II. UN SERVICE STRUCTURELLEMENT FRAGILISÉ PAR LES CHOIX BUDGÉTAIRES DE LA DÉCENNIE ÉCOULÉE ET LES TENSIONS AFFECTANT LE SECTEUR DE LA SANTÉ

A. UNE BAISSE IMPORTANTE DES MOYENS FINANCIERS ET HUMAINS DU SERVICE DE SANTÉ DES ARMÉES DANS LE CADRE DE LA PROGRAMMATION 2014-2019

1. Une baisse brutale des moyens financiers du SSA au début de la programmation 2014-2019

Dans le contexte général de déflation des ressources des armées prévu par la loi de programmation militaire (LPM) 2014-20194(*), le SSA a subi une perte importante de ses moyens.

Il a ainsi connu une diminution brutale de ses ressources budgétaires de près de 8 % dans les deux premiers exercices de cette programmation tandis que les crédits de la mission « Défense » stagnaient en valeur.

Ces crédits connaissent ensuite à partie de 2016 une légère progression, au même rythme que ceux de la mission dans son ensemble.

Évolution comparée des crédits de paiement du SSA
et de la mission « Défense » entre 2014 et 2018 (exécution)

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

2. Une baisse de 10 % des effectifs sur la même période

Sur l'ensemble de la programmation 2014-2019, le service a perdu environ 10 % de ses effectifs.

Ainsi, entre 2015 et 2018, les plafonds d'emplois autorisés en loi de finances initiale (LFI) au titre des personnels gérés par le SSA ont connu une diminution de 888 ETPT. Cette évolution traduit la rigueur de la politique de déflation imposée au SSA.

Dans ses réponses au questionnaire du rapporteur spécial, le ministère des armées a ainsi reconnu qu'au terme de la
programmation 2014-2019 « la structure des effectifs du SSA est devenue quantitativement insuffisante ».

Évolution des plafonds d'emplois de personnels gérés par le SSA
autorisés en LFI entre 2015 et 2018

(en ETPT)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

B. LES TENSIONS PERSISTANTES SUR LES RESSOURCES HUMAINES DANS LE SECTEUR DE LA SANTÉ SAPENT LES EFFORTS DE REMONTÉE EN PUISSANCE DU SSA

La déflation des moyens et des effectifs du SSA est intervenue au pire des moments. En effet, celle-ci a été opérée à l'orée d'une période de fortes tensions sur les ressources humaines et sur les compétences qui affecte l'ensemble du secteur de la santé et qui perdure à ce jour.

Cette conjoncture a pour effet de saper les efforts budgétaires de remontée en puissance du SSA pourtant entrepris depuis 2019.

Comme le montre en effet le graphique ci-dessous, la hausse significative des crédits prévus au titre du SSA sous la programmation 2019-20255(*) s'est accompagnée d'une stagnation des effectifs : elle a seulement permis de « stopper l'hémorragie ».

Évolution comparée des effectifs employés et des crédits prévus
en lois de finances au titre du SSA depuis 2019

(en millions d'euros et en ETP)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

La sous-exécution structurelle et massive des schémas d'emplois sur la période (- 169,2 ETPT en moyenne sur 2018-2022) atteste des difficultés à attirer et conserver les personnels en poste.

La déflation des effectifs de la dernière décennie semble de surcroît avoir été à l'origine d'un cercle vicieux : les tensions sur les effectifs contribuent à détériorer les conditions d'exercice des personnels, et donc pénaliser en retour l'attractivité du service sur le marché du travail.

Évolution du schéma d'emplois entre 2018 et 2022

(en ETPT)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

À l'instar de l'ensemble du milieu hospitalier, les tensions sont particulièrement prononcées s'agissant de certaines spécialités médicales (médecine générale, chirurgie, anesthésie-réanimation, médecine d'urgence, psychiatrie) et paramédicales (infirmiers de bloc opératoire, techniciens hospitaliers, manipulateurs en électroradiologie, orthoptistes).

Au total, les postes sur la composante médecine des forces sont pourvus à hauteur de 94 %. Ce taux relativement élevé ne doit cependant pas masquer de réelles difficultés s'agissant des praticiens, dont 100 étaient toujours manquants au 1er janvier 2023, soit 10 % des effectifs théoriques.

Comparaison entre les effectifs théoriques et réalisés
de la composante médecine des forces

(en nombre de personnels et en %)

     

Effectif théorique (REO) 2023

Effectif réalisé au 1er janvier 2023

Taux de réalisation

Personnels militaires

Officiers

Praticiens

1 029

929

90 %

Internes et assistants

0

6

-

Officiers MITHA

62

56

90 %

Officiers commissionnaires des armées

28

28

100 %

Officiers armée de Terre

4

3

75 %

Autres officiers

3

2

67 %

Total officiers

1 126

1 024

91 %

Sous-officiers

MITHA sous-officiers

1 238

1 287

104 %

Sous-officiers de l'armée de Terre

180

162

90 %

Autres sous-officiers

32

10

31 %

Total sous-officiers

1 450

1 459

101 %

Militaires du rang

Auxiliaires sanitaires armée de Terre

1 219

1 053

86 %

Autres auxiliaires sanitaires

218

218

100 %

Volontaires du SSA

0

0

-

Autres militaires du rang

45

113

251 %

Total militaires du rang

1 482

1 384

93 %

Personnels civils

Catégorie A

105

74

70 %

Catégorie B

107

82

77 %

Catégorie C

351

328

93 %

Ouvriers de l'État

19

21

111 %

Total personnels civils

582

505

87 %

TOTAL

4 640

4 372

94 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial


* 4 Loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale.

* 5 Loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense.

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