COMPTE RENDU DES DÉPLACEMENTS

Jeudi 17 février 2022

Déplacement au centre du SNU de Dunkerque

Accueil par Bernard Hameau , directeur du centre, Patrick Piret , chef du service départemental à la jeunesse, à l'engagement et aux sports ainsi que par Patrick Weslinck , encadrant.

Jeudi 24 février 2022

Déplacement dans le département de Maine-et-Loire

1. Rencontre à la mairie de Soulaire-et-Bourg autour de la Journée citoyenne

Accueil par Jean François Rambault , également vice-président du conseil départemental de Maine-et-Loire, Marina Toullier , conseillère municipale et Régine Brichet , vice-présidente du conseil départemental de Maine-et-Loire, responsable du secteur « éducation et sport de haut niveau ».

2. Visite de l'Établissement pour l'insertion dans l'emploi (Épide) de Combrée

Accueil par Alexandra Solazzo , directrice de l'Épide, et son équipe.

Mercredi 23 mars et jeudi 24 mars 2022

Déplacement dans l'Hérault

1. Rencontre avec des membres du Conseil d'enfants et de jeunes (CEJ) de la commune de Jacou

2. Rencontre dans le quartier de La Paillade (Montpellier) avec Habib Deshraoui, directeur, et Nacer Benammar, éducateur spécialisé, à l'association Uni'sons

3. Au lycée Henri IV de Béziers, rencontre avec des lycéens de terminale, Jean Fonteray, professeur, et Jean-Philippe Papineau, proviseur (enquête sur la citoyenneté réalisée auprès des lycéens dans le cadre de l'option « droit et grands enjeux du monde contemporain »)

Déplacement de la mission d'information
au centre du SNU de Dunkerque (17 février 2022)

Le président et le rapporteur se sont rendus le 17 février 2022 à L'escale , centre du Service national universel (SNU) de Dunkerque, sur la suggestion de Jean-Pierre Decool, vice-président, qui a pris l'initiative de ce déplacement et a participé à cette visite.

La délégation de la mission d'information a été accueillie par Bernard Hameau, directeur du centre de Dunkerque, et par Patrick Piret, chef du service départemental à la jeunesse, à l'engagement et aux sports ainsi que par Patrick Weslinck, encadrant.

Les principaux aspects du retour d'expérience du SNU dans le département du Nord ont été tout d'abord rappelés par les interlocuteurs de la mission d'information :

- le Nord a fait partie en 2019 des préfigurateurs du SNU et a accueilli 240 jeunes sur les sites de Morbecque et de Tourcoing ;

- après l'annulation du séjour de cohésion de 2020 en raison de la situation sanitaire, le déploiement du séjour de cohésion en 2021 s'est appuyé sur trois sites (Morbecque, Valenciennes et Bouvines) qui ont accueilli 301 volontaires du SNU originaires des départements suivants : Aisne, Oise, Pas-de-Calais, Nord, Somme ;

- 325 jeunes du département (167 filles et 156 garçons) ont effectué un séjour de cohésion en juin-juillet 2021, ce séjour s'est déroulé, pour la plupart de ces jeunes, dans des centres situés dans la région.

L' organisation de la vie quotidienne à L'Escale , auberge de jeunesse qui héberge la session de février 2022 du « séjour de cohésion », s'appuie sur le schéma général suivant, commun à tous les centres :

- les volontaires sont répartis en « maisonnées », encadrées par un tuteur (à L'Escale , l'appartenance à une maisonnée, est rendue apparente par un badge portant le numéro de celle-ci) ;

- au sein de chaque maisonnée, un tuteur, cadre de proximité, est chargé de la cohésion collective, du suivi des activités et de l'animation des « conseils de maisonnées » ;

- les maisonnées sont regroupées au sein d'une « compagnie », sous la direction d'un capitaine de compagnie et d'un adjoint. Au contraire des maisonnées, les compagnies sont mixtes.

Les volontaires ont tiré au sort à leur arrivée à Dunkerque la maisonnée où ils sont affectés.

Il ressort des échanges entre la délégation et ses interlocuteurs que :

- le bilan du SNU dans le département du Nord s'appuie sur l' engagement inlassable des équipes encadrantes , motivées par un esprit que certains ont qualifié de « militant » et par des convictions extrêmement solides à l'égard des objectifs du SNU : éduquer à la citoyenneté, renforcer la cohésion nationale, former aux valeurs de la République, contribuer à l'insertion sociale et professionnelle des jeunes. La mission d'information a été sensible au fait que certains encadrants participent aux séjours de cohésion sur leur temps de congés professionnels, ce qui souligne la forte conviction qui les motive ;

- la cohésion des équipes , constituées de membres issus d'origines professionnelles très diverses (Éducation nationale, milieu associatif - sports, éducation populaire... -, métiers en uniforme) est un gage de réussite du séjour ;

- à cet esprit de cohésion contribuent, tant pour les volontaires que pour les encadrants, les spécificités du séjour de cohésion, première étape du SNU (internat, tenue identique, moments forts comme la levée des couleurs, cérémonies...) ;

- dans cet esprit, la tenue identique pour tous les jeunes constitue un symbole de la cohésion nationale dont l'exigence se trouve à l'origine du SNU ; la cérémonie de la levée des couleurs , « moment de sacralisation hors du temps et de l'espace » selon le directeur du centre et temps fort de chaque journée, a été présentée comme un moment de communion autour d'un rituel écrit en commun. Certains encadrants issus du milieu associatif ont indiqué à la mission qu'en dépit du fait qu'ils n'avaient pas un a priori favorable à l'égard de cette cérémonie, ils avaient été convaincus à l'usage de son utilité pour marquer le caractère transcendant des valeurs de la République qui se situent « au-dessus de la vie quotidienne » des encadrants comme des volontaires ;

- un ancrage territorial fort est décisif pour la réussite du SNU, qu'il s'agisse du séjour de cohésion (les centres SNU doivent être en mesure de promouvoir leur territoire et de tirer parti de réseaux locaux d'intervenants et d'encadrants) ou des MIG (ainsi les missions proposées aux jeunes doivent tenir compte de la nécessité d'une proximité géographique, afin de tenir compte des ressources des familles). Ce constat permet d'insister sur la nécessité de relais forts auprès des acteurs du territoire susceptibles de contribuer à l'animation du séjour de cohésion et de proposer des MIG aux jeunes. Les encadrants doivent donc particulièrement bien connaître le territoire dans lequel s'inscrit le séjour de cohésion. Cet ancrage territorial doit passer par le réseau des associations locales et, selon les interlocuteurs de la délégation, par des relations étroites avec les collectivités territoriales , présentées par les interlocuteurs de la mission d'information comme l'une des principales conditions de l'effectivité de la montée en puissance du SNU ;

- chaque séjour est unique , qu'il s'agisse de l'ambiance, car il s'adresse à chaque fois à un public différent, de la maquette du programme , qui doit pouvoir s'adapter aux attentes des volontaires et aux spécificités offertes par les sites choisis (ainsi à Liévin, site fort d'un stade réputé, le sport joue un rôle central dans le programme) ; l'une des spécificités du séjour de février 2022 tient à la nécessité d'adapter l'expérience acquise en été aux activités envisageables l'hiver ;

- la création d'une maquette de programme est complexe notamment parce que certaines activités peuvent s'inscrire dans plusieurs des axes définis au niveau national (ainsi, apprendre à fabriquer du pain peut relever de la résilience comme de l'autonomie ou de la découverte du patrimoine ; de même, le thème du développement durable peut susciter une approche théorique ou passer par des visites de terrain - par exemple une centrale nucléaire - ou des débats) ;

- le programme du séjour de cohésion fait de celui-ci une étape privilégiée du parcours citoyen des jeunes, si l'on se réfère par exemple à la participation aux conseils de maisonnée et, surtout, à l'élection du « maire du village » (en l'occurrence de la maire), organisée comme une élection en grandeur réelle (inscription sur les listes électorales, attribution à chaque volontaire d'une carte d'électeur, installation d'un bureau de vote dans une salle de la mairie (avec le concours d'un maire-adjoint), avec isoloir, dépouillement des bulletins, proclamation des résultats et remise de son écharpe à la maire élue par ses pairs) ; l'échange qui a eu lieu entre les sénateurs et les volontaires en début d'après-midi s'est donc inscrit dans les séquences du programme dédiées à l'éducation à la citoyenneté ;

- la levée des couleurs et l'exigence d'une tenue parfois qualifiée d'uniforme ont pu être à l'origine de certains malentendus en attirant des jeunes motivés par des activités militaires, en contradiction avec la nature civile du SNU ; il existe une contradiction entre ce que viennent chercher certains jeunes dans les séjours de cohésion (préparation militaire, cadets de la défense...) et la nature du SNU ; de fait, lors de l'échange qui a eu lieu entre les sénateurs et les volontaires, un certain nombre de jeunes ont fait état de leur volonté de tester leur capacité à s'intégrer au milieu militaire, voire d'être valorisés comme un atout en vue d'un éventuel volontariat militaire. Les interlocuteurs de la mission ont également reconnu qu'il existait un risque de décalage entre leur représentation théorique du SNU, fondée sur un équilibre entre trois pôles d'égale importance que sont le monde associatif, les armées et l'Éducation nationale, et la représentation du SNU chez les volontaires, souvent dominée par une dimension inspirée du service militaire. Un effort de communication doit donc être mobilisé pour prévenir une telle incompréhension.

Le projet pédagogique du centre de Dunkerque a ensuite été présenté.

Il s'inscrit dans les exigences définies au niveau national, à partir de quatre objectifs :

- accroître la cohésion et la résilience de la Nation en développant une culture de l'engagement ;

- garantir un brassage social et territorial de l'ensemble d'une classe d'âge ;

- renforcer l'orientation et l'accompagnement des jeunes dans la construction de leur parcours personnel et professionnel ;

- valoriser les territoires, leurs dynamiques et leur patrimoine culturel et naturel.

Le projet pédagogique du centre de Dunkerque renvoie à « ces liens qui nous unissent » , clin d'oeil aux cordages liés à la vocation maritime de la ville de Dunkerque et à l'importance du port dans son patrimoine historique et dans son économie.

Dans l' « éphémère petite cité éco-républicaine » que constitue le centre SNU, ces liens doivent permettre d'être « égaux et solidaires, libres, fiers et volontaires, divers dans nos apparences, nos enracinements, nos lignées, nos parcours, nos bagages culturels, liés par un destin collectif qui transcende nos péripéties personnelles (...), la République. Notre chose publique. Notre bien commun suprême. La République laïque qui nous protège de toute emprise et promet à chacune et chacun d'entre nous les conditions pour accomplir sa destinée choisie » .

Comme l'a rappelé le directeur du centre, les liens qui unissent peuvent toutefois être aussi « ce qui nous entrave, des liens dont il faut se défaire » : l'objectif du séjour de cohésion est ainsi, selon le projet pédagogique, de dépasser ces entraves en passant « du je au nous, de l'individualisme au collectif, de l'individu à la maisonnée, de la maisonnée à la compagnie, des compagnies au groupe, du groupe à l'identité citoyenne collective ».

Dans cet esprit, les interlocuteurs de la délégation ont souligné l'importance des cérémonies , qui constituent comme cela a été relevé précédemment des temps forts des séjours de cohésion , qu'il s'agisse de la levée quotidienne des couleurs ou du baptême de la promotion de février 2022, dédiée au lieutenant-colonel Christophe Merten, ce choix traduisant de surcroît une volonté de rendre hommage à une personnalité très investie dans le territoire.

Les activités inscrites à l'agenda du séjour de cohésion relèvent des sept thématiques définies au niveau national :

- découverte de l'engagement ;

- défense, sécurité et résilience nationale ;

- culture et patrimoine ;

- activités physiques et sportives et de cohésion ;

- autonomie, connaissances des services publics et accès aux droits ;

- citoyenneté et institutions nationales et européennes ;

- développement durable et transition écologique et solidaire.

La délégation de la mission d'information a pu, au cours du temps d'échanges avec les jeunes qui lui a été ménagé en début d'après-midi, mesurer l'intérêt de la thématique « citoyenneté ». Les aspects très concrets de l'activité législative du Sénat ont ainsi été présentés aux volontaires, qui ont été invités par le rapporteur à exposer leurs attentes à l'égard du SNU. Parallèlement à des motivations liées à un projet d'engagement militaire, certains jeunes ont témoigné de leur volonté de faire une expérience de vie collective, d'enrichir leur parcours et de découvrir un nouveau milieu. À l'issue de cet échange, la maire du village, ceinte de son écharpe tricolore, a fait à ses camarades un discours inspirant qui s'est terminé par les mots : « Chacun à son échelle peut contribuer à la vie politique de son pays » . Selon le directeur du centre, le SNU s'inscrit ainsi dans un parcours citoyen déjà présent à l'école.

Le sport occupe également une place importante dans ce projet, scandé de jeux sportifs tels que courses, parcours, challenges divers... Les interlocuteurs de la délégation ont insisté sur l'importance de l' apprentissage de la natation pour des jeunes qui ne sauraient pas nager : à cet effet, la réactivité et l'efficacité de la mairie de Dunkerque, qui a dans des délais record mis à la disposition des volontaires la piscine municipale, ont été à plusieurs reprises saluées. Outre la natation sont proposés aux jeunes des activités telles que self défense ou handball. Parallèlement sont abordées les questions de diététique et la prévention des maladies cardiovasculaires. Selon certains interlocuteurs de la mission d'information, on constate une certaine dégradation de la santé physique et psychologique des jeunes , ce qui souligne les conséquences d'une éducation physique à l'école jugée largement insuffisante et impose un effort dans ce domaine.

Les jeunes sont considérés comme devant être acteurs de leur séjour :

- chaque volontaire reçoit un carnet « traces » dans lequel il est invité à inscrire des textes, dessins, images et autres documents constituant son journal de bord ; ce carnet est appelé à devenir un « portfolio de compétences » récapitulant ce que le jeune a appris pendant son séjour ;

- chaque jour est désignée une équipe de reporters qui sont autorisés à utiliser leur téléphone - dont l'usage est en principe interdit pendant le séjour - pour filmer les événements de la journée et réaliser quotidiennement un montage vidéo de quelques minutes envoyé aux familles.

Selon le directeur du centre de Dunkerque, le séjour de cohésion constitue un « objet nouveau » , qui ne relève ni de l'école, ni de l'armée, ni de l'éducation populaire, ni de la colonie de vacances . Il s'agit plus, selon le directeur du centre, d'une occasion unique de valoriser les qualités que l'école laisse de côté dans son évaluation des jeunes, comme par exemple l'apprentissage de la musique, la participation à une chorale, la pratique sportive...

Le retour d'expérience impose ainsi d' éviter une trop grande ressemblance avec l'école dans la conception des activités, sauf à lasser des jeunes qui attendent autre chose du séjour de cohésion qu'une ambiance scolaire . Une autre condition du succès réside dans la diversité des équipes, dont la composition doit refléter l'esprit du projet pédagogique, une erreur pouvant être de s'appuyer sur des équipes préconstituées.

Le SNU constitue une opportunité de faire connaître aux jeunes des institutions et des activités pour lesquelles le vivier de recrutement est un défi, comme par exemple les services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) ou les associations qui semblent nombreuses à être confrontées à un problème de relève. De même, le séjour de cohésion est de nature à susciter des vocations de porte-drapeau et à donner aux jeunes le goût de la participation à des cérémonies mémorielles . Au-delà de la problématique de l'incitation à l'engagement, la participation au SNU d'acteurs associatifs et de personnes issues des corps en uniforme est de nature à mieux faire connaître aux jeunes citoyens la portée de l'action de ces acteurs et d'améliorer par capillarité leur image au sein de la population.

Dans le même esprit, le séjour de cohésion constitue une opportunité d'informer les jeunes sur les MIG constituant la deuxième phase du SNU. C'est le rôle des intervenants, qui sont à raison de 90 % des bénévoles, d'éveiller les vocations des jeunes et de leur donner le goût de l'engagement au service de la collectivité .

De manière générale, la formation de citoyens engagés et acteurs de leur territoire est un axe fort du SNU.

S'agissant des SDIS , la contraction de la durée moyenne de l'engagement des volontaires (six ans au lieu de quarante ans par le passé) impose de faire porter l'effort sur le nombre de bénévoles, a fortiori si l'on tient compte du temps de formation nécessaire.

En dépit de la force de conviction et de l'engagement des encadrants, l'expérimentation conduite en 2019-2021 a mis en évidence des marges de progression de l'organisation des séjours de cohésion, conduisant les interlocuteurs de la mission d'information à formuler les axes de recommandation suivants :

- mieux définir le rôle de chaque échelon, national et local, l'échelon opérationnel se situant au niveau local. Certains interlocuteurs de la mission ont souligné à cet égard que la cohabitation de quatre échelons d'intervention (national, régional, départemental et local au niveau du centre) était source de complexité et que le nombre d'échelons pourrait être réduit ;

- les opérateurs assureraient la mise en oeuvre concrète d'un cahier des charges défini en amont, ce qui permettrait de meilleures capacités d'accueil ;

- la mise en place d'une approche par arrondissement, avec au sein de chaque arrondissement la création d'un centre multi-sites fondé sur une gestion décentralisée ;

- la création d'une association gestionnaire départementale, offrant les garanties de souplesse et de réactivité qu'exigent l'organisation et le suivi des séjours de cohésion, qui supposent de multiples dépenses de faible montant difficiles à anticiper.

De manière générale, l'avenir du SNU repose, selon les interlocuteurs de la mission d'information, sur les axes d'amélioration suivants.

1) Définir la cible recherchée pour développer le SNU : faut-il évoluer vers la sélection des volontaires parmi les jeunes dont on suppose qu'ils ont le plus besoin du SNU, ce qui induirait un changement de nature de celui-ci en le centrant sur l'insertion sociale et professionnelle ? Faut-il maintenir le volontariat ou évoluer vers l' obligation ? Selon les témoignages entendus par la mission d'information, le séjour de cohésion ne peut demeurer en l'état dans un contexte de jeunes appelés ; le seul modèle d'universalité sur lequel pourrait s'appuyer le SNU est l'Éducation nationale, celui de la journée défense et citoyenneté semblant difficilement transposable, de l'avis des interlocuteurs de la mission d'information, à un séjour long comme le séjour de cohésion. Les interlocuteurs de la mission ont à cet égard estimé que l'heure des choix était venue et qu'il était essentiel de répondre aux questions précédemment exposées afin de pouvoir piloter efficacement la montée en charge du dispositif et sa pérennisation.

2)  Le maintien du volontariat imposerait de mieux faire connaître le SNU parallèlement à sa montée en puissance pour « aller chercher les jeunes » :

- cette nécessité de dynamiser la communication sur le SNU passe par trois relais : celui des anciens du SNU susceptibles d'en devenir les ambassadeurs auprès des jeunes, le réseau des chefs d'établissements scolaires , également stratégique pour sensibiliser les jeunes à l'intérêt du SNU, de même que celui des collectivités territoriales ; la nécessité d'activer le réseau des missions locales a également été évoquée, de même que ceux de l'Aide sociale à l'enfance et de la protection judiciaire de la jeunesse ;

- le développement du SNU impose de travailler davantage avec les collèges et les lycées dont l'information sur le SNU semble encore très insuffisante ;

- communiquer sur le SNU auprès des élus et des associations d'élus est une des conditions de sa montée en puissance, qu'il s'agisse des MIG que les collectivités peuvent proposer aux jeunes, ou des aspects concrets de l'organisation des séjours de cohésion comme la mise à disposition de locaux ou l'organisation de certaines activités (les cours de natation dispensées aux volontaires grâce à la mobilisation de la mairie de Dunkerque constituent un exemple éclairant des avantages de ce partenariat) ; à Dunkerque, les élus semblent désormais impliqués ; le SNU a été présenté comme une « chance pour les élus locaux » , car le séjour de cohésion peut permettre notamment de rentabiliser des sites d'hébergement en assurant une occupation pendant plusieurs semaines par an.

3)  Résoudre l'environnement concret de la gestion du SNU :

- s'agissant de l'hébergement du séjour de cohésion, identifier des sites pérennes dédiés dans une logique pluriannuelle garantissant la disponibilité des locaux, le « nomadisme » qui caractérise la situation actuelle ne pouvant être une solution satisfaisante dans la durée ; l'alignement des dates de séjours sur un calendrier défini au niveau national pourrait poser des difficultés en raison des spécificités des agendas locaux (ainsi, en sortie de crise sanitaire, la disponibilité d'un local comme L'Escale pourrait être incertaine à des dates coïncidant avec celles du Carnaval de Dunkerque, qui attire beaucoup de monde) ;

- améliorer les délais de paiement des encadrants (certains ont reçu leur rémunération deux mois après le début du stage de cohésion, ce qui peut être très pénalisant) et assouplir les règles d'engagement des dépenses ; toutes les activités ne pouvant être organisées longtemps à l'avance, leur organisation pâtit, d'après les témoignages recueillis à Dunkerque, d'une insuffisante souplesse qui doit trouver des solutions dans l'hypothèse d'une véritable montée en puissance ;

4)  Constituer et entretenir au plus près du territoire un vivier d'encadrants, « chevilles ouvrières des séjours de cohésion », et d'intervenants :

- ces derniers donnent de la consistance aux séjours, les encadrants pouvant de surcroît participer au séjour en tant qu'intervenants ;

- la stabilité des équipes autour de leurs directeurs doit être privilégiée pour permettre au séjour de cohésion de s'inscrire dans la durée ;

- la mission d'information a constaté que les directeurs de centre avaient acquis à ce jour une expérience tout à fait remarquable qu'il importe de transmettre dans l'hypothèse de la montée en puissance du SNU : l'indispensable formation des futurs directeurs de centre doit à l'évidence s'appuyer sur eux. À cet effet, il semble essentiel de mettre en place un espace d'échanges entre tous les directeurs de centre pour leur permettre de partager les retours d'expérience capitalisés au niveau local et de les transmettre à leurs collègues moins expérimentés. Le développement du SNU passe nécessairement par la création d'un tel réseau.

Déplacement de la mission d'information
dans le Maine-et-Loire (24 février 2022)

Le 24 février, la mission d'information s'est rendue dans le département de Maine-et-Loire, à l'initiative de Stéphane Piednoir, président. Henri Cabanel, rapporteur, et Sabine Drexler ont participé à ce déplacement.

Le programme prévoyait, le matin, un échange sur les « Journées citoyennes », qui se sont inscrites au cours des dernières années dans l'agenda du département de Maine-et-Loire.

L'après-midi était consacré à une visite de l'Épide de Combrée, à la suite de l'audition par la mission d'information de Florence Gérard-Chalet, directrice générale de l'Épide (Établissement pour l'insertion dans l'emploi), le 27 janvier 2022.

I. RENCONTRE À LA MAIRIE DE SOULAIRE-ET-BOURG AUTOUR DE LA JOURNÉE CITOYENNE

La réunion s'est tenue à la mairie de Soulaire-et-Bourg, commune de 1 531 habitants, où la délégation sénatoriale a rencontré son maire, Jean-François Rambault, également vice-président du conseil départemental de Maine-et-Loire. Ont également participé à ces échanges :

- Marina Toullier, conseillère municipale ;

- et Régine Brichet, vice-présidente du conseil départemental de Maine-et-Loire, responsable du secteur « éducation et sport de haut niveau ».

Dans un premier temps, la réunion a porté sur la mise en place de journées citoyennes dans la commune de Soulaire-et-Bourg. Ces journées ont été présentées comme un élément parmi d'autres mesures ou actions en faveur de la citoyenneté, telles que le dispositif « gagne ton argent de poche » à destination des jeunes, le conseil municipal des jeunes ou, plus largement, la volonté de mieux impliquer les adolescents dans la vie associative locale.

À l'échelle de l'agglomération, les journées citoyennes ont d'abord été créées dans la ville d'Angers, puis le maire de la commune, souhaitant mieux connaître cette initiative, a pris connaissance des travaux de Fabien Jordan, instigateur des toutes premières journées citoyennes, dans sa commune de Beerwiller (Haut Rhin), en 2008 419 ( * ) .

La première journée citoyenne de Soulaire-et-Bourg s'est tenue en 2017. Selon Jean-François Rambault, la population était dubitative initialement, mais la première édition a remporté un certain succès, entraînant d'autres communes de l'agglomération dans son sillage.

La mise en oeuvre de cette journée est née du constat que, malgré un tissu associatif assez dense, les habitant du village ne se connaissaient pas.

Ces journées ont donc eu pour objectif de replacer les habitants au coeur de la cité en leur faisant dépasser le seul statut de « consommateurs » de services publics pour les faire devenir acteurs de leur territoire. Ces journées ont également permis de créer du lien avec les entreprises de la commune et avec les agents de ses services techniques.

Le principe des journées citoyennes est dérivé de la devise de la République :

- Liberté : chacun est libre de participer ou non ;

- Égalité : tout le monde occupe une place égale dans l'organisation ;

- Fraternité : le déroulement s'effectue dans une ambiance conviviale, nourrie par les échanges intergénérationnels.

L'organisation de la journée citoyenne débute en amont par une phase d'appel à projets, durant laquelle les habitants de la commune soumettent des travaux ou des actions qu'ils aimeraient voir réalisés lors de cette journée : on peut citer, entre autres exemples, la construction de nids à cigognes ou de boîtes à insectes, ou encore la réfection des garde-corps du stade municipal.

Les travaux sélectionnés sont mis en oeuvre lors de la journée citoyenne par l'ensemble des acteurs, en fonction de leurs capacités et de leurs expertises propres.

Régine Brichet a ensuite présenté la démarche « citoyenneté » mise en place par le département de Maine-et-Loire. Cette démarche s'appuie sur une définition de la citoyenneté fondée sur le triptyque « solidarités », « civisme » et « civilité » qui fonde le département à co-construire les politiques publiques, prendre en compte l'ensemble des concitoyens et des territoires, promouvoir l'engagement personnel et le bénévolat pour le bien commun et soutenir les actions liées au savoir vivre en collectivité.

Afin de promouvoir la citoyenneté, le département a désigné un conseiller spécialement en charge de cette thématique ; il dispose d'un service dédié qui appuie les autres services dans leurs missions. Le département s'est également doté d'une première feuille de route établie en 2018 et traduite en un plan d'action renouvelé en 2022. Il s'appuie sur trois groupes d'objectifs. Le premier consiste à sensibiliser, éduquer, encourager au civisme et à la citoyenneté. Le deuxième tend à développer la concertation et la participation citoyenne. Le troisième vise à encourager et soutenir les promoteurs d'initiatives citoyennes.

La mise en oeuvre des plans successifs a notamment conduit à un appel à idées d'actions solidaires ayant permis de sélectionner sept projets lauréats co-construits avec les habitants du département et ayant conduit à coordonner des politiques départementales différentes : enfance, routes, revenu de solidarité active et collèges. Concrètement, il s'est agi, par exemple, de mettre des Joëlettes (ou fauteuils roulants « tout terrain ») à disposition de personnes en situation de handicap via une association et divers partenaires, parmi lesquels l'Épide de Combrée. Ces actions ont également permis d'associer les habitants à la construction du futur collège Beaupréau.

II. VISITE DE L'ÉPIDE DE COMBRÉE

Lors de cette visite, les sénateurs ont participé à un échange avec Alexandra Solazzo, directrice de l'Épide et son équipe (chefs de service éducation à la citoyenneté, moyens généraux, insertion et formation, conseiller Éducation citoyenneté, formatrice en enseignement général, formateur en sports) ainsi que quatre volontaires à l'insertion (dont une jeune femme).

D'une capacité d'accueil de 75 volontaires à l'insertion, l'Épide de Combrée, créé en 2007, est le seul établissement de ce type dans la région des Pays de la Loire. Il couvre les six départements suivants : Loire-Atlantique, Maine-et-Loire, Mayenne, Deux-Sèvres, Vendée et Vienne.

Le suivi qui y est offert aux jeunes tient, comme dans les autres centres Épide, à une équipe pluridisciplinaire offrant un très large spectre de compétences (médico-sociales, sportives, enseignement général, insertion professionnelle). Le centre de Combrée s'appuie sur une équipe de 32 agents qui se relaient pour assurer une présence constante du lundi matin au vendredi soir. Un psychologue y est présent une demi-journée par semaine.

La mission d'information tient à rendre hommage à l'implication et au dévouement des personnels rencontrés à Combrée. Elle a pu mesurer leur force de conviction et leur attachement pour les jeunes qu'ils accompagnent vers la réussite.

La mission d'information a été reçue dans des locaux que l'Épide de Combrée devrait quitter prochainement afin d'emménager dans un site plus proche d'Angers et plus facile d'accès depuis la gare. Cette nouvelle implantation devrait faciliter le départ des volontaires chaque vendredi et leur retour le lundi matin. Parallèlement à ce projet de déménagement, un appel d'offres est en cours pour permettre, à terme, l'hébergement pendant les week-ends des volontaires qui souhaiteraient demeurer au centre.

L'emploi du temps des volontaires s'appuie sur une discipline stricte : réveil à 6 heures, levée des couleurs à 8 heures, coucher à 22 heures. Le programme quotidien est intensif ; des activités culturelles sont proposées le soir ; l'hébergement est collectif, les jeunes ayant la responsabilité de l'entretien de leur espace de vie et de leur linge. Le respect des règles de vie collective est une exigence forte, de même que la pratique quotidienne du sport. Selon les interlocuteurs de la mission d'information, deux mois sont nécessaires à l'intégration des jeunes, parfois quatre.

L'un des objectifs de l'Épide est de faire émerger un sentiment de solidarité et de groupe, dans un « esprit de promotion » ; un autre objectif est d'accompagner les jeunes vers l'insertion sociale et professionnelle : tous les volontaires bénéficient d'une remise à niveau scolaire, sont aidés à découvrir des métiers et à choisir des stages, suivent des cours adaptés à leur projet professionnel, sont préparés au PIX, passent le code de la route, sont formés aux gestes de premiers secours et participent à des actions de solidarité qui s'inscrivent dans une éducation citoyenne destinée à compléter leur formation. Certains peuvent en outre être préparés au Passeport de compétences informatiques européen (PCIE) et au permis de conduire. La remise à niveau concerne aussi le plan sportif : les volontaires à l'insertion passent le brevet de natation de 25 mètres ; ceux qui en ont besoin peuvent apprendre à faire du vélo.

Le parcours citoyen, sanctionné par la remise de l'Attestation de parcours citoyen de l'Épide (APCE), fait donc partie de l'accompagnement des jeunes vers l'insertion. Il vise l'autonomie des volontaires à travers des formations concrètes tournées vers l'organisation de la vie quotidienne (formalités administratives, budget...). Il comporte également des modules de connaissance des institutions, locales et nationales ainsi qu'une sensibilisation au devoir de mémoire. Ce point est d'autant plus important qu'il ressort des échanges avec les volontaires à l'insertion rencontrés par la mission d'information que ceux-ci ne gardaient pas de souvenir de l'EMC dispensée dans le cadre scolaire. Chaque matin, la levée du drapeau est un moment fort de la journée qui permet d'enseigner les symboles de la République, l'hymne national (deux couplets de La Marseillaise sont enseignés) et les valeurs citoyennes. La cérémonie des couleurs du vendredi clôt la semaine. Elle constitue l'occasion de la remise solennelle de l'APCE ; elle permet aussi de saluer les réussites de chacun. Les volontaires sont également conduits à participer aux commémorations nationales (certains assistent au ravivage de la flamme sous l'Arc de Triomphe) et à la cérémonie du 14 juillet.

Des visites culturelles (musées, lieux de culte...) font également partie du parcours citoyen de l'Épide, de même que la participation à des chantiers de restauration du patrimoine et à des actions d'entretien de l'environnement. Le bénévolat est naturellement encouragé, avec des partenaires divers (Ehpad, associations telles que Les restos du coeur , La Banque alimentaire ...). Entre autres initiatives, l'Épide a été partenaire du projet Han'semble une aventure en joëlette mis en oeuvre par le département de Maine-et-Loire pour mettre à disposition de personnes à mobilité réduite des fauteuils roulants « tout terrain » permettant la participation à des randonnées et à des activités sportives, culturelles ou de loisirs (ce point avait été évoqué le matin à la mairie de Soulaire-et-Bourg).

Les parcours des quatre volontaires à l'insertion rencontrés par la mission d'information à Combrée, qui ont rejoint l'Épide en 2021, souligne la diversité des jeunes accueillis à l'Épide. Trois d'entre eux ont fait état d'un intérêt pour un engagement dans l'armée ou les métiers de la police, même si cet objectif ne s'est pas concrétisé pour tous. L'Épide offre en effet la possibilité de se préparer à passer avec succès les tests conditionnant un engagement militaire ; la pratique sportive, intégrée à l'emploi du temps quotidien, favorise cette préparation ; l'Épide peut prendre en charge les frais de déplacement et, parfois, d'hébergement, nécessaires pour aller passer les tests.

Les témoignages recueillis lors de cet échange ont souligné l'intérêt qu'attachent ces jeunes à l'expérience de vie collective que constitue l'Épide, aux découvertes qu'ils effectuent pendant leur séjour et aux actions bénévoles auxquelles ils participent, dont ils parlent d'ailleurs avec fierté.

Le recrutement de volontaires et leur accompagnement vers l'insertion professionnelle constituent un défi. Il implique un effort régulier de promotion de l'Épide, d'une part, auprès d'acteurs comme Pôle emploi , les maisons de quartier, le Point info jeunesse d'Angers (où l'Épide tient une permanence par mois) ou la mission locale de Nantes et, d'autre part, auprès d'entreprises susceptibles d'employer des jeunes issus de l'Épide.

Attirer les futurs volontaires à l'insertion vers l'Épide suppose de les convaincre des opportunités que peut leur apporter cette structure en termes de remise à niveau, y compris sur le plan médical, de revenu, d'accès au permis de conduire, d'accompagnement social et d'insertion professionnelle. Le fait d'être privé d'Internet et de sortir de son milieu, la nécessité de se confronter à des règles de vie nouvelles, les contraintes liées à la discipline et le port d'un uniforme constituent pour certains de véritables obstacles. À cet égard, la directrice du centre a insisté sur le courage des volontaires qui osent sortir de leur « zone de confort » en rejoignant l'Épide.

Le cadre de vie rigoureux et la discipline en vigueur à l'Épide contribuent à adapter les volontaires à l'insertion aux exigences de la vie professionnelle : selon la directrice, les attentes des entreprises concernent avant tout une attitude, un savoir-être et un comportement, domaines dans lesquels la formation reçue à l'Épide fait des volontaires un atout pour leurs employeurs potentiels.

Selon les témoignages des volontaires à l'insertion rencontrés par la mission d'information, la perspective de passer le permis et de trouver une formation pour « s'en sortir », jointe à la pratique sportive favorisée à l'Épide, ont constitué des arguments convaincants : « Ici, tu es obligé de sortir avec quelque chose. Ailleurs on te laisse partir sans rien ». À cet égard, la directrice de l'Épide a rappelé que 70 % des volontaires connaissent une sortie « positive » de l'Épide, ce qui constitue une proportion favorable comparée aux quelque 30 % d'abandons ou de renvois.

Depuis qu'il est accessible aux mineurs et aux bacheliers, l'Épide touche des publics nouveaux, même s'il n'a pas vocation à accueillir les bacheliers de l'année : l'un des volontaires à l'insertion rencontrés, titulaire d'un bac STMG, n'a pas eu accès à une formation qui lui convenait à l'issue de sa terminale ; il a privilégié l'Épide de préférence à la perspective qui lui était proposée de passer un nouveau bac.

Dans le cadre de la Mission de lutte contre le décrochage scolaire (MLDS), l'Épide intervient dans un territoire étendu : or cette mission incombe à un seul membre du personnel de l'Épide, ce qui semble particulièrement insuffisant, même si le meilleur vecteur de communication semble être le bouche à oreille entre pairs.

Selon la directrice, l'Épide a été impacté par d'autres dispositifs susceptibles d'être considérés comme plus attractifs sur le plan financier, et plus particulièrement la garantie jeunes . Jusqu'à la fin de 2021, l'indemnité mensuelle versée aux volontaires de l'Épide (210 euros, auxquels s'ajoutaient 90 euros capitalisés chaque mois) était moins élevée que la garantie jeunes (497,50 euros) et assortie de contreparties plus exigeantes. Depuis le début de 2022, l'indemnité de l'Épide a été portée à 450 euros par mois, auxquels s'ajoutent 50 euros mis de côté et restitués aux volontaires à leur départ, ce qui devrait accroître l'attractivité de ce dispositif pour les jeunes.

De plus, compte tenu du nombre de jeunes ayant vocation à intégrer la garantie jeunes , les missions locales ont été conduites à positionner des jeunes dans ce dispositif (que par ailleurs elles portaient), ce qui a réduit d'autant ceux qu'elles orientaient vers l'Épide.

Selon les informations recueillies à Combrée, le contrat d'engagement jeunes est toutefois susceptible de changer la donne au profit de l'Épide, car ce dernier va entrer dans ce dispositif, ce qui améliorera la visibilité de l'institution, à condition toutefois qu'une campagne d'information dynamique et efficace renforce sa notoriété : ainsi, alors que l'Épide faisait partie du portefeuille 1 jeune 1 solution , l'insuffisante visibilité de l'établissement sur le site a limité son rayonnement, l'Épide ayant été en quelque sorte dilué au sein d'un ensemble composite formé des écoles de la deuxième chance (E2C), du service militaire volontaire (SMV) et des dispositifs autonomes mis en place par certaines collectivités territoriales. Il faut noter également que l'Épide a accueilli certains bénéficiaires de la garantie jeunes que cette prestation n'a pas permis d'insérer dans la vie professionnelle. Selon la directrice de l'Épide, certains jeunes sont susceptibles en effet, faute d'une bonne orientation et d'un accompagnement solide, d'aller de dispositif en dispositif ( garantie jeunes , E2C, SMV...) sans résultat ni suivi d'une structure à l'autre. C'est la rigueur du cadre offert par l'Épide et la qualité de l'accompagnement proposé aux jeunes qui semble faire la différence, en provoquant un « déclic » et une envie de se prendre en mains.

L'insuffisante coordination entre les différentes structures chargées d'accueillir les décrocheurs, la superposition de dispositifs ayant des vocations comparables ainsi qu'un certain mélange des genres entre organismes prescripteurs et acteurs de l'insertion compromettent, selon la directrice de l'Épide de Combrée, l'efficacité de ces dispositifs.

Déplacement de la mission d'information
à Montpellier (23 et 24 mars 2022)

Mairie de Jacou

Quartier de La Paillade

Rencontre avec des élus du Conseil des enfants et des jeunes (CEJ)
de la commune de Jacou (23 mars 2022)

Quelques informations sur le CEJ

- Les conseillers sont désignés pour un mandat de deux ans

- Effectifs pour l'année en cours : 18 CM2 et 18 collégiens,
dont deux jeunes de l'Institut médico-éducatif (IME)

En 2020-2021, les membres du CEJ de Jacou ont choisi comme thématique de travail le harcèlement scolaire. Ils ont notamment réalisé une vidéo à destination de leurs camarades, qui peut être consultée sur le site internet de la mairie.

Ils ont également participé au projet Deux actions pour la planète , initié par les collégiens en partenariat avec la municipalité, comprenant l'organisation d'un événement Repair Café (33 objets pris en charge dont 18 réparés sur place et 46 kilos de déchets évités) et d'un événement Ramassage des déchets (avec ateliers de sensibilisation à la gestion des déchets).

Le programme de l'année en cours prévoit des travaux essentiellement axés sur les thématiques de la solidarité et de la différence :

- collecte au profit de la Banque alimentaire pour l'épicerie solidaire de Jacou, collecte de jouets au profit des familles bénéficiaires de l'épicerie solidaire ;

- participation à la vidéo des voeux du maire ;

- rédaction d'une lettre de soutien adressée aux aînés durant la période de restrictions sanitaires (janvier) ; lettre distribuée avec des friandises locales.

La délégation du Sénat était composée de Stéphane Piednoir , président de la mission commune d'information, Henry Cabanel , son rapporteur, ainsi que Guy Benarroche et Hussein Bourgi , membres de la mission et respectivement sénateurs des Bouches-du-Rhône et de l'Hérault. Elle a été accueillie par Enguerran Aubert , directeur de cabinet du Maire de la ville de Jacou, commune de la métropole de Montpellier, ainsi que par Brigitte March , adjointe au maire de Jacou en charge de la jeunesse et déléguée à l'école élémentaire, au collège et au conseil de jeunes. La délégation a rencontré une vingtaine de membres du conseil de jeunes.

Après une présentation de la mission par le président Piednoir, le rapporteur a rappelé l'importance de l'engagement citoyen et a interrogé les membres du conseil de jeunes de Jacou sur les motivations qui ont présidé à leur propre engagement.

Océane : « Je veux faire grandir la ville, qu'elle soit connue et qu'on ait plein de projets. Cette ville mérite d'être mise en avant ! Et avec plein de petits projets on peut y arriver . »

Ilan : « J'avais entendu parler du conseil de jeunes et j'étais content de pouvoir participer à la vie de la commune . »

Gaëtan : « C'est ma mère qui m'a parlé du CEJ. Je suis content de représenter mes camarades et d'être dans la citoyenneté française . »

Estéban : « C'est mon troisième mandat. Au début, j'étais motivé par le besoin de participer à la vie de la ville et être au courant de ce qui s'y passe . »

En réponse à une question du président, certains enfants ont indiqué envisager de devenir, plus tard, conseiller municipal.

Brigitte March a, par la suite, présenté le fonctionnement du conseil de jeunes de Jacou. Initialement dédié aux élèves de CM2 et de 6 e , le conseil a intégré des collégiens plus âgés qui étaient motivés. En outre, le conseil accueille deux jeunes de l'Institut médico-éducatif de la commune.

Pour être admis au conseil de jeunes, chaque enfant écrit une profession de foi avant qu'un tirage au sort ait lieu. Cette modalité est préférée à une élection en raison de l'âge des enfants. Brigitte March indiquait que « Normalement, il y a 12 places, mais cette années ils étaient 18 et on a pris tout le monde car ils avaient tous des bonnes idées ! ».

À la question du rapporteur tendant à savoir comment les jeunes avaient eu envie de rejoindre le conseil, plusieurs réponses ont été données :

- « Il y avait des affiches à l'école . » ;

- « Je connaissais des personnes du CEJ... des affiches contre le harcèlement scolaire m'ont donné envie de m'engager . »

Trois séances de travail sont organisées chaque semaine par Brigitte March et une animatrice : deux pour le collège et une pour les CM2. Elles ont pour objet de préparer un projet qui sera présenté au maire de la commune par les jeunes afin qu'il le valide et le mette en oeuvre. Un membre du conseil de jeunes indiquait : « On va créer une journée pour la nature avec plusieurs stands sur différents thèmes : “panneaux solaires”, “réparation de vélos”, “comment fabriquer ses produits ménagers”, “comment entretenir son jardin sans pesticide”. On va installer un Repair café . Dans le cadre d'une fresque pour le climat, une dame va venir et va animer une activité... ». Un autre de compléter : « On va faire un stand de boissons avec des verres consignés. L'argent récolté sera reversé à une association ».

Les membres du conseil de jeunes suivent également un stage parmi les élus de la commune ainsi que les services municipaux même si cette initiative a récemment été perturbée par la Covid-19.

Au cours des échanges qui ont suivi, le rapporteur a souhaité savoir ce que signifiait, pour ces jeunes, la citoyenneté. Pour certains, c'est « habiter à Jacou sans commettre d'infraction ». Pour d'autres, c'est « s'engager à prendre soin de la ville dans laquelle on habite ».

Les enfants ont également souhaité connaître le rôle du Sénat et des sénateurs.

*

Rencontre avec des membres de l'association Uni'sons
(Habib Deshraoui, directeur, et Nacer Benammar, éducateur spécialisé)
et des jeunes en service civique au sein de l'association
.

L'association a fait le choix délibéré de s'installer au coeur du quartier Nord de La Paillade (quartier de 28 000 à 30 000 habitants), dans les locaux d'une ancienne pharmacie - la plupart des commerces, infrastructures de transport, culturelles et économiques se situant dans le sud de ce quartier). Le taux de votants dans le quartier est faible - il y a moins de votants qu'il y a dix ans, alors même que le nombre d'habitants a augmenté.

L'association a choisi comme slogan L'Art est Public et se veut un porte-voix de la République auprès d'une population que l'on ne voit pas. La culture permet en effet de réunir les gens. L'association a créé le Festival Arabesques , qui est l'un des plus grands festivals de musique arabe d'Europe, sous le haut patronage de l'Unesco. Dix-neuf permanents travaillent dans l'association, dont un éducateur spécialisé, deux médiateurs culturels et une conseillère en insertion professionnelle.

Nacer Benammar, éducateur spécialisé, a expliqué son double rôle au sein de l'association. Uni'sons est partenaire du programme Réussite éducative (PRE). Dans ce cadre, elle accueille des jeunes provisoirement exclus de leurs établissements, afin qu'ils ne restent pas livrés à eux-mêmes pendant cette période d'exclusion. Par ailleurs, il accompagne des jeunes de 16 à 24 ans, souvent sortis des dispositifs existants, qui « accumulent déception sur déception dans leurs recherches d'emploi ou d'insertion ».

Uni'sons organise deux réunions annuelles d'information sur le service civique pour les jeunes du quartier. Mais très peu d'entre eux candidatent, ce qui interroge sur la présentation du service civique et sur l'information délivrée aux jeunes dans ce domaine. Afin d'inciter les jeunes les plus éloignés à s'engager dans un service civique, l'association finance leur permis de conduire. En effet, 100 % des jeunes se sentent concernés par l'obtention d'un permis de conduire.

L'association travaille également en partenariat avec les missions locales afin de repérer les 16-25 ans « invisibles ». Leurs missions sont complémentaires : Uni'sons a en effet remarqué que les jeunes appréhendent souvent leur rendez-vous devant le conseiller de la mission locale.

Le programme Réussite éducative s'inscrit dans un partenariat avec la métropole de Montpellier qui a mis en place un parcours en lien avec les associations pour accueillir les jeunes exclus. L'association Uni'sons les accueille les lundi, mercredi et vendredi matins et travaille avec ces jeunes sur l'expression et le ressenti, mais aussi sur l'acceptation de la sanction. Le reste de la semaine, ces jeunes suivent notamment un atelier sur la civilité organisée par le réseau des transports en commun. Ce programme permet d'apaiser le rapport du jeune avec l'école.

M. Benammar est revenu sur la difficulté de nombreux jeunes (collégiens mais aussi étudiants) à trouver des stages. L'association travaille sur une mise en réseau pour les aider dans leurs recherches. Malheureusement, les jeunes viennent les voir très tardivement - entre trois et cinq jours avant le début du stage.

Lors des échanges avec les jeunes en service civique, la journée défense et citoyenneté a été évoquée. Elle a été jugée décevante, permettant seulement « d'obtenir les papiers nécessaires », alors même qu'il s'agit d'un passage obligatoire pour tous les jeunes Français. Cette journée « doit mieux être utilisée ».

En partenariat avec une autre association, Uni'sons prépare actuellement une émission politique dans le cadre des échéances électorales de cette année. Or les accompagnateurs du projet ont été surpris de constater lors de la préparation de cette émission que les jeunes ne prévoyaient aucune question les concernant directement, alors même qu'ils sont convaincus du désintérêt des politiques pour leurs problématiques. Dans leur esprit, la politique semble inatteignable, réservée à une autre classe sociale.

M. Benammar est également revenu sur l'expression de divorce entre les jeunes et la politique. Il juge ce terme inadéquat : en effet pour qu'il y ait divorce, il faut qu'il y ait eu préalablement un mariage, or ce n'est pas le cas.

De nombreux jeunes du quartier ont des parents qui ne sont pas de nationalité française et n'ont donc jamais voté. Il n'y a donc pas eu de transmission du rituel du vote au sein de la famille. L'un des jeunes qui a pu voter pour la première fois, il y a cinq ans, a indiqué regretter de ne pas avoir été accompagné à l'époque dans sa recherche d'informations, qu'on lui indique comment bien s'informer pour donner tout son sens au vote.

*

Rencontre au lycée Henri IV de Béziers (lycéens de terminale ayant réalisé une enquête sur la citoyenneté dans le cadre de l'option « droit et grands enjeux du monde contemporain »), Jean Fonteray, professeur et Jean-Philippe Papineau, proviseur

Participants : Stéphane Piednoir , Henri Cabanel , Guy Benarroche , Hussein Bourgi

À la demande de M. Cabanel, rapporteur, les élèves de terminale suivant l'option « droit et grands enjeux du monde contemporain » (DGEMC) du lycée Henri IV de Béziers ont réalisé un sondage auprès de leurs camarades de lycée sur la « culture citoyenne ». Cette enquête a été complétée par une consultation de 129 enseignants du secondaire, permettant un regard croisé sur certaines thématiques entre élèves et enseignants.

Jean Fonteray est revenu sur cette nouvelle option. Les enseignants doivent avoir une licence en droit ou un diplôme d'IEP. Il a mis en avant « le faible vivier d'enseignants potentiels ».

La note moyenne attribuée par les élèves au programme d'EMC est de 2,5 sur 5 ; les terminales sont les moins satisfaits. Ils demandent de vrais cours d'EMC, distincts de ceux d'histoire. En outre, 30 % des élèves souhaiteraient que ces cours préparent mieux à la vie active ou incluent des débats avec des intervenants extérieurs. Enfin, 80 % des élèves souhaitent davantage d'heures d'EMC, et deux tiers des élèves veulent que le coefficient de l'EMC soit augmenté dans la note du baccalauréat.

43 % des élèves se déclarent concernés personnellement par la politique et le vote - seulement 35 % des élèves en classe technologique, et 61 % déclarent avoir confiance dans les élus locaux. En revanche, seuls 11 % se sentent écoutés par les politiques qui sont « trop peu du côté des jeunes ». Ils déplorent notamment que la jeunesse soit trop absente des programmes. 15 % des élèves sont engagés ; parmi ceux qui ne le sont pas, un tiers évoque un manque de temps.

Les principales sources d'information pour les jeunes sont les réseaux sociaux (51,5 %) ainsi que la radio et la télévision (50 %).

Le SNU est très peu connu (seuls 14 % des jeunes en ont entendu parler).

L'enquête permet de mettre en lumière, à travers les regards croisés élèves/enseignants, une concordance dans la définition de la citoyenneté ainsi que des droits et devoirs qu'implique la citoyenneté. Enfin, 57 % des enseignants estiment que l'école ne forme pas suffisamment à la citoyenneté.

Lors de l'échange entre la délégation de la mission d'information, les élèves, leurs professeurs et le proviseur, de nombreux sujets ont été évoqués.

Les élèves ont notamment regretté un manque d'écoute de la part des élus, mettant en avant le fait que les revendications exprimées lors des manifestations n'étaient pas entendues, ou encore le référendum de 2005 qui a eu selon un jeune un effet négatif sur le vote. Dans l'imaginaire des élèves s'est transmise d'une génération à une autre l'image d'une classe politique qui ment.

Par ailleurs, de nombreux élèves ont mis en avant le manque d'informations, notamment lorsqu'il n'y a pas une tradition de vote dans le cercle familial. Pour l'un des élèves, l'une des raisons de l'abstention est due au manque d'informations relatives à l'inscription sur les listes électorales. Ils souhaiteraient par exemple que les élèves en soient informés lors de leur entrée en seconde.

Le proviseur est revenu sur l'évolution de l'EMC au lycée. Alors qu'il était inclus avant la réforme du baccalauréat dans le cours d'histoire et géographie, pouvant « étouffer l'EMC », cet enseignement dispose désormais d'un coefficient à part entière. Cela permet de désigner un enseignant en charge de l'EMC autre que celui d'histoire-géographie et de faire en sorte que l'EMC ne soit pas absorbé par l'histoire-géographie. Dans le même temps, cette heure d'EMC permet parfois de compléter un service hebdomadaire d'un enseignant à qui il « manque » des heures. En revanche, il n'est pas possible de regrouper les heures d'EMC en raison du statut des enseignants (avoir pendant un mois l'EMC délivré par un enseignant de philosophie, le mois suivant par un enseignant d'histoire-géographie... afin de prendre en compte les différentes facettes de l'EMC).

Le programme d'EMC a été qualifié, tant par les élèves que par le corps enseignant, de rébarbatif et d'abstrait, qui ne permet pas aux élèves de s'investir, d'éveiller leur curiosité.

En ce qui concerne le SNU, il y a cette année une incitation académique très forte. Actuellement vingt-quatre élèves du lycée se sont inscrits pour la session de juin. Chaque semaine, le rectorat communique la liste des lycées avec le nombre d'élèves s'étant inscrits au SNU.

Enfin, la journée de citoyenneté et de défense a été jugée décevante par plusieurs élèves, ne poussant pas à l'engagement. Sa qualité semble dépendre fortement des intervenants. Néanmoins, plusieurs élèves ont exprimé leur désir d'avoir un « temps de citoyenneté » plus long (deux à trois jours - voire deux mois l'été des 18 ans). De même, dans le concours de rédaction de proposition de loi, organisé chaque année par le professeur de DGEMC, on remarque qu'un texte porte sur le rétablissement du service militaire, ce qui témoigne d'un intérêt de certains jeunes pour cette problématique.


* 419 Au cours d'une table ronde associant des élus locaux, le 9 mars 2022, la mission d'information a entendu Fabian Jordan.

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