III. LES TRAVAUX DU CONSEIL

Les travaux du Conseil de l'Union européenne à partir des propositions de la Commission ont été présentés par la présidence luxembourgeoise lors de la COSAC des 13-14 novembre.

On trouvera ci-dessous de larges extraits du discours de M. Jean MISCHO, Ambassadeur du Grand-Duché, qui a fait de manière détaillée le point sur les débats du Conseil :

" (...) La préparation des décisions sur l'ouverture des négociations d'élargissement est entrée dans sa phase décisive. D'ici un mois, à l'occasion du Conseil européen de Luxembourg, des 12 et 13 décembre, les chefs d'Etat et de Gouvernement devront prendre une série de décisions dont la complexité est à la mesure du caractère historique des événements.

" L'élargissement signifie la formidable victoire de l'idée européenne . L'idée européenne a d'abord constitué, pour les pays fondateurs des Communautés, une réponse aux déchirements terribles qu'a connus notre continent pendant ce siècle. Elle représente également aujourd'hui la meilleure perspective d'avenir pour les pays d'Europe centrale après la guerre froide qui a si cruellement divisé l'Europe.

" Nous avons aujourd'hui une tâche difficile mais enthousiasmante : réconcilier définitivement les peuples du continent européen dans la paix, la solidarité, la démocratie et le progrès économique et social.

" L'élargissement représente une chance unique, non seulement pour consolider la paix et la démocratie, mais aussi pour fournir à l'économie européenne ce potentiel d'expansion dont elle a besoin pour retrouver une croissance durable et pour nous rapprocher du plein emploi.

" La Présidence luxembourgeoise est fermement engagée à mettre en route ce grand projet.

"  L'Europe a en effet un rendez-vous historique avec elle-même.

" Le processus d'élargissement est désormais irréversible.

" Sur la base des conclusions des Conseils européens de Copenhague, de Essen, de Madrid et de Florence le plan de route menant à l'élargissement futur a été tracé : les pays ont été déterminés (ceux ayant signé un accord d'association avec l'UE), les conditions politiques et économiques fixées, le cadre de pré-adhésion défini et un calendrier esquissé (six mois après la clôture de la CIG) (...)

" Le Conseil européen d'Amsterdam a chargé le Conseil "Affaires générales" d'examiner en détail les avis de la Commission ainsi que l'Agenda 2000 et de présenter un rapport détaillé au Conseil européen de Luxembourg. Ce rapport devrait lui permettre d'adopter certaines orientations générales sur l'ensemble du processus d'élargissement, mais surtout de prendre les décisions nécessaires en ce qui concerne les modalités pratiques de la phase initiale des négociations et le renforcement de la stratégie de pré-adhésion de l'Union.

" Vous comprenez, Mesdames, Messieurs, que je ne veux pas préjuger le résultat même du Conseil européen. Mais je souhaite néanmoins rappeler un certain nombre de principes qui marqueront sans aucun doute cette décision. Les débats d'orientation générale que le Conseil a tenus le 15 septembre, le 6 octobre, le 25 octobre ainsi que le 10 novembre, sur l'ensemble du processus d'élargissement lui ont permis d'identifier les éléments politiques essentiels qui nécessitent encore un examen plus approfondi dans la perspective du rapport que le Conseil est appelé à présenter au Conseil européen.

" A ces occasions le Conseil a encore une fois souligné la nature globale et inclusive que devrait revêtir ce processus d'élargissement qui concerne tous les candidats. Je le répète, chacun des onze pays candidats fera partie du processus qui s'ouvrira au début de l'année prochaine.

" Tous les gouvernements des Etats membres sont en faveur d'un scénario inclusif, évolutif, objectivisé et personnalisé.

" Les ministres ont clairement exprimé leur attachement au principe de l'égalité des pays candidats. L'égalité des chances sera à la base de tout le processus d'élargissement ; le seul critère déterminant pour l'accession devra être le progrès accompli par le pays candidat.

" La question de savoir de quelle façon débuteront les négociations est encore ouverte et appartient en définitive au Conseil européen. Comme vous le savez, la Commission a proposé de commencer des négociations proprement dites avec certains candidats dans un premier temps . Mais la Commission se propose également de revoir sur une base annuelle l'état d'avancement des préparations à l'adhésion dans chaque pays candidat et de proposer, le cas échéant, l'ouverture des négociations.

" Cela n'est qu'une des possibilités que nous examinons à l'heure actuelle. L'autre branche de l'alternative serait de commencer les négociations avec tous les candidats à l'adhésion en même temps. C'est le modèle de la "common starting line".

" Je ne vous révèle rien de nouveau en disant qu'au sein du Conseil il y a des partisans pour chaque modèle. Le débat doit encore être approfondi car la décision que les chefs d'Etat et de gouvernement auront à prendre à Luxembourg ne sera pas facile.

" Il demeure en tout état de cause, et quelle que soit la décision finalement prise à Luxembourg en décembre, que la stratégie de l'élargissement de l'Union doit être et sera un processus d'inclusion et non d'exclusion.

L'égalité de traitement
est assurée moyennant l'application de critères objectifs , valables pour tous.

" La rapidité du processus de négociation sera fonction des particularités de la situation de chaque pays et des efforts supplémentaires qu'il sera disposé à fournir pour se mettre en position d'adhérer à l'Union européenne. (...)

Je tiens à souligner ici que, même si nous en venions à décider de commencer les négociations avec seulement certains des candidats, cela ne veut pas dire que ces pays seront automatiquement les premiers à adhérer. La logique d'un processus personnalisé et objectivisé implique qu'un pays qui aura atteint un certain niveau d'intégration sera invité à négocier et que la date d'adhésion dépend avant tout de critères objectifs. Il n'est dès lors pas exclu que tel pays avec lequel les négociations ont commencé plus tard puisse néanmoins adhérer plus rapidement que tel autre.

Il serait donc absolument faux de parler du premier groupe et d'un deuxième groupe de pays. Il n'y a pas de groupe ; chaque candidature est examinée en fonction de ses mérites propres .

" Avant que les premières adhésions n'aient lieu il reste beaucoup de travail à faire.

" Les avis de la Commission relèvent que tous les pays ont déployé des efforts considérables pour remplir les critères économiques et ceux tenant à la transposition de l'acquis communautaire. Cependant, la Commission indique également que pour l'instant, aucun des candidats n'est véritablement prêt à mettre en oeuvre cet acquis. Chacun doit donc encore faire des efforts . La liste minimale des actes législatifs indispensables pour participer au marché intérieur est de 892. Encore ne suffit-il pas de voter ces lois, mais il faut aussi les mettre en oeuvre sur le plan pratique.

" De plus, l'acquis communautaire n'est pas un concept statique. J'en veux pour preuve le nouveau Plan d'Action en faveur du marché unique présenté par la Commission lors du Conseil européen d'Amsterdam. L'achèvement du marché unique est en effet un processus dynamique qui demande de la part des Etats membres des efforts continus. L'acquis évolue rapidement dans des domaines tels que l'environnement ou la société de l'information.

" A cet égard l'idée de la Commission de faire des fiches individuelles pour guider chaque pays candidat dans ses efforts de reprise de l'acquis communautaire dans le domaine du marché intérieur est très intéressante. Une telle fiche, ou "road map" dans le vocabulaire de la Commission, décrirait la situation actuelle dans le pays et fixerait les priorités . Elle établirait aussi un calendrier global pour la transposition des règles du Marché Intérieur. Ainsi chaque pays candidat saura exactement ce qui lui reste à faire.

" La date d'ouverture des négociations ne sera en effet qu'une des modalités du processus d'adhésion. A côté de cela il y a d'autres éléments comme en particulier la stratégie de pré-adhésion renforcée , qui impliquera un effort d'assistance important de l'Union afin de mettre tous les pays candidats en position d'adhérer à terme à l'Union européenne.

" Vous savez que depuis le Conseil Européen d'Essen en décembre 1994 l'Union a mis en oeuvre une stratégie de pré-adhésion ayant pour objet de rapprocher davantage les pays ayant signé un accord d'association avec l'Union Européenne. Je n'ai pas besoin de vous en rappeler les éléments constitutifs.

" Mais maintenant, comme le Ministre des Affaires étrangères du Luxembourg, Monsieur Jacques POOS, a pu le déclarer devant le Parlement européen, le Conseil devra porter une attention toute particulière à la définition d'une stratégie de pré-adhésion renforcée dont l'objectif est l'adhésion à terme de tous les pays candidats faisant l'objet des avis de la Commission. Nous veillerons à ce que les pays candidats sentent que leur vocation à l'adhésion est fermement acquise et que la discussion porte uniquement sur le moment auquel cette vocation pourra se concrétiser (...).

" Lors de sa réunion de lundi dernier , 10 novembre 1997, le Conseil, sur la base d'un rapport de la présidence, a marqué son accord sur les éléments constitutifs de cette stratégie renforcée, étant entendu que les aspects financiers pour la période 2000-2006 restent ouverts et seront précisés dans le contexte plus général des discussions sur le nouveau cadre financier de l'Union proposé dans l'Agenda 2000.

" Quels sont ces éléments constitutifs ?

" Ensemble avec les " accords européens " qui demeurent la base des relations de l'Union avec les pays candidats, la stratégie renforcée s'articule autour des trois éléments suivants :

" - de l'aide pré-adhésion;

" - des partenariats pour l'adhésion;

" - de la participation aux programmes communautaires et aux mécanismes de mise en oeuvre de l'acquis communautaire.

" En ce qui concerne l 'aide à la pré-adhésion, outre le programme PHARE , celle-ci comporterait, selon la Commission, deux éléments supplémentaires à partir de l'an 2000 :

" - une aide au développement agricole;

" - une aide structurelle dont l'objectif premier sera d'aider les pays candidats à se rapprocher des normes communautaires en matière d'infrastructures, notamment et par analogie avec les interventions actuelles du Fonds de Cohésion, dans les domaines des transports et de l'environnement .

" Summa summarum, entre l'an 2000 et l'an 2006, la Commission a prévu un véritable Plan Marshall pour les PECO, d'un montant de 75 milliards d'ECU en tant qu'aides pré-adhésion et en vue de l'intégration des nouveaux Etats membres dans les politiques communautaires.

" Cette aide restera d'ailleurs constante tout au long de la période sous considération.

" La Commission propose d'autre part des partenariats pour l'adhésion. Ce nouvel instrument constituerait l'axe essentiel de la stratégie renforcée en mobilisant toutes les formes d'assistance aux pays candidats d'Europe centrale et orientale, dans un cadre unique, pour la mise en ouvre de programmes nationaux de préparation à leur statut de membre de l'Union. (...)

" Il est acquis que le partenariat pour l'adhésion s'articulera autour :

" - d'engagements précis de la part de l'Etat candidat, en particulier sur la démocratie, la stabilisation macro-économique, la sûreté nucléaire et un programme national de reprise de l'acquis communautaire, soumis à un calendrier précis et axé sur les domaines prioritaires constatés dans chaque avis ;

" - d'une mobilisation de tous les moyens disponibles de la Communauté pour la préparation des Etats candidats à l'adhésion. Il s'agirait tout d'abord du programme PHARE , mais aussi des nouvelles formes d'aide que pourrait dégager la Communauté dans le cadre des futures perspectives financières.

" Il me paraît important de consacrer, comme le propose la Commission une part substantielle de moyens au financement des investissements dans des domaines tels que l'environnement et les transports. La sûreté nucléaire mérite une attention particulière, car l'Union a le devoir de protéger la vie et la santé de ses citoyens, présents et futurs en coordination, également avec les institutions financières internationales.

" Le programme d'adoption de l'acquis communautaire sera défini avec la Commission dans le cadre d'une relation de partenariat avec chaque pays candidat. Les priorités retenues devraient dans un premier temps correspondre aux secteurs recensés comme déficients dans les avis. La poursuite des objectifs fera l'objet d'un calendrier prévisionnel. L'octroi de l'assistance -sur la base de conventions de financement annuelles- sera subordonné à la réalisation de ces objectifs et à l'état d'avancement des programmes en cours. L'exécution du programme sera ainsi soumise à une stricte "conditionnalité de l'adhésion" reposant sur des mécanismes adaptés d'évaluation et un dialogue permanent avec la Commission.

" La Commission fera rapport annuellement au Conseil européen sur les progrès constatés. Le premier rapport sera soumis à la fin de 1998. Le rapport sera établi sur la base des progrès accomplis par les pays candidats dans la réalisation des objectifs fixés par chacun des partenariats pour l'adhésion. Lorsqu'un pays candidat sera considéré comme remplissant les conditions requises pour que des négociations d'adhésion soient ouvertes mais que celles-ci ne l'ont pas encore été, la Commission adressera une recommandation au Conseil en vue de l'ouverture de négociations. (...).

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