CONTRIBUTIONS DES GROUPES

A. CONTRIBUTION DU GROUPE LES RÉPUBLICAINS

Le groupe Les Républicains partage le constat effectué par la mission concernant l'impact des plateformes numériques sur les formes traditionnelles des relations de travail, et sur la nécessité de pouvoir mieux quantifier et analyser ce phénomène. Celui-ci recoupe des réalités très diverses selon les secteurs, influant aussi bien sur la situation financière des travailleurs que sur l'étendue de leur protection et de leurs droits. En l'occurrence, le mode de fonctionnement des plateformes de services aux particuliers (livraisons, transport de personnes) est le plus atypique. Le développement rapide de ces plateformes répond à la fois à une demande des utilisateurs, et au souhait d'indépendance exprimé par certains actifs, de moins en moins enclins à accepter la subordination et les contraintes que suppose le statut de salarié. Il permet également à des travailleurs peu qualifiés d'exercer une activité.

Les travailleurs des plateformes numériques ne sont ni tout à fait des travailleurs indépendants compte tenu de l'absence de liberté dont ils disposent généralement dans l'exécution de la prestation ou de son prix, ni vraiment des salariés en raison de l'absence de pouvoir de direction de la plateforme à leur égard.

De ce fait, ces travailleurs bénéficient d'une protection sociale lacunaire, qui ne comprend pas, notamment, la protection contre le risque accident du travail/maladie professionnelle ou l'assurance chômage.

Notre groupe approuve donc la démarche de la mission qui a souhaité proposer des améliorations aux conditions de travail des travailleurs de plateformes et diminuer leur exposition aux risques, dans le prolongement de mesures législatives déjà prises ou de ce qui a déjà été organisé directement par certaines plateformes.

Ainsi, le rapport recommande d'étendre à tous les travailleurs de plateformes le droit de choisir librement leurs horaires et périodes d'inactivité, à l'image de ce qui existe pour les plateformes de mobilité.

Il prévoit également que ces travailleurs puissent bénéficier des mêmes garanties que des salariés en matière de sécurité au travail et que l'inspection du travail puisse exercer son contrôle à cet égard.

Si ces propositions de la mission sont louables et représentent une avancée, elles restent en deçà d'une véritable protection sociale face aux risques majeurs, en particulier celui d'accident du travail. La mission arrive ici à ses limites, ce que notre groupe ne peut que regretter. En effet, la nature ambivalente des emplois créés par les plateformes numériques est source de difficultés juridiques qu'il n'appartient pas à la mission de trancher.

Ainsi, renforcer le droit social applicable aux travailleurs reviendrait de fait soit à les assimiler à des salariés, soit à leur reconnaître un nouveau statut.

Qualifier ces activités en salariat n'est pas satisfaisant puisqu'il n'existe objectivement pas de situation de subordination, celle-ci n'étant d'ailleurs pas souhaitée par les intéressés. En outre, les nouvelles obligations que cette qualification impliquerait pour les plateformes pourraient se répercuter en termes d'emploi et d'activité économique.

A l'inverse, créer un tiers statut, plus protecteur que le statut d'indépendant sans pour autant être assimilé au salariat, supposerait une réflexion approfondie, qui ne peut être menée dans le cadre de cette mission.

Notre groupe regrette donc que la question récurrente du statut des travailleurs de plateformes numériques n'ait pas permis de renforcer davantage la protection des travailleurs.

Le rapport apporte néanmoins des éléments importants concernant l'instauration d'une représentation des travailleurs et d'un dialogue social. Le Gouvernement s'étant engagé dans cette voie, la mission recommande la fixation de thèmes obligatoires, ainsi que la négociation d'accords de plateformes qui primeraient sur les accords de secteur lorsqu'ils seraient plus favorables.

D'autre part, la mission prend la mesure de la transformation majeure qu'engendre le management algorithmique dans les relations entre les travailleurs, les clients et les plateformes. Les algorithmes, présentés comme neutres, comportent cependant des risques, notamment par l'utilisation de données personnelles, et peuvent également être responsables de discriminations.

Certaines variables sont utilisées pour établir un profil des travailleurs, s'appuyant par exemple sur les avis et notes des internautes ou sur leur rapidité d'intervention, mais à ces variables objectives peuvent s'en ajouter d'autres, largement invisibles. L'algorithme devient ainsi une boîte noire qui opère des classements dans une complète opacité, ce qui est d'autant plus inquiétant que la plateforme peut ne pas se limiter à rapprocher l'offre et la demande mais impacter des décisions aussi importantes que les conditions de travail ou de rémunération des travailleurs.

Face à un tel système, la mission propose des solutions concrètes. Il est essentiel, comme le propose le rapport, que la transparence, la lisibilité et l'évolution des algorithmes deviennent plus systématiquement un des thèmes du dialogue social qui va se mettre en place dans le cadre des plateformes, et d'encourager la formation des acteurs de ce dialogue - qu'il s'agisse des entreprises ou des travailleurs - aux enjeux de l'intelligence artificielle et des algorithmes, ainsi que leur accès à une expertise.

C'est également en amont qu'il faudra agir en instituant des règles encadrant la conception des algorithmes et plateformes, en particulier pour leur imposer des critères d'accessibilité et d'auditabilité.

Ainsi que le rapport le précise, cet ensemble de mesures doit trouver à s'appliquer dans le respect du principe de secret des affaires.

En conclusion, le groupe Les Républicains estime que le travail approfondi de la mission permettra une meilleure connaissance de l'ensemble des enjeux lié au développement des plateformes, contribuant ainsi à la mise en place d'un cadre juridique respectueux de la liberté et des droits des travailleurs.

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