IV. SÉANCE DU MERCREDI 29 JANVIER 1997

Sous la présidence de M. Jean-Pierre Fourcade, président , la commission a procédé à l'examen du rapport d'information présenté par M. Claude Huriet au nom de la mission d'information sur les conditions du renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité des produits thérapeutiques en France.

M. Jean-Pierre Fourcade, président
, a rappelé que la mission a été créée le 21 mai 1996 et que ses membres ont été désignés le 5 juin 1996. Elle avait d'abord effectué un déplacement aux Etats-Unis du 13 au 21 septembre 1996 dont un compte rendu a été débattu le 20 novembre en commission des qffaires sociales. Il a indiqué que, depuis le 22 octobre, les membres de la mission d'information avaient ensuite procédé à quarante et une auditions.

M. Claude Huriet, rapporteur, a d'abord dressé un bilan de l'application des procédures tendant à garantir la sécurité sanitaire des produits et à assurer la veille sanitaire. Il a souhaité à cette occasion que l'intitulé de la mission soit élargi à la sécurité sanitaire de l'ensemble des produits destinés à l'homme, estimant que l'opinion ne comprendrait pas que le Sénat restreigne le champ de son étude à la sécurité des seuls produits thérapeutiques.

Il a indiqué que, si la sécurité sanitaire du médicament à usage humain était garantie, les réformes entreprises depuis le début des années 1990 pour le sang et les greffes n'étaient pas achevées. En effet, elles ne mettent pas en oeuvre une séparation suffisante entre les contrôleurs et les gestionnaires.

Evoquant la réglementation d'origine communautaire concernant les dispositifs médicaux, il a démontré qu'elle n'était pas assez stricte et que la procédure du marquage CE ne pouvait garantir la sécurité sanitaire, notamment parce qu'elle ne requérait pas une véritable évaluation du rapport bénéfice-risque des dispositifs.

Après avoir rappelé que la réglementation et les contrôles étaient insuffisants pour de nombreux autres biens de santé, il a estimé que les conditions de la sécurité sanitaire des produits alimentaires n'étaient pas réunies.

Enfin, il a constaté que malgré le progrès constitué par la création du réseau national de santé publique en 1992, la veille sanitaire, dotée de moyens insuffisants, n'était pas assez coordonnée ni performante.

Dans la seconde partie de son rapport, M. Claude Huriet, rapporteur , a formulé plusieurs propositions.

Il a d'abord rappelé que l'Etat devait être en mesure d'assumer trois missions, l'évaluation des actes thérapeutiques, le contrôle des produits et la veille sanitaire et qu'il devait aussi pouvoir les coordonner. Il a centré ses propositions sur les deux dernières missions, la première devant être assurée par la récente création de l'agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé.

Afin de garantir le contrôle des produits, qui constitue une mission dont l'unicité ne saurait être contestée, il a proposé la création de deux institutions, une agence chargée du contrôle des produits et dispositifs médicaux et une agence de la sécurité sanitaire des produits alimentaires. Il a en effet estimé que la diversité des acteurs, le stade d'élaboration des législations concernées et la nécessité d'une réflexion commune à plusieurs départements ministériels plaçaient les réponses aux problèmes posés par ces deux catégories de produits sur deux rythmes différents.

M. Claude Huriet, rapporteur, a aussi proposé la constitution d'un institut de la veille sanitaire qui deviendrait une tête de réseau un peu à l'image de ce qui existe aux Etats-Unis avec les Centers for Disease Control. Il a souhaité que la coordination des trois missions d'évaluation des actes thérapeutiques, de contrôle des produits et de veille sanitaire soit favorisée par un comité national permanent de sécurité sanitaire placé auprès du Premier ministre et présidé par le ministre chargé de la santé.

Il a souhaité que les missions du ministère de la santé soient recentrées autour de la définition de la politique de santé et de la préparation de la réglementation.

M. Claude Huriet, rapporteur , a enfin jugé utile de renforcer la rigueur de la réglementation concernant certains produits. Il a indiqué que la mise en oeuvre de ces propositions exigeait l'adoption d'une loi définissant les conditions du renforcement de la sécurité sanitaire en France, dont l'initiative du dépôt devrait être prise rapidement.

M. Jean-Pierre Fourcade, président , a également considéré que l'adoption du rapport de la mission d'information ne constituait que la première étape d'un travail qui devait déboucher sur une initiative législative.

M. Bernard Seillier a fait part de sa satisfaction devant la mise en forme réalisée par le rapporteur des principaux enseignements tirés des travaux de la mission. Il s'est déclaré très favorable à l'idée de ne pas évoquer la " sécurité alimentaire " mais plutôt la " sécurité sanitaire des produits alimentaires ". Il a estimé que, compte tenu des probables divergences entre les départements ministériels concernés par les questions de sécurité sanitaire, le Parlement était le mieux placé pour prendre une initiative.

M. Louis Souvet a fait part de sa satisfaction devant le contenu du rapport. Il a cependant souligné que, si la sécurité sanitaire des produits sanguins pouvait exiger une sélection accrue des donneurs, il fallait aussi tenir compte de la pénurie de dons. Il a indiqué que le ministre chargé de l'agriculture et de l'alimentation s'était déclaré hostile à la création de structures nouvelles en matière de sécurité sanitaire.

Mme Marie-Madeleine Dieulangard a d'abord regretté qu'au cours de la dernière période des travaux de la mission d'information, la densité des travaux du Sénat avait souvent contraint les membres de la mission à effectuer des choix difficiles. Elle s'est interrogée sur la crédibilité des travaux de la commission s'ils prétendaient traiter le sujet de la sécurité sanitaire de l'ensemble des produits destinés à l'homme. Elle s'est déclarée favorable à la rupture du lien financier entre les laboratoires pharmaceutiques et les agences, ainsi qu'à l'évaluation des actes en médecine de ville. Souhaitant que le ministre de la santé prenne sa place dans le schéma proposé par le rapporteur, elle s'est demandé si ses propositions ne conduiraient pas à la création d'une " usine à gaz ".

M. Guy Fischer a estimé que la garantie de la sécurité sanitaire passait par l'attribution de moyens financiers supplémentaires aux institutions en charge de cette fonction. Il a fait siens les propos de Mme Marie-Madeleine Dieulangard sur la nécessaire rupture des liens entre les industries et les autorités chargées du contrôle des produits.

M. René Marquès, prenant l'exemple des pesticides, des fongicides et de la brucellose, a estimé que les intérêts de la santé publique étaient souvent -et non parfois comme l'indiquait le rapporteur- contradictoires avec ceux des producteurs du secteur alimentaire.

M. Charles Descours, président de la mission d'information, a estimé qu'il ne fallait pas trop agiter le " chiffon rouge ".

M. Jean-Pierre Fourcade, président , a estimé que la proposition de recentrage de l'action du ministère de la santé autour des fonctions de définition de la politique de santé et d'élaboration de la réglementation était très pertinente. Il a estimé que cette proposition devait être présentée dans le rapport avant celle tendant à instituer un comité national permanent de sécurité sanitaire. Evoquant ce dernier, il a estimé qu'il devait être présidé par le Premier ministre, le ministre de la santé étant vice-président.

M. Charles Descours, président de la mission d'information, indiquant qu'il était à l'origine de la proposition de création de ce comité, a fait siens les propos de M. Jean-Pierre Fourcade, président. Il a indiqué que la présidence du Premier ministre contribuerait à faire de la santé publique une priorité de l'action gouvernementale.

M. Claude Huriet, rapporteur , a remercié M. Charles Descours, président de la mission d'information, pour le climat de confiance qui avait régné tout au long des travaux de la mission.

Il a indiqué à M. Louis Souvet que la nécessaire sélection des donneurs pouvait être compatible avec la suffisance de l'approvisionnement en produits sanguins si une politique active de promotion du don était mise en place. Il a expliqué la réaction du ministère de l'agriculture concernant la création de nouvelles agences par la proposition de création d'une agence unique faite à l'Assemblée nationale par M. Jean-François Mattéi, député.

Répondant à Mme Marie-Madeleine Dieulangard , il a rappelé que la durée des travaux d'une mission d'information étant limitée, il n'avait pas été possible de décaler complètement ces derniers par rapport au travail législatif. Il a expliqué l'élargissement de l'intitulé de la mission par l'attente de l'opinion et par le champ effectif de ses investigations et a estimé que le rapport, en s'intéressant à la veille sanitaire, avait une approche globale de l'ensemble des produits destinés à l'homme.

Il a rappelé que parmi les missions de l'agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé figurait celle des actes réalisés en médecine de ville et que le ministre de la santé demeurait responsable de la politique dans ce domaine.

Il a indiqué à M. Guy Fischer que le rapport ne proposait pas la création d'une structure véritablement nouvelle mais dans une large mesure le regroupement de moyens existants. La mise en oeuvre de ces propositions ne devrait donc pas entraîner un surcoût important.

Répondant à la question commune de Mme Marie-Madeleine Dieulangard et de M. Guy Fischer, M. Claude Huriet, rapporteur, a rappelé que le texte du projet de loi initial tendant à créer l'Agence du médicament opérait une confusion entre les missions de sécurité sanitaire et économique et que cette option n'avait pas été retenue par le Sénat.

Il a en outre précisé que l'Agence du médicament ne recevait pas de subventions de l'industrie du médicament mais qu'elle percevait les taxes et des redevances.

M. Claude Huriet, rapporteur , a remercié M. René Marquès pour ses propos.

M. Jean-Pierre Fourcade, président , a annoncé qu'une question orale avec débat sur les questions de sécurité sanitaire serait prochainement posée au Gouvernement, à qui il appartiendra d'y répondre le 18 février prochain.

La commission a adopté le rapport d'information de M. Claude Huriet, rapporteur , au nom de la mission d'information sur les conditions du renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme, en France .

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