C. LES FINANCES PUBLIQUES

Le modèle MOSAÏQUE de l'OFCE, utilisé pour réaliser cette projection, ne permet qu'une approche globale des finances publiques. Il a néanmoins été demandé aux experts de l'OFCE d'en tirer le maximum d'indications sur l'évolution détaillée des finances publiques (présentée dans l' annexe n° 1 ). Votre rapporteur s'attachera ci-après à celles qui lui paraissent les plus significatives.

1. Les hypothèses relatives aux dépenses

La définition des hypothèses sur l'évolution des dépenses publiques présuppose :

- un pronostic sur l'orientation délibérée de la politique budgétaire et l'évolution des dépenses publiques autres que les prestations sociales (masse salariale publique, dépenses courantes et investissements des administrations) ;

- un diagnostic sur l'évolution tendancielle des prestations sociales , dont l'évolution à moyen terme est plus difficile à maîtriser par les pouvoirs publics.

· Sur le premier point, les experts de l'OFCE ont retenu l'hypothèse d'un ralentissement de l'évolution des dépenses publiques ( hors prestations sociales) : celles-ci progresseraient en francs constants de 2,5 % par an en moyenne de 1997 à 2002, contre 2,8 % de 1990 à 1996.

Surtout, les dépenses publiques (hors prestations sociales) augmenteraient en projection comme le PIB, alors que sur la période 1990-1996, leur progression a été sensiblement plus rapide que celle du PIB (2,8 % contre 1,2 %). Néanmoins cette hypothèse d'augmentation des dépenses publiques traduit une inflexion par rapport aux contraintes imposées au cours des trois dernières années (1995, 1996 et 1997). Ceci est particulièrement vrai de l'évolution de la masse salariale publique : l'OFCE a ainsi supposé que l'augmentation annuelle moyenne des effectifs publics (+ 40.000 par an) se prolongerait à l'horizon 2002 et que le pouvoir d'achat de l'indice brut des traitements de la fonction publique augmenterait de 0,7 % par an en moyenne de 1998 à 2002 (après - 0,7 % en 1996 et 1997). La masse salariale publique augmenterait ainsi en francs constants de 2,8 % par an en moyenne entre 1997 et 2002, contre 2,3 % par an de 1990 à 1996.

· L'évolution à moyen terme des prestations sociales est conditionnée par la réponse à la question suivante : le ralentissement très marqué de l'évolution des prestations maladie en 1996 et 1997 (respectivement + 0,7 % et + 0,1 % en pouvoir d'achat , contre 1,8 % par an en moyenne de 1990 à 1996) sera-t-il durable ?

Dans les exercices réalisés les années précédentes à la demande du Sénat 9( * ) , les experts de l'OFCE avaient considéré que les plans de maîtrise des dépenses de santé ne modifiaient pas la tendance " lourde " de leur taux de croissance , même si leur effet immédiat sur le niveau de la dépense restait durablement acquis.

L'incidence de la dernière réforme (qui ne se limite pas à une réduction des remboursements mais met en œuvre une nouvelle politique de gestion des soins) sur l'augmentation des prestations-maladie en 1996 et 1997, a conduit l'OFCE à nuancer cette analyse.

Les auteurs de la projection ont ainsi examiné une première hypothèse d'évolution des dépenses de santé à mi-chemin entre, d'une part les évolutions récentes et l'objectif fixé par le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 1998 (+ 2,2 % d'augmentation en francs courants ) et, d'autre part, la tendance de longue période. Sous cette hypothèse, l'augmentation des prestations-maladie sur le moyen terme se stabiliserait autour de 1,4 % par an en francs constants à partir de 1998.

Une deuxième hypothèse a également été envisagée : elle suppose un retour des dépenses de santé vers leur rythme de croissance tendanciel (soit + 2,5 % par an en francs constants à partir de 1999).

Dans la première hypothèse (ralentissement durable de l'évolution des dépenses de santé), le pouvoir d'achat de l'ensemble des prestations sociales augmenterait de 1,7 % par an en moyenne ; dans la seconde hypothèse (retour de la progression des dépenses de santé vers leur rythme d'évolution tendanciel), le pouvoir d'achat de l'ensemble des prestations sociales augmenterait de 2 % par an en moyenne.

2. L'équilibre à moyen terme des régimes sociaux

· Sous l'hypothèse d'un ralentissement durable de l'évolution des dépenses de santé, l'augmentation annuelle moyenne de l'ensemble des prestations sociales entre 1997 et 2002 (+ 3,3 % en valeur) serait inférieure en projection à celle du PIB (3,7 % par an en valeur) et à celle des salaires (qui évoluent en projection sensiblement comme le PIB), ce qui serait favorable au rééquilibrage progressif des comptes sociaux.

Ainsi, l'équilibre à moyen terme des comptes sociaux serait atteint sans apport de recettes supplémentaires.

· Une hypothèse de retour des dépenses de santé vers leur rythme d'augmentation tendanciel aurait une incidence défavorable sur les comptes sociaux dont le solde serait dégradé d'un montant égal à 0,2 % du PIB en 2002.

3. Le besoin de financement des administrations publiques et la dette publique

· Exprimé en pourcentage du PIB, le besoin de financement des administrations publiques (au sens de la comptabilité européenne) se réduit en projection de 0,1 point par an, pour atteindre 2,7 % en 2002.

Le tableau figurant dans l'encadré ci-dessous décrit la variation du déficit public et analyse les différentes contributions à cette variation.

On peut en déduire que le déficit public exprimé en pourcentage du PIB se réduirait en début de période essentiellement grâce à l'accélération de la croissance. En fin de période, le ralentissement de la croissance entraîne une aggravation du ratio déficit public/PIB, compensé toutefois par l'orientation de la politique budgétaire, qui contient l'augmentation des dépenses à un rythme inférieur à la croissance du PIB.



ENCADRÉ N° 3

CONTRIBUTIONS À LA VARIATION DU RATIO DÉFICIT PUBLIC / PIB
(calculs réalisés par l'OFCE)

En %

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

Ratio déficit / PIB (au sens de Maastricht)

5,6

5,6

5,0

4,2

3,1

3,0

2,9

2,8

2,6

2,7

Variation du ratio déficit/PIB (au sens de la Comptabilité nationale) par rapport à l'année précédente



+2,3



- 0,5



- 0,7



- 1,2



- 0,4



- 0,7



- 0,2



- 0,1



- 0,1



0,0

dont :
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
effet du taux de pression fiscale

- 0,4

- 0,1

- 0,5

- 1,4

- 0,3

+0,1

+0,1

- 0,1

+0,1

+0,2

effet de l'écart de croissance du PIB


+1,8


- 0,2


+0,2


+0,4


+0,2


- 0,3


- 0,2


+0,2


+0,2


0,1

effet de l'écart de croissance des dépenses


+0,6


- 0,4


- 0,7


- 0,2


- 0,3


- 0,4


- 0,2


- 0,3


- 0,3


- 0,2

effet des charges d'intérêt

+0,3

+0,2

+0,3

+0,1

0,0

0,0

0,0

0,0

- 0,2

0,0

Source :Comptabilité nationale, prévisions OFCE, modèle MOSAÏQUE.

La première ligne décrit l'évolution du ratio déficit public/PIB au sens de la Comptabilité européenne . Pour les années 1997 à 2002, le résultat est celui de la projection réalisée à l'aide du modèle MOSAÏQUE de l'OFCE.

La deuxième ligne décrit la variation du ratio déficit public/PIB au sens de la Comptabilité nationale par rapport à l'année précédente. Cette ligne peut ainsi ne pas être cohérente avec la ligne précédente en raison de la mesure différente du ratio de déficit public selon la Comptabilité nationale et selon la Comptabilité européenne (comptabilisation différente des coupons courus sur les obligations d'Etat, des opérations de crédit-bail des administrations, des avances accordées par l'Etat aux entreprises du secteur aéronautique et, enfin, de certaines opérations des hôpitaux publics).



Les lignes suivantes décrivent les différentes contributions à la variation du ratio de déficit public, mesuré au sens de la Comptabilité nationale. Un signe - traduit une contribution à la réduction du ratio de déficit public. Une signe + traduit une contribution à l' augmentation du déficit public.

La troisième ligne met en évidence l'incidence de l'augmentation des taux d'imposition décidés en 1993, 1995, 1996 et 1997, sur la réduction du déficit public.

La quatrième ligne montre l'effet de la divergence entre la croissance effective et la croissance potentielle de l'économie française (évaluée ici à 2,5 % par an). Celle ligne permet d'analyser l' incidence de la conjoncture sur le déficit public. Sur la période 1993-1997 , la croissance de l'économie française est inférieure à son potentiel (excepté en 1994), ce qui contribue à l' augmentation du déficit public (notamment en 1993). La croissance des années 1998 et 1999 résultant de la projection de l'OFCE est favorable à la réduction du ratio de déficit public. Le ralentissement en fin de période contribue au contraire à son augmentation.

La cinquième ligne décrit l'effet de l'écart entre l'évolution des dépenses publiques et la croissance potentielle du PIB. C'est une façon d'apprécier l'incidence de l' orientation délibérée de la politique budgétaire . Une augmentation des dépenses publiques inférieure à la croissance potentielle du PIB (évaluée ici à 2,5 %), contribue ainsi à la réduction du ratio de déficit public. C'est le cas pour toutes les années présentées dans le tableau, à l'exception de 1993.

La sixième ligne montre enfin l'incidence de l'évolution des charges d'intérêt . Celle-ci contribue nettement à l'aggravation du ratio de déficit public de 1993 à 1996, en raison de l'augmentation de la dette publique et de la hausse des taux d'intérêt. En projection (1997-2002), les charges d'intérêt n'ont pratiquement pas d'incidence sur la variation du ratio de déficit.

Il faut rappeler que ces calculs sont fortement tributaires de l'évaluation de la croissance potentielle de l'économie française. Celle qui est retenue ici (2,5 %) se situe à l'extrémité haute de la fourchette des estimations de la croissance potentielle.



· La dette publique , exprimée en pourcentage du PIB, s'accroît en projection de 0,7 point par an , pour atteindre 60 % en 2002.

Un déficit public inférieur à 3 % ne peut ainsi être considéré comme un objectif de moyen terme satisfaisant pour l'économie française, dans la mesure où il ne suffit pas à stabiliser le ratio de dette publique, comme il conviendrait de le faire dans une période de reprise conjoncturelle.

Par rapport à la politique budgétaire simulée en projection, le montant des mesures correctrices nécessaires pour parvenir à stabiliser le ratio dette/PIB représenterait, selon le modèle MOSAÏQUE, l'équivalent de 1,5 point de Contribution Sociale Généralisée. Un prélèvement de ce montant (ou une réduction équivalente des dépenses publiques) ramènerait le déficit public en 2002 à 2,1 % du PIB 10( * ) .

· En plus des considérations macroéconomiques, il convient d'avoir à l'esprit les effets de l'augmentation de l'endettement public sur l'efficacité et l'équité du système fiscal.

L'accroissement de la dette publique se traduit instantanément par une augmentation des créances pour le même montant, sous forme d'émission de titres de la dette publique. Si la dette publique ne constitue pas de ce fait un " report de charges sur les générations futures ", elle opère néanmoins une redistribution au profit des porteurs de la dette publique. Lorsque les charges d'intérêt de la dette atteignent, comme aujourd'hui, un montant supérieur à celui de l'impôt sur le revenu, les réflexions sur l'évolution de la dette publique ne peuvent donc s'abstraire de considérations sur l'équité fiscale.

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