CHAPITRE I
PERSPECTIVES MACROÉCONOMIQUES À MOYEN TERME

I. UNE PROJECTION DE L'ÉCONOMIE FRANÇAISE À L'HORIZON 2001 (réalisée par l'OFCE)

L'Observatoire Français des Conjonctures Economiques (OFCE) a réalisé, à la demande du Service des Etudes du Sénat, une projection de l'économie française à l'horizon 2001 à l'aide de son modèle macroéconomique MOSAÏQUE. Les résultats détaillés en sont présentés dans l' annexe à ce rapport (établie par la Division des Etudes macro-économiques du Service des Etudes).

Cet exercice est de nature essentiellement macroéconomique , mais il a été demandé aux experts de l'OFCE d'en tirer le maximum d'indications sur l'évolution des finances publiques . En effet, il s'agit là, évidemment, d'un enjeu central de politique économique à court comme à moyen terme.

Votre Délégation rappelle une nouvelle fois qu'en présentant les principales conclusions de ces travaux, elle n'a d'autre souci que de mettre à la disposition du Sénat une illustration - grâce à l'éclairage que peut donner une projection à cinq ans - des choix et des questions de politique économique, et de baliser ainsi les cheminements possibles de l'économie française à l'horizon 2001.

A. LES ÉVOLUTIONS MACROÉCONOMIQUES

Il parait nécessaire de présenter les résultats macroéconomiques de la projection en distinguant deux sous-périodes :

- les trois premières années (1996-1998), pour lesquelles les résultats obtenus à l'aide du modèle, en fonction d'une part des dernières informations conjoncturelles et, d'autre part, du diagnostic que portent les experts de l'OFCE sur l'évolution de l'environnement international, peuvent être interprétés comme une prévision ;

- les trois dernières années (1999-2001) qui, compte tenu d'un horizon aussi éloigné, ne décrivent certainement pas le scénario le plus probable mais plutôt un prolongement des tendances lourdes à l'oeuvre dans l'économie française.

1. Les évolutions à court terme (1996-1998)

Il faut d'emblée souligner que les résultats de la projection pour les années 1996 et 1997 sont peu différents des prévisions à court terme du Gouvernement et de la plupart des instituts indépendants. Ils confirment en effet le diagnostic de reprise modérée de la croissance de l'économie française (+ 2,3 % en 1997 pour le PIB marchand après 1,1 % en 1996).

Ils confirment également l'analyse menée par la plupart des prévisionnistes sur les déterminants de cette reprise :

- elle serait soutenue par l'amélioration de l' environnement international , en particulier européen ;

- au niveau de la demande interne, le redémarrage de l'activité serait tiré par les dépenses des entreprises . En effet, le fort déstockage auquel les entreprises ont procédé depuis l'automne 1995 jusqu'au milieu de 1996 semble s'être interrompu. La contribution des stocks à la croissance de 1997 serait ainsi, comme à chaque épisode de retournement conjoncturel , très importante : fortement négative en 1996 (- 0,9 point de croissance), elle redeviendrait fortement positive en 1997 et représenterait 0,6 point de croissance. Par ailleurs, l'investissement des entreprises, pratiquement " plat " en 1996 (+ 0,1 %), progresserait sensiblement en 1997 (+ 2,4 %).

La projection vient ainsi donner encore plus de force au " consensus " qui règne actuellement parmi les experts sur les prévisions de croissance à court terme. Il ne faudrait pas en déduire qu'elle confirme ainsi la probabilité de réalisation de ces prévisions, puisque l'expérience montre que c'est lorsque le consensus est le plus fort qu'il est généralement pris en défaut... L'intérêt de la projection réside plutôt dans l'indication qu'elle livre sur la nature de la reprise : s'agit-il d'une reprise solide, durable et destinée à s'amplifier ?

La réponse à cette question, qui résulte de l'interprétation des résultats de l'année 1998 (ceux-ci permettent en effet d'observer comment les évolutions engagées en 1997 se prolongent), est finalement assez décevante.

Certes la demande étrangère continue à s'accélérer, l'investissement des entreprises s'amplifie (+ 3,5 % en 1998 après 2,4 % en 1997), ou encore l'investissement en logement des ménages se redresse (+ 6,4 % en 1998 après 1,7 % en 1997) en raison de la baisse des taux d'intérêt, mais la composante la plus importante de la demande interne, c'est-à-dire la consommation des ménages (soit 60 % du PIB environ), progresse de manière insuffisante (+ 1,6 %) pour pouvoir contribuer à l'accélération de la croissance.

Ce faible dynamisme de la consommation s'explique essentiellement par celui du pouvoir d'achat du revenu des ménages. Les évolutions salariales sont effet contraintes dans la projection par le niveau élevé du chômage , lequel pèse sur les revendications salariales.

Par ailleurs, il n'a pas été possible de simuler en projection une nouvelle baisse du taux d'épargne (après la baisse de 2 points en 1996), de nature à soutenir la consommation. Le taux d'épargne semble en effet avoir désormais rejoint son niveau " normal ", c'est-à-dire celui qui résulte de ses déterminants économiques habituels que sont le revenu et l'inflation.

Au total, l'économie française croîtrait en 1998 de 2,5 % (pour le PIB marchand).

La croissance française serait ainsi assez nettement inférieure à celle de ses principaux partenaires (soit 3 % selon les hypothèses internationales associées à la projection). Ce " différentiel de croissance " ne peut pourtant s'expliquer en projection ni par une dégradation de la compétitivité de l'économie française (celle-ci s'améliore au contraire) ni par des problèmes spécifiques de politique économique : les économies européennes connaissent en effet globalement des politiques monétaires peu différentes et des contraintes budgétaires comparables .

Les experts de l'OFCE ont ainsi été amenés à considérer que cette différence de croissance avec nos partenaires pouvait trouver sa source dans l'effet simulé par le modèle de l'impact positif d'une baisse des taux d'intérêt 1( * ) . Selon le modèle MOSAÏQUE en effet, comme selon la plupart des modèles macroéconomiques français, les effets positifs sur l'activité d'une baisse des taux d'intérêt sont limités , alors que dans la plupart des modèles étrangers, ces effets sont beaucoup plus sensibles, ce qui ne signifie certainement pas que dans la réalité ces effets seraient réduits en France et significatifs à l'étranger.

C'est pourquoi l'OFCE a élaboré un second scénario qui simule des effets d'une baisse des taux d'intérêt comparables à ceux que décrivent les modèles étrangers. Cela se traduit par une augmentation plus forte de l'investissement des entreprises (via une hausse de leur profitabilité) et de la consommation des ménages (via une baisse du taux d'épargne).

Dans ce second scénario, la croissance de l'économie française en 1998 se rapprocherait ainsi de celle de ses partenaires : + 2,9 % pour le PIB marchand .

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