Rapport d'information n° 1 - Mission d'information effectuée en République socialiste du Vietnam sur la francophonie et l'enseignement du français


MM. Adrien GOUTEYRON, François LESEIN, Ivan RENAR, Jean-Louis CARRERE, James BORDAS et Jean BERNADAUX


Commission des Affaires culturelles - Rapport d'information n° 1 1997/1998

Table des matières






N° 1

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Annexe au procès-verbal de la séance du 1er octobre 1997

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des Affaires culturelles (1), à la suite d'une mission d'information effectuée en République socialiste du Vietnam , sur la francophonie et l' enseignement du français ,

Par MM. Adrien GOUTEYRON, François LESEIN, Ivan RENAR,
Jean-Louis CARRÈRE, James BORDAS et Jean BERNADAUX,

Sénateurs.

(1) Cette commission est composée de : MM. Adrien Gouteyron, président ; Pierre Laffitte, Albert Vecten, James Bordas, Jean-Louis Carrère, Jean-Paul Hugot, Ivan Renar, vice-présidents ; André Egu, Alain Dufaut, André Maman, Mme Danièle Pourtaud, secrétaires ; MM. Philippe Arnaud, Honoré Bailet, Jean Bernadaux, Jean Bernard, Jean-Pierre Camoin, Jean-Claude Carle, Robert Castaing, Marcel Daunay, Jean Delaneau, André Diligent, Ambroise Dupont, Daniel Eckenspieller, Gérard Fayolle, Alain Gérard, Roger Hesling, Pierre Jeambrun, Alain Joyandet, Philippe Labeyrie, Henri Le Breton, Jacques Legendre, Guy Lemaire, François Lesein, Mme Hélène Luc, MM. Pierre Martin , François Mathieu, Philippe Nachbar, Michel Pelchat, Louis Philibert, Jean-Marie Poirier, Guy Poirieux, Roger Quilliot, Jack Ralite, Victor Reux, Philippe Richert, René Rouquet, Claude Saunier, Franck Sérusclat, René-Pierre Signé, Jacques Valade, Marcel Vidal.


Vietnam. - Rapports d'information.

Mesdames, Messieurs,

Sans remettre en cause les principes de son organisation politique et institutionnelle, la République socialiste du Vietnam a engagé depuis le VIe congrès du parti communiste vietnamien (1986) une politique de " renouveau " -Doi Moi- axée sur l'ouverture progressive de son économie aux mécanismes du marché et aux échanges extérieurs.

Confirmée par les VIIe et VIIIe congrès du parti communiste vietnamien, la politique du Doi Moi a incontestablement permis d'amorcer le décollage économique du Vietnam.

Certes, il s'en faut que le Vietnam ait pu encore effacer les conséquences de trente années de guerre, et d'une réunification difficile suivie de dix années de collectivisation " dure ". Il n'a pas encore rattrapé le retard pris sur d'autres Etats de la région, même les moins prospères d'entre eux. Cependant, les résultats du Doi Moi sont déjà très prometteurs : le taux de croissance s'est accéléré (7 % en moyenne entre 1988 et 1994, plus de 9 % en 1995 et 1996), la monnaie nationale (le dong) s'est stabilisée, l'industrie progresse rapidement, l'agriculture, sinistrée par la guerre et par la collectivisation, s'est vivement redressée, au point que le Vietnam est devenu un important exportateur de riz et d'autres denrées (café, produits de la mer).

La politique de renouveau économique s'est accompagnée de la réintégration du Vietnam dans le réseau des relations régionales et internationales. Cette ouverture extérieure était d'autant moins dissociable du Doi Moi que l'évolution politique du bloc de l'Est, qui a eu pour conséquence l'interruption de l'aide économique importante qu'accordaient au Vietnam les pays d'Europe orientale, lui rendait plus nécessaire la " normalisation " de sa politique étrangère et la recherche de nouveaux partenaires.

L'issue du conflit cambodgien, le règlement des arriérés du Vietnam à l'égard du Fonds monétaire international et le rééchelonnement de sa dette, la levée de l'embargo américain, l'adhésion à l'ASEAN ont été, entre 1992 et 1995, les principales et rapides étapes de cette normalisation diplomatique. L'adhésion du Vietnam aux institutions de la francophonie, dont il soutient l'évolution vers une communauté économique, a été aussi une des manifestations de sa volonté de réinsertion dans la communauté internationale : le Vietnam a participé à tous les sommets francophones, il est membre à part entière, depuis le deuxième Sommet de Québec en 1987, de la Conférence des chefs d'Etat et de gouvernement ayant le français en partage.

La France a été un des premiers pays occidentaux à prendre acte de l'évolution économique du Vietnam et de sa volonté d'ouverture internationale, et à lui manifester concrètement son soutien, aussi bien sur le plan diplomatique que sur celui de la coopération économique.

· Sur le plan diplomatique , la France a joué un rôle important dans les négociations qui ont conduit à l'allégement et au règlement de la dette vietnamienne. Elle s'est employée à faire aboutir, en juillet 1995, la signature d'un accord cadre de coopération entre l'Union européenne et le Vietnam.

La France a également soutenu la candidature vietnamienne, présentée en 1991, à l'organisation d'un Sommet des chefs d'Etat et de gouvernement des pays ayant le français en partage, et elle apporte une contribution importante à l'organisation, en novembre 1997, du prochain Sommet de la francophonie de Hanoi.

·  Le soutien diplomatique français au Doi Moi vietnamien s'est accompagné d'un très important développement de l'aide au Vietnam .

* L'aide bilatérale au développement est passée entre 1989 et 1995 de 5 à 410 MF de dons et de prêts. La France a été le premier pays occidental, avant l'Australie (1991) et le Japon (1992), à reprendre son effort d'aide au Vietnam, dont elle a été, en termes de versements effectifs, le deuxième bailleur de fonds en 1993 (après le Japon), et le troisième en 1994 (après le Japon et l'Australie). En dehors des protocoles d'aide, la Caisse française de développement est intervenue au Vietnam depuis 1994. L'ensemble des aides françaises ont bénéficié à des secteurs-clés du développement vietnamien : télécommunications, traitement des eaux, énergie, équipement et industrie, santé, formation et informatisation mais aussi -en particulier pour ce qui concerne les interventions de la CFD- le développement rural, la pêche, la restructuration des services publics, le développement du système bancaire et financier.

* La coopération culturelle, scientifique et technique , fondée sur un accord signé en avril 1977, a également connu, après une longue période de stagnation, un essor remarquable. Les crédits d'intervention qui lui sont consacrés sont passés de 20 MF en 1989 à 72,4 MF en 1994. Même si les exigences de la maîtrise des dépenses budgétaires ont imposé la stabilisation du montant des crédits de la coopération culturelle et linguistique au niveau -il est vrai très élevé- atteint en 1994, le Vietnam est ainsi devenu le premier pays bénéficiaire de cette coopération en Asie (avant le Cambodge et le Laos, qui reçoivent respectivement 39,4 et 29,6  MF) et le quatrième dans le monde, après les trois pays du Maghreb.

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Le Vietnam constitue désormais une des " priorités géographiques " de la politique française de coopération, et en particulier de la coopération linguistique et culturelle.

Pour votre commission, cette priorité se justifie : bien que le français soit actuellement peu pratiqué au Vietnam, qui n'a d'ailleurs jamais été un pays " francophone " au sens linguistique du terme, son adhésion aux institutions de la francophonie, les potentialités du développement, dans des domaines très divers, des relations culturelles, scientifiques et techniques franco-vietnamiennes, les perspectives, aussi, de développement économique du Vietnam font de ce pays un enjeu majeur pour la diffusion de la francophonie en Asie du Sud-Est.

Compte tenu des exigences de maîtrise de la dépense publique, cette priorité ne pourra plus se traduire, comme entre 1989 et 1994, par une croissance rapide des crédits budgétaires.

Cette contrainte -peut-être à certains égards salutaire, car il s'en faut que les résultats obtenus soient toujours fonction des moyens financiers mis en oeuvre- constitue une raison supplémentaire de veiller tout particulièrement aux orientations de notre action culturelle et linguistique au Vietnam, à l'efficacité des moyens mis en oeuvre, à leur adéquation aux attentes de nos partenaires.

C'est dans cette perspective que votre commission des Affaires culturelles avait décidé d'effectuer une mission d'information sur la coopération culturelle franco-vietnamienne, et en particulier sur le développement de la francophonie au Vietnam.

La délégation de la commission, qui était conduite par M. Adrien Gouteyron, Président de la commission, et composée en outre de MM. François Lesein, Ivan Renar, Jean-Louis Carrère, James Bordas et Jean Bernadaux, a séjourné au Vietnam du 11 au 19 septembre 1996, et s'est rendue à Hanoi, à Hué et à Ho Chi Minh-Ville.

Grâce au concours efficace que lui ont apporté l'ambassadeur de France en République socialiste du Vietnam, M. Gilles d'Humières, et le service culturel de l'Ambassade, ainsi que le Consulat général de France à Ho Chi Minh-Ville, grâce aux nombreux entretiens qu'elle a pu avoir avec des membres du gouvernement et de l'Assemblée nationale du Vietnam, mais aussi avec des universitaires, des enseignants, des formateurs, des responsables des médias audiovisuels, la mission d'information s'est efforcée de dresser un premier bilan du " renouveau " de la coopération culturelle et linguistique franco-vietnamienne.

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Avant d'analyser les voies et les moyens de la politique de coopération culturelle et linguistique au Vietnam, il convient de prendre l'exacte mesure de la situation actuelle de la francophonie au Vietnam.

Des trois pays de la péninsule indochinoise autrefois placés sous la domination française, le Vietnam est celui où la pratique du français est aujourd'hui la moins répandue : cette réalité, sans doute assez éloignée de l'idée que l'on se fait, en France, de la situation de la francophonie au Vietnam, doit naturellement être un facteur déterminant dans le choix des orientations de la politique de diffusion linguistique au Vietnam.

En outre, il faut être conscient que l'intention des dirigeants vietnamiens est à l'évidence de n'accorder aucun " traitement de faveur ", que ce soit en matière culturelle ou en matière économique, à aucun de leurs partenaires étrangers : l'avenir de la francophonie au Vietnam sera donc fonction de sa contribution possible au développement culturel et économique du Vietnam, et non du soutien que la France aura apporté à la normalisation diplomatique du Vietnam ni de l'importance de son effort de coopération.

Il ne faut pas cependant s'en tenir à ce constat immédiat, et qui peut paraître décourageant : le renouveau de la francophonie au Vietnam peut en effet s'appuyer sur de solides atouts, en particulier l'image positive dont bénéficient encore la langue et la culture française, et l'appartenance du Vietnam à la communauté francophone. La tenue à Hanoi, en novembre 1997, du 7° Sommet de la francophonie doit à cet égard être une occasion de consolider et de dynamiser la relance de la coopération linguistique et culturelle franco-vietnamienne.

1. L'image positive de la langue et de la culture française

Le français n'a jamais été au Vietnam une langue véhiculaire, et son enseignement y a subi une longue éclipse. Il avait été supprimé au nord après 1954 -l'allemand et le russe devenant, pendant une trentaine d'années, les principales langues étrangères enseignées- et avait quasiment disparu en 1975 au sud, où il avait été supplanté par l'anglais.

Ces raisons historiques expliquent que le nombre des francophones réels soit aujourd'hui très limité au Vietnam : il était évalué en 1990 par le Haut Conseil de la francophonie à 0,1 % de la population, soit environ 70.000 personnes, qui se recrutaient essentiellement dans des tranches d'âge élevées de la population.

Mais les mêmes raisons ont aussi contribué à asseoir le prestige de notre langue : avant 1954, le français était la langue des universitaires, des scientifiques, des intellectuels qui, après avoir effectué leur scolarité dans les écoles et lycées français de l'ancienne Indochine, poursuivaient fréquemment leur formation dans les universités françaises.

Grâce à cette élite francophone et érudite, qui a joué un rôle majeur dans la vie nationale après l'indépendance et qui a conservé l'usage de notre langue, le français est aujourd'hui encore considéré comme un instrument privilégié de formation intellectuelle, d'échanges, d'accès à l'information et à la connaissance, en particulier dans certains domaines -le droit, la médecine, l'agronomie, les sciences humaines, la technologie.

Le souvenir, toujours vivace, de grands scientifiques français -Pasteur et Yersin en particulier- et le maintien de liens de coopération scientifique et technique depuis le début des années soixante ont également entretenu l'image positive du français comme langue de la pensée et de la culture. Même si elle demande sans doute à être actualisée, notamment en intégrant, à côté de leurs réussites passées, une information plus complète sur l'évolution récente de la science et des technologies françaises, cette image constitue une base solide pour relancer la pratique de notre langue, et pour lui assurer une place à côté de l'anglais, incontestablement avantagé tant par l'adhésion du Vietnam à l'ASEAN que par son statut de " langue des affaires " dans les pays de la zone.

2. L'adhésion du Vietnam aux institutions de la francophonie

L'adhésion du Vietnam à la francophonie n'est pas prioritairement motivée par des considérations d'ordre culturel et linguistique.

Certes, comme l'a dit en 1996 à l'occasion de la journée mondiale de la francophonie le vice-ministre des affaires étrangères, M. Tran Quang Co, elle est " dans le droit fil de la volonté de diversification et d'équilibre des relations extérieures " du Vietnam, et " procède de circonstances historiques et d'un choix politique conscient ".

Mais il ajoutait que " tout choix politique doit être soumis et conforté par des actions concrètes ", et il semble en effet que les autorités vietnamiennes, très favorables à l'évolution de la francophonie vers un espace économique, en attendent surtout un renforcement des flux d'investissement et de coopération entre pays francophones, un développement des échanges Sud-Sud, la définition et la défense de positions communes sur les problèmes internationaux d'ordre commercial ou monétaire.

En revanche, elles ne paraissent pas considérer que l'adhésion vietnamienne à la francophonie doive obligatoirement se traduire par le développement de l'enseignement et de la pratique du français ou l'intensification des relations culturelles. Comme le soulignait, lors de la 22° session ordinaire de l'AIPLF (juillet 1996), le Président de la section vietnamienne, M. Nguyen Ngoc Tran, pour les jeunes générations " apprendre une langue étrangère est aussi une forme d'investissement " : cet investissement ne sera donc encouragé et consenti que s'il s'avère utile, c'est-à-dire s'il concourt à une bonne insertion professionnelle des étudiants et au développement de l'économie nationale.

En dépit de ce pragmatisme - par ailleurs aisément compréhensible de la part d'un pays légitimement soucieux de conforter son décollage économique- l'engagement du Vietnam à l'égard de la francophonie est un atout essentiel pour le maintien et le développement de la présence du français au Vietnam et dans le Sud Est asiatique.

· En premier lieu, il conforte, dans cette région du monde, la place du français comme langue internationale -et il convient à cet égard de souligner que la langue choisie par le Vietnam à l'ONU est le français . Il impose aussi le maintien d'un certain niveau de pratique du français parmi les cadres et les dirigeants des milieux économique, diplomatique ou politique parmi lesquels se recruteront les acteurs de la coopération avec les pays francophones.

· En second lieu , il ne faut pas mésestimer les opportunités qu'ouvre à la francophonie -et plus spécialement au resserrement des liens avec la France- la " volonté de diversification " des relations extérieures du Vietnam.

Cette volonté procède en effet du souci d'affirmation de son indépendance et de son identité culturelle qu'a toujours manifesté le Vietnam, et qui lui a toujours fait redouter toutes les hégémonies. Cette tendance traditionnelle ne peut qu'être renforcée, chez les dirigeants actuels, par la crainte des possibles effets pervers du développement et de la libéralisation économique, qui peuvent être des facteurs de déstabilisation sociale et de banalisation culturelle.

Le Vietnam ne peut donc que partager les principes culturels -attachement à la diversité linguistique, défense de " l'exception culturelle "- qui fondent la francophonie, et en font un contrepoids à la domination du modèle américain.

Plus particulièrement, le souci de sauvegarder son héritage peut inciter le Vietnam à renforcer ses relations culturelles avec la France. Depuis le début du siècle, en effet, d'importants travaux de recherche sur la civilisation et la culture vietnamiennes ont été conduits par la France -en particulier ceux de l'Ecole française d'Extrême-Orient- et c'est en français qu'ont été publiés, par des auteurs français ou vietnamiens, les principaux ouvrages et études sur ces sujets.

Ce " gisement " commun de connaissances, l'acquis, aussi, de relations vieilles de plusieurs siècles -dont le témoignage le plus ancien et le plus éclatant est la " romanisation " de l'alphabet vietnamien, généralisée au début du XXe siècle et qui trouve son origine dans les travaux, au XVIIe siècle, d'un religieux français, Alexandre de Rhodes- peuvent faire de la France le partenaire privilégié d'un Vietnam soucieux de la protection de son patrimoine historique et culturel.

3. Le Sommet de Hanoi : une occasion de renforcer l'image de la francophonie

La tenue à Hanoi, en novembre 1997, du septième Sommet des chefs d'Etat et de gouvernement des pays ayant le français en partage, qui constitue un rendez-vous important pour la francophonie, sera aussi un événement décisif au regard de l'affirmation de la présence de la francophonie en Asie du Sud-Est et de la relance de la coopération culturelle entre la France et le Vietnam.

Comme l'avait rappelé le secrétaire d'Etat à la francophonie, Mme Margie Sudre, lors de sa visite officielle au Vietnam en janvier 1996, ce Sommet représente, pour la France " la consécration des efforts auxquels, parmi les premiers, la France a participé afin de favoriser la réinsertion du Vietnam dans les cadres de la légalité internationale. (...) La complémentarité et la continuité entre la tenue de la conférence des chefs d'Etat et de gouvernement ayant le français en partage, la présence de nos entreprises au Vietnam et la coopération bilatérale sont totales. La perspective du Sommet ne peut que perfectionner, enrichir et diversifier nos actions communes ".

Par delà cette consécration des " retrouvailles " franco-vietnamiennes, le Sommet de Hanoi, qui sera un événement très important et largement médiatisé, doit être aussi l'occasion de valoriser notre effort de coopération, et de mieux faire connaître la France et la francophonie dans l'ensemble de la population, en particulier les jeunes générations (plus de la moitié de la population vietnamienne a moins de 25 ans) qui n'ont de notre pays qu'une image au mieux très sommaire.

Il est très positif, à cet égard, que l'aide apportée par la France à l'organisation du Sommet, et dont une partie renforcera les moyens de formation linguistique, soit complétée par la réalisation à Hanoi de six grands projets de coopération bilatérale orientés sur le renforcement de la présence culturelle et de l'enseignement francophones.

· L'aide à l'organisation du Sommet

Premier contributeur à l'organisation du Sommet, la France y consacre une enveloppe totale de 75 MF. Une partie de cette aide n'aura pas d'incidence pérenne sur les moyens de la coopération culturelle franco-vietnamienne : ainsi en sera-t-il de la participation française (35 MF, soit environ les 2/3 du coût total de l'opération) à la construction du centre de conférences international où se dérouleront l'essentiel des travaux du Sommet, ou de l'assistance technique fournie dans divers domaines (fourniture de véhicules, d'équipements électriques et de télécommunications...).

En revanche, le programme de formation linguistique et professionnelle mis en place par la France contribuera de façon durable à renforcer la francophonie et les moyens techniques de l'enseignement du français au Vietnam.

Ce programme s'élève à 2 MF pour la formation technique et professionnelle, destinée en particulier à des cadres diplomatiques et à des personnels de sécurité, et à 9 MF pour la formation linguistique, que pilotera l'Alliance française de Hanoi.

Cette dernière somme sera affectée à l'organisation de cours de français dispensés à l'Alliance française et dans les établissements vietnamiens enseignant le français (notamment l'Ecole supérieure des langues étrangères de Hanoi, le Centre de Formation Continue en français de spécialité et l'Institut des relations internationales), ainsi qu'à l'acquisition d'équipements de formation linguistique.

Ces formations, organisées sur l'année précédant la tenue du Sommet, doivent bénéficier à environ 2.000 fonctionnaires et agents administratifs appartenant à 21 catégories socio-professionnelles. Elles seront complétées, pour certaines d'entre elles, par des formations professionnelles assurées par la France ou par d'autres pays et organismes contributeurs.

· Les projets de coopération culturelle associés à la tenue du Sommet

Six grands projets de coopération culturelle, qui ont bénéficié du soutien de nombreux opérateurs -français ou non- permettent de prolonger et d'inscrire dans la durée les effets bénéfiques que l'on peut attendre du Sommet pour la relance de la francophonie au Vietnam.

* Trois de ces projets mettent l'accent sur la coopération culturelle et la " présence francophone " au Vietnam :

- La réalisation du Musée national d'ethnographie, aboutissement d'une coopération engagée depuis 1992 entre le Musée de l'Homme et les autorités vietnamiennes, constitue une illustration positive de la contribution que la France peut apporter à la connaissance et à la sauvegarde du patrimoine culturel vietnamien. Le musée, qui devait ouvrir pendant l'été 1997, retrace l'histoire et la culture des 54 ethnies du Vietnam. Il a bénéficié de soutiens des ministères des affaires étrangères et de l'éducation nationale, mais aussi de la région Ile-de-France et de l'Agence de la francophonie.

- L'ouverture d'une librairie française et francophone au centre de Hanoi : ce projet était déjà très avancé lors de la visite de la mission. Installée dans un local de 100 m2 environ, la librairie pourra offrir à des prix accessibles pour le public vietnamien un large éventail de livres en français et d'ouvrages traduits en vietnamien. Soutenue par le ministère de la culture et par l'Agence de la francophonie, facilitée par des remises substantielles sur le prix des livres consenties par de nombreux éditeurs français, cette réalisation contribue à lever un des obstacles au développement de la présence culturelle francophone au Vietnam : la rareté et la cherté des livres français ou traduits du français.

- Dans le même esprit, a été prévue l'ouverture, également au centre de Hanoi, d'une salle de cinéma de 900 places consacrée à la diffusion de films français et francophones en version originale, sous-titrée ou doublée.

* Les trois autres projets sont axés sur l'enseignement et la formation :

- L'installation de l'école française internationale de Hanoi dans de nouveaux locaux : ce projet souffrait, lors de la visite de la mission, de quelques retards dus à des lenteurs administratives dans l'attribution du permis de construire.

Ces difficultés ont cependant été depuis résolues, et la construction des nouveaux bâtiments, qui a débuté en février 1997, est en voie d'achèvement.

- L'extension de l'Ecole Semi-publique de Technologie Informatique de Hanoi : cet établissement a été ouvert à la rentrée 1994 à l'initiative commune de la Ville de Paris et de la Ville de Hanoi, et dispense des formations de niveau BTS. Soutenue par la Chambre de commerce et d'industrie de Versailles (qui reconnaît les diplômes de l'ESTIH), l'AIMF et le ministère français du travail, l'Ecole a étendu à la rentrée 1996 les formations dispensées à l'informatique industrielle et à la maintenance informatique et s'est installée dans de nouveaux locaux construits par la ville de Hanoi.

- La rénovation et l'équipement du lycée Chu Van An de Hanoi : ce lycée de haut niveau, installé dans les locaux de l'ancien " lycée du protectorat du Tonkin " fondé en 1907, forme chaque année plus de 800 bacheliers. Il fait partie des trois " lycées d'excellence " qui formeront les bacheliers issus des filières d'enseignement bilingue, avec le lycée Le Hong Phong de Ho Chi Minh-Ville et le lycée Quoc Hoc de Hué. En vue de l'accueil de ces classes à la rentrée 1997, a été conduit un programme de formation des enseignants et d'équipement financé par l'ambassade et aidé, pour la rénovation des locaux, par le conseil régional d'Ile-de-France.

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Les orientations de la coopération linguistique et culturelle avec le Vietnam tiennent compte de la situation actuelle de la francophonie et des potentialités de développement du rayonnement culturel et intellectuel français dans ce pays. Prioritairement axée sur l'enseignement et la formation, ainsi que sur l'animation et les échanges culturels, la coopération culturelle franco-vietnamienne s'attache à favoriser, en même temps que la connaissance et la pratique du français, les échanges et la coopération dans certains domaines privilégiés, et à renforcer l'influence française parmi les élites vietnamiennes.

Elle fonde donc le renouveau de la francophonie au Vietnam sur trois " lignes de force " :

- l'enseignement du français ;

- le statut du français comme langue de formation, d'échanges et de coopération scientifique et économique ;

- le renforcement de la " présence francophone " à travers l'audiovisuel, la presse, le livre et le renouveau des échanges culturels.

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CHAPITRE I :

L'ENSEIGNEMENT DU FRANÇAIS

La promotion de la francophonie passe d'abord par le développement de l'offre d'enseignement du français, en direction de la population scolaire et étudiante, bien sûr, mais aussi de toute personne désireuse de s'initier au français ou d'acquérir des compétences linguistiques spécialisées correspondant à un projet de formation ou à une activité professionnelle.

Les efforts accomplis depuis la relance de la coopération culturelle franco-vietnamienne ont déjà permis d'obtenir des résultats notables : environ 100.000 personnes, tous publics confondus, bénéficient d'un enseignement du français, et le français est désormais en deuxième position parmi les langues enseignées au Vietnam, derrière l'anglais mais avant le chinois, l'allemand et le japonais.

A. L'ENSEIGNEMENT DU FRANÇAIS DANS LE SYSTÈME SCOLAIRE ET UNIVERSITAIRE

Le soutien à l'enseignement du français aux niveaux scolaire et universitaire revêt trois formes : l'aide apportée à la formation des professeurs de français de l'enseignement scolaire et supérieur, le programme d'enseignement bilingue piloté par l'AUPELF-UREF (avec une importante contribution financière française), beaucoup plus ambitieux mais qui s'adresse à un public nettement plus restreint, et, enfin, la scolarisation d'élèves vietnamiens dans les deux établissements français existant au Vietnam.

Ces établissements, de dimensions modestes, n'accueillent certes qu'un petit nombre d'élèves vietnamiens, mais ils méritent d'être mentionnés, tant en raison de la remarquable qualité de leur enseignement que parce qu'ils offrent un exemple éloquent, en matière d'enseignement des langues, du plurilinguisme qui, au Vietnam comme ailleurs, est le meilleur rempart contre la domination du " tout anglais " qu'avait dénoncée un précédent rapport d'information de la commission 1( * ) .

1. L'aide à la formation des professeurs de français

Le système scolaire et universitaire vietnamien est soumis à une très forte pression démographique : il accueille environ 18 millions de jeunes -un vietnamien sur quatre est en formation scolaire ou supérieure. Son fonctionnement représente donc une charge difficile à assumer pour le budget vietnamien, ce qui se traduit par un certain nombre de problèmes cumulatifs :

- difficulté à recruter et à former des enseignants en nombre suffisant, et à leur assurer un niveau de rémunération satisfaisant ;

- insuffisance des équipements ;

- recul de la gratuité de l'enseignement, qui freine, en dépit du désir des familles d'assurer une bonne formation à leurs enfants, la poursuite d'études (la scolarité n'est pas obligatoire au-delà de l'âge de 11 ans).

L'aide à la formation des professeurs de français, qui sont au Vietnam les plus actifs promoteurs de la francophonie, est donc fort utile pour soutenir le développement tant qualitatif que quantitatif de l'enseignement du français.

Dans l'enseignement secondaire, qui accueille au total 4 millions d'élèves, 34.000 collégiens et 35.000 lycéens apprennent le français, cet enseignement étant dispensé par environ 1.200 professeurs.

Dans l'enseignement supérieur, où la connaissance d'une langue étrangère est exigée depuis 1991, 12.000 étudiants (sur un effectif total de 150.000 environ) ont choisi le français et un peu plus de 5.000 autres apprennent le français comme deuxième langue vivante.

L'aide apportée au renforcement de l'enseignement du français a porté à la fois sur la pédagogie et sur la formation des enseignants :

· la réalisation d'une série complète de manuels de français destinés aux classes des collèges et lycées a été entreprise depuis 1989 par des équipes franco-vietnamiennes : le dernier de ces manuels, destiné aux classes terminales, devait paraître en 1996.

· les actions de formation des enseignants sont menées en partenariat avec l'Université nationale et les écoles normales supérieures vietnamiennes. Elles comprennent :

- des stages de perfectionnement linguistique et méthodologique régulièrement organisés et animés par des formateurs français ;

- des actions de formation continue à distance : conduite en collaboration avec les professeurs des écoles normales supérieures vietnamiennes, cette formation a pour but de sélectionner des enseignants à qui sont proposés des stages en France, à l'issue desquels ils pourront remplir des fonctions de conseillers pédagogiques ;

- une formation de télé-enseignement, élaborée par le département des sciences du langage de l'Université de Rouen : 500 enseignants suivaient en 1996 cette formation, qui assure la préparation à des examens de licence, de maîtrise et diplôme d'études approfondies.

En 1996, 1 500 étudiants de l'Université, 600 étudiants des filières de formation des maîtres, 1 100 enseignants de français langue étrangère, ainsi que 250 enseignants des classes bilingues, ont bénéficié de l'ensemble de ces stages et formations.

Trois attachés, assistés de deux coopérants-lecteurs et de quatre conseillers pédagogiques, travaillent, en association avec les professeurs des départements de français des universités, à actualiser le contenu des programmes et les méthodes pédagogiques. Dans les provinces, les quatre centres de français, gérés par des attachés conseillers pédagogiques, appuient également la formation des enseignants dans les écoles normales supérieures de Da Nang, Hué, Nha Trang et Can Tho.

2. L'enseignement bilingue

Le programme d'enseignement bilingue tend à la constitution, au sein de l'appareil éducatif vietnamien, de filières scolaires et universitaires complètes -du cours préparatoire au diplôme d'ingénieur- destinées à des élèves et étudiants sévèrement sélectionnés et leur offrant à la fois un enseignement intensif du français et une formation de haut niveau dispensée en partie en français.

Piloté par l'AUPELF-UREF (et financé à 80 % par la France), il a pour objet de créer des " filières d'excellence " et de reconstituer au Vietnam une élite francophone de cadres et de scientifiques dans tous les secteurs de l'activité nationale.

Il s'agit donc d'un programme très ambitieux qui constitue, en terme d'allocation de moyens, la pièce maîtresse du dispositif de coopération dans le domaine de l'enseignement du français, et qui semble susciter un intérêt certain de la part aussi bien des familles -qui, au Vietnam comme en France, attachent un grand prix à la réussite scolaire de leurs enfants- que des autorités vietnamiennes, soucieuses de développer et de moderniser leur système éducatif.

Il faut être conscient cependant que les résultats du programme d'enseignement bilingue ne pourront être véritablement appréciés que dans quelques années, lorsque les filières de formation auront été complétées et au vu du devenir des premières formations de bacheliers et de diplômés qui en seront issus.

Le succès de l'enseignement bilingue, et sa contribution à la place du français au Vietnam, dépendront en effet non des moyens mis en oeuvre ni même de la qualité intrinsèque des formations dispensées, mais bien des opportunités qui seront offertes à ses diplômés, en matière de poursuites d'études ou d'insertion professionnelle. Et il subira, à cet égard, la concurrence d'autres cursus de formation, au Vietnam ou dans des pays étrangers, car l'enseignement francophone au Vietnam et les universités françaises ne sont plus, comme autrefois, la seule voie d'accès aux formations de haut niveau et aux emplois supérieurs ouverte aux jeunes vietnamiens.

Le programme d'enseignement bilingue et le placement de ses jeunes diplômés exigeront donc un suivi très attentif car, si les résultats de l'entreprise n'étaient pas à la hauteur des espoirs qu'elle a pu faire naître chez les jeunes engagés dans ses filières et leurs familles, les conséquences de cette déception seraient sans doute très graves pour l'image de la francophonie et l'avenir de la diffusion de notre langue au Vietnam.

· Les filières bilingues dans l'enseignement scolaire

En 1996/1997, 370 classes bilingues environ étaient ouvertes dans 72 établissements, répartis dans 17 provinces sur les 53 que compte le Vietnam. Elles accueillaient plus de 11.000 élèves. En 2006, date où s'achèvera la mise en place du cursus scolaire bilingue, l'enseignement bilingue sera assuré dans quelque 1.230 classes, et 1 à 2 % des bacheliers en seront issus. Trois " lycées d'excellence " formeront les premières promotions de bacheliers bilingues : le lycée Le Hong Phong à Ho Chi Minh-Ville (à partir de la rentrée 1996), le lycée Chu Van An à Hanoi (à partir de la rentrée 1997) et le lycée Quoc Hoc à Hué (à partir de la rentrée 1998).

Les élèves des classes bilingues, qui suivent les programmes de l'enseignement vietnamien, organisé sur 18 à 20 séquences pédagogiques de 40 ou 45 minutes par semaine, bénéficient en supplément de 10 heures hebdomadaires d'enseignement de français (soit 14 à 15 cours). Certaines matières scientifiques -les mathématiques, la physique, la biologie- leur sont en outre enseignées en français.

Les professeurs bénéficient d'un complément de traitement, d'une formation initiale et continue et d'une assistance pédagogique.

Les classes bilingues reçoivent aussi un important support pédagogique : fourniture de manuels, bibliothèques de livres et de périodiques, équipements d'enseignement des langues, organisation de séjours d'études et de découverte, jumelages d'établissements.

Au terme de leurs études, les bacheliers francophones pourront poursuivre leurs études dans les filières universitaires francophones, ou dans les universités françaises.

L'enseignement scolaire bilingue remporte indéniablement un très grand succès auprès des parents d'élèves : le nombre des demandes d'inscription est en moyenne cinq fois supérieur à celui des places disponibles.

Il convient de noter que ce succès n'est pas uniquement fonction d'une demande d'enseignement du français. Il tient aussi à la plus grande qualité de l'enseignement bilingue : les enseignants sont plus nombreux, mieux formés et motivés, les moyens pédagogiques plus développés. Surtout, comme a pu le constater la mission en visitant des classes bilingues, les effectifs de ces classes, quoique nombreux au regard des critères français (de l'ordre de 40 élèves), sont nettement inférieurs à ceux des classes " normales " (qui peuvent atteindre 60 à 70 élèves).

Ces différents facteurs, auxquels s'ajoute la sévère sélection des élèves inscrits, contribuent puissamment aux excellents résultats scolaires obtenus par les élèves des classes bilingues, et donc au nombre élevé des candidatures.

· Les filières francophones universitaires

Mises en place à partir de 1994, les filières francophones universitaires ont très rapidement progressé : 13 filières avaient été ouvertes en 1994, 40 fonctionnaient à la rentrée 95/96, leur nombre a été porté à 47 à la rentrée 1996. Une dizaine d'entre elles assurera la formation des enseignants de français et de sciences des filières francophones.

Ces filières, installées à Hanoi, Haiphong, Hué, Da Nang, Ho Chi Minh-Ville et Can Tho, sont implantées dans les Instituts polytechniques, les universités (chimie, physique, droit, sciences économiques, médecine, langues, informatique) ainsi que dans les écoles supérieures offrant des formations dans les secteurs du commerce, de l'agronomie, de la construction, des transports ou de la communication.

Leurs effectifs peuvent varier entre une vingtaine et une soixantaine d'étudiants par promotion, la plupart accueillant entre 30 et 50 étudiants. Elles devraient former, au terme de leur mise en place, un millier de diplômés par an aux niveaux bac + 4 ou bac + 5.

Dans l'enseignement supérieur comme dans l'enseignement scolaire, les filières francophones se veulent des " filières d'excellence " et sélectionnent leurs étudiants en fonction de leurs résultats aux concours d'entrée à l'université ou, pour les formations de 2° cycle, après un examen de français. Elles ont pour objet de développer la francophonie dans les milieux scientifiques et de haute technologie et, selon l'Agence de la francophonie, " de permettre une meilleure intégration des scientifiques vietnamiens francophones dans le réseau mondial de la recherche, pour former des professionnels dont la spécialisation correspond aux besoins des entreprises francophones, pour servir au sein de la coopération francophone ".

Elles assurent, en complément du programme de l'établissement d'accueil, une formation intensive en français (10 heures hebdomadaires) dispensée pendant les deux premières années.

A partir de la troisième année, en plus des enseignements de français (4 heures hebdomadaires), certains enseignements sont dispensés en français, et les étudiants rédigeront en français un mémoire de fin d'études.

Les filières francophones sont également dotées de centres de documentation (ouvrages, cassettes) en français.

Les diplômes obtenus sont les diplômes vietnamiens des établissements d'origine, et font mention de la spécialisation francophone de la filière.

Cette mention doit ouvrir aux diplômés la possibilité :

- de continuer des études post-universitaires au Vietnam dans des établissements d'enseignements francophones ;

- de bénéficier de bourses d'études dans les établissements d'enseignements supérieurs francophones ;

- de trouver des emplois dans le secteur public ou dans des entreprises francophones.

C'est à la fin de l'année universitaire 1997/1998 que sortiront les premières promotions de diplômés des filières francophones, ceux des filières à bac + 4 mises en place dès 1994.

C'est donc à partir de cette date que l'on pourra commencer d'apprécier, à travers les débouchés offerts, le succès et l'avenir de la formule.

L'AUPELF-UREF s'en préoccupe notamment en s'efforçant de " mettre en contact " étudiants et entreprises francophones, en organisant une bourse de l'emploi francophone : la grande inconnue reste cependant le volume, à moyen terme, de l'offre de recrutement local francophone à bac + 4 ou  + 5. Quant aux opportunités de poursuite d'études en France et de débouchés dans l'enseignement et la recherche, elles dépendront pour partie des moyens dont seront dotés les programmes de bourses, mais aussi d'autres facteurs, notamment des possibilités de réévaluation des carrières d'enseignants et de chercheurs, professions actuellement très dévalorisées, et qui ne seront sans doute pas les premières bénéficiaires du décollage annoncé de l'économie vietnamienne.

3. Les établissements d'enseignement français

L'enseignement français au Vietnam est dispensé dans deux établissements relevant de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, l'école française internationale de Hanoi -qui prendra, lorsqu'elle sera installée dans ses nouveaux locaux, le nom d'Alexandre Yersin- et l'école Colette de Ho Chi Minh-Ville.

L'école de Hanoi (300 élèves) assure un enseignement direct primaire et secondaire, l'école Colette, créée en 1975, accueille quelque 220 élèves et assure un enseignement direct pour le primaire.

La mission a eu l'occasion de visiter l'école de Hanoi, qui accueille des élèves de 38 nationalités différentes, dont un quart d'élèves vietnamiens.

Le projet pédagogique de l'établissement met l'accent sur la pratique des langues (" trois langues pour le XXIe siècle "), l'adaptation linguistique rapide des élèves étrangers, et l'ouverture sur la culture vietnamienne. Les élèves étrangers sont " mis à niveau " en français en une année, et tous les élèves apprennent l'anglais à partir du CE2. Des enseignements d'allemand et d'espagnol sont également offerts à partir de la quatrième.

Cet enseignement, qui associe la maîtrise du français à l'apprentissage des autres langues internationales, et qui reconnaît à l'anglais, comme le souligne le projet d'établissement, sa place de " langue de communication internationale " a paru à la mission se situer dans la perspective réaliste et équilibrée qui doit être celle du développement de la francophonie au Vietnam : la connaissance du français doit être considérée comme un atout supplémentaire pour les jeunes, le français doit être perçu comme une langue offrant l'accès à des formations de qualité, mais il ne faut en aucun cas opposer le français à l'anglais, ni aux autres langues étrangères.

B. LA FORMATION CONTINUE ET L'ENSEIGNEMENT DU FRANÇAIS DE SPÉCIALITÉ

L'offre d'enseignement du français ne se limite pas au cadre de l'enseignement scolaire et universitaire : elle vise aussi des publics variés (étudiants, adultes, personnes engagées dans la vie active) qui peuvent avoir accès à des cours de français de tous niveaux, ainsi qu'à des enseignements spécialisés leur permettant d'accéder à des formations francophones ou d'améliorer leur qualification professionnelle.

Les instituts et centres français offrent une large palette de formations linguistiques, complétée par des structures plus spécialisées.

1. Les centres et instituts de français

Outre l'Alliance française de Hanoi et l'Institut d'échanges culturels avec la France de Ho Chi Minh-Ville (IDECAF), qui est une institution de droit vietnamien, le réseau des centres et instituts de français comprend quatre centres de français gérés par l'ambassade.

· L'Alliance française de Hanoi

Fondée en 1991, elle est devenue depuis janvier 1993 un centre culturel français, ce changement de statut n'ayant modifié ni son appellation, ni les termes de l'accord de coopération définissant ses activités.

Dans le cadre de son activité d'enseignement, organisée par une vingtaine d'enseignants français et vietnamiens, elle accueille un millier d'apprenants à qui elle offre des enseignements de français général de tous niveaux, organisés par sessions de 10 semaines à raison d'une heure de cours par jour, du lundi au vendredi : les droits d'inscription sont de 220.000 dongs (110 F) pour une session de 50 heures de cours.

Depuis 1994, l'Alliance offre aussi aux entreprises la possibilité d'organiser pour leur personnel des cours de français " sur mesures " ; elle a enfin ouvert 7 classes (140 étudiants) destinées aux personnels de l'hôtellerie et de la restauration.

Ces activités d'enseignement sont complétées par l'accès (ouvert aux 8.500 adhérents de l'Alliance) à l'ensemble des services offerts par l'Alliance : la bibliothèque (17.000 volumes, 500 emprunts par semaine) l'espace de lecture de la presse française (60 publications, 50 lecteurs par jour), les expositions, l'espace télévision (diffusion des programmes de CFI), la présentation de films, l'organisation de conférences.

L'Alliance française bénéficie par an d'un financement de 3,5 millions de francs environ, auquel s'ajoutent en 1996/1997 les moyens supplémentaires affectés aux formations organisées dans le cadre de la préparation du Sommet de la francophonie.

Elle est installée en location dans des locaux dont le bail devait expirer en juillet 1997. Lors de la visite de la mission d'information, la question de son relogement n'était toujours pas résolue, et ne l'a pas été depuis. En l'absence d'une solution de remplacement convenable, le bail a été prolongé d'un an, jusqu'en juillet 1998, mais il reste encore à trouver les nouveaux locaux qui pourront accueillir l'Alliance après cette échéance.

· L'IDECAF (Ho Chi Minh-Ville)

Etablissement sous tutelle vietnamienne, l'IDECAF, outre de nombreuses activités culturelles qui attirent un public nombreux et fidèle, emploie plus de 30 enseignants qui dispensent chaque année des cours à plus de 3.000 étudiants. Depuis deux ans, l'Institut a également ouvert trois classes accueillant des enfants qui seront ensuite inscrits dans les filières d'enseignement bilingue.

L'enseignement du français dispensé par l'IDECAF, comme celui assuré par l'Alliance française de Hanoi, s'appuie sur l'ensemble de ses ressources culturelles : une grande bibliothèque, un centre de ressources multimédia, l'accès aux programmes de CFI, une salle de conférence et une salle de spectacle où sont organisés de nombreuses manifestations culturelles, des séminaires et des colloques.

· Les centres de français

Créés par l'ambassade, quatre centres de français ont été ouverts en 1991 à Hué, en 1992 à Da Nang et à Can Tho, en 1993 à Nha Trang. Placés sous la responsabilité d'un attaché linguistique, ils offrent des formations et des équipements culturels (bibliothèque, équipements audiovisuels) à un public comprenant entre 250 et 430 personnes par centre.

En coopération avec les établissements d'enseignement supérieur locaux ou avec des entreprises, ils offrent notamment des enseignements spécialisés correspondant aux besoins de chaque région :

- médecine, tourisme, formation des enseignants à Hué ;

- médecine, français des affaires, gestion, industrie, technologie à Da Nang ;

- médecine, sciences, informatique et agronomie à Can Tho ;

- hôtellerie, tourisme, sciences de la mer à Nha Trang.

2. L'enseignement du français de spécialité

Une réelle demande d'enseignement spécialisé du français se manifeste, dans les secteurs économiques ayant vocation à développer des contacts avec l'étranger (tourisme, hôtellerie, transports) mais aussi dans d'autres domaines d'activité (affaires, administrations) ou parmi les étudiants désireux de compléter leur bagage linguistique, d'accéder à des formations francophones ou d'obtenir des bourses d'étude en France.

Pour répondre à cette demande, ont été créés deux établissements spécialisés, et organisées un certain nombre de formations :

· Le centre de formation continue en français de spécialité de Hanoi (CFC)

Les premiers cours de français de spécialité ont été organisés à Hanoi dès 1986. Cette demande s'est depuis accrue et diversifiée au point de justifier la construction du CFC dont les bâtiments, financés par la France et installés sur le campus de l'Institut national polytechnique, ont ouvert en 1994.

Le centre accueille sur concours près de 400 étudiants par an, qui peuvent, au terme de leurs études, passer les diplômes -très appréciés sur le marché du travail- de la Chambre de commerce et d'industrie de Paris ou les concours d'accès aux instituts d'enseignement supérieur franco-vietnamiens, obtenir des bourses de formation en France ou entrer directement sur le marché du travail.

Les cours, dispensés par 15 enseignants vietnamiens et français, couvrent tout l'éventail des spécialités :

- français économique et commercial ;

- français des affaires (communication, vente, transport) ;

- français du tourisme et de l'hôtellerie (accueil, restauration, gestion d'agence) ;

- français scientifique et technique, spécialité destinée en particulier aux futurs boursiers ;

- français du secrétariat (centré sur la correspondance commerciale, les conversations téléphoniques, l'organisation de réunions, voyages d'affaire ou conférences) ;

- français juridique (terminologie du droit privé et du droit des sociétés) ;

- français médical.

Le CFC organise également des stages et séminaires de perfectionnement destinés aux enseignants de français, et des cycles de conférence.

Il offre à ses étudiants une documentation de qualité (3.000 ouvrages, 25 revues) et doit être également doté de logiciels d'apprentissage et de CD-Rom de science et de civilisation.

· Le centre de formation d'interprètes et de traducteurs (CFIT)

Le CFIT a été créé en 1995 dans le cadre d'un partenariat associant l'Institut des Relations Internationales du ministère vietnamien des affaires étrangères, l'Ambassade de France à Hanoi et l'université de Paris III Sorbonne (ESIT).

Il assure la formation initiale, sur deux ans, d'interprètes et de traducteurs de haut niveau, recrutés sur concours au niveau bac + 4, et la formation permanente d'interprètes en exercice. Il accueille actuellement 22 étudiants en formation initiale et 70 personnes en formation permanente.

Les formations initiales permettent d'obtenir un certificat d'interprétation et de liaison, ainsi qu'un diplôme d'études supérieures de traduction. La formation permanente est validée par un certificat d'aptitude à l'interprétation.

· Les formations de français organisées dans les administrations vietnamiennes

Des classes de 15 à 20 apprenants ont été ouvertes dans quelques administrations publiques pour répondre à la demande des fonctionnaires souhaitant valoriser leur carrière par la maîtrise du français. Certains des participants ont déjà acquis des bases de français au cours de leurs études secondaires, ou à l'occasion des séjours dans des pays francophones (en Algérie, par exemple) d'autres n'ont appris que le russe comme langue étrangère. Les effectifs concernés représentent environ 500 personnes.

*

* *

CHAPITRE II :

LE RENFORCEMENT DU FRANÇAIS COMME LANGUE DE FORMATION, D'ÉCHANGES ET DE COOPÉRATION

Le renouveau et le développement de la francophonie au Vietnam ne passent pas seulement par l'enseignement du français, mais aussi par la formation " en français et par le français ", c'est-à-dire par les efforts consentis pour refaire du français un outil privilégié d'acquisition et de développement des connaissances, un instrument au service du développement national et de la coopération internationale dans les domaines économique, scientifique ou culturel.

Les actions menées dans ce domaine concernent prioritairement la gestion des entreprises et l'économie ainsi que la promotion des technologies de pointe, mais ils intéressent aussi tous les autres " milieux porteurs " du développement vietnamien, notamment dans les secteurs (le droit, la médecine, les sciences humaines) où la coopération franco-vietnamienne s'appuie sur une longue tradition.

Elles ont pour objectif commun le renforcement de la francophonie et de l'influence française parmi les " décideurs " et les élites économiques, administratives et scientifiques du Vietnam de demain. Elles s'appuient sur le développement d'institutions de formation et de recherche franco-vietnamiennes et sur un programme de bourses d'études et de stages en France qui a retrouvé, depuis la " réouverture " du Vietnam, un niveau très important.

A. LE DÉVELOPPEMENT DES FORMATIONS DESTINÉES AUX FUTURS DIRIGEANTS DE L'ÉCONOMIE VIETNAMIENNE

Les actions développées dans ce secteur prioritaire ont pour objet à la fois d'offrir aux entreprises françaises qui s'implantent au Vietnam un " vivier " de recrutement de cadres et d'ingénieurs de haut niveau, d'assurer une formation française aux futurs dirigeants de l'économie vietnamienne, et de donner un contenu nouveau à la francophonie, instrument de maîtrise et de développement des technologies les plus performantes.

1. Les formations de cadres dans le domaine de la gestion des entreprises

· Le centre franco-vietnamien de formation à la gestion (CFVG)

Le CFVG, ouvert en septembre 1992, et qui comprend deux établissements, à Hanoi et à Ho Chi Minh-Ville, constitue la pièce maîtresse du dispositif francophone de formation des futurs dirigeants d'entreprises.

Cet établissement, animé par une équipe pédagogique franco-vietnamienne, forme en deux ans des étudiants recrutés sur concours après avoir obtenu un diplôme universitaire et les conduit au niveau de la maîtrise de gestion des entreprises.

L'opérateur de ce programme de formation est la Chambre de commerce et d'industrie de Paris. Son objectif est de former des cadres d'entreprise correspondant aux besoins créés par l'évolution de l'économie vietnamienne.

Le cursus de formation, dispensée à plein temps, comporte :

- un programme de cours intensifs complétés par des travaux dirigés et des études sur le terrain ;

- un stage en entreprise d'une durée minimale de deux mois ;

- la rédaction d'un mémoire de recherche portant sur un problème de gestion.

Les méthodes d'enseignement privilégient l'apprentissage des langues et la pratique des nouvelles technologies utilisées dans le monde des affaires.

Le diplôme du CFVG, reconnu par le système éducatif vietnamien au niveau du mastère, offre des débouchés variés. Un nombre important de diplômés est recruté par des entreprises nationales ou étrangères et par des administrations. Les meilleurs étudiants peuvent en outre bénéficier de bourses pour poursuivre en France des études de troisième cycle dans les grandes écoles et les universités partenaires du CFVG (HEC, ESCP, ENS de Cachan, Universités de Paris-I, Paris-IX, Paris X, Paris XII, Aix Marseille II, Grenoble II, Toulouse I...).

La convention de création du CFVG a été reconduite en 1996 pour trois ans. Le succès du centre est démontré par l'embauche rapide, et à des niveaux très satisfaisants, de ses anciens élèves : les diplômés des trois premières promotions du centre de Hanoi et des deux premières promotions du centre de Ho Chi Minh-Ville, soit au total 149 étudiants, ont tous obtenu un emploi, ou pour 27 d'entre eux, des bourses d'études en France. Le nombre des candidats à l'entrée au CFVG est également élevé : 191 postulants pour les 106 places offertes au concours de septembre 1995, 218 candidats aux concours de recrutement de 1996.

Le CFVG ne limite pas son activité à son programme de formation initiale. Il assure en effet :

- des actions de formation continue, élaborées à la demande d'entreprises ou d'administration publique, et des programmes de formation de formateurs. Des séminaires sur les problèmes économiques vietnamiens sont également organisés au profit des professeurs de gestion, hommes d'affaires et cadres ;

- des missions ponctuelles d'assistance et de conseil réalisées, à la demande des entreprises publiques ou privées, par des équipes de professeurs et d'étudiants du centre sur des sujets tels que la réalisation d'études de marché, l'informatisation des entreprises, l'organisation de recrutement de personnel francophone... ;

- une activité de publication : le CFVG assure la publication de livres d'économie et de gestion en vietnamien et d'une collection d'ouvrages pédagogiques. Il publie également deux périodiques, une revue trimestrielle bilingue (" Ouverture économique ") et un mensuel d'informations économiques (" la lettre du CFVG "), diffusés dans les milieux économiques et des affaires.

Enfin, le centre développe ses partenariats avec à la fois le réseau universitaire national et régional et les entreprises.

En dehors du CFVG, un programme d'enseignement à distance de la gestion des entreprises a également été lancé en 1995 à Da Nang. Il associe l'université d'économie de Da Nang, la Fondation nationale pour l'enseignement de la gestion des entreprises (FNEGE) et l'Institut d'administration des entreprises (IAE) de l'université de Nantes. Cette formation d'un an, ouverte à des cadres et à des enseignants, est sanctionnée par un certificat d'aptitude à l'administration des entreprises délivré par l'IAE de Nantes.

· La formation informatique

* L'Institut francophone d'informatique

Le principe de la création de l'institut francophone d'informatique avait été retenu au Sommet de Chaillot en 1991, à la demande des autorités vietnamiennes. Ce projet, qui ressortit à la coopération francophone multilatérale, a été mené sous la responsabilité directe de l'AUPELF-UREF, seule la prise en charge du traitement du directeur de l'Institut étant directement assurée sur les crédits de la coopération française.

L'Institut, qui a ouvert en 1995, a pour objet d'assurer en langue française une formation de troisième cycle sur deux ans, de constituer un centre de documentation et de communication ouvrant sur l'ensemble du monde francophone et de soutenir des projets d'études et de recherche en informatique.

Il recrute ses étudiants sur concours parmi les titulaires de diplômes du second cycle (bac + 4 ou + 5) en informatique : la première promotion, entrée en 1995, comptait 29 élèves.

Les diplômés de l'IFI ont vocation à devenir des chefs de projet informatique, des développeurs et des chercheurs.

* L'Ecole de technologie de Hanoi qui est largement le fruit, comme on l'a déjà rappelé, de la coopération " déconcentrée " a, quant à elle, vocation à former des diplômés au niveau technicien supérieur (bac + 2), elle doit également développer ses activités dans le domaine de la formation continue.

Il est à noter que la coopération dans le domaine des enseignements technologiques de niveau bac + 2 -niveau de formation dont on peut penser qu'il correspondra dans les années à venir à une demande importante de l'économie vietnamienne- doit aussi se développer à Ho Chi Minh-Ville dans les domaines de la mécanique et de l'hydraulique électrique et électronique dans le cadre du programme CODIFOR : les formations seront assurées au sein de l'Ecole polytechnique, la France fournissant des équipements et une assistance à l'enseignement.

* Enfin, le Centre des formations aux techniques informatiques de Hanoi (CFTI), qui fonctionne depuis près de 20 ans, bénéficie aussi de la coopération bilatérale française dans le domaine de l'introduction des nouvelles technologies à laquelle participent des spécialistes français -6 missions annuelles en moyenne. Le CFTI a en outre des relations de partenariat avec plusieurs organismes de formation français, dont le CNAM.

Le CFTI propose, en français, en vietnamien ou en anglais, des formations courtes sur les nouvelles techniques informatiques, les réseaux et les systèmes informatisés. Les stages sont sanctionnés par un certificat reconnu par le ministère de l'éducation et de la formation.

2. Les formations dans le domaine financier

Un certain nombre de programmes de formation ont également été organisés pour renforcer la formation professionnelle et la francophonie dans le secteur des finances publiques et privées .

Les plus importants, les projets " Finances et Trésor ", qui concernent le ministère vietnamien des Finances, visent à renforcer l'expertise de l'administration financière du Vietnam et à assister les projets nationaux de réorganisation économique et financière. Ils participent aussi au développement de la francophonie au sein des responsables de cette administration, puisqu'ils comprennent, à côté de formations techniques (économie publique, comptabilité et finances publiques), un enseignement du français et des stages organisés dans les universités et les écoles financières françaises.

L'opérateur en France de ces programmes est le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, qui appuie aussi le programme de modernisation des douanes vietnamiennes, notamment en organisant pour les fonctionnaires vietnamiens des formations de 3 mois à un an dans les Ecoles nationales des douanes françaises.

Dans le secteur privé, des formations sont également assurées en direction des cadres de la banque et de l'assurance.

B. LE DÉVELOPPEMENT DU FRANÇAIS COMME LANGUE DE FORMATION ET D'ÉCHANGES DANS LES AUTRES DOMAINES DE COOPÉRATION CULTURELLE SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE

Sensible dans les domaines " traditionnels " de la coopération franco-vietnamienne -le droit, la médecine et la santé publique- il s'est élargi à de nouveaux secteurs -l'information et les médias- et devrait aussi se renforcer dans le domaine des sciences humaines.

· Le droit

La francophonie a joué un rôle important dans l'élaboration du droit vietnamien, et dans la formation des juristes vietnamiens.

Cet état de fait tient certes à des circonstances historiques : le premier tribunal français a été établi au Vietnam à la fin du XIXe siècle, et le premier code civil du Tonkin, promulgué en 1931, a été rédigé par un juriste français. De même, l'enseignement de la première faculté de droit vietnamienne, établie à Hanoi, était dispensé en français et, après 1954, l'enseignement juridique vietnamien est resté marqué par les concepts et la terminologie du droit français. Mais le succès de la coopération juridique franco-vietnamienne tient sans doute aussi à des affinités plus profondes : l'histoire institutionnelle du Vietnam, qui est comme la France un pays de droit écrit, révèle une certaine parenté dans les conceptions française et vietnamienne de l'Etat, incarnation de l'unité et de l'indépendance nationales, de l'organisation et du rôle des administrations publiques.

Tous ces facteurs contribuent sans doute à expliquer que le droit soit un des domaines où les relations entre la France et le Vietnam ont été les plus fructueuses et sont aujourd'hui les plus prometteuses. Il est à cet égard significatif que plusieurs des élèves des classes bilingues visitées par la mission d'information, interrogés sur leurs projets d'avenir, se soient déclarés attirés vers des études de droit.

Le Doi Moi vietnamien offre un large champ au renouveau du " dialogue juridique " entre la France et le Vietnam. La politique du Doi Moi doit en effet s'accompagner de la restauration de l'Etat de droit, et exige aussi une importante adaptation de la législation du Vietnam à sa nouvelle organisation économique et à l'intensification de ses échanges internationaux. Et il est particulièrement intéressant, pour l'avenir de l'influence française au Vietnam, que la France participe largement à cette entreprise de rénovation juridique, le droit étant sans doute l'un des principaux " éléments structurants " des sociétés.

· La Maison du Droit vietnamo-française , créée en février 1993, a été conçue pour être l'instrument privilégié de la coopération juridique entre les deux pays.

Administrée par un comité d'orientation paritaire de douze membres -qui comprend notamment les ministres de la justice français et vietnamien- et dirigée par un directeur et un directeur adjoint, ces deux postes étant occupés alternativement par des personnalités vietnamiennes et françaises 2( * ) , la Maison du Droit s'est vue assigner cinq objectifs :

- la mise en place d'une documentation informatisée sur les droits français et vietnamien ;

- la centralisation de l'information relative à la coopération juridique franco-vietnamienne ;

- l'organisation de cycles de conférence dans le domaine juridique ;

- la participation à la conception et au suivi des stages de formation et le soutien à l'organisation des échanges ;

- l'appui à la coopération universitaire et au développement de la recherche dans le domaine juridique.

En fonction de ces objectifs, la Maison du Droit a développé ses actions dans trois domaines essentiels :

* L'assistance au processus d'élaboration des textes normatifs

La Maison du Droit participe à la rénovation du droit vietnamien en organisant des séminaires sur les thèmes jugés prioritaires par les autorités vietnamiennes, suivis d'échanges d'experts sur les avant-projets de textes.

Ces travaux, auxquels participent des spécialistes français et vietnamiens ainsi que les responsables des départements ministériels concernés et les rédacteurs des textes font désormais l'objet de publications bilingues.

Ils ont porté, en 1996, sur la réorganisation judiciaire, la formation des magistrats de l'ordre judiciaire et administratif, l'élaboration de nouveaux textes de procédure pénale, civile et administrative.

* La formation de juristes francophones

La Maison du Droit organise des cours annuels de français et des formations linguistiques intensives destinés aux candidats aux formations et stages organisés en France par les universités, l'ENA, l'Institut international d'Administration publique, l'Ecole nationale de la magistrature, l'Ecole nationale des greffes et les Centres de formation professionnelle d'avocats et de notaires. Ces formations linguistiques sont également ouvertes aux étudiants, aux fonctionnaires et aux praticiens du droit désireux d'acquérir une bonne maîtrise du français juridique.

Bien qu'ayant été recentrées sur l'étude du français juridique et sur les niveaux avancés de formation, les formations linguistiques de la Maison du Droit font l'objet d'une demande constamment croissante et ont rassemblé, sur l'année 1995/1996, 172 auditeurs.

* L'information et la documentation juridique

Implantée sur le campus de l'université de droit de Hanoi, la Maison du Droit sert aussi de centre de documentation ouvert aux étudiants et juristes vietnamiens comme aux professionnels étrangers en fonction au Vietnam : sa bibliothèque, qui comprend plus de 3.000 ouvrages de droit, dont plus de 2600 ouvrages et encyclopédies en français couvrant toutes les disciplines juridiques, et près de 400 ouvrages juridiques en langue vietnamienne, des textes juridiques vietnamiens traduits en français et un certain nombre de banques de données juridiques françaises (lois et règlement, jurisprudence de la Cour de cassation) ou vietnamiennes (Base des textes législatifs et réglementaires élaborée par l'Assemblée nationale vietnamienne).

Ce fonds est fréquenté par 2 à 300 usagers réguliers, et par de nombreux lecteurs plus occasionnels.

La Maison du Droit a également entrepris un vaste programme de traduction des textes vietnamien en français et des textes français en vietnamien. Cette activité, extrêmement exigeante en termes de temps et de moyens, est toutefois peut-être menée de manière un peu trop systématique. Par exemple, s'il est certainement utile -ne serait-ce que pour faciliter l'ouverture économique du Vietnam- de favoriser l'accès des investisseurs ou juristes étrangers aux textes vietnamiens fondamentaux relatifs au droit économique ou à la législation financière, une traduction systématique des codes de procédure français n'est en revanche peut-être pas indispensable pour nourrir la réflexion sur la rénovation du droit procédural vietnamien.

Enfin, la Maison du Droit a entrepris la publication d'une revue juridique bilingue, les " Cahiers vietnamiens du Droit " qui sera une source très utile d'informations et de commentaires sur l'activité législative vietnamienne et un instrument d'étude du droit comparé français et vietnamien.

· La médecine et la santé publique

La médecine et la santé publique sont un autre secteur de coopération ancienne et féconde entre la France et le Vietnam : le milieu médical est certainement au Vietnam le milieu scientifique où la francophonie et la coopération scientifique avec la France sont les plus répandues.

La coopération dans le domaine de la formation médicale repose sur l'organisation à l'échelle nationale d'un dispositif coordonné permettant d'envoyer chaque année 80 à 100 jeunes spécialistes vietnamiens, recrutés dans une dizaine de spécialités différentes, pour occuper pendant un an un poste de " faisant fonction d'interne " dans un CHU français. Les candidats, 300 par an environ, suivent des sessions de formation organisées à Hanoi et à Ho Chi Minh-Ville et dispensées par des missions d'enseignants français. Ils sont sélectionnés au vu de l'examen organisé à l'issue de cette formation, et de tests linguistiques organisés par l'Ambassade de France. Une de ces filières permet la sélection et l'accueil en France de pharmaciens et de biologistes.

Cette coopération dans le secteur de la formation est complétée par des opérations de réhabilitation et de modernisation des équipements, associant de multiples partenaires, qui ont concerné depuis 1992 plusieurs hôpitaux vietnamiens, l'ancien Institut Pasteur et le Centre de transfusion sanguine de Hanoi.

Une formation en santé publique a également été mise en place depuis la fin de 1995. Organisée par les Ecoles de Santé publique de Nancy et de Bordeaux, elle doit permettre l'obtention en deux ans au Vietnam d'un diplôme inter-universitaire français pouvant être pris en compte pour l'obtention du master vietnamien de santé communautaire, ou être prolongé par la préparation en France d'un diplôme d'étude approfondie ou d'une thèse.

· Les formations en sciences sociales et humaines

Les sciences humaines offrent de larges possibilités de développement de la coopération franco-vietnamienne. Les besoins des autorités vietnamiennes sont en effet considérables dans ce domaine, qui bénéficiait dans le passé d'une importante aide soviétique. Les premières actions engagées ont été modestes : collaboration entre les archives nationales des deux pays, réalisation d'un atlas informatisé du Vietnam.

Depuis le début des années 1990 cependant, de nouvelles perspectives semblent s'ouvrir :

- la France est intervenue depuis 1992 en appui d'un programme du Fonds des Nations Unies sur la population (FNUAP) tendant à la création d'un centre de population à l'Ecole Supérieure d'Economie de Hanoi. Complémentaire de cette action multilatérale, la contribution de la France, assurée par le Centre d'études et de recherches sur les populations africaines et asiatiques de l'Université de Paris V, est centrée sur la formation de démographes francophones. Les bénéficiaires de ce programme, recrutés au niveau de la maîtrise, du DEA ou du doctorat, peuvent, après avoir suivi une formation linguistique et un cours de méthodologie des sciences sociales dispensé en français, accéder à des formations en France : 8 étudiants ont passé à ce titre au moins un an en France ;

- la réouverture à Hanoi, en 1991, de l'Ecole Française d'Extrême Orient (EFEO) est aussi un signe positif de reprise de la coopération scientifique et culturelle dans un domaine -l'étude des civilisations- où la France a acquis une grande expertise, et qui revêt une grande importance pour le Vietnam, soucieux de préserver sa culture et son identité.

Fondée en 1898, l'ancienne " Mission archéologique d'Extrême Orient " s'était installée à Hanoi en 1902, où elle a fonctionné jusqu'en 1959. Elle a largement contribué à l'étude et à la conservation du patrimoine des civilisations indochinoises et asiatiques, comme à la formation de chercheurs vietnamiens.

Elle offre à nouveau, depuis 1996, des formations en méthodologie des sciences sociales, complétées en tant que de besoin par un soutien linguistique, qui s'adressent à des enseignants-chercheurs et à des étudiants de l'université de Hanoi, ainsi qu'à des chercheurs du Centre national des sciences sociales et humaines, et elle a mis en place deux programmes de recherche et un programme de publications en français et en vietnamien.

· La formation des journalistes

Récente, la contribution française à la formation des journalistes est née d'une coopération qui a débuté en 1993 entre l'Association des journalistes vietnamiens, qui fédère l'ensemble des 7.000 journalistes exerçant dans la presse écrite, de radio, de télévision et d'agence, l'Ecole supérieure de journalisme de Lille et le ministère français des affaires étrangères.

Elle repose sur un programme de formation continue de trois ans (1996-1998) pendant lesquels seront organisés 10 stages de perfectionnement annuels d'une à deux semaines sur des thèmes variés (traitement de l'information économique, secrétariat de rédaction et mise en page, gestion des rédactions ...). Ce programme devrait s'adresser, par an, à 150 journalistes professionnels diplômés de l'enseignement supérieur sélectionnés sur critères professionnels.

C. LES FORMATIONS EN FRANCE : LE DÉVELOPPEMENT DES PROGRAMMES DE BOURSES ET DE STAGES

Comme le met en évidence l'analyse des actions menées dans les différents secteurs de coopération, l'aide à la formation sous forme de bourses d'études et de stages est une composante importante de la coopération franco-vietnamienne, et un moyen efficace de développer la francophonie et la connaissance de la France parmi l'élite intellectuelle vietnamienne.

Cette aide, qui s'est considérablement accrue depuis 1990, fait d'ailleurs l'objet d'une forte demande de la part des jeunes diplômés et scientifiques vietnamiens. Le développement des bourses se heurte cependant à la nécessité de limiter les dépenses publiques, en raison du coût élevé de cette forme d'aide : les crédits de bourse représentent à eux seuls près du quart de l'ensemble des moyens mobilisés par la France en faveur du Vietnam.

Environ 700 étudiants ou stagiaires poursuivent annuellement des études ou suivent des stages en France avec des bourses du gouvernement français ou une prise en charge sur les fonds publics français. La montée en puissance des attributions de bourses a été rapide puisque de 1990 à 1995, elles ont concerné 1.400 boursiers, dont le plus gros contingent (plus de 1.000) a poursuivi des études scientifiques et techniques (sciences exactes, sciences de l'ingénieur, économie, agronomie, télé détection, informatique, droit et administration publique, sciences humaines...) la part des boursiers dans les matières littéraires, linguistiques ou artistiques étant nettement plus réduite (350).

Sur la même période de 5 années, environ 500 autres jeunes vietnamiens ont bénéficié de bourses financées par la coopération française décentralisée (collectivités territoriales, chambres de commerce et d'industrie) par des entreprises, par l'Agence pour la coopération technique (ACTIM) ou la Caisse française de développement.

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* *

CHAPITRE III :

LA " PRÉSENCE FRANCOPHONE " AU VIETNAM

Le renforcement de la francophonie et du rayonnement de la culture française au Vietnam ne peut s'opérer sans un effort accru de " présence " de la langue et de la culture française. L'accès au livre, au film ou à la chanson, le contact avec la culture française, la présence de la France et du français dans les médias et dans l'environnement quotidien sont indispensables pour faire naître et soutenir l'intérêt pour notre langue et notre pays, en particulier parmi les jeunes, et pour actualiser l'image de la France et de la culture française.

Après 30 ans de quasi-absence de la France au Vietnam, beaucoup est à faire en ce domaine, même si le développement des échanges de personnes, l'importance du tourisme français au Vietnam contribuent aussi à effacer les conséquences de la longue parenthèse qui a affecté les relations franco-vietnamiennes.

Comme on l'a déjà souligné, le Sommet de Hanoi devrait être l'occasion de potentialiser les actions menées depuis une dizaine d'années pour relancer la diffusion culturelle au Vietnam, et de relayer les efforts qui ont porté, avec des bonheurs et des moyens divers, sur l'animation et les échanges culturels, la politique du livre, le cinéma, la presse et les moyens audiovisuels.

A. L'ANIMATION ET LES ÉCHANGES CULTURELS

L'animation et les échanges culturels sont essentiellement promus par les centres français, en particulier l'Alliance culturelle de Hanoi et l'IDECAF de Ho Chi Minh-Ville.

L'Alliance française est le maître d'oeuvre de la politique d'échanges artistiques, à laquelle est consacré un budget annuel de 2 millions de francs qui ne peut malheureusement être " démultiplié " par des cofinancements locaux. L'accent est mis sur des projets réalisés en coopération entre des créateurs français et vietnamiens : ont ainsi été présentés au public vietnamien des pièces de théâtre (" les Fourberies de Scapin " en vietnamien), un opéra classique (" Lucile ", le premier opéra monté au Vietnam depuis 20 ans, avec un orchestre et des chanteurs vietnamiens), un spectacle de danse contemporaine monté par Ea Sola. La célébration de la fête de la musique, l'organisation à Hué d'un festival francophone, et celle, en 1992, d'un concert du chanteur Jean-Jacques Goldman sont d'autres exemples, peut-être susceptibles de toucher un plus large public, de la relance de l'action culturelle au Vietnam.

L'IDECAF de Ho Chi Minh-Ville -dont l'activité s'est longtemps cantonnée à l'enseignement- a également contribué au développement de l'animation et des échanges artistiques et les activités qu'il organise (spectacles de variétés, cinéma, " karaoké ") remportent un grand succès.

Enfin, les actions de formation artistique ont également été privilégiées, par la mise en place d'ateliers de théâtre, d'arts plastiques, de formation musicale animés par des artistes français.

B. LA POLITIQUE DU LIVRE

La politique du livre, à laquelle sont consacrés des crédits de l'ordre de 1,7 million de francs, est un élément essentiel de la politique d'aide à la formation et de la diffusion culturelle.

Outre le développement, difficile, de la présence en librairie d'ouvrages français à des prix abordables, qui franchira cette année une étape importante avec l'ouverture déjà mentionnée de la librairie francophone de Hanoi, elle s'organise selon trois axes :

- l'aide à la publication et à la traduction d'ouvrages classiques et contemporains de la littérature française, qui s'est surtout développée depuis 4 ans : 60 oeuvres ont été traduites jusqu'en 1996, dont 20 pour la seule année 1996 ;

- le don de documentation à des bibliothèques, des organismes de diffusion culturelle et scientifique, à des personnalités du monde éditorial ;

- l'invitation en France d'auteurs vietnamiens et de responsables de l'importation et de la diffusion de la littérature étrangère au Vietnam et, parallèlement, à l'occasion de manifestations françaises, comme " Le Temps des Livres " en 1995, l'invitation au Vietnam d'auteurs et éditeurs français.

Un programme spécifique est en outre consacré à la diffusion de l'information scientifique et technique française (0,7 million de francs).

C. LE CINÉMA

La coopération dans le secteur du cinéma a bénéficié du tournage au Vietnam de trois films français en 1991 et 1992 (l'Amant, Dien Bien Phu, Indochine) qui a permis d'établir de nouvelles relations entre les deux industries, favorisées par les efforts du service culturel de l'ambassade pour promouvoir chaque année des voyages en France de cinéastes vietnamiens, pour contribuer à la formation sur place ou à Paris (grâce à des bourses de la Femis) des jeunes professionnels, et par l'octroi d'aides à la production de films vietnamiens.

Quant à la promotion du film français au Vietnam -où le cinéma français avait pratiquement disparu- elle se heurte à un certain nombre d'obstacles : problèmes de droits, de doublage ou de sous-titrage, insuffisance de l'équipement technique des salles.

Le ministère des affaires étrangères est intervenu pour aider la diffusion du cinéma français dans le cadre de festivals : la célébration du centenaire du cinéma a ainsi été marquée au Vietnam par l'organisation d'un " mois du cinéma français " au cours duquel des films de fiction mais aussi des films documentaires ont été projetés à l'IDECAF de Ho Chi Minh-Ville et à Hanoi.

L'effort porte actuellement sur l'amélioration des conditions de présentation des films : comme en témoignent le projet d'installation à Hanoi d'une salle moderne, et le rééquipement complet en 1996 de la salle de cinéma de l'IDECAF.

D. LA PRESSE ÉCRITE ET L'AUDIOVISUEL

Les médias -et en particulier l'audiovisuel- constituent dans tous les pays le meilleur moyen d'atteindre le grand public : c'est particulièrement vrai au Vietnam, dont 80 % de la population réside en zone rurale, et ne peut guère avoir accès à d'autres supports de la diffusion culturelle française que la télévision et, surtout, la radio.

1. La presse écrite

Il existe 4 titres francophones au Vietnam :

- un quotidien, le " Courrier du Vietnam " édité par l'Agence vietnamienne d'information (AVI), dont la création est le résultat d'un accord passé en 1994 entre l'AVI et l'AUPELF-UREF, et dont le lancement avait été aidé à hauteur de 500.000 F (400.000 F apportés par l'AUPELF-UREF et 100.000 F financés sur les crédits de l'action audiovisuelle extérieure).

Depuis son lancement, la qualité de ce journal de 8 pages s'est améliorée, et des négociations sont en cours entre l'AVI et l'AUPELF-UREF pour augmenter son tirage -qui est de 3.000 exemplaires environ- et développer sa distribution ;

- un hebdomadaire, " le Courrier du Vietnam hebdomadaire ", édité par l'AVI qui contrôle seule sa conception et sa diffusion ;

- un hebdomadaire culturel et économique édité à Ho Chi Minh-Ville par le groupe de presse Saïgon Times, " Saïgon Eco ", qui a bénéficié en 1993 d'une modeste aide au lancement française ;

- un autre hebdomadaire économique et culturel, " Vietnam Scoop " lancé en 1993 par une petite société de presse franco-belge et le Comité d'Etat vietnamien pour les investissements (CEVI).

" Vietnam Scoop ", qui tire à 5.000 exemplaires, a été racheté à 80 % en 1995 par deux groupes français, Hachette et Excelsior -suivant ainsi l'exemple des groupes de presse australiens, thaïlandais ou suisses qui participent déjà depuis longtemps à l'édition d'une dizaine de publications en anglais ou en vietnamien.

Grâce au renforcement de son actionnariat français, cet hebdomadaire pourrait apporter un utile appui à l'image de la France au Vietnam, et notamment développer l'information disponible sur l'industrie, la technologie et les entreprises françaises.

La présence française et francophone dans la presse écrite vietnamienne ne passe cependant pas seulement par l'existence de la presse de communication francophone qui ne s'adresse qu'à un public restreint, et la coopération journalistique se préoccupe donc également, en liaison avec les actions de formation de journalistes, de promouvoir la parution de pages en français dans la presse populaire vietnamienne (quotidiens d'information, presse féminine, publications destinées à la jeunesse).

2. La radiodiffusion et la télévision

a) La radiodiffusion

Moins écoutée qu'autrefois en ville, la radio est en revanche le média le plus répandu -et le plus accessible- dans le milieu rural.

La présence radiophonique française repose à la fois sur les émissions de RFI et sur la coopération avec la radio vietnamienne.

* RFI émet en ondes courtes sur le Vietnam 6 heures par jour en français, 1 h 30 en vietnamien et 1 heure en anglais. Il est à noter que les émissions en vietnamien sont peu appréciées des autorités vietnamiennes.

RFI fournit également à la radio nationale des programmes musicaux enregistrés.

* La coopération avec les radios vietnamiennes

La radio nationale vietnamienne, la Voix du Vietnam (VOV), diffuse quotidiennement deux heures de programmes en français : elle fait notamment une place importante à la chanson d'expression française. Elle diffuse trois fois par jour un journal en français, plusieurs fois par semaine des émissions d'apprentissage du français d'une heure, une fois par semaine une émission musicale, " Top France ".

Des radios régionales programment également cours de français et chansons françaises : à Ho Chi Minh-Ville, la radio " la Voix du peuple " reprend " Top France ", et un petit programme, " Francophonie Diffusion ", assure la présence de la chanson française sur une fréquence FM, grâce à un émetteur radio dépendant de la télévision de Ho Chi Minh-Ville.

b) La télévision

L'essentiel de la présence des programmes français et en français résulte de leur diffusion par la télévision vietnamienne, le grand public n'étant pas équipé pour la réception directe des chaînes diffusées par satellite.

· La réception des chaînes françaises

TV5 est disponible en compression numérique depuis avril 1996 sur le satellite Asia Sat 2 dans un bouquet de chaînes européennes (DW, RAI, TVE, MCM) mais la réception de ce bouquet est subordonnée à l'usage d'un décodeur et n'est pas accessible à l'ensemble du public.

La réception de TV5, en dehors des hôtels et autres établissements disposant du matériel de décodage nécessaire, sera donc subordonnée à sa reprise sur les réseaux de câble et de MMDS, qui diffusent des programmes étrangers. A cet effet, les têtes de réseau de Hanoi et de Ho Chi Minh-Ville doivent être dotées de décodeurs par la chaîne.

CFI est diffusée sur le Vietnam en analogique et en clair via le satellite indonésien Palapa I, mais sa réception directe ne concerne que le public expatrié et celui des centres français, Alliance française et IDECAF, et ses programmes n'atteignent donc le public vietnamien qu'à travers leur reprise par les chaînes vietnamiennes, équipées à cette fin depuis 1991 d'antennes de réception.

· La coopération avec la télévision vietnamienne

- La télévision nationale vietnamienne, VTV, est née en 1988, lorsque ont été dissociées les activités de radio de télévision auparavant réunies au sein de la radio-télévision du Vietnam, créée en 1970.

Son budget croît rapidement : de 24 milliards de dongs en 1992 à 96 milliards de dongs en 1996 3( * ) , et elle s'est récemment ouverte à des recettes publicitaires dont le montant vient en déduction des dépenses publiques.

VTV, qui diffuse de 6 h du matin à 11 h du soir, comprend deux chaînes : VTV 1 (généraliste) et VTV 2 (scientifique et éducative). Sur VTVI existent trois unités de programmes : VTVI, dont l'antenne ouvre à 18 h 45, VTV3, la chaîne commerciale relayée sur VTVI l'après-midi et le soir, et VTV4, chargée des programmes destinés à la diffusion satellite à l'étranger qui propose pour l'instant la rediffusion du journal en vietnamien et du journal en anglais repris sur la chaîne russe du réseau MMDS.

La télévision nationale vietnamienne est diffusée par satellite et relayée dans les provinces via un réseau terrestre de réception et des réémetteurs : sa couverture représente 70 % du territoire.

L'audience réelle de la télévision est difficile à mesurer : le parc des téléviseurs serait de 6 à 7 millions, mais il n'est pas significatif de l'audience, la télévision étant encore souvent regardée dans un cadre plus communautaire que familial, notamment à la campagne. La télévision nationale évalue pour sa part à 70 % la proportion de la population pouvant avoir accès à la télévision, qui est surtout regardée le soir.

Les projets de la télévision nationale vietnamienne pour le moyen terme sont l'augmentation de son volume de production et l'extension de sa couverture à 90 % du territoire.

- Les télévisions provinciales -essentiellement celles de Ho Chi Minh-Ville et de Hanoi- présentent, en dehors de programmes propres, les émissions d'information et une partie des programmes de la télévision nationale.

Depuis 1993, elles sont placées sous la tutelle conjointe de VTV (qui elle-même relève directement du gouvernement) et des comités populaires locaux.

La coopération avec la télévision vietnamienne en matière de programmation repose sur trois éléments :

- le principal est la reprise depuis 1991 de programmes de CFI : en 1992 et 1993, VTV diffusait sur ses deux chaînes 5 heures par jour de programmes provenant de la banque française (rediffusions comprises).

Les fictions françaises, mais aussi des émissions scientifiques comme E=M6 remportent un net succès auprès du public. La reprise des programmes de CFI alimente aussi les programmes des télévisions régionales, en particulier celle de Ho Chi Minh-Ville.

VTV a en outre conclu en 1992 avec France 3 un accord de jumelage qui prévoit des échanges de programmes et une coopération en matière de production et de formation. Cet accord permet aussi de développer la coopération entre la télévision vietnamienne et les stations régionales de France 3.

- Depuis 1989, VTV diffuse un programme d'apprentissage du français , dont les émissions sont complétées par des livrets pédagogiques. A partir de l'année suivante, ont également été fournies, par cassettes, des émissions scientifiques et culturelles en vietnamien. Une nouvelle émission éducative et un projet de film sur la francophonie sont également en chantier.

La coopération franco-vietnamienne en matière de télévision éducative pourrait aussi se développer à travers un partenariat avec " La Cinquième ", via l'association internationale des télévisions éducatives. Cependant les projets de la télévision éducative vietnamienne semblent pour l'instant essentiellement centrés sur la création d'un système d'enseignement à distance par la télévision.

- Enfin, il convient de souligner que depuis le 14 juillet 1993, VTV assure la diffusion nationale quotidienne d'un journal d'actualité nationale et internationale en français . Ce journal est programmé à 22 h 30, après un journal en anglais -à une heure dont il faut regretter qu'elle soit un peu tardive pour le public vietnamien, qui commence très tôt sa journée de travail.

Depuis le 1er avril 1996, une deuxième édition du journal en français est diffusée à la mi-journée, à 13 h : elle " actualise " le journal du soir, sur la même durée et selon le même format qui privilégie le " tout en images ", et utilise notamment les images d'actualité d'AITV et les dépêches AFP.

Cette réalisation, qui participe à la fois des actions de formation, de fourniture d'équipement et d'aide à la réalisation de programmes, représente une réussite exemplaire de la coopération audiovisuelle, et a reçu un accueil très favorable du public, séduit par une conception du journalisme télévisuel nouvelle au Vietnam. L'équipe vietnamienne chargée de ce journal comprend 9 personnes, dont un rédacteur en chef. Quatre journalistes francophones ont été formés spécialement pour la réalisation de ce projet, sur place et en France. Un représentant de l'Ecole supérieure de journalisme de Lille encadre l'équipe vietnamienne, et le coopérant français affecté à la télévision de Hanoi assure également le suivi et la continuité du journal.

La télévision locale de Ho Chi Minh-Ville s'est inspirée de cet exemple, et diffuse également depuis janvier 1995 un bulletin d'information francophone.

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* *

CONCLUSION :

L'AVENIR DE LA FRANCOPHONIE AU VIETNAM

Demain comme hier, le Vietnam restera essentiellement " vietnamophone ", et l'enseignement des langues étrangères y sera fonction de leur utilité en tant que vecteur des savoirs et instrument de développement. Dans ce pays légitimement fier de son histoire et jaloux de son indépendance, ouvert au dialogue des cultures mais soucieux de garder la maîtrise de son destin et de trouver sa propre voie vers le progrès, l'apprentissage des langues n'est pas une fin en soi -et encore moins l'expression de l'adhésion à un modèle- mais le moyen d'intégrer, sans renoncer à sa singularité, les expériences et les acquis d'autres civilisations.

C'est bien ainsi, d'ailleurs, que le français était devenu, pendant la première moitié de ce siècle, la langue des élites intellectuelles vietnamiennes, pour lesquelles il représentait une voie d'accès à ce que la société et la pensée occidentales pouvaient apporter à leur pays, bridé par des coutumes archaïques, en termes de progrès scientifique et économique, d'édification d'une société et d'un Etat modernes et, finalement, d'émancipation nationale.

La poursuite, à travers toutes les vicissitudes des relations franco-vietnamiennes, d'une coopération scientifique et culturelle fructueuse, le foisonnement d'initiatives et de projets qui a immédiatement suivi la " réouverture " du Vietnam incitent à penser que le dialogue franco-vietnamien est toujours considéré, de part et d'autre, comme une source d'enrichissement mutuel, et que le français, instrument d'expression mais aussi de construction de la pensée, demeurera, pour le Vietnam d'aujourd'hui, un atout précieux pour réussir son décollage économique tout en préservant son identité.

Il a semblé à la mission d'information que le choix des orientations selon lesquelles se réorganise, en tenant compte de ses acquis passés, la coopération culturelle scientifique et technique avec le Vietnam correspondait bien aux domaines dans lesquels la France -et le français- peuvent apporter un concours original et efficace au " renouveau " vietnamien.

La mission a également été impressionnée par l'enthousiasme et la compétence de tous les acteurs de la coopération culturelle française qu'elle a rencontrés, et par la qualité des relations qu'ils entretiennent avec leurs interlocuteurs et partenaires vietnamiens. Elle a aussi pu constater la réelle " demande " qui se manifeste dans les milieux universitaires et scientifiques en faveur d'un resserrement des relations avec la France, notamment au niveau des collaborations et des échanges avec des universités et organismes de recherche français.

Cependant ce bon départ ne suffira sans doute pas, après la longue éclipse de l'enseignement du français, à garantir que notre langue retrouvera au Vietnam la place correspondant à la contribution qu'elle peut apporter à son développement.

Dans la période de profonde évolution que traverse le Vietnam, il paraît indispensable de veiller en permanence à adapter les actions menées aux réalités du terrain, aux attentes de nos partenaires, à la recherche de l'efficacité.

Cette " évaluation permanente " doit en particulier, pour la mission, porter sur certains points essentiels :

· La définition des objectifs et des ambitions de la politique de diffusion linguistique , qui suppose en particulier que soit envisagée avec réalisme la place du français vis-à-vis de l'anglais.

Avec réalisme, c'est-à-dire sans illusions ni défaitisme :

- Il faut éviter de confondre le soutien indispensable à une francophonie vivante avec la " défense du français à tout prix " et d'abord ne pas entretenir l'illusion que le français pourrait redevenir la principale langue étrangère, voire la " langue seconde " du Vietnam. Toute politique qui consisterait à opposer -ou paraître opposer- le français à l'anglais serait en effet vouée à l'échec et à terme préjudiciable à l'avenir du français au Vietnam.

Car il serait absurde de contester que l'anglais est aussi un outil linguistique nécessaire au développement du Vietnam. L'anglais est la " langue commune " des pays de la zone Asie Pacifique, dont beaucoup n'ont pas de tradition francophone, à commencer par les principaux partenaires commerciaux du Vietnam (Taiwan, le Japon, la Corée, Singapour, Hong Kong...).

C'est la langue de l'ASEAN, et c'est aussi, qu'on le veuille ou non, la principale langue de communication internationale.

Il est donc normal que l'anglais soit considéré au Vietnam comme la langue " utile " par excellence, d'autant plus que l'autorité de la langue tient d'abord, de nos jours, à la performance économique et que les attentes des autorités vietnamiennes à l'égard de leurs partenaires étrangers s'expriment surtout aujourd'hui -décollage économique oblige- en termes d'investissements et de développement des échanges commerciaux.

- Mais il ne faut pas, pour autant, redouter que le développement inéluctable de l'anglais au Vietnam soit un obstacle à celui du français.

Le développement d'un " bilinguisme anglais-français " est au contraire une chance de confirmer le rôle spécifique du français comme outil de formation et d'expression de la pensée, spécialement dans certaines disciplines où sa précision et sa rigueur s'avèrent particulièrement utiles.

Tel est bien, du reste, le sens des observations faites spontanément par plusieurs interlocuteurs de la mission et qui distinguaient l'anglais, " langue du commerce " ou " des affaires ", et le français " langue du droit " ou " langue de la littérature ".

La diffusion de l'anglais renforce aussi le rôle du français en tant que langue de la diversité culturelle, face au modèle unique et uniformisateur véhiculé par l'industrie culturelle anglo-saxonne.

Au Vietnam comme ailleurs, et peut-être plus qu'ailleurs, la relance de la francophonie passe par une valorisation du " plurilinguisme " et il serait très utile que la coopération dans le domaine de l'enseignement et de la formation mette l'accent sur le développement des possibilités offertes aux élèves ou aux étudiants qui ont choisi l'anglais comme langue étrangère d'apprendre aussi le français en " deuxième langue ".

· L'attention portée aux débouchés offerts aux jeunes vietnamiens francophones

Le développement de l'enseignement du français dans l'enseignement scolaire et universitaire est évidemment indispensable pour reconstituer un " vivier " de francophones. Mais les efforts considérables qui ont déjà été consentis en ce sens, et qui commencent d'ailleurs à porter leurs fruits, n'atteindront pas leur but si le développement de l'offre d'enseignement du français ne tient pas compte des débouchés qui seront offerts aux élèves et étudiants ayant fait le choix du français.

Dans un pays en développement, où les jeunes générations sont nombreuses, le marché du travail encore relativement étroit, et où les familles accordent -comme en France- une importance extrême à la formation de leurs enfants, il est évident que les jeunes n'apprendront pas le français pour le seul plaisir d'apprendre une langue étrangère, mais parce qu'ils en attendent une chance supplémentaire de réussite ou d'insertion professionnelle. C'est encore plus vrai dans le cas des filières bilingues, dont les résultats en terme de maîtrise de la langue sont certes exceptionnels, mais qui exigent des élèves un investissement également exceptionnel.

Il paraît donc essentiel de prendre toutes les précautions possibles pour leur éviter une déception qui serait sans doute fatale à une renaissance durable du français au Vietnam, et notamment :

- veiller à ce que le développement des filières bilingues suive -et non précède- une étude approfondie des débouchés offerts à leurs futurs diplômés ;

- inciter les entreprises françaises implantées au Vietnam à embaucher de jeunes diplômés francophones ;

- développer prioritairement les formations aux niveaux (bac + 2) et dans les secteurs où les perspectives de recrutement dans des entreprises françaises et de développement des échanges franco-vietnamiens apparaissent les plus favorables (par exemple la bureautique, l'agronomie et l'agro-alimentaire, le tourisme, la santé, les télécommunications...).

· La concentration des efforts dans les " domaines d'excellence " de la coopération franco-vietnamienne , non seulement pour valoriser les résultats déjà acquis, mais aussi parce que ce sont des domaines très porteurs pour l'avenir du Vietnam et la présence culturelle et économique française :

- la médecine et la santé publique ;

- le droit et l'administration, où la coopération scientifique est étroitement liée à la coopération économique, les investissements français au Vietnam ne pouvant qu'être favorisés par une réflexion commune en ce domaine, et par la participation de juristes français à l'élaboration du droit vietnamien des sociétés, de la banque et des assurances, ou des investissements étrangers ;

- les autres sciences sociales -histoire, anthropologie, économie, environnement, démographie- dont le développement est nécessaire à la maîtrise de l'évolution économique du Vietnam et à la prévention des risques de déstabilisation sociale ;

- la politique culturelle (protection du patrimoine, encouragement à la création) qui, loin d'être un luxe superflu, est une préoccupation indispensable pour un pays engagé dans un processus de " modernisation " rapide mais soucieux de préserver son identité.

· La cohérence de l'offre de formation en France

Comme la mission a pu le constater, la demande de formation en France est très vive : l'espoir de pouvoir suivre un stage, une formation, des études en France joue un rôle souvent très important dans le développement de la demande d'enseignement du français, qu'il s'agisse de l'enseignement du français général ou du français de spécialité.

Il faut être conscient que la possibilité de multiplication des bourses se heurte rapidement à des limites budgétaires, et aussi que dans ce domaine la concurrence des formations anglophones, notamment de celles offertes dans la région, ne cessera sans doute de se renforcer : l'Australie, par exemple, a déjà mis en place un important programme de bourses universitaires.

Il est donc très important de consentir tous les efforts qui pourront l'être pour renforcer l'efficacité et la qualité de la politique des bourses, et en particulier :

- de développer, dans toute la mesure du possible, une programmation de l'offre de bourses (nombre et nature des bourses offertes, secteurs concernés). C'est en effet un domaine où le manque de suivi des efforts et de continuité dans les engagements est particulièrement " contre-productif " ;

- de coordonner l'offre de bourses, et en particulier de tenir compte des possibilités offertes dans le cadre de la coopération décentralisée et de la coopération inter-universitaire ;

- de " cibler " les formations offertes (niveau de formation, disciplines, sujets étudiés) en fonction des possibilités d'insertion des boursiers à leur retour au Vietnam et des priorités de la politique vietnamienne de formation et de développement.

· La mise en valeur de l'effort de coopération français

On ne saurait reprocher à la coopération française de privilégier l'action en profondeur sur l'ostentation et le savoir-faire sur le faire-savoir, aisément déplacé lorsque l'on travaille avec et chez des partenaires étrangers.

Cependant, à l'âge de la communication, un excès de discrétion peut devenir un handicap : c'est ainsi que la mission s'est étonnée de constater, dans un grand lycée vietnamien, qu'une plaque immortalisait le don par le consulat australien d'un laboratoire de langues, alors que la contribution de la France à la constitution d'un remarquable centre de documentation multimédia n'était en rien signalée à l'attention et à la mémoire du nombreux public d'élèves qui le fréquentait.

Si louable qu'elle soit, notre modestie peut donc parfois être à notre désavantage et, sans imiter des exemples parfois caricaturaux, il serait sans doute souhaitable de ne pas négliger de valoriser les réalisations et les succès de la coopération franco-vietnamienne ni de faire connaître au peuple vietnamien l'intérêt très réel que nous portons à son avenir et à la poursuite entre nos deux pays d'un dialogue qui a démontré au cours de l'histoire qu'il était une source d'enrichissement mutuel.

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ANNEXE :

PROGRAMME DE LA MISSION

· Mercredi 11 septembre 1996

- 15 h 45 : Arrivée à Hanoi. Accueil par M. Gilles d'Humières, Ambassadeur de France, et les membres du service culturel de l'Ambassade de France.

- 19 h 30 : Dîner buffet à la résidence de l'Ambassade de France, en présence des responsables français de la coopération franco-vietnamienne.

· Jeudi 12 septembre 1996

- 8 h 00 : Réunion à l'Ambassade de France : présentation du dispositif de préparation du Sommet de la francophonie et des activités du Bureau de Coopération Linguistique et Educative.

- 9 h 00 : Entretien avec la Présidente de la Commission de la Culture, de l'éducation, de la jeunesse et de l'enfance de l'Assemblée nationale, Mme Tran Thi Tam Dam.

- 10 h 30 : Entretien avec le Président de la commission de la science, de la technologie et de l'environnement de l'Assemblée nationale, M. Vu Dinh Cu.

- 11 h 30 : Visite de l'Ecole française internationale de Hanoi.

- 13 h 00 : Déjeuner offert par M. Jacques Audibert, Conseiller Culturel.

- 14 h 30 : Entretien avec M. Nguyen Dy Nien, Vice-Ministre des affaires étrangères.

- 15 h 30 : Entretien avec les responsables du Bureau de l'AUPELF-UREF.

- 17 h 00 : Réception à la résidence de l'Ambassade de France en l'honneur de la délégation, en présence des partenaires vietnamiens de la francophonie et des membres de la communauté française de Hanoi.

- 19 h 00 : Dîner offert par la Commission de la Culture, de l'Education, de la Jeunesse et de l'Enfance de l'Assemblée nationale.

· Vendredi 13 septembre

- 8 h 00 : Visite du Centre de Formation Continue au français de spécialité.

- 9 h 00 : Entretien avec M. Nguyen Trung Kien, Vice-Ministre de la culture.

- 10 h 00 : Entretien au Conseil populaire de la ville de Hanoi avec M. Bang Viet, Vice-Président.

- 11 h 00 : Entretien avec M. Phung Van Tuu, Vice-Président de l'Assemblée nationale.

- 14 h 00 : Visite de l'Alliance française.

- 15 h 00 : Visite de la Maison du Droit franco-vietnamienne.

- 16 h 00 : Visite du Centre Franco-vietnamien de formation à la Gestion.

- 17 h 00 : Visite du bureau régional de l'Agence de la Francophonie (ACCT).

- 19 h 30 : Dîner buffet à la Résidence de l'Ambassade de France en présence de parlementaires, de personnalités et d'intellectuels francophones.

· Samedi 14 septembre 1996

- 9 h 00 : Visite de la Télévision du Vietnam.

- 10 h 30 : Entretien avec M. Nguyen Ngoc Tran, Président de la section vietnamienne de l'AIPLF, Vice-Président du comité national pour la préparation du Sommet de la francophonie.

· Lundi 16 septembre 1996

- 7 h 50 : Arrivée à Hué. Accueil à l'aéroport par M. Le Viet Xe, Vice-Président du comité populaire de la province de Thua Thien-Hué.

- 9 h 00 : Visite du lycée Quoc Hoc. Entretien avec M. Au Thanh Minh, directeur du service de l'Education de la province de Thua Thien-Hué, M. Truong Si Sang, responsable du Programme de l'Enseignement bilingue, et M. Dang Xuan Trung, proviseur du lycée Quoc Hoc. Visite d'une classe de français.

- 9 h 30 : Lycée Hai Ba Trung : entretien avec les responsables de l'établissement. Visite de deux classes bilingues.

- 10 h 00 : Visite du Centre Français de Hué.

- 11 h 00 : Rencontre avec les membres du Comité populaire de la ville de Hué.

- 14 h 00 : Visite des principaux sites de Hué : Cité impériale, Vallée des tombeaux.

- 19 h 00 : Dîner offert par M. Nguyen Van Me, Président, et les membres du Comité Populaire de la province de Thua Thien-Hué.

· Mardi 17 septembre 1996

- 10 h 20 : Arrivée à Ho Chi Minh-Ville. Accueil par M. Jean Charroing, attaché culturel.

- 13 h 00 : Déjeuner offert par M. Jacques Buguet, Consul général de France.

- 15 h 00 : Visite du lycée Le Hong Phong.

- 19 h00 : Dîner offert par M. Jean Charroing, attaché culturel.

· Mercredi 18 septembre 1996

- 8 h 30 : Entretien avec M. Dong Van Mong, directeur de l'Institut d'Echanges Culturels avec la France (IDECAF) et visite de l'Institut.

- 12 h 30 : Déjeuner offert par M. Stéphane Dovert, attaché scientifique, en présence de personnalités francophones.

- 15 h 30 : Visite de la Télévision de Ho Chi Minh-Ville.

- 17 h 00 : Rencontre avec Mme Luong Bach Van, secrétaire générale, et des membres de l'Association d'Amitié Vietnam-France.

- 19 h 00 : Réception offerte par M. François Barateau, Consul de France, en présence de personnalités francophones et des responsables de la politique de diffusion culturelle et linguistique à Ho Chi Minh-Ville.

· Jeudi 19 septembre 1996

- 8 h 30 : Visite des principaux sites de Ho Chi Minh-Ville, et visite à Cu Chi.

- 19 h 50 : Départ pour Paris.

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1 " Vers un nouveau contrat pour l'enseignement des langues ", rapport de la mission d'information de la commission des affaires culturelles sur l'enseignement des langues dans l'enseignement scolaire (n° 73, 1995-1996).

2 lorsque la mission a visité la Maison du Droit, le poste de directeur était confié à un éminent avocat vietnamien, Me NGUYEN The Giai, et le poste de directeur adjoint était occupé par un magistrat français de l'ordre judiciaire, M. Alain GUILLOU.

3 1F = environ 2.000 dongs.

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