B. UNE PERCEPTION PAR LES USAGERS EN DÉCALAGE AVEC CETTE AMÉLIORATION GÉNÉRALE

Alors que les améliorations informationnelles et procédurales apportées à Parcoursup sont largement reconnues, il est paradoxal de constater que l'appréciation portée par ses usagers se dégrade. L'enquête d'opinion annuelle, commandée par le ministère de l'enseignement supérieur depuis 2020 et réalisée par l'institut de sondages Ipsos, fait ainsi état, en 2022, d'une angoisse croissante et d'une érosion du sentiment de clarté, de fiabilité, de transparence, de justice, de rapidité. Nombre de témoignages de lycéens et de leurs familles, largement relayés dans les médias à chaque nouvelle session de la procédure, corroborent ce constat.

83%

des usagers trouvent Parcoursup « stressant »3(*).

Comme le précise toutefois le Comité éthique et scientifique de Parcoursup dans son dernier rapport au Parlement4(*), « il s'agit là de ressenti, infirmé par les faits quand ils sont quantifiables, comme pour la rapidité, mais qu'il convient d'analyser ». Si le comité reconnaît lui-même qu'il est aujourd'hui difficile de déterminer les causes exactes de cette appréciation dégradée, en particulier ce qui relève de la procédure elle-même (degré de transparence, de rapidité, d'équité), d'autres mécanismes psychologiques et sociaux (angoisse de l'avenir, poids du diplôme dans le devenir professionnel...), il est certain que Parcoursup n'a, pour l'instant, pas réussi à inspirer confiance à ses usagers.

À la suite des auditions qu'il a menées, le rapporteur identifie trois obstacles principaux à sa bonne acceptation :

· les lacunes et l'hétérogénéité de l'information délivrée : malgré l'augmentation des données disponibles sur la plate-forme, il manque encore des éléments importants pour éclairer le choix d'orientation des lycéens sur chaque formation, comme le taux de réussite des candidats qui y sont admis (que pourrait, par exemple, illustrer le taux des étudiants ayant par la suite accédé à un master) et les débouchés professionnels qu'elle offre. À cela s'ajoute une hétérogénéité de la qualité de l'information selon les formations. En dépit des instructions nationales données par le ministère, la présentation des formations est en effet loin d'être homogène, certaines réalisant plus d'efforts que d'autres pour rendre leurs informations réellement compréhensibles et exploitables par les candidats ;

· la longueur de la procédure : même si, en 2022, 88 % des néo-bacheliers admis ont reçu la proposition qu'ils ont finalement acceptée en moins d'un mois, plus de 17 000 (4 %) ont attendu deux mois la proposition qu'ils ont finalement approuvée. Et, comme le note le Comité éthique et scientifique de Parcoursup, cette attente est nettement supérieure pour les bacheliers technologiques et surtout professionnels, alors qu'ils ont souvent besoin de connaître plus tôt leur affectation pour des raisons financières. Ces délais génèrent une anxiété supplémentaire à celle déjà suscitée par le choix de son orientation dans l'enseignement supérieur ;

· le caractère encore trop opaque des modalités de classement utilisées par les commissions d'examen des voeux, qui sont à la discrétion de chaque formation et qui donnent lieu à des pratiques très diverses (emploi ou non d'une formule mathématique de pré-classement, prise en compte ou non du lycée d'origine...) : ce manque de transparence - notamment en comparaison de certaines pratiques étrangères5(*) -, couplée à une grande hétérogénéité des méthodes de classement, suscite toujours une forte suspicion et ne permet pas aux candidats de bien estimer leurs chances d'admission. Or sans confiance des jeunes et de leurs familles dans la façon dont les dossiers sont examinés et classés, le système ne peut susciter l'adhésion.


* 3 Résultat de l'enquête Ipsos 2022, « L'opinion des néo-bacheliers à l'égard de Parcoursup ».

* 4 Comité ethnique et scientifique de Parcoursup, 5ème rapport annuel au Parlement, février 2023.

* 5 En Allemagne, Finlande, Suède, Danemark, Norvège, la pondération des critères utilisés par les formations est généralement rendue publique et explicitée. Cette approche facilite l'acceptation des décisions d'affectation, en limitant les soupçons d'arbitraire.

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