B. LA MOBILITÉ DANS LES ZONES PEU DENSES : L'EMPIRE DE LA VOITURE INDIVIDUELLE

1. La prédominance des déplacements en voiture individuelle
a) La voiture individuelle prédominante pour les déplacements du quotidien : pas uniquement dans les espaces peu denses

Hors Île-de-France, la voiture individuelle reste le mode de déplacement majoritaire des Français . Selon l'enquête mobilités déplacements (EMD) 22 ( * ) menée en 2018-2019, elle représentait 63 % des déplacements locaux effectués du lundi au vendredi, pour un temps de déplacement moyen de 19 minutes.

La part de la voiture se réduit un peu par rapport à 2008, essentiellement dans les agglomérations de plus de 20 000 habitants. En milieu rural, la voiture reste utilisée dans plus de 80 % des déplacements du quotidien et la situation n'a pas tellement évolué depuis une décennie .

La différence entre zones denses et peu denses est toutefois moins marquée qu'on pourrait le croire, lorsqu'on neutralise la situation très spécifique de la région parisienne. La voiture individuelle apparaît très utilisée dans les agglomérations hors Paris pour les déplacements du quotidien. On constate aussi que la part du vélo est à peu près similaire dans tous les espaces, même si dans les espaces urbains elle croît fortement depuis le confinement du printemps 2020.

La dépendance à la voiture est donc un phénomène partagé , qui transcende l'opposition entre zones denses et peu denses et commence dès que l'on s'éloigne un peu des coeurs d'agglomération. Cette dépendance entraîne une fragilité économique en cas de hausse des prix du carburant, comme évoqué précédemment ; et ce même si, toutes autres choses égales par ailleurs, les prix des carburants sont extrêmement bas par rapport aux années 1970, à euro constant 23 ( * ) .

Évolution des parts des modes de transport (en nombre de déplacements) par tranche d'unités urbaines entre 2008 et 2019

Simplement, dans les zones périphériques des agglomérations, l'existence de systèmes de transports collectifs performants permet plus facilement un report modal. À l'inverse, dans les zones peu denses, les systèmes de transport collectif sont plus faiblement développés et sont souvent conçus pour des publics spécifiques : personnes âgées (plus nombreuses dans les espaces peu denses), population scolaire (avec des systèmes de ramassage scolaire très structurés qui couvrent presque l'ensemble du territoire) et personnes fragiles (n'ayant pas de voiture pour raison économique, ou sans permis, ou porteuses de handicaps).

Les politiques de mobilité dans les territoires peu denses n'ont pas visé à diversifier l'offre, sans aucun doute parce qu'il y avait une absence de volonté de remettre en question la prééminence de la voiture qui n'était pas jugée problématique mais également parce que d'un point de vue technique on ne savait pas bien développer autre chose que des services réguliers, comme en ville.

Les espaces peu denses étant institutionnellement autonomes par rapport aux agglomérations denses, du fait du découpage intercommunal et des périmètres des autorités organisatrices des transports ne les incluant pas, les actions en matière de mobilité se sont donc déployées de manière autonome par rapport aux espaces denses, si bien que ce sont deux mondes très différents et donc deux modes de mobilité différents qui se structurent dans chacun de ces espaces.

b) Le défi de la mobilité de demain se pose aussi dans les campagnes

Pour autant, les espaces peu denses ne peuvent pas rester à l'écart des transformations des mobilités. L'enjeu de décarbonation des mobilités se pose aussi pour leurs habitants , mais dans des termes distincts des zones denses où le remplacement du transport individuel par du transport collectif a déjà été entamé pour répondre non pas à un objectif environnemental mais à un objectif pratique de contournement de la congestion automobile structurelle dans des territoires devenus trop petits pour y accueillir des flux automobiles massifs.

Les mobilités alternatives à l'usage individuel de la voiture thermique dans les espaces peu denses doivent contribuer à l'allègement de l'empreinte carbone des déplacements, mais aussi à l'allègement de la facture mobilité des ménages , celle-ci pouvant approcher voire être supérieure au coût du logement lorsque les déplacements se font sur des distances importantes. Selon les chiffres 2020 du baromètre des mobilités du quotidien 24 ( * ) mis en place conjointement par Wimoov et la Fondation Nicolas Hulot, le coût des déplacements s'élevait en moyenne à 90 € par mois en ville contre 141 € par mois à la campagne.

Pour autant, le défi d'une mobilité plus diversifiée dans les campagnes ne paraît pas insurmontable :

• d'une part, des solutions nouvelles et complémentaires à la voiture existent et peuvent être mises en oeuvre. Elles sont examinées ci-dessous ;

• d'autre part, de très nombreux déplacements depuis les zones peu denses sont des déplacements courts . Le modèle pendulaire à travers des navettes longue distance n'est en réalité pas le seul modèle de mobilité dans les zones peu denses et aurait même tendance à être minoritaire. Citant une étude faite sur le département de l'Aube, Xavier Desjardins, lors de la table ronde du 23 septembre 2020 au Sénat, indiquait que 55 % de la population travaillaient en réalité à moins de 7 kilomètres de leur domicile. Ce sont tous ces déplacements courts pour lesquels la recherche d'alternatives porte un potentiel de transformation de la vie quotidienne et du rapport aux mobilités dans les espaces peu denses.

En termes de distance parcourue pour les déplacements du quotidien, la tendance de long terme est à l'augmentation pour les habitants des espaces périurbains et des espaces ruraux. Mais les données disponibles montrent une grande disparité de situations : ainsi, selon l'enquête nationale mobilité et modes de vie 2020 du Forum Vies Mobiles, « 36 % des gens parcourent moins de 10 kilomètres par jour pour leur travail alors que près d'un quart (22 %) parcourent plus de 60 kilomètres par jour en moyenne ».

2. Un bouquet diversifié de solutions de mobilités
a) Quelle place pour les transports collectifs classiques dans les zones peu denses ?

L'association ATEC ITS France, qui regroupe collectivités et experts des transports, a établi une feuille de route pour les mobilités en zone peu dense lors des assises des mobilités en 2017 et a produit une actualisation de cette feuille de route début 2020 à travers un rapport 25 ( * ) analysant les différentes solutions disponibles.

Plaidant pour la combinaison des modes et la mutualisation des moyens dans les espaces peu denses , ce rapport met en évidence les difficultés à faire reposer le système de mobilité dans ces territoires sur les systèmes classiques de transports collectifs et rejoint la proposition émise par Vincent Kaufmann lors de son audition de travailler en priorité sur l'offre existante, en la recensant et en la coordonnant mieux, constatant que bien souvent il y a une offre significative mais non organisée.

Concernant les transports ferrés , qui constituent un mode lourd, nécessitant des infrastructures à maintenir voire à mettre à niveau périodiquement, leur maintien et leur régénération passe par la consommation massive de crédits publics. La stratégie de transfert aux régions d'une fraction des 9 000 km des petites lignes reporte la charge de la décision et une part du financement sur celles-ci 26 ( * ) . Comme le remarquait Thierry Mallet, PDG du groupe Transdev et président de l'UTP, lors de la table ronde organisée au Sénat le 23 septembre 2020, « le train est perçu comme une bonne alternative pour les longues distances, et beaucoup moins pour les trajets du quotidien ». Il ajoutait que pour améliorer la qualité de service, les usagers attendent une augmentation de la fréquence des trains et un cadencement des rotations, ce qui n'est pas tenable économiquement lorsque le public potentiel est trop peu nombreux. Leur présence dans les zones peu denses dépend donc du choix politique d'y consacrer massivement des crédits publics, même s'il existe des pistes d'amélioration comme le ferroviaire léger, éventuellement fonctionnant à l'hydrogène. En outre, le ferroviaire reste pertinent en l'intensifiant par du rabattement sur des lignes structurantes. De nombreuses expériences existent en France et en Europe où des petites lignes ont vu leur fréquentation augmenter par une amélioration de l'offre. Les régions ont d'ailleurs fait la démonstration qu'elles savaient dynamiser le ferroviaire par l'offre et les prix.

Concernant les transports en bus ou cars express , le rapport de l'ATEC ITS France souligne qu'ils offrent une véritable solution alternative à la voiture pour accéder aux zones d'emploi des zones denses voire aux zones denses elles-mêmes. L'extension des zones périurbaines autour des grandes agglomérations donne en effet sa pertinence aux transports collectifs de rabattement, car il s'agit d'amener un nombre plus important de personnes sur des distances plus longues vers des destinations centrales. Mais l'enjeu est que ces transports soient rapides, fiables et confortables. Car sinon, la voiture individuelle offrira toujours une souplesse et une rapidité inégalables. C'est pourquoi le rapport préconise des fréquences élevées aux heures de pointe avec des temps de parcours minimisés grâce à un faible nombre d'arrêts et au développement de voies réservées. Dans notre pays de « culture ferroviaire », le car est parfois dénigré comme étant un palliatif à l'absence de liaisons par train, alors qu'il peut rendre des services efficaces à coût maîtrisé s'il est organisé avec rigueur.

Ces contraintes plaident pour une articulation de cette solution avec d'autres, plus souples, comme le covoiturage et/ou l'autopartage . Elles plaident aussi pour l'aménagement de pôles multimodaux assurant des correspondances rapides dans des hubs urbains de mobilité. Les modes lourds pouvant être massifiés sont coûteux et doivent être valorisés au maximum pour que ce coût soit considéré comme acceptable. Dès lors il faut organiser un rabattement de voyageurs vers eux en début de trajet et à l'arrivée organiser la diffusion multimodale de cette massification. D'où la nécessité de l'aménagement de pôles multimodaux autour de ces équipements structurants que sont le ferroviaire ou les lignes de bus express à haut niveau de service.

La gare autoroutière de Briis-sous-Forges, dans l'Essonne, est souvent citée comme exemple pour ce type de solution : un parking automobile y est aménagé pour les habitants des alentours, qui ont la possibilité d'y emprunter des bus (passant toutes les 5 minutes aux heures de pointe) pour rallier la gare de RER de Massy, ou encore pour rallier le pôle d'Evry à 30 kilomètres en empruntant une voie réservée sur autoroute, évitant la congestion routière.

b) Une diversité de solutions alternatives, individuelles ou semi-collectives

Au-delà des transports collectifs, l'alternative à la voiture individuelle pour les déplacements en zones peu denses peut prendre des formes variées au travers d'un bouquet d'offres : des mobilités actives (vélo, marche à pied) qui doivent être encouragées mais également le transport à la demande (TAD), les services de covoiturage et d'autopartage, les transports solidaires, taxis...

• La palette des solutions alternatives aux déplacements en voiture individuelle dans les zones peu denses passe aussi par le vélo, la marche et l'ensemble des « engins de déplacements personnels » (trottinettes électriques, monoroues...) dont le rapport de 2018 de la délégation à la prospective du Sénat saluait le développement tout en appelant à leur régulation et à veiller à une meilleure équité de leur accès dans les différents territoires 27 ( * ) .

La marche est pertinente pour les très courts trajets mais elle ne représente qu'une part très faible des déplacements domicile-travail au-delà de 2 kilomètres selon l'INSEE. Par ailleurs, 30 % des trajets domicile-école se font encore en voiture 28 ( * ) et la part des mobilités active sur ce type de trajet ne cesse de décroître depuis la fin des années 1980, ayant un impact direct sur la santé physique des élèves comme sur l'environnement. Plus généralement, comme l'a démontré le rapport 2018 de l'ONAPS 29 ( * ) , rappelé par Mathieu Chassignet dans un article d' Alternatives Economiques : « la part de la marche et du vélo pour se rendre à son établissement scolaire s'effondre : en France, sur les 30 dernières années, la proportion de déplacements effectués à pied par les enfants et adolescents de plus de 6 ans pour se rendre dans leurs établissements scolaires a diminué de 20 points, passant de 52,1 % à 32,3 %. La proportion de déplacements à vélo pour le même motif a diminué de plus de la moitié, passant de 7,5 % à 3,3 %. » 30 ( * )

S'agissant du vélo , contrairement à une idée reçue, il est à peu près autant utilisé dans les campagnes que dans les villes. Mais si sa part progresse, elle reste encore faible (aux alentours de 3 %), malgré ses atouts (faible coût d'acquisition et d'utilisation, absence d'émissions de gaz à effet de serre) et son développement récent reste cantonné aux grandes villes. La crise sanitaire est venue ajouter à ses qualités la possibilité pour les personnes de se déplacer individuellement et avec flexibilité, en respectant les gestes barrières. Et si sa pratique a fortement augmenté dans les grandes villes suite au confinement du printemps 2020 (+31 %), sa progression est également sensible dans le périurbain et dans les espaces ruraux (+15 %) d'après une enquête de l'association Vélo & Territoires. Avec l'apparition du vélo à assistance électrique (VAE), la possibilité s'ouvre de réaliser des trajets plus longs et moins fatigants. Mais comme noté dans le rapport de l'ATEC ITS France précité, « les aménagements de voirie sont encore plus indispensables en zones peu denses qu'en ville, compte tenu du différentiel de vitesse plus élevé entre la voiture et le vélo. C'est le point clef qui est indispensable au décollage de la pratique ».

Plus largement, si le report modal de la voiture vers le vélo est possible dans les zones peu denses, cela dépend de la mise en place d'un véritable « système vélo » intégrant des aménagements sécurisés de voirie, des possibilités de stationnement, ou encore la possibilité d'embarquer son vélo dans le train ou le bus pour des trajets multimodaux 31 ( * ) . Il s'agit d'un levier essentiel pour enclencher le report modal selon le rapport de l'ATEC ITS. Lors de son audition, Frédéric Cuillerier, représentant l'AMF et maire de Saint-Ay (Loiret) citait en exemple le collège de sa commune, accueillant 450 élèves : dans le but de développer la pratique du vélo par les collégiens, des aménagements cyclables et un parking à vélos de 120 places ont été réalisés. Il s'avère aujourd'hui déjà plein. C'est le même constat qui a été fait lors de son audition par Olivier Schneider, président de la FUB. Mais comme le précisait Xavier Desjardins, il est possible d'imaginer aller plus loin, par exemple en dotant tous les élèves d'un vélo pour qu'ils se rendent à leur établissement et allier ainsi décarbonation et activité physique, tout comme à l'heure du tout numérique il ne paraîtrait pas superflu de s'assurer que tous les collégiens et lycéens soient dotés d'outils informatiques.

Le transport à la demande (TAD) a pour objectif d'offrir un service de mobilité non pas régulier comme le serait un service de bus par exemple, mais en fonction des besoins 32 ( * ) . Son coût est globalement élevé (mais bien inférieur à un transport en commun classique) et la mutualisation est faible ; mais tout dépend de son organisation et de la volonté politique y afférant. Plusieurs pistes existent pour l'encourager : la possibilité de faire conduire les véhicules par des bénévoles (transport solidaire), par exemple, limite le coût de cette solution, qui apparaît comme une réponse très ponctuelle et de niche aux besoins de mobilité en zone peu dense. Dans certaines collectivités, le transport à la demande s'effectue sous la forme de taxis individuels ou collectifs bénéficiant à certains publics cibles (personnes âgées, personnes en situation de handicap, personnes sans ressource et non mobile), dont le coût est pris en charge en tout ou partie par la collectivité. Il peut rendre de réels services dans son domaine de pertinence.

Le covoiturage constitue une solution intéressante pour mutualiser les transports du quotidien, comme les transports longue distance 33 ( * ) . Pour les trajets entre domicile et travail, le taux d'occupation des automobiles est le plus souvent d'une seule personne, ce qui laisse trois à quatre places de libres, selon le format des véhicules utilisés, soit un gisement potentiel calculé sur la base du prix estimé du siège libre des transports collectifs urbains (TCU) de l'ordre de 40 milliards d'euros selon Thomas Matagne, président-fondateur d'Ecov. Pour le conducteur et propriétaire de la voiture, covoiturer peut constituer une manière de réduire le coût du trajet, lorsque ce covoiturage est assorti d'une participation aux frais. Il existe aujourd'hui une multitude d'expérimentations liées au covoiturage. Lors de la table ronde du 23 septembre au Sénat, Thomas Matagne a présenté les solutions proposées par sa société pour les territoires périurbains et ruraux, consistant à créer des lignes de covoiturage courte distance (projet Lane à Bourgoin-Jallieu), appréhendées comme des lignes de bus : les conducteurs sont incités à emprunter cette ligne préférentielle et des arrêts sécurisés sont à disposition des covoiturés. Les tarifications peuvent être extrêmement incitatives en fonction des autorités organisatrices. Lors de la même table ronde, Isabelle Mesnard, directrice de projet au Cerema, rappelait cependant que le covoiturage ne s'adressait pas aux territoires les moins denses car un flux minimal est nécessaire pour qu'un tel service puisse être garanti, tant aux passagers qu'aux conducteurs. Ensuite, la réussite du covoiturage dépend de facteurs psychologiques importants pour les utilisateurs : conducteurs comme passagers doivent oser changer leurs habitudes. Mais comme le remarquait Thomas Matagne : « 75 % de nos utilisateurs ont été convaincus par nos services car ils les ont testés », c'est donc l'expérience qui peut changer les pratiques .

Exemple : lignes régulières de covoiturage autour de Grenoble

Les services d'autopartage ont un but différent : offrir la possibilité de se déplacer sans détenir le véhicule ou, dans la logique de décarbonation des mobilités, de ne pas passer le cap de l'achat du second véhicule. Adapté à des grandes villes, très denses, l'autopartage est-il possible en zones peu denses ?

Il nécessite la mise en place d'une organisation forte. Plusieurs obstacles se dressent sur la route de cette solution dans ces territoires : un taux d'utilisation potentiellement plus faible que dans les zones denses (ce qui rend le dispositif moins pertinent), une distance aux lieux de mise à disposition des véhicules forcément plus importante que dans les zones denses. L'autopartage peut prendre des formes très variées : location de véhicules entre voisins, autopartage de véhicules dédiés ou flotte en libre-service, publique ou privée, à la sortie d'une gare comme en Suisse avec le réseau Mobility . La piste de la mise à disposition de flottes professionnelles disponibles le soir et le week-end pourrait être creusée comme une option intéressante pour développer l'autopartage. L'exemple du réseau d'autopartage développé dans le Pays du Mans est également intéressant en ce que l'AOM met à disposition dans chacune des 14 communes périurbaines concernées des véhicules en autopartage.

c) Des domaines de pertinence des modes alternatifs augmentés grâce à l'intermodalité et à la multimodalité

Analysé isolément, chaque mode a un domaine de pertinence dépendant des distances à parcourir, du nombre de personnes à transporter sur les mêmes trajets et aux mêmes moments, et du rythme de circulation. Plus les flux sont réduits et les mobilités diffuses, moins les modes lourds paraissent pertinents.

Cependant, cette vision statique est à remettre totalement en cause dès lors qu'on développe l'intermodalité. Le domaine de pertinence de chaque mode peut ainsi être augmenté par l'articulation entre tous ces modes sur le territoire . Ainsi, une petite ligne de train ou de bus, peu fréquentée et donc considérée comme peu pertinente, peut le devenir si des dispositifs de covoiturage et d'autopartage, se mettent en place autour de la ligne ferroviaire et permettent le rabattement de davantage de personnes vers les gares et une utilisation accrue du service. Le bouquet local de mobilités peut être d'autant plus riche qu'il valorise l'offre préexistante. Dans ces conditions, les modes doivent être conçus comme complémentaires plutôt que concurrents .

Le recours aux technologies numériques, avec la localisation instantanée des voyageurs et des modes de transports, permet de construire des parcours intermodaux facilités. Dans la logique du MaaS 34 ( * ) , l'interopérabilité est une condition nécessaire à l'intermodalité pour l'usager : ainsi, on attend une seule tarification pour aller d'un point A à un point B quand bien même la personne est amenée à traverser plusieurs périmètres administratifs et à emprunter différents modes de transports. Il est clair que cela nécessite une organisation publique sans faille et interterritoriale. Des parcours complexes peuvent être réalisés ainsi : VAE puis TER puis tramway enfin marche ; voiture puis TER puis vélo en libre-service ; VAE puis covoiturage puis bus...


* 22 https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/comment-les-francais-se-deplacent-ils-en-2019-resultats-de-lenquete-mobilite-des-personnes

* 23 En effet, si avec 1h de SMIC il était possible d'acheter autant de litres d'essence que dans les années 1970, le prix du litre d'essence à la pompe serait aujourd'hui supérieur à 3 ou 4€/litre ; or ce n'est pas le cas. Cependant, dès lors que les prix des carburants augmentent, même très légèrement, les fragilités économiques se révèlent (cf. la crise des gilets jaunes). Cela s'explique pour partie en ce que d'autres postes de dépenses incompressibles ont pris de l'importance dans les budgets des ménages (logement, nouvelles technologies, loisirs). La « sensibilité prix » à l'énergie nécessaire pour se déplacer est plus forte, car elle touche l'objet majeur et quasi-exclusif autorisant la liberté de déplacement.

* 24 http://barometremobilites-quotidien.org/index.php/chiffres-cles/

* 25 https://atec-its-france.com/wp-content/uploads/2019/10/2-Zones-peu-denses_mise-en-page-14.01.20.pdf

* 26 Voir le rapport Philizot sur les petites lignes ferroviaires.

* 27 Mettre les nouvelles mobilités au service de tous les territoires , rapport d'information n°117, novembre 2018

* 28 https://www.ifop.com/publication/les-parents-et-les-transports-domicile-etablissement-scolaire/

* 29 http://www.onaps.fr/data/documents/190917_ONAPS_RC%202018%20final.pdf

* 30 La mobilité vers l'école : un enjeu de santé publique trop souvent oublié des politiques publiques , le blog de Mathieu Chassignet, Alternatives Économiques, 7 décembre 2020.

* 31 Un « système-vélo » complet comprend également l'ensemble des services qui sont associés à cette pratique : ateliers de réparation, formations, vélo-école...

* 32 Ce sujet est particulièrement traité dans les synthèses des travaux du comité scientifique de France mobilités de décembre 2020 :

https://www.francemobilites.fr/sites/frenchmobility/files/inline-files/France%20Mobilit%C3%A9s%20-%20Evaluation%20TAD%20-%20VF.pdf

https://www.francemobilites.fr/sites/frenchmobility/files/inline-files/France%20Mobilit%C3%A9s%20-%20Evaluation%20services%20benevoles%20-%20VF.pdf

* 33 Une synthèse des travaux du comité scientifique de France mobilités de septembre 2020 traite de ce sujet : https://www.francemobilites.fr/sites/frenchmobility/files/inline-files/France%20Mobilit%C3%A9s%20-%20Evaluation%20services%20covoiturage%20-%20Version%20finale.pdf

* 34 Mobility as a service : terme anglais qui désigne la mise en réseau sur un territoire donné de tous les modes à disposition du déplacement des personnes et leur articulation dans une logique multimodale. Le concept de MaaS repose sur l'idée qu'un déplacement doit pouvoir s'effectuer "sans couture", en utilisant l'ensemble de la palette de solutions de mobilités existantes. Il comporte plusieurs aspects importants : une information voyageur complète, une tarification coordonnée et une billettique multimodale pour une facturation unique, des aménagements permettant la multimodalité. Le MaaS permet d'optimiser les déplacements et de simplifier l'expérience voyageurs, de mieux adapter l'offre de mobilité pour les opérateurs et de mieux piloter les politiques de déplacements et d'optimiser les flux pour les pouvoirs publics.

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