Troisième séquence



30ème anniversaire de la disparition
du président Gaston Monnerville

Georges Patient
Sénateur de la Guyane
Vice-président du Sénat
Président de la Société des amis du président Gaston Monnerville

Monsieur le président du Sénat,

Monsieur le président de la Délégation aux outre-mer du Sénat, cher Stéphane Artano,

Monsieur le président de la Délégation aux outre-mer de l'Assemblée nationale, cher Olivier Serva,

Chers collègues parlementaires,

Mesdames et messieurs les maires,

Mesdames et messieurs,

Cher Stéphane, vous faites un grand honneur à tous les amis de Gaston Monnerville en lui consacrant du temps dans cette rencontre avec les maires et les élus d'outre-mer. Vous le savez, je préside la Société des Amis du président Gaston Monnerville qui s'est donné pour mission de le remettre à sa juste place dans la mémoire nationale et de lui exprimer de la façon la plus officielle cette reconnaissance nationale qui conduit au Panthéon.

Aussi, pouvoir évoquer ici, en ce lieu, qu'il déclarait se confondre avec sa propre vie me comble d'émotion. Gaston Monnerville est partout présent ici, que ce soit dans l'hémicycle, dans les salons de Boffrand, dans la galerie sud, en haut et en bas de l'escalier d'honneur. Dans quelque lieu que ce soit, on trouve Gaston Monnerville. Il a passé 28 années au Sénat, dont 22 en tant que Président. Plus qu'un record, un véritable attachement !

Oui, cher Stéphane Artano, Gaston Monnerville méritait d'être avec nous en ce jour consacré aux outre-mer. Je tenais à vous en remercier tout comme je voudrais saluer Jean-Pierre Bel, président du Sénat de 2011 à 2014, les anciens présidents Serge Larcher et Michel Magras, Éric Doligé, rapporteur de la mission commune d'information. Ils sont tous à l'origine de la création de notre délégation, de sa montée en puissance. Ils en ont fait un véritable outil pour nous permettre, nous ultramarins, de bien faire appréhender nos problématiques ultramarines trop souvent survolées dans les commissions permanentes.

Chers collègues, chers amis des outre-mer, de Gaston Monnerville on met le plus souvent en avant sa longue carrière au Sénat et ses différends avec le Général de Gaulle. Tout le monde connaît la formule « forfaiture » qu'on lui impute à tort, mais beaucoup ignorent encore Monnerville. Pourtant, ce dernier ne manquait pas d'ancrage territorial ultramarin : deux mandats de député de Guyane, un mandat de maire de Cayenne. Guyanais, Gaston Monnerville n'a jamais oublié qu'il l'était. Né à Cayenne, il a eu à coeur d'y faire supprimer en 1938 le bagne ouvert en 1854, qui constituait à ses yeux un obstacle majeur à l'intégration dans la République du territoire guyanais.

Dès 1937, comme sous-secrétaire d'État aux colonies, il défendra dans la même optique l'assimilation des « quatre vieilles » colonies et sera ensuite l'un des principaux artisans de la départementalisation de 1946 avec Aimé Césaire, député de la Martinique, Raymond Vergès, député de La Réunion et Léopold Bissol, député de la Guadeloupe. Son projet était alors de conférer à ces anciennes colonies, un siècle après l'abolition de 1848, une dignité définitive dans le cadre institutionnel et législatif d'un pays où régnait la liberté, l'égalité, la justice et la solidarité. Anciennes colonies, nouveaux départements, société assainie dont les membres sans considération de leur origine ethnique, de leur généalogie, de leur position sociale, devenaient définitivement des citoyens à part entière.

Dans la même foulée, il déposa une proposition de loi portant fondation d'un fonds d'investissement pour le développement économique et social des pays d'outre-mer qui, souligne-t-il, « a pour but de permettre que les richesses naturelles de ces territoires d'outre-mer soient enfin mises en valeur dans l'intérêt commun des membres de l'Union française, car ils ne sont pas faits uniquement par et pour la métropole comme l'avait voulu le Pacte colonial ». C'est ce FIDES qui est devenu peu après le FIDOM, fonds d'investissement pour le développement des outre-mer.

Et pourtant, 75 ans plus tard, nous nous heurtons encore à des problématiques qui montrent que si la dignité et la liberté sont acquises en droit, l'égalité, la justice et la solidarité ne le sont pas encore dans la réalité. Que l'on veuille bien se souvenir de l'intitulé de la loi de février 2017 relative à l'égalité réelle outre-mer. Il reste encore beaucoup à accomplir dans les esprits et dans les faits. Les valeurs défendues par Gaston Monnerville et la reconnaissance solennelle que nous voulons leur rendre à travers sa personne peuvent nous y aider. J'en suis persuadé.

On a un jour qualifié les outre-mer de confetti. Je préfère les voir comme les pièces d'un puzzle complexe dont il s'agit maintenant de rassembler les morceaux naguère dispersés, devrais-je dire discriminés. L'honneur que nous souhaitons rendre à la mémoire de Gaston Monnerville vise cet objectif : compléter notre puzzle national avec une pièce maîtresse qui symbolise tout à la fois les valeurs fondatrices de la République, une vie au service de l'intérêt général, le positionnement des outre-mer français au sein des problématiques politiques et sociales et la réalité incontournable d'une société française multiculturelle. Cette pièce maîtresse, c'est Gaston Monnerville.

Il faut voir Gaston Monnerville non comme un symbole désincarné, non comme le faire valoir d'une quelconque idéologie, mais comme un symbole qui peut, à côté de bien d'autres, nous faire vivre une histoire globale intégrant toutes ses composantes, en particulier celles que l'on a trop longtemps passées sous silence et qu'il est largement temps d'assumer de la façon la plus officielle, la plus monumentale, la plus auguste qui soit.

En tant que sénateur, en tant que président de la Société des amis du président Gaston Monnerville, je demande symboliquement que Gaston Monnerville soit transféré au Panthéon. Incinéré et ses cendres dispersées en mer, c'est son esprit à défaut de son corps, ce sont ses combats pour la France et ses engagements républicains que je souhaite voir célébrés au Panthéon. Cet homme a mérité la reconnaissance nationale. Il a incarné et porté haut les idéaux de la République française. Cet homme a travaillé inlassablement, parfois au péril de sa vie, à défendre une France grande, diverse et fière. Son destin exceptionnel a été injustement gommé de la mémoire collective à côté de tant d'autres, mais il a largement fait honneur à ce pays.

Stéphane Artano, président . - Merci cher Président. Cette séquence aurait été incomplète sans y associer sa famille, ceux qui l'ont côtoyé au plus près.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page