II. DES COLLECTIVITÉS PUBLIQUES PLUS EFFICACES

A. UN ATOUT À MIEUX EXPLOITER POUR LA MODERNISATION DE L'ÉTAT

Les nouvelles technologies ne peuvent que jouer un rôle primordial pour les changements nécessaires au sein de l'Etat.

Les technologies de l'information peuvent renforcer la proximité entre l'administration et le citoyen -notamment pour une facilité accrue des démarches administratives-, augmenter la productivité des services et améliorer leur coordination.

M. Richard Bion, chargé de mission pour les nouvelles technologies et les systèmes d'information au Commissariat à la réforme de l'État, a d'ailleurs conforté votre mission d'information dans cette opinion qui avait déjà été largement exprimée par le Sénat lors des débats sur la loi correspondante présentée dans la session 1996-1997.

1. Une intégration progressive des nouvelles technologies par les services de l'État

a) Les étapes de l'informatisation des services de l'État

Depuis le " plan calcul " lancé en 1966, l'administration de l'État a progressivement pris conscience de l'enjeu que représentent les technologies de l'information et de la nécessité pour l'État de les intégrer.

Les étapes de cette prise de conscience sont résumées dans l'encadré suivant :

UNE INTÉGRATION PROGRESSIVE DE LA PART DE L'ÉTAT

1966-1984 : " Plan calcul " : Le Gouvernement impose la création de " commissions de l'informatique " dans chaque ministère.

Décret du 18 juin 1984 : Des " commissions de l'informatique et de la bureautique " sont mises en place dans chaque ministère, ainsi que des schémas directeurs et des conventions de développement permettant le suivi des choix effectués.

Le comité interministériel de l'informatique et de la bureautique dans l'administration (CIIBA) est créé.

Décret du 24 décembre 1986 : Obligation pour chaque ministre, responsable de son informatique, de réaliser un schéma directeur, dont la mise en place est supervisée par le CIIBA.

1992 : Rapport Fontaine évaluant l'informatique de l'État.

1994 : Circulaire du 31 janvier 1994 relative à l'établissement d'un cadre coordonné de gestion de l'informatique dans l'administration, qui précise les dispositions relatives aux schémas directeurs des ministères.

Décret du 13 septembre 1995 : Création du comité interministériel pour la réforme de l'État, chargé d'animer et de coordonner les actions des administrations en matière de systèmes d'information. Création du Commissariat à la réforme de l'État, chargé de veiller à la prise en compte par les administrations des conséquences des nouvelles technologies de l'information sur leur fonctionnement et leur organisation.

1996 : circulaire du 15 mai 1996 sur les sites Internet des ministères et arrêté du 18 mai 1997 portant modèle-type de traitement d'informations nominatives mis en oeuvre dans le cadre d'un site Internet ministériel.

1996 : Circulaire du 16 septembre 1996 qui prévoit la mise à jour des schémas directeurs des ministères.

b) Un effort à poursuivre

Conséquence de ces évolutions, il existe aujourd'hui dans l'administration de l'État (hors Défense), d'après le Commissariat à la réforme de l'État, un ratio moyen d'un micro-ordinateur pour deux agents . Ce chiffre varie cependant de 1 à 5, suivant les administrations.

Le budget informatique de l'État s'élève à 5 milliards de francs par an et nécessite la conclusion de 1.000 marchés (dont 60 % pour le matériel et 40 % pour des études et prestations de service). L'administration dispose de 13.700 informaticiens. Le nombre des utilisateurs est évalué à 600.000 , pour plus de 250.000 micro-ordinateurs.

On peut craindre que dans leur immense majorité des ordinateurs servent comme machine à écrire à traitement des textes mais non comme terminaux de réseaux intranet.

L'informatisation a été plaquée sur les structures administratives existantes . Elle n'a pas entraîné de changement organisationnel majeur. Aucune remise en cause les hiérarchies administratives. Elle n'a pas non plus et sans doute fort peu de travail interservice. Il serait bon de connaître le nombre de messages en e-mail qui circulent chaque jour entre ces 600.000 utilisateurs potentiels. Un tiers des micro-ordinateurs de l'administration ne fonctionne pas en réseau. Les systèmes des différentes administrations restent cloisonnés. D'après le Commissariat à la réforme de l'État, les " gisements d'information " de l'administration ne sont pas non plus exploités comme l'avènement des nouvelles technologies le permettrait.

D'après M. Richard Bion, entendu par votre mission d'information, une meilleure utilisation des systèmes d'information, par la mise en place de réseaux interministériels d'information notamment, permettrait d'améliorer la décision publique, d'en réduire les délais, de faire mieux communiquer les administrations, centrales ou déconcentrées.

D'ailleurs, notre collègue député M. Patrice Martin-Lalande, dans son rapport au Premier Ministre intitulé " L'Internet : un vrai défi pour la France " 16( * ) fait un constat similaire lorsqu'il affirme que pour l'administration, les technologies de l'information " ne doivent pas être une simple mesure d'accompagnement mais le pivot de la modernisation de l'État. (...) L'État doit mettre en réseau l'administration, c'est-à-dire passer d'une informatique de gestion à une informatique de communication ".

Dans une publication excellente, l'actuel conseiller technique du Premier ministre pour les technologies et la société de l'information plaidait " pour un Etat en réseau " 17( * ) dont nous sommes fort loin.

Le rapport précité formule les propositions suivantes pour améliorer l'utilisation par l'administration des nouvelles technologies :

L'ADMINISTRATION ET LES NOUVELLES TECHNOLOGIES :
PROPOSITIONS DU RAPPORT
" L'INTERNET : UN VRAI DÉFI POUR LA FRANCE "

Mobiliser les grandes écoles d'administration afin qu'elles intègrent l'utilisation des nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) dans leur programme de formation.

Il est indispensable d'identifier au sein de chaque administration les personnes compétentes dans l'utilisation des NTIC pour leur confier par exemple une mission de formation.

Il est urgent d'intégrer le multimédia dans les actions de formation professionnelle et de prévoir un plan d'action à court terme pour que chaque agent en bénéficie.

Les concours administratifs doivent être réorientés afin de tenir compte des NTIC dans le fonctionnement de l'administration.

L'État veillera à ce que tous les candidats puissent s'entraîner aux techniques multimédia dans la préparation de leur concours.

Fournir à chaque agent public une adresse électronique d'ici l'an 2000.

Mettre en réseau l'administration

La mise en réseau de l'Administration doit s'effectuer de façon pragmatique, en s'appuyant notamment sur la compétence de ses ingénieurs mais sans vouloir tout normaliser.

L'État doit constituer un réseau Intranet et peut être des réseaux extranets (réseaux internes à une organisation ou à un ensemble d'organisations avec des accès identifiés ou sécurisés) permettant aux agents publics de s'échanger des informations.

Les applications sont innombrables :

- Une meilleure gestion du personnel grâce à un échange d'informations en temps réel des offres d'emploi et des compétences disponibles.

- Une meilleure gestion des risques en globalisant les moyens et en individualisant les réponses. Des centres de traitement spécialisés pourraient par exemple exercer un contrôle de légalité plus efficace par télétravail.

- Un traitement statistique en temps réel du territoire national (les administrations travaillent aujourd'hui sur un recensement qui date de 1990).

On pourrait penser à des objectifs plus contraignants et plus drastiques. Pourquoi ne pas

· imposer dès 1998 à tous les fonctionnaires des catégories A et B de se doter d'une adresse électronique et d'utiliser comme véhicule interne à l'administration la messagerie électronique.

· dans les examens de recrutement dès 1998 pour les catégories A et B, considérer que sont éliminatoires de mauvais résultats en matière de messagerie électronique, recherche de documentation sur Internet, création et pratique de travail coopératif sur listes.

· diminuer les crédits de tout ministère dont le système Intranet ne présenterait pas x  % de travail coopératif interne (x étant augmenté chaque année)
Mais au-delà du fonctionnement interne de l'administration, les nouvelles technologies doivent bouleverser les relations entre l'État et le citoyen.

2. La démocratie en ligne : un défi à relever

Des impulsions, venues du plus haut sommet de l'État, ont affirmé la nécessité de rendre l'Administration plus proche et plus accessible pour le citoyen.

a) Un État plus proche et plus ouvert ?

La création d'un site web par ministère est certes utile (cf. infra). Mais c'est d'autant plus insuffisant que l'interactivité entre ces sites et l'extérieur est souvent nulle.

Les nouvelles technologies doivent être pour l'État le moyen d'être plus accessible pour les citoyens. Pour réformer notre État, la simplification des procédures administratives ne suffit pas. Il faut changer plus profondément l'accès au service public . Les technologies de l'information permettent cette révolution. L'État au service du citoyen, c'est abolir les contraintes des déplacements, de l'attente, de la fermeture en dehors des heures de bureau. C'est possible donc urgent.

Le développement des " téléprocédures " doit bien sûr concerner les entreprises, pour lesquelles elles représentent la perspective de gains substantiels de productivité. M. Patrice Martin-Lalande dans son rapport précité, chiffre à 500 millions de francs l'allégement de charges que représenterait pour les entreprises la dématérialisation des déclarations mensuelles de cotisations sociales (URSSAF, ASSEDIC, Caisses de retraites...) et de taxe sur la valeur ajoutée, c'est-à-dire le fait pour les entreprises d'envoyer leurs déclarations sociales, fiscales et douanières via l'Internet.

Mais les citoyens doivent eux aussi bénéficier du développement des téléprocédures dans leurs relations avec l'Administration. La mise en ligne des formulaires administratifs serait une voie d'amélioration possible, tout comme la possibilité d'effectuer les déclarations fiscales par Internet.

La circulaire du Premier ministre du 15 mai 1996 relative à la communication, à l'information et à la documentation des services de l'État sur les nouveaux réseaux de télécommunication est une étape importante dans la prise de conscience par l'État du rôle moteur que peuvent jouer, pour sa modernisation, les nouvelles technologies.

Cette circulaire affirme que " L'État doit prendre part au développement d'Internet en créant des produits d'information, de documentation et de communication accessibles par ce réseau. A cette fin, le Gouvernement a décidé que chaque ministère serait doté, d'ici au 31 décembre 1997, d'un tel ensemble de produits et que les crédits du fonds interministériel de modernisation pourraient être mobilisés à cet effet ".

Cette circulaire, adressée aux ministres et secrétaires d'État, a entraîné la création de sites Web par les différents ministères, dont l'adresse se termine par la racine commune " gouv. fr ". Dans la plupart des pays industrialisés, aux États-Unis bien sûr, mais aussi chez nos partenaires européens et dans les pays d'Europe centrale et orientale, l'Internet est déjà utilisé par les administrations comme moyen de diffusion de l'information. Il importait donc que le Gouvernement français offrit aux citoyens français mais aussi aux utilisateurs étrangers d'Internet un accès similaire aux informations publiques.

A titre d'exemple, citons le serveur ministériel relatif aux Télécommunications (www.telecom.gouv.fr) et celui du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie (www. finances. gouv. fr), qui sont particulièrement riches d'informations. Bien d'autres ministères ont mis leurs sites au point : culture, fonction publique, jeunesse et sports, agriculture, aménagement du territoire et environnement, éducation nationale, équipement, affaires étrangères, outre mer... Une liste de ces sites est disponible sur le serveur " Admifrance " : www.admifrance.gouv.fr.

Mais un site doit être fortement interactif et la structure des services de chaque ministère doit permettre de répondre sinon en temps réel du moins dans un délai bref (un jour ?) aux questions posées. Toute une révolution mentale! En outre à l'heure actuelle l'État n'offre pas gratuitement aux citoyens un accès aux contenus d'information . Est-il logique de créer des sites gouvernementaux en leur déniant le droit de diffuser la loi de la République ?

Le régime actuel de diffusion des données publiques n'est pas admissible

La diffusion du " service public des bases de données juridiques ", qui comprend tous les textes officiels de la République française cités dans l'encadré ci-dessous, a été organisée par les décrets n° 84-940 du 24 octobre 1984 et n° 96-481 du 31 mai 1996. Ce dernier décret fait actuellement l'objet d'un recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d'État, déposé par l'ordre des avocats, tendant à son annulation, qui est actuellement en cours d'instruction 18( * ) .

TEXTES INCLUS DANS LE SERVICE PUBLIC

DES BASES DE DONNÉES JURIDIQUES

- traités et accords internationaux publiés ;

- lois et règlements ;

- documents publiés au Journal officiel des Communautés européennes ;

- instructions et circulaires publiées ;

- conventions collectives nationales ayant fait l'objet d'un arrêté d'extension ;

- décisions du Conseil constitutionnel, du Conseil d'État et du tribunal des conflits ;

- arrêts de la Cour de cassation et de la Cour des comptes ;

- jugements des cours administratives d'appel et des tribunaux administratifs ;

- décisions des cours et tribunaux judiciaires ;

- décisions des chambres régionales des comptes ;

- arrêts de la Cour de justice et du tribunal de première instance des Communautés européennes ;

- arrêts de la cour et des décisions de la Commission européenne des droits de l'homme ;

- actes publiés des autorités administratives indépendantes (CSA, COB, CNIL, ART...) ;

- autres documents officiels de caractère juridique dont les catégories sont fixées par arrêté conjoint du Premier ministre et du ou des ministres intéressés.

Le régime juridique de la diffusion de ces données est le suivant :

- la diffusion par voie ou support électronique de ces bases de données fait l'objet d'une concession ;

- la diffusion externe ne peut être réalisée que par le titulaire de cette concession, qui dispose donc du monopole de diffusion des textes officiels ;

- deux exceptions - théoriques pour l'instant- existent à ce monopole : soit, par dérogation, quand le premier ministre autorise la diffusion externe par un tiers si le concessionnaire n'est pas à même de l'assurer, soit, par le biais de " licences ", payantes, quand le concessionnaire cède les données numérisées qu'il détient.

Les services de l'État, et au premier chef les ministères, comme le Parlement, ne peuvent donc pas 19( * ) mettre en ligne les textes officiels sur leurs sites, y compris les lois dont ils sont à l'origine.

La loi, que selon l'adage nul n'est censé ignorer, qui est, selon l'article 6 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen du 26 août 1789, l'expression de la volonté générale, se voit ainsi frappée du sceau d'un secret d'autant plus aberrant qu'il est trahi par de nombreux -mais non officiels- sites, notamment étrangers.

En effet, face à cette carence de l'Administration 20( * ) , des individus ou des universités étrangères ont mis en ligne certains pans de la réglementation française, sans toutefois offrir la garantie d'authenticité et d'actualisation qui découlerait de la mise en ligne sur un site officiel.

Le journal Libération du 28 février 1997 affirmait ainsi : " Qu'un automobiliste ne s'avise pas de chercher le code de la route sur le site du ministère de l'équipement. Il le dénichera sur celui de Jérôme Rabenou, étudiant en maîtrise de droit. Pour le citoyen souhaitant lire le projet de loi Debré, rien à espérer du côté du ministère de l'intérieur (dont on cherchera en vain le site). Il trouvera son bonheur sur celui des sans-papiers. Quant au code général des collectivités territoriales, il se trouve sur un site universitaire... japonais. Peu de solutions, en revanche, pour l'internaute en quête du Journal officiel de la veille : seuls un sommaire analytique et une sélection de textes actualisés tous les quinze jours sont accessibles sur des sites universitaires en Allemagne et au Japon ".

Certains textes de loi sont parfois disponibles sur les serveurs de tel ou tel parti ou homme politique qui est intervenu dans son élaboration et qui " privatise " ainsi ce bien public, ce qui est une solution discutable.

Certes, les textes sont accessibles par Minitel ainsi que par consultation de bases de données électroniques, mais dans ces deux cas le coût de la connexion est élevé (environ 700 francs par heure en moyenne).

Le principe d'égalité d'accès au service public semble atteint par le coût prohibitif des connexions actuellement proposées. Votre mission estime que les textes officiels doivent sans tarder être mis en ligne sur les serveurs Internet -existants- du Parlement, des ministères et des juridictions.

Un changement est d'autant plus nécessaire que ces moyens de communication, quelque peu dépassés, n'offrent pas de liens hypertextes entre les différentes dispositions et ne touchent pas le public international.

Conscients de ces écueils, certains ministres ont d'ores et déjà franchi le pas parmi lesquels M. François Fillon, ministre délégué à la Poste, aux télécommunications et à l'Espace du précédent Gouvernement, qui avait en son temps mis en ligne la loi du 26 juillet 1996 de réglementation des télécommunications. De même, M. Jean Arthuis, ancien ministre de l'économie et des finances, a été à l'initiative de la mise en ligne du Code général des Impôts sur le serveur Internet du ministère des finances.

En outre, la possibilité d'établir des liens hypertexte offerte par le réseau Internet est particulièrement adaptée pour la consultation des textes réglementaires, qui procèdent le plus souvent par renvois à d'autres dispositions.

Le Sénat a, pour sa part, rejoint cette démarche en décidant de diffuser le code général des collectivités territoriales sur son serveur Internet.

Votre mission d'information se félicite de voir ainsi le Sénat jouer pleinement son rôle constitutionnel envers les collectivités locales et participer à une nécessaire démarche de libéralisation de la diffusion des données publiques.

Les atouts de l'hypertexte doivent être mis au service du droit


La réglementation actuelle est complexe et peu lisible. En effet, la clarté des textes est souvent amoindrie par des renvois à d'autres dispositions en vigueur. En outre, elle est changeante car fréquemment modifiée. Bien souvent, la lecture des lois et décrets n'est donc accessible qu'aux spécialistes.

Mettre les données officielles sur Internet permettrait de remédier à ces deux inconvénients qui sont autant d'obstacles à la diffusion démocratique des textes de la République. En effet, les liens hypertexte permettent instantanément de passer d'une disposition à une deuxième, visée par le premier texte, puis de revenir ensuite à celui-ci. Bien des recherches fastidieuses seraient ainsi grandement facilitées. En outre, l'actualisation des textes pourrait se faire en temps réel.

Bien plus, des liens hypertextes " officiels " pourraient être mis en place (de la loi au décret d'application par exemple) qui fourniraient des indications, si précieuses pour le praticien du droit, quant à l'état d'application des dispositions votées par le Parlement. La possibilité d'établir des liens hypertextes change en effet considérablement les modes de lecture possibles d'un document, comme il est indiqué dans l'encadré ci-après :

DU TEXTE À L'HYPERTEXTE

" Vers une épistémologie de la discursivité hypertextuelle "

par Jean Clément (extraits)

" Le discours oral est binaire. L'expression " suivre (ou perdre) le fil du discours " traduit l'idée d'un ordre irréversible et unidimensionnel. Le texte imprimé introduit une deuxième dimension. Aux deux repères de l'avant et de l'après du discours oral, il ajoute ceux du plus haut et du plus bas. Sur la page, chaque fragment textuel occupe une position spatiale qui invite à une lecture tabulaire et multiple que les poètes, entre autres, ont su exploiter. Mais le support du papier restreint et fige les possibilités d'agencement des éléments du texte . Même si une page peut être parcourue en divers sens, même si un livre peut être feuilleté dans le désordre, la matérialité du dispositif de lecture offert par le livre limite sérieusement les possibilités de vagabondage. Certains auteurs ont tenté d'imagniner des dispositifs plus souples, mais il a fallu attendre le texte numérique pour voir voler en éclat l'ordre immuable du texte et apparaître de nouvelles possibilités (...)

L'hypertexte est une des figures de cette nouvelle textualité. Il se caractérise par sa non-linéarité et par sa discontinuité potentielle. (...)

C'est une structure déconstruite que l'hypertexte invite le lecteur à organiser selon son bon plaisir, au fil de ses vagabondages. Car les fragments d'un hypertexte ne sont pas des électrons libres, ils appartiennent à des configurations potentielles dont certaines ont été voulues par l'auteur tandis que d'autres naissent du geste du lecteur activant les liens qui s'offrent à lui. Entre ordre et désordre, l'hypertexte se donne à déchiffrer comme la figure changeante d'une intelligibilité potentielle, comme un espace sémantique à construire. "

Source : http://www.psiconet.com


La non-linéarité de la lecture hypertextuelle peut faciliter considérablement la consultation juridique puisque l'ordre dans lequel se trouvent ou se suivent les éléments d'informations n'est plus une contrainte pour leur consultation.

Bien plus, certains 21( * ) estiment que les nouvelles technologies pourraient transformer profondément la nature du travail gouvernemental. En effet, dans la perspective d'une diffusion en ligne des textes, ceux-ci pourraient être préparés par un Intranet propre au Gouvernement, qui remplacerait les procédures interministérielles, parfois longues, qui existent aujourd'hui. Il en résulterait une habitude accrue de la collaboration entre les services et du travail en réseau. De même un Intranet parlementaire entre Assemblée et Sénat faciliterait le travail en réseau des rapporteurs pour les textes en navette entre les deux assemblées.

Le vote des dispositions législatives par le Parlement, ou la signature des décrets, serait le signal du passage d'un Intranet à un Extranet, accessible à tous.

Une volonté politique forte nécessaire pour engager les changements qui s'imposent

Votre mission d'information pense que les résistances administratives liées à l'imbroglio juridique actuel du régime de diffusion des textes officiels sont si fortes que seule une volonté politique clairement affirmée peut en venir à bout.

L'argumentaire fondé sur les obstacles techniques invoqués à l'encontre de la diffusion des textes par le Gouvernement (difficulté d'authentification, sécurité des serveurs) il s'agit pour l'Etat de s'adapter à son temps. C'est la volonté qui fait défaut.

Espoir d'une démocratie renouvelée, les nouvelles technologies offrent également la chance d'un développement plus harmonieux du territoire.

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