II. L'INCLUSION DU NUCLÉAIRE DANS LA TAXONOMIE DE L'UE : UNE NÉCESSITÉ SCIENTIFIQUEMENT RECONNUE POUR LA TRANSITION CLIMATIQUE ET UNE CLÉ POUR L'AUTONOMIE STRATÉGIQUE EUROPÉENNE

A. LE NUCLÉAIRE, UNE ACTIVITÉ DURABLE AU SENS DU RÈGLEMENT SUR LA TAXONOMIE : LA RÉPONSE APPORTÉE PAR LES EXPERTS

1. Une énergie bas-carbone qui contribue à l'atténuation du changement climatique
a) Des émissions de carbone comparables à celles des énergies renouvelables

Les données sur les émissions de carbone des différentes énergies pour la production d'électricité attestent que, sur l'ensemble de son cycle de vie (construction, exploitation et démantèlement), l'énergie nucléaire émet du CO 2 en quantité comparable aux énergies renouvelables .

Les données publiées par le Commissariat à l'énergie atomique (CEA) sur la décomposition des émissions pour l'ensemble de la filière nucléaire montrent que les émissions de CO 2 sont, en grande partie, liées à la gestion des matières (amont du cycle) et à l'exploitation des réacteurs, y compris leur démantèlement. La stratégie de retraitement mise en place par la France ne pèse a contrario que 7 % des émissions de gaz à effet de serre de la filière.

Selon la « base carbone » de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), l'énergie nucléaire n'émet en France que 6 grammes de dioxyde de carbone par kilowattheure (geqCO 2 /KWh), soit une performance supérieure aux moyennes françaises du charbon (1 058), du gaz (418) ou du fioul (730) mais aussi aux moyennes mondiales de l'éolien (9 à 10), du photovoltaïque (13 à 32), du biogaz (10) ou de l'hydroélectricité (10 à 13). Les données publiées par le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) avance une estimation moyenne, au niveau mondial, de 12 geqCO 2 /KWh . Le nucléaire doit donc naturellement être classé parmi les sources d'énergie bas-carbone.

Les émissions des énergies pour la production d'électricité en équivalent CO 2 (CO 2 e) en gramme par kilowattheure d'énergie finale en France

Combustible

Émission de CO 2

Centrale nucléaire

6 g CO 2 e/kWh

Éolien en mer

9 g CO 2 e/kWh

Éolien en terre

10 g CO 2 e/kWh

Hydroélectricité

10 g CO 2 e/kWh

Biomasse

32 g CO 2 e/kWh

Géothermie

38 g CO 2 e/kWh

Gaz naturel

443 g CO 2 e/kWh

Pile à combustible

664 g CO 2 e/kWh

Centrale fioul-vapeur

730 g CO 2 e/kWh

Pétrole lourd

778 g CO 2 e/kWh

Centrale à charbon

1 058 g CO 2 e/kWh

Source : bilan GES de l'ADEME

La commission des affaires économiques déplore par conséquent que la taxonomie de l'Union européenne traite ensemble les cas du nucléaire, qui constitue une énergie à faible émission de gaz à effet de serre, et celui d'une énergie très émettrice de carbone (le gaz naturel, qui émet 70 fois plus de CO 2 que le nucléaire) .

b) Un outil dans la transition vers la neutralité carbone à l'horizon 2050
(1) Au regard de l'objectif d'atténuation du changement climatique

Les critères d'examen technique de la taxonomie relatifs à l'atténuation du changement climatique sont déterminés afin d'être en conformité avec les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de neutralité carbone d'ici à 2050 .

Le Pacte vert pour l'Europe impose des transformations majeures pour tous les secteurs de l'économie. Le volet climatique de la taxonomie est donc déterminant pour accompagner cette stratégie de décarbonation de l'économie, et son financement par des acteurs privés. La finance durable doit pouvoir encourager les investissements dans les énergies bas-carbone contribuant à la transition climatique de l'Union européenne.

Le secteur de la production d'électricité est appelé à jouer un rôle clé pour atteindre les objectifs de décarbonation et favoriser une « économie propre et circulaire ». En effet, le secteur de l'énergie représente environ 75 % des émissions totales de CO 2 de l'UE et la production d'électricité compte pour un tiers de ces émissions. Or la part de l'électricité dans la consommation globale d'énergie, à l'échelle de l'Union européenne, devrait doubler d'ici 2050 pour atteindre 50 %. La part décarbonée de l'électricité produite est actuellement de 55 % ; l'objectif est de porter cette part à 80 %, avec 55 % d'origine renouvelable à l'horizon 2030.

Source majeure de production d'électricité bas-carbone et solution de substitution à faible émission de gaz à effet de serre aux combustibles fossiles, l'énergie nucléaire peut contribuer substantiellement à atteindre l'objectif de neutralité carbone à l'horizon 2050 , décidé par l'Union européenne dans le cadre du Pacte vert. Le Parlement européen a d'ailleurs adopté, le 28 novembre 2019, une résolution mettant en avant le rôle du nucléaire « dans la réalisation des objectifs climatiques », susceptible d'« assurer une part significative de la production d'électricité en Europe » 15 ( * ) . Sur ce plan, la France constitue un exemple ; son empreinte carbone est la plus faible des pays développés grâce à son parc nucléaire.

Pour le directeur général de Foratom, représentant de la filière nucléaire en Europe, « les objectifs de décarbonation de la transition d'ici 2050 ne peuvent être atteints sans le nucléaire, qu'il s'agisse de la construction de nouvelles centrales ou de l'exploitation à long terme des centrales existantes. En fait, si l'UE investissait dans le maintien d'un parc nucléaire pleinement opérationnel pendant cette période, 58 % de son électricité proviendraient de sources à faible émission de carbone d'ici 2030, ce qui en ferait le leader mondial en matière de politique de lutte contre le changement climatique. Dans le cas contraire, cette part tomberait à 38 %, ce qui augmenterait les émissions cumulées d'environ 1 500 millions de tonnes de CO 2 d'ici à 2030 ».

Le nucléaire constitue aussi un avantage dans la production d'hydrogène bas-carbone . Ce nouveau carburant pourrait jouer un rôle important pour atteindre les objectifs de neutralité carbone. Le nucléaire permet de décarboner l'hydrogène utilisé dans l'industrie, qui est actuellement produit à base d'énergies fossiles très émettrices de CO 2 . Les États membres doivent, en effet, travailler à la décarbonation de leur production d'hydrogène et augmenter leurs capacités de production. À cet égard, la commission des affaires européennes se félicite que les critères adoptés pour classifier la production d'hydrogène de « durable » au sens de la taxonomie ne se fondent pas sur son origine renouvelable ou nucléaire. Toutefois, elle souhaite attirer l'attention sur la nécessité de maintenir une neutralité technologique entre l'hydrogène issu de l'énergie nucléaire et celui issu des énergies renouvelables .

(2) Une solution technologique soutenue par les experts du Giec et l'Agence internationale de l'énergie

Le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec) et l'Agence internationale de l'énergie estiment aussi que la neutralité carbone est hors de portée sans l'atome.

Pour atteindre les objectifs de l'Accord de Paris, signé en décembre 2015, de réduction du réchauffement climatique en-dessous de 2 degrés d'ici la fin du siècle, objectif ramené à 1,5 degré par la COP26, à Glasgow, en novembre 2021, il est en effet impératif de sortir de l'utilisation des énergies fossiles. Le dernier rapport du GIEC, publié en août 2021, a réitéré l'urgence de réduire très rapidement les émissions de gaz à effet de serre afin de lutter contre le changement climatique .

D'après les données de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), pour 2019, la combustion de charbon est à l'origine de plus de 40 % des émissions mondiales de carbone et de plus de 75 % des émissions issues de la production d'électricité. La nécessité d'atteindre la neutralité carbone d'ici 2050 que s'est fixée l'Union européenne dans le cadre du Pacte vert suppose d'accroître l'utilisation d'énergies à faible émission de carbone, tels que l'énergie hydraulique, les énergies renouvelables mais aussi l'énergie nucléaire .

Dans son rapport spécial « Réchauffement planétaire à 1,5°C » , du 6 octobre 2018, le GIEC inclut l'énergie nucléaire, aux côtés des énergies renouvelables et du captage et stockage du CO 2 parmi les options d'atténuation et de développement durable évaluées dans le secteur de l'approvisionnement énergétique . Parmi les scénarios présentés, il prévoit une reprise des investissements afin d'augmenter substantiellement la puissance nucléaire installée.

À l'échelle mondiale, l'énergie nucléaire est aujourd'hui la deuxième source d'électricité à faible émission de carbone , après l'énergie hydraulique, et la première dans les pays de l'OCDE. Ces deux sources d'énergie de production d'électricité bas-carbone fournissent 75 % de la production mondiale à faible émission de carbone, selon les données de l'Agence internationale de l'énergie. Au cours des cinquante dernières années, l'utilisation de l'énergie nucléaire a permis de diminuer les émissions de CO 2 de plus de 60 gigatonnes, soit près de deux ans d'émissions mondiales liées à l'énergie .

Dans le débat mondial sur l'énergie et la lutte contre le changement climatique, le développement du nucléaire constitue un défi à l'échelle planétaire . Comme le fait remarquer le rapport de l'Agence internationale de l'énergie, intitulé « l'énergie nucléaire dans un système d'énergie propre », publié en mai 2019, « alors que l'énergie nucléaire est confrontée à un avenir incertain dans de nombreux pays, le monde risque une forte baisse de son utilisation dans les économies avancées, ce qui pourrait entraîner des milliards de tonnes d'émissions de carbone supplémentaires. Certains pays se sont retirés de l'énergie nucléaire à la lumière des préoccupations concernant la sécurité et d'autres questions. Beaucoup d'autres, cependant, voient encore un rôle pour le nucléaire dans leurs transitions énergétiques, mais n'en font pas assez pour atteindre leurs objectifs.».

2. Le nucléaire au regard du principe « Do no significant harm »
a) L'analyse du rapport du Centre commun de recherche

Déjà reconnu comme une source d'approvisionnement énergétique propre et la moins émettrice de gaz à effet de serre, l'énergie nucléaire doit aussi faire la preuve du respect du principe d'innocuité do no significant harm ») pour lever l'obstacle à son insertion dans la taxonomie européenne.

À la suite de l'accord politique intervenu entre les co-législateurs sur le règlement sur la taxonomie, la Commission européenne a conduit l'évaluation de l'énergie nucléaire dans le cadre des travaux sur les actes délégués relatifs aux critères d'examen technique des activités économiques considérées comme durables . Sur les recommandations du groupe d'experts techniques sur la finance durable (TEG) 16 ( * ) , la Commission européenne a demandé au Centre commun de recherche (CCR), en tant que service scientifique interne, de réaliser une évaluation de l'énergie nucléaire sur ses aspects liés à l'absence de dommages significatifs , y compris ceux liés à la gestion des déchets radioactifs et du combustible nucléaire usé. Ces travaux ont donné lieu à la publication d'un rapport 17 ( * ) , le 29 mars 2021 , qui a été validé, le 2 juillet 2021, par deux groupes d'experts, le groupe d'experts sur la radioprotection et la gestion des déchets au titre de l'article 31 du traité Euratom, et le comité scientifique des risques sanitaires, environnementaux et émergents, sur les incidences sur l'environnement.

Ce rapport a établi un état de la recherche en termes d'impacts environnementaux de l'énergie nucléaire tout au long de son cycle de vie. Son intérêt a été d'exposer des données scientifiques factuelles et de contribuer à la réflexion de la Commission européenne dans son processus d'élaboration technique du règlement sur la taxonomie . Dans ses conclusions, le Centre commun de recherche a estimé que le nucléaire pouvait être considéré comme une activité économique durable sur le plan environnemental et que, par conséquent, le débat n'était pas défavorable à l'inclusion du nucléaire dans la taxonomie : « Les analyses n'ont révélé aucune preuve scientifique que l'énergie nucléaire est plus nuisible à la santé humaine ou à l'environnement que les autres technologies de production d'électricité déjà incluses dans la taxonomie comme des activités soutenant l'atténuation au changement climatique ».

Les experts indiquent ainsi que :

- l'existence d'un cadre administratif, juridique et réglementaire approprié au niveau européen et national garantit la protection de la population et de l'environnement dans les pays disposant d'installations nucléaires ;

- les effets non radiologiques de l'énergie nucléaire sur la santé humaine et l'environnement sont comparables à ceux de l'hydroélectricité et des énergies renouvelables ;

- la survenue ou les conséquences des effets radioactifs peuvent être empêchées ou atténuées par des mesures appropriées « en utilisant la technologie existante » et à des coûts raisonnables ;

- l'impact du nucléaire sur les ressources en eau nécessite une prise en compte appropriée lors des phases de sélection du site, de conception des installations et d'exploitation de la centrale.

Le rapport répond ainsi au groupe d'experts techniques sur la finance durable, qui, tout en affirmant que cette technologie contribuait significativement à l'atténuation du changement climatique, s'interrogeait, sans émettre de conclusions, sur le respect du principe DNSH, notamment sur la question de la gestion des déchets radioactifs et en l'absence de solution opérationnelle. Il a aussi permis de constater que le nucléaire se positionnait mieux sur le plan environnemental - en termes d'émissions carbone- que certaines technologies déjà intégrées dans la taxonomie .

Concernant les déchets nucléaires, le rapport souligne que leur gestion est un point essentiel et qu'il existe « un large consensus scientifique et technique sur le fait que le stockage des déchets radioactifs de haute activité et du combustible usé dans des formations géologiques profondes est, en l'état actuel des connaissances, considéré comme la solution la plus efficace et la plus sûre qui puisse garantir qu'aucun dommage significatif ne sera causé à la vie humaine et à l'environnement pendant la période requise ». Le rapport fait ainsi référence aux projets français Cigeo, finlandais et suédois.

Le CCR estime, en outre, que les défis posés par le stockage des déchets sont similaires à ceux posés par le captage et le stockage de carbone dans des installations géologiques dont les technologies ont été incluses dans le premier acte délégué complétant le règlement sur la taxonomie.

S'agissant des accidents nucléaires graves , le document souligne qu'il s'agit d'événements «dont la probabilité est extrêmement faible, mais dont les conséquences peuvent être graves et qui ne peuvent être exclus avec une certitude absolue», tout en précisant que le secteur nucléaire a évolué depuis l'accident de Tchernobyl. Selon les auteurs du rapport, les réacteurs qui sont aujourd'hui construits et mis en service ne sont pratiquement que des réacteurs de troisième génération, « conçus selon des exigences renforcées en matière de prévention et d'atténuation des accidents graves » .

Annexe 4 du rapport du Centre commun de recherche - Recommandations

La production d'électricité à partir de l'énergie nucléaire peut être considérée comme une activité contribuant de manière significative à l'objectif d'atténuation du changement climatique. Les autres activités industrielles associées au cycle du combustible nucléaire (extraction et broyage de l'uranium, fabrication du combustible nucléaire, retraitement du combustible nucléaire usé, stockage définitif des déchets hautement radioactifs...) peuvent être considérées comme des activités permettant l'utilisation sûre et durable de l'énergie nucléaire.

Le groupe d'experts nationaux, institué par le traité Euratom, a largement approuvé les conclusions du rapport du CCR , dont il a estimé qu'elles « sont fondées sur des résultats de recherche scientifique bien établis, examinés en détail par des organisations et des comités reconnus au niveau international ».

Toutefois, le Comité scientifique des risques sanitaires, environnementaux et émergents a été plus critique, notamment d'un point de vue méthodologique, considérant que, faute d'experts en matière de technologies et de risques liés au traitement et au stockage à long terme des déchets radioactifs de haute activité, il devait s'abstenir de commenter les sections portant sur ces sujets. Sur plusieurs questions, comme la pollution thermique de l'eau de mer et les impacts non radiologiques, il a émis quelques réserves, souhaitant disposer de preuves supplémentaires.

Au vu des travaux d'expertise conduits par la Commission européenne, la commission des affaires européennes estime que la production d'électricité à partir de l'énergie nucléaire peut être considérée comme une activité « contribuant, substantiellement, à l'objectif d'atténuation du changement climatique » .

Si elle n'incluait pas le nucléaire dans la taxonomie, la Commission européenne signifierait que le nucléaire ne relève pas des outils de lutte contre le dérèglement climatique.

b) Des conclusions contestées par des ONG environnementales et par le ministère allemand de l'environnement

Les considérations relatives à l'absence de nuisance significative du nucléaire sur l'environnement ont été contestées par de nombreuses ONG environnementales, préalablement engagées dans des actions hostiles à l'inclusion de cette énergie dans la taxonomie des investissements durables. Elles ont mis en avant des lacunes dans l'évaluation des risques liés au nucléaire, plus particulièrement sur la gestion des déchets radioactifs. Dans une tribune, publiée en décembre 2020 18 ( * ) , à la suite de la publication du projet d'acte délégué de la Commission européenne, cent trente signataires 19 ( * ) ont notamment exprimé leur opposition à cette éventuelle décision .

Lors de son audition, l'ONG Greenpeace a fait valoir que l'énergie nucléaire faisait peser des menaces importantes sur plusieurs objectifs environnementaux , fixés par le règlement sur la taxonomie. Tout en reconnaissant que le nucléaire peut permettre de contribuer à l'objectif d'atténuation du changement climatique, les représentants de Greenpeace estiment qu'il ne répond à aucun des autres critères environnementaux et qu'il exerce, par ailleurs, des effets négatifs sur trois d'entre eux (la protection des ressources hydrologiques et marines, la prévention et le contrôle de la pollution, la protection des écosystèmes). Ils ont également souligné qu'au-delà des risques d'incident, le stockage des déchets nucléaires représente un obstacle majeur à l'inclusion du nucléaire dans la taxonomie, et que cette inscription contribuerait à la décrédibiliser « au risque d'en faire un énième produit de greenwashing ». Citant l'exemple de l'usine de retraitement de La Hague, ils ont indiqué que « même si tout est bien réglé, on ne peut nier que les rejets radioactifs liquides et aériens quotidiens des centrales nucléaires et autres installations de la filière ont un impact négatif sur l'environnement». 20 ( * )

Il faut également noter que le ministère allemand de l'environnement, dans une étude publiée le 14 juillet 2021 sur le rapport du Centre commun de recherche, a contesté la conclusion des experts selon laquelle le nucléaire ne cause aucun préjudice à l'environnement et peut ainsi être inclus dans la taxonomie verte. Cette étude critique plusieurs éléments du rapport d'expertise, dont elle estime qu'ils ont été traités de manière trop lacunaire ou ignorés : la persistance du problème des déchets radioactifs pour les générations futures et la sous-estimation des accidents graves qui se sont produits au cours des dernières décennies.

Cette controverse autour de l'impact environnemental du nucléaire ne doit pas faire oublier le coût environnemental dissimulé de la plupart des énergies renouvelables , promues par la transition écologique. En effet, ces technologies vertes sont souvent tributaires de l'extraction et de l'importation de métaux rares, nécessaires au processus de fabrication.

c) Des garanties apportées par l'existence d'un cadre réglementaire au niveau européen et national

Il est important de noter que, dans l'Union européenne, le nucléaire est un secteur régulé et contrôlé via des autorités de sûreté nationales . Le contrôle des installations nucléaires et la gestion des déchets radioactifs et du combustible usé sont, en effet, assurés au sein de l'Union européenne par des autorités de sûreté nationales dans un cadre juridique communautaire spécifique.

Comme l'a fait remarquer lors de son audition Jacques Percebois, expert sur ces questions, la mise en oeuvre de mesures spécifiques par l'industrie nucléaire, sous le contrôle des régulateurs et des autorités gouvernementales, permet de garantir que l'impact des activités afférentes reste dans les limites établies.

(1) La gestion des déchets

Les matières et les déchets radioactifs produits par le parc électronucléaire doivent être gérés de façon durable, dans le respect de la protection de la santé des personnes, de la sécurité et de l'environnement.

Au niveau international, la gestion des déchets radioactifs est soumise à plusieurs textes :

- la Convention commune sur la sûreté de la gestion du combustible usé et des déchets radioactifs , adoptée le 5 septembre 1997, qui prévoit la présentation par les pays nucléaires contractants de rapports périodiques sur la manière dont ils s'acquittent de leurs obligations au regard des dispositions de la convention. Aujourd'hui, quarante-trois pays présentent un rapport tous les trois ans à l'AIEA (Agence internationale de l'énergie atomique). Ces pays disposent d'un cadre juridique et organisationnel solide et complet pour assurer le contrôle de la gestion des déchets radioactifs ;

- les recommandations de la Commission internationale de protection radiologique ;

- les règlementations relatives au transport des colis de déchets radioactifs qui créent des obligations en la matière pour protéger les populations et l'environnement.

Au niveau européen, la directive 2011/70/Euratom du Conseil européen établissant un cadre communautaire pour la gestion responsable et sûre du combustible usé et des déchets radioactifs contribue au renforcement de la sûreté nucléaire au sein de l'Union européenne et impose à chaque État membre de se doter d'un cadre législatif et réglementaire visant à mettre en place des programmes nationaux de gestion des déchets radioactifs et du combustible usé . Dans le cadre de sa mise en oeuvre, les États membres sont tenus de démontrer qu'ils ont pris des mesures raisonnables pour garantir qu'aucune charge indue n'est transmise aux générations futures et que les déchets radioactifs et le combustible usé sont gérés de manière sûre.

Le stockage des déchets radioactifs dans des formations géologiques profondes constitue, en l'état actuel des connaissances, un moyen approprié et sûr de les isoler de la biosphère sur le temps long . Les recherches sur le traitement des déchets nucléaires, en particulier sur les procédés de multi-recyclage du combustible usé, sont aussi prometteuses.

(2) La sécurité des installations nucléaires

L'Union européenne dispose d'un cadre solide et révisé permettant d'assurer la sûreté nucléaire à l'échelle de son territoire et à encourager les États membres à garantir un niveau élevé de sûreté nucléaire

À la suite de l'accident nucléaire de Fukushima au Japon, en 2011, la Commission européenne a effectué, dans l'ensemble des États membres concernés, des évaluations globales des risques et de la sûreté des centrales nucléaires . Considérant que des améliorations pouvaient être apportées pour réduire les risques au minimum et garantir les niveaux de sûreté nucléaire les plus élevés, elle a procédé à une révision de la directive 2009/71/Euratom du Conseil du 25 juin 2009 établissant un cadre communautaire pour la sûreté nucléaire des installations nucléaires . Ainsi, elle a procédé à une actualisation des règles de sécurité de l'Union européenne relatives aux installations nucléaires par le biais de la directive 2014/87/Euratom du Conseil du 8 juillet 2014.


* 15 Résolution du Parlement européen du 28 novembre 2019 sur la conférence des Nations unies sur les changements climatiques de 2019 à Madrid, en Espagne (COP 25) - TA(2019)0079.

* 16 Le TEG n'a pas recommandé, à ce stade, l'inclusion du nucléaire dans la taxonomie, ayant considéré qu'il n'était pas possible d'écarter l'existence de préjudice significatif de la chaîne de valeur à « d'autres objectifs environnementaux sur les échelles de temps en question ».

* 17 Rapport du Centre commun de recherche : Évaluation technique de l'énergie nucléaire au regard des critères « ne pas causer de préjudice significatif » du règlement (UE) 2020/852 (« règlement taxonomique ») - 29 mars 2021.

* 18 Civil Society Statement: Ten Priorities for the Climate TaxonomyDraft Delegated Act - Décembre 2020.

* 19 ONG, groupes de réflexion, experts, scientifiques, associations d'actionnaires et associations d'investissement durable.

* 20 Réponse de Greenpeace France au questionnaire des rapporteurs - 27 octobre 2021

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page