C. UN DISPOSITIF MOBILISANT DES MOYENS IMPORTANTS POUR UN NOMBRE RELATIVEMENT FAIBLE DE BÉNÉFICIAIRES...

Le fonctionnement du SMV nécessite la mobilisation de moyens conséquents au regard du nombre de volontaires, ce qui s'explique par le mode de fonctionnement du SMV : en plus d'être formés, les volontaires sont nourris, logés, blanchis et strictement encadrés pour la durée de leur contrat.

Le SMV est ainsi un dispositif qui a un coût budgétaire conséquent et qui nécessite de moyens aisément mobilisables pour la mise en place où l'extension d'un centre.

Des études menées sur le SMV suggèrent cependant que la dépense réalisée dans le cadre du SMV est efficace, tant au regard des objectifs directement poursuivis par le dispositif qu'au regard d'une vision plus large de ce que coûteraient les bénéficiaires du SMV à la société s'ils n'étaient pas passés par le SMV.

1. Le coût budgétaire du SMV

Le SMV a coûté 53 millions d'euros en 2022, dont 44 millions d'euros de crédits « nationaux ». Cela représente un coût d'environ 38 000 euros par volontaire.

a) Un coût de 53 millions d'euros en 2022

Le coût du SMV ne ressort pas clairement des documents budgétaires publiés annuellement, ses sources de financements étant éclatées entre plusieurs sources. Le SMV est ainsi financé par :

- les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », mission dans laquelle le SMV apparaît nommément en tant que politique publique ;

- les crédits de la mission « Défense », qui représentent la plus importante contribution au SMV ;

- un financement par des fonds de concours abondés par les régions Grand Est et Nouvelle-Aquitaine ;

- un financement direct par les régions Auvergne-Rhône-Alpes, Nouvelle-Aquitaine, Bretagne et Île-de-France ;

- la participation du fond social européen (FSE), qui se surajoute aux financements précédents.

Au total, le SMV a coûté 53 millions d'euros en 2022, dont 36 millions d'euros de dépenses de titre 2 (dépenses de personnel correspondant aux salaires des personnels du SMV, aux soldes des volontaires et aux pensions)18(*). 3,5 millions d'euros proviennent de financements régionaux : 2 millions d'euros en financement direct et 1,5 millions provenant de fonds de concours abondés par des régions. Cependant, ce coût ne comprend pas les dépenses liées au soutien infrastructure et santé, qui ne sont pas connues et qui sont comprises dans le budget des armées. La demande de travaux immobiliers hors Brest était estimée à 21 millions d'euros en 2023.

Une précision importante doit être apportée : sur les 13,5 millions d'euros hors titre 2 et hors financements régionaux engagés, 9,3 millions d'euros avaient vocation à être et ont depuis été couverts par les crédits du FSE, dont le versement n'a eu lieu qu'en fin d'année 2022.

Tableau récapitulatif du coût du SMV en 2022 (exécution en CP)

(en millions d'euros)

Budget général

T2 (hors cas pensions)

36

Crédits métier/UO SMV/Programme 169

4,76

Soutien courant (AGSC)

4,89

SCA (alimentation/habillement)

4,06

Total

49,71

Ressources extra budgétaires

Fonds de concours

 

Grand Est

1,47

Nouvelle-Aquitaine

0,48

Total FDC

1,47

Financement direct des régions (estimation)

 

Auvergne-Rhône-Alpes

0,67

Nouvelle-Aquitaine

0,35

Bretagne

0,39

Île-de-France 

0,66

Total financement direct des régions

2,07

Source : direction du service national et de la jeunesse, en réponse au questionnaire du rapporteur spécial

Ce coût, rapporté au nombre de bénéficiaire, est important. Il apparait cependant difficilement compressible, au regard de la nature des dépenses et des recettes qui s'attachent au SMV.

Les crédits du FSE répondent à la règle de l'additionnalité et ne seraient pas versés s'il apparaissait qu'ils étaient nécessaires au fonctionnement de base du dispositif. Ils ne peuvent donc être dépensés que sur des postes non-essentiels, et servent donc à couvrir ces derniers. Une compression de ces dépenses non-essentielles dans un but d'économies serait absurde puisqu'elles ne sont pas couvertes par des crédits budgétaires et n'entrainerait qu'une dégradation des conditions de vie des stagiaires sans qu'aucune économie budgétaire ne puisse en découler.

Les crédits régionaux servent à financer les formations professionnelles et les compléments de rémunération des volontaires stagiaires.

Sur les crédits restant, soit un peu plus de 40 millions d'euros, 36 millions relèvent du titre 2, et sont donc incompressibles à effectifs constant. Par ailleurs ces 36 millions d'euros servent également à payer la solde des volontaires stagiaires et experts.

Les crédits budgétaires couvrant le fonctionnement courant du SMV ne représentent donc qu'un peu plus de 4 millions d'euros, ce qui s'explique notamment par une mobilisation forte de moyens préexistants.

b) Un coût en augmentation du fait de l'intégration de financements européens

Le SMV est un dispositif dont le coût a significativement augmenté depuis 2020, passant de 43 millions d'euros à 53 millions d'euros.

Tableau récapitulatif de l'exécution 2020, 2021 et 2022 du SMV

(en millions d'euros)

Budget général (en CP)

2022

2021

2020

T2 (hors cas pension)

36

36

36

Crédits métier/UO SMV/Programme 169

4,76

3

2.8

Soutien courant (AGSC)

4,89

2.8

0

SCA (alimentation/habillement)

4,06

2.87

0

Sous-total

49,71

44.67

38.8

Ressources extra budgétaires

   

Fonds de concours

     

Grand Est

0.99

2

2

Nouvelle-Aquitaine

0,48

0.8

0.8

Sous-total

1,47

2.8

2.8

Financement direct des régions (estimation)

     

Auvergne-Rhône-Alpes

0,67

0.54

0.48

Nouvelle-Aquitaine

0,35

0.45

0.45

Bretagne

0,39

0.42

0.26

Île-de-France 

0,66

0.98

0.17

Sous-total

2,07

2.39

1.36

TOTAL GENERAL

53.25

49.86

42.96

Source : direction du service national et de la jeunesse

Cette augmentation correspond cependant à l'apparition et à la monté en puissance des financements européens sur la même période :

Crédits consommés de l'opération budgétaire « FSE »
de l'opération stratégique SMV

(en crédits de paiement, en millions d'euros)

 

2020

2021

2022

Crédits consommés de l'OB FSE

N/A19(*)

5,17

9,28

Source : commission des finances du Sénat, d'après les rapports annuels de performance 2020, 2021 et 2022

Aussi, une fois cette hausse neutralisée, les crédits du SMV évoluent de 42,96 millions d'euros en 2020 à 43,97 millions d'euros en 2022 (+ 2,3 %). Sur la même période, le nombre de volontaires a varié entre 933 et 122920(*), avec un objectif de 1205 recrutements en 202221(*).

Le fonds de concours dédié aux subventions européennes (FSE) devrait bénéficier d'un montant de 15 millions d'euros en 2024.

c) Un coût par volontaire élevé

Le coût du dispositif en 2022, rapporté au nombre de volontaires total22(*) s'élève ainsi à 37 860 euros par bénéficiaire au regard de l'effectif théorique et 44 170 euros par bénéficiaire au regard de l'effectif effectivement recruté en 202223(*).

Pour les seuls crédits « nationaux » (hors crédits européens), le coût par bénéficiaire en 2022 est de 31 430 euros par bénéficiaire au regard de l'effectif théorique et de 36 700 euros par bénéficiaire au regard de l'effectif réel24(*).

Cela représente un coût très important qui s'explique par plusieurs facteurs : formation de plusieurs mois en régime d'internat, taux d'encadrement très importants, fourniture par le SMV d'effets militaires, etc...

Ces mêmes facteurs ont pour conséquence que ces dépenses soient difficilement compressibles. À titre de comparaison, le service militaire adapté25(*), qui accueille 6 000 jeunes par an, coûte 36 000 euros par jeune.

La principale source d'« économies » envisageable semble être une réduction du coût par bénéficiaire grâce à des économies d'échelle qui pourraient être permise par une mise en commun de services supports si de nouvelles antennes devaient être ouvertes. Cependant, comme l'indique l'exemple du SMA, la diminution du coût par participant resterait très limitée et ne se ferait qu'au prix d'une augmentation globale de la dépense du SMV.

Il est regrettable que les objectifs de recrutement ne soient pas atteints.

2. Les moyens matériels du SMV : une mise à contribution forte de l'existant qui atteint ses limites

L'ouverture des régiments et centres de SMV s'est jusqu'à présent basé sur des infrastructures militaires déjà existantes. À titre d'exemple, le Centre SMV d'Ambérieu-en-Bugey a été ouvert sur cette base de l'armée de l'air et y occupe deux bâtiments. De la même manière, l'antenne de Marseille a pu être ouverte aussi rapidement grâce à la mobilisation de bâtiments appartenant à l'armée à Marseille.

Cependant, cette méthode, qui a la qualité de limiter très significativement les coûts et délais d'ouverture des centres de SMV, atteint ses limites avec les annonces de montée en charge du dispositif que représentent les cibles de 1 300 et 1 500 volontaires stagiaires par an.

À titre d'exemple, le centre d'Ambérieu-en-Bugey et son antenne marseillaise ont dû lancer des travaux immobiliers, respectivement pour permettre d'accueillir un nombre plus important de volontaires et pour ne pas obérer les capacités opérationnelle des armées.

En plus des besoins immobiliers, comme cela a déjà été indiqué, le SMV fait face à un certain nombre de dépenses inévitables (remise d'effets militaires aux volontaires, nourriture, etc...)

Certaines dépenses sont mécaniques et directement proportionnelles au nombre de volontaires accueillis dans l'année. Elles ont donc vocation à augmenter si le nombre de volontaires devait lui-même croitre.

3. Les moyens humains du SMV : la mobilisation de militaires expérimentés soutenus par quelques civils et les volontaires experts

Le SMV mobilise 357 militaires et 10 civils, auxquels doivent être ajouté les volontaires experts formés26(*). Il s'agit cependant d'un objectif théorique et les effectifs réels sont en-deçà.

Cette sous-occupation des effectifs n'est pas une difficulté spécifique au SMV : les armées, de manière générale, souffrent de difficultés pour recruter et fidéliser des militaires. En conséquence, certains postes ne peuvent pas être pourvus.

Si la situation n'est pas spécifique au SMV, celui-ci en souffre de manière plus importante que la moyenne car il s'agit d'un dispositif sans utilité opérationnelle et est logiquement considéré comme non prioritaire dans l'affection des effectifs, et, hors personnels civils, il n'y a pas de recrutement spécifique d'encadrants SMV de la part des armées. De plus, le SMV disposant d'effectifs au global très modestes, les absences se font rapidement ressentir.

À titre d'exemple, le SMV d'Ambérieu-en-Bugey disposait de 80 % de son effectif théorique fin 2022 et devrait disposer de 90 % de son effectif théorique fin 2023.

Les encadrants du SMV en contact direct avec les volontaires sont tous des militaires sélectionnés sur la base d'une expérience opérationnelle riche, avant de suivre un parcours de formation spécifique.

Ce parcours de formation prévoit une présentation de l'unité d'accueil. En outre un marché public de formation notifié en 2020 propose des modules adaptés, délivrés au profit des encadrants, axés sur les techniques de recrutement, de préparation et d'accompagnement d'un public de jeunes adultes en difficulté d'apprentissage, peu ou pas diplômé et éloigné de l'emploi.

Le personnel mobilisé par le SMV correspond donc plutôt à des militaires expérimentés revenant d'opération et en fin de carrière. Le SMV peut représenter pour eux une forme de transition vers le civil grâce à son intégration dans le tissu économique local.

La question d'un plus grand recours aux personnels civils pour les postes de soutien mérite d'être posée dans la mesure où ces derniers sont plus faciles à recruter et à retenir à moyen terme. Cependant, la militarité du dispositif représentant le coeur de sa spécificité, un recours à des personnels civils pour les postes d'encadrement en contact avec les volontaires doit être écarté car il dénaturerait le dispositif.

Enfin les volontaires experts sont dans une situation hybride : s'ils sont bénéficiaires du dispositif le temps de leur formation, ils participent à son fonctionnement une fois formé et sur le reste de la durée de leur contrat.

4. Des crédits européens importants mais aux conditions d'engagement strictes

Depuis 2021, le SMV bénéficie d'un financement européen grâce au FSE. Ce financement a deux caractéristiques : premièrement, il est massif au regard du coût budgétaire du SMV. Deuxièmement, il obéit à des principes auxquels son versement est conditionné et dont le respect est strictement contrôlé.

S'agissant des montants, comme indiqué précédemment, ils se sont élevés en exécution (CP) à 5,17 millions d'euros en 2021 et 9,28 millions d'euros en 2022.

L'exécution ne correspond pas nécessairement aux rattachements du fonds de Concours au bénéfice du SMV qui se sont eux élevés à 6,9 millions d'euros en 2021 et 17,32 millions d'euros en 2022. Ce fonds de concours devrait s'élever à 27,5 millions d'euros en 2023.

La convention passée par le SMV avec le FSE sur la période 2022-2024 prévoit un financement évalué à 40 millions d'euros sur la période.

Ces crédits obéissent à deux principes : il s'agit de remboursements et ils doivent respecter la règle de l'additionnalité.

S'agissant de crédits remboursés, les crédits éligibles au FSE sont préfinancés par le programme 178 « Préparation et emploi des forces », qui relève de la mission « Défense », que le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation », qui relève de la mission « Anciens Combattants », rembourse par facturation interne.

Le principe de l'additionnalité27(*) a pour conséquence que les fonds européens ne peuvent pas être utilisés pour financer des dépenses qui seraient nécessaires au fonctionnement du SMV. Ils ne peuvent financer que des dépenses dont l'objet est d'améliorer la qualité du dispositif au-delà de ce qui est nécessaire à son strict fonctionnement.

À titre d'exemple, ces fonds ont pu être utilisés pour améliorer les repas proposés aux volontaires, engager un psychologue ou acquérir des simulateurs de conduite.

Le respect du principe d'additionnalité est très strictement contrôlé par les autorités européennes. Les services du SMV font ainsi état d'un surcoût RH pour la seule gestion des financements européens.


* 18 Le coût de T2 hors pension s'élève à 20 millions d'euros, ce qui donnerait un coût total du dispositif de 37 millions d'euros.

* 19 L'OB FSE n'existe pas en 2020.

* 20 933 volontaires stagiaires recrutés en 2020, 1 229 en 2021 et 997 en 2022.

* 21 Seuls 997 volontaires stagiaires ont été recrutés en 2022.

* 22 997 volontaires stagiaires recrutés pour une cible de 1205 recrutements et 199 volontaires experts.

* 23 Les effectifs correspondent aux volontaires stagiaires et experts.

* 24 Idem.

* 25 Le service militaire adapté est un dispositif équivalent au SMV existant en outre-mer. Le SMV a été conçu comme la transposition du SMA en métropole.

* 26 L'objectif de recrutement est de 200 volontaires experts en 2023.

* 27 Règlement (UE) n ° 1304/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 relatif au Fonds social européen et abrogeant le règlement (CE) n ° 1081/2006 du Conseil défini ainsi le principe d'additionnalité : « les fonds du FSE ne peuvent se substituer aux dépenses nationales d'un pays de l'Union ».

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