° 1 : favoriser le rapprochement, tant administratif que budgétaire, entre écoles supérieures en arts plastiques et écoles supérieures d'arts appliqués avec pour objectif la rationalisation de la cartographie des formations et le renforcement de l'attractivité des établissements.

4. ... et sur la politique immobilière des établissements

La question de la rationalisation de l'enseignement supérieur en arts plastiques passe également par une réflexion sur la politique immobilière des grands établissements. L'évolution des enseignements et leur ouverture à de nouveaux publics supposent souvent une adaptation de leurs locaux.

La logique qui préside aux travaux actuellement menés suscite cependant une certaine interrogation. Le cas de l'école nationale supérieure de création industrielle est assez éloquent : aucun rapprochement géographique avec le pôle scientifique et technologique de Paris-Saclay n'a, en effet, été envisagé. Or toute dépense d'investissement dans ces établissements devrait s'intégrer dans une logique territoriale et participer d'une meilleure complémentarité entre les enseignements.

Le plan de relance prévoit un renforcement de l'accompagnement financier des établissements de l'enseignement supérieur culturel dans leurs projets immobiliers (70 millions d'euros en AE et 50 millions d'euros en CP en 2021). Les rapporteurs spéciaux insistent sur le fait que cette aide exceptionnelle intègre ce paramètre.

Recommandation n° 2 : conditionner les crédits accordés dans le cadre du Plan de relance en vue d'accompagner les établissements dans leurs projets immobiliers au respect d'une logique territoriale et à l'intégration au sein de pôles scientifiques et technologiques.

Montant dédiés aux travaux de rénovation du réseau des écoles
de l'enseignement supérieur culturel au sein du PLF 2021

(en millions d'euros)

Crédits inscrits au sein de la mission « Plan de relance »

Crédits inscrits au sein de la mission « Culture »

Total

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Rénovation du réseau des écoles de l'enseignement supérieur culturel

70

50

7,75

5,58

77,75

55,58

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires


* 1 École nationale supérieure des beaux-arts de Paris, École nationale supérieure de création industrielle, École nationale supérieure des arts décoratifs de Paris, Écoles nationales supérieures d'art d'Arles, Bourges, Cergy, Dijon, Limoges, Nancy Artem et Nice Villa Arson.

* 2 A ces crédits s'ajoute le financement par le ministère des emplois inscrits sur le titre 2 soit 25 millions d'euros.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page