IV. VERS UN ENGAGEMENT RENOUVELÉ DE L' « ÉQUIPE FRANCE » DANS LE GOLFE DE GUINÉE

Le golfe de Guinée est une région dont la stabilité et le développement sont essentiels pour la stabilité et le développement de toute l'Afrique de l'Ouest. Les intérêts de la France y sont significatifs, davantage d'ailleurs sur les plans de la sécurité et de la stabilité que dans le domaine économique. Or cette région est prise en tenaille par deux menaces : les activités illicites qui se développement au large du golfe de Guinée - pillage des ressources halieutiques, piraterie et trafic de drogue- et la « poussée » djihadiste multiforme dans le Nord de la région.

Certes, les pays du golfe de Guinée semblent être moins fragiles que ceux du Sahel . Leur richesse est globalement supérieure, leur population plus importante et plus diverse du point de vue religieux. Pour autant, ils présentent des faiblesses importantes (inégalités très fortes et croissantes, système éducatif en difficulté, conflits sociaux non résolus, etc.) qui les rendent vulnérables au risque de déstabilisation .

Tel est le contexte dans lequel la France doit renouveler son approche du golfe de Guinée afin de contribuer à assurer sa stabilité dans la durée.

A. UNE POLITIQUE DE LA FRANCE EN AFRIQUE DE L'OUEST QUI A DÉJÀ BEAUCOUP ÉVOLUÉ, NOTAMMENT SUR LE PLAN DE LA COOPÉRATION MILITAIRE

Des indépendances jusque dans les années 90, la France a souvent apporté son appui aux différents régimes par le biais d'interventions militaires dans le cadre d'accords de défense et de coopération militaires. Ces accords comportent parfois des clauses secrètes d'assistance en cas de menace extérieure mais aussi intérieure. La France participait également de manière importante à la formation des forces de sécurité des États. Toutefois, progressivement, la fin de la Guerre froide et la volonté de mettre fin à la « Françafrique » ont conduit à abandonner le soutien inconditionnel aux régimes en place et à promouvoir une politique davantage soucieuse de démocratie et de droits de l'homme . Les accords de défense ont été renégociés, approuvés par le Parlement et rendus publics, sans clauses d'assistance en cas de troubles intérieurs. Mais les circonstances ont parfois rendu difficile de rester dans cette épure. L'exemple le plus frappant de cette difficulté est la guerre civile ivoirienne dans les années 2000, pendant laquelle l'action française fut très contestée .

Il convient par ailleurs de rappeler que la présence militaire française en Afrique de l'Ouest a déjà connu une très forte déflation depuis le milieu des années 90 . En 1996, les 1 500 hommes des Éléments français d'assistance opérationnels (EFAO), implantés en Centrafrique, ont été retirés, tandis que les garnisons présentes à Libreville, à Abidjan et à Dakar ont été réduites. La présence militaire française en Afrique, hors Tchad, est ainsi passée de 8 000 hommes en 1995 à 5 000 en 2001. En outre, en 2011, les Forces françaises du Cap Vert (1 200 hommes) ont été dissoutes et remplacées par les Éléments français du Sénégal (EFS), avec seulement 350 militaires formant un « Pôle opérationnel de coopération (POC) » devant venir en appui des armées des 15 pays membres de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO). En 2014, les Forces françaises du Gabon ont également été réduites de 900 à 350 hommes, devenant les éléments français du Gabon (EFG), Pôle opérationnel de coopération (POC) ayant pour domaine de compétence les pays de la Communauté économique des États de l'Afrique centrale (CEEAC). Toutefois, une base permanente en Côte d'Ivoire est maintenue au-delà de la fin de l'opération Licorne en 2015, avec environ 1000 d'hommes, formant une « Base opérationnelle avancée (BOA) » couvrant toute l'Afrique de l'Ouest .

Par ailleurs, la doctrine d'emploi des forces armée françaises a également évolué au cours des années 90 et 2000 . Après le concept de « renforcement des capacités africaines de maintien de la paix » (RECAMP) en coopération avec les Nations unies (ONU) et les « Forces africaines en attente » des organisations régionales (CEDEAO et CEEAC), la progression du djihadisme à partir de 2010 a imposé une évolution vers la lutte contre le terrorisme. Parallèlement, l'accent a été mis sur la formation menée par la direction de la coopération de sécurité et de défense (DCSD) du Quai d'Orsay, qui appuie le travail d'une quinzaine d'Écoles nationales à vocation régionale (ENVR). Le ministère des Armées a continué à organiser l'accueil des stagiaires africains dans les écoles militaires en France et des missions d'instruction opérationnelle et d'entraînement sont mises en oeuvre depuis les POC de Dakar et de Libreville.

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